DIASPORA AFRICAINE DANS LES CARAIBES

 

Ce fait historique et anthropologique inédit ressort assez clairement à la lecture de « ! Kalunga Eh ! Los Congos de Villa Mella «  , le dernier ouvrage du chercheur dominicain Carlos Hernandez Soto. Ce livre vient d´être publié à Saint – Domingue par l´Editorial Letra Gráfica.

 

 

Compilation de textes s´étalant sur 142 pages, rédigés dans la foulée de la proclamation par l´UNESCO, de la Confrérie des Congos de Villa Mella, «  Œuvre Majeure du Patrimoine Oral e Immatériel de l´Humanité « ce recueil est, visiblement, la suite de travaux antérieurs qui aboutirent á la publication, il y a quelques années, de «  Morir en Villa Mella : ritos funerários afrodominicanos «.

 

Dans cette approche d´anthropologie eschatologique, l´auteur qui dirige actuellement le Musée de l´Homme Dominicain , met en relief le rôle essentiel de cette structure associative traditionnelle dans les cérémonies de funérailles à Villa Mella, région adjacent la capitale de la partie orientale de l´ancienne Hispaniola.

Et, Kalunga est leur principale pièce musicale et chorégraphique ainsi que leur cri identificateur.

L´étude de cette pratique rituelle, survivance génériquement kongo, mais en réalité,  bantu, qui a phagocyté, dans une  dynamique inévitablement syncrétique, divers éléments de la religion catholique et des croyances yorouba et ewe-fon, est faite dans six chapitres.

 Hernandez Soto y aborde, entre autres aspects, la nature sociale et la fonction spirituelle de ce rassemblement fraternel ainsi que les contours de leur _expression musicale ( chants et supports organologiques ) et le registre de leur chorégraphie.

Roman"> Et, dans une démarche comparative, peu systématisée dans les Amériques et les Caraïbes, l´auteur, qui est aussi Professeur à l´Université Autonome de Saint-Domingue, atteste l´existence du même type de confréries dans le territoire jumeau d´Haïti et á Cuba, ainsi que sur le continent, au Brésil, á Panama et aux Etats Unis d´Amérique, plus précisément à La Nouvelle Orléans.

 

 

 

UNIVERS ESCHATOLOGIQUE

Roman"> 

Comme preuves linguistiques et anthropologiques, notamment congo-angola, le Directeur du MHD dresse, bien à propos, en fin d´ouvrage, un glossaire de termes en usage dans cette structure de solidarité sociale.

L´on y retrouve, dans la trame des diverses manifestations organisées, dans ce cadre, les célébrations de maní, probables réminiscences des cérémonies relatives au couronnement des Mani Kongo.

 

Et, l´animation de l´ensemble des rites de la Confrérie est soutenue, pour l´essentiel, par des instruments appelés, génériquement, congos, congas ou palos. Le congo est le tambour majeur et le conguito désigne le tam-tam mineur.

Quant aux membres de l´association, qui doivent impérativement être des musiciens ou des danseurs, ils sont naturellement désignés comme congueros.

L´une des chansons rituelles ( toques ), d´introduction, est  appelée bembé yagua, vraisemblablement une survivance du kikongo bembo nengwa ( berceuse ) .   Et, durant la cérémonie du kumba ( séparation ), l´on entonne, entre autres complaintes, le pembué chamaliné ( départ pacifique ) .

Les autres chants repris, véritables requiems aeternam, sont le bembe koko ( réconfort solidaire ), mamá yungué ou ñungué ( berceuse ), oh yacabelo (affection ), oh kikondé ( regret ), yaguacila ( désespoir ), ensilla mi caballo ( impuissance devant la mort ), gayumba eh ( rédemption ) alé bambó ( courage ), ya lo ve ( bravoure), antonio bangala ( fin ) et lambé lo deo ( nourriture céleste ).

 

C´est cette remarquable continuité linguistique et anthropologique, qui a milité afin l´exigeante UNESCO puisse déclarer l´ensemble des pratiques rituelles kongo qui se sont perpétuées, dans un syncrétisme vivifiant, dans l´est de l´historique Española, richesse culturelle universelle.

Et, le « munsi kalunga « dominicain, soutient, à juste titre, que cette considération doit être, en fait, élargie á toutes les Amériques et les Caraïbes noires, avec, entre autres composantes, la Société Congo de l´île de Gonaives, dans le voisin territoire  d´Haïti ; le Congo Reales á Trinidad, á Cuba ; le fameux et inusable Congo Square á La Nouvelle Orléans, á laquelle l´on adjoint aujourd´hui le nom du célèbre jazzman Louis Armstrong ; ls représentations théâtrales congos dans la symptomatique localité de Cuango, á Panama et les inévitables congadas d´Atibaia, au Brésil.

 

L´un des apports scientifiques majeurs que l´anthropologue de Saint-Domingue a effectivement mis en relief, est la  prédominance prise dans l´univers eschatologique des déportés, après la terrible et traumatisante traversée de l´Océan, par les croyances hydrogoniques. En effet, le ntoto, ( terre ferme ) et le nzulu ( ciel ) , Royaume de Nzambi ( Dieu ), éléments fondamentaux des cultures d´origine , se sont retrouvés dans l´outre-Atlantique, relégués au second plan, au profit de l´ insondable kalunga ( mer ). Les africains enchaînés dans les insalubres cales des navires négriers, ont senti dans leur chair et dans leur esprit, la force et l´immensité du nlangu dia mungwa (eau salée) .

Avec le livrinho de Carlos Hernandez Soto, la Route de l´Esclave a été, en vérité, le Voyage sur le kalunga et le transfert, dans une dynamique véritablement

psychoanaleptique , de ses tenaces mystères.

 

 

 

 

Roman"> 

 

Recension de Simão SOUINDOULA

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.