Introduction minière, pas mineure par Marcel Yabili

Le Katanga est le symbole de la réputation universelle du Congo, comme «
scandale géologique. En réalité, les gîtes miniers s’étendent du Sud Est au Nord
Est du Pays et comprennent principalement d’Ouest en Est, le diamant, le
manganèse, le cuivre, et le cobalt, la cassitérite et l’étain, le charbon, l’or
et le coltan.
 
Traditionnellement, 85% des exportations étaient minières
et provenaient essentiellement du Katanga (cuivre, zinc, cobalt, étain, coltan,
manganèse) ainsi que  le diamant et l’or en dehors de la province.
 
10%
des exportations étaient agricoles (bois, café, cacao, thé, caoutchouc et
huiles  de palme et palmiste. Le solde des 5% exportés représentaient des
produits manufacturés, tel le ciment.
 
La colonisation par la Belgique
(de 1908 à 1960) a engrangé une cagnotte de 260 millions de carats de diamants,
4,9 millions de tonnes de cuivre, 72.000 tonnes de cobalt, rien comme zinc et
248 tonnes d’or. Cette période correspond à la construction du pays qui avait
atteint en 1960 un PNB supérieur à celui de l’Afrique du Sud.
 
Après
l’indépendance, les prélèvements des richesses minières ont été de loin plus
importantes, mais sans retombées sur le développement du pays, qui a été
détruit. De 1960 à ce jour, on a produit environ 430 millions de carats de
diamant ( 2 X plus que la colonisation), 15 millions de tonnes de cuivre ( 3X
plus), 330.000 tonnes de cobalt ( 4,5 X plus), 165.000 tonnes de zinc ( contre
zéro zinc-métal, antérieurement) et 108 tonnes d’ or ( 40% de l’ ère
coloniale).
 
Ces contreperformances des richesses minières d’un pays
riche, mais très pauvre montrent l’importance primordiale de la « gouvernance »
et, ensuite, de la « bonne gouvernance ». Cela commence par la gestion d’un même
territoire où se superposent les droits d’occupation et d’exploitation du sol
(code foncier), l’exploitation selon le code minier et celle du code forestier.
A cela s’ajouteront un code agricole et un code des hydrocarbures, en
préparation. Enfin, les chefs coutumiers interfèrent dans la gestion, en
accordant des autorisations illégales d’exploiter minerais et
forêts.
 
Ceci montre l’ importance d’ une bonne gestion du territoire. Il
faut établir un ordre de priorités aux différentes formes d’ exploitations qui
se superposent. Il faut faire un choix entre les techniques d’exploitations
industrielles et artisanales. Il faut aussi décider du nombre d’opérateurs, car
la multiplicité d’exploitants exacerbe l’anarchie, avec une perte des contrôles
de traçabilité et de certification des produits et elle constitue une prime à
l’économie informelle.
 
Le défi le plus important de la gouvernance du
territoire porte sur l’Environnement et la mise en harmonie de la souveraineté
nationale et du développement durables avec  tous les aspects du Patrimoine
Mondial (parcs, faune et flore, sites touristiques, archéologiques et
culturels). Même les réserves minérales, qui ne sont pas renouvelables,
appartiennent sur le long terme, à l’Humanité. Certaines exploitations
pourraient même être sacrifiées et rémunérées par la Communauté Internationale (
Nb cas des « puits de carbone »). D’ où la nécessite d’ une gestion technique
performante et parcimonieuse, et interdiction de l’écrémage et des extractions
sauvages qui accélèrent l’épuisement des ressources et rend plus coûteuses les
exploitations par les futures générations, lorsqu’ elles ne les en prive pas
totalement. 
 
Le code minier découpe le pays en carrés de 85 Ha. Les
bénéficiaires obtiennent des permis recouvrant plusieurs carrés et portant sur
des matières minérales bien déterminées. Sur les cartes du Cadastre minier, les
zones de recherche sont en vert, celles d’exploitation minière sont en jaune.
Les zones brunes et rouges indiquent respectivement les aires de recherche et
d’exploitation de carrières de  matériaux (Nb agrégats : gravier et sable). Sont
rayées de noir les zones interdites d’exploitation (parcs nationaux), et en
blanc, les zones encore libres.
 
Il a suffi à peine 3 années sous le
nouveau code minier pour que 64% du Pays soient cédés à la recherche (en vert)
ou à l’exploitation minière ( en jaune). A première vue, on pourrait croire qu’
il resterait encore 36% du territoire pour de futures attributions
minières. 
  
 

Mais la carte des ressources minières historiques, qui s’étalent
du Sud-Est au Nord-Est,  montre que les 64% déjà attribués recouvrent la
totalité des zones minières. Les 36 % restant ne représentent pas des zones
utiles. Autrement dit ce sont 100% des ressources minérales connues qui ont été
distribuées en 3 années.

 
Ces attributions ont été encouragées par le
fait que l’accès aux ressources minières est très bon marché. Il est payé une
taxe superficielle annuelle de $ 1,5 par carré minier de 85 hectares pour
l’exploration, et  seulement $ 425 pour l’exploitation. A titre de comparaison,
l’impôt foncier sur les habitations est 10.000 fois plus élevé. De plus, les
opérateurs miniers doivent apporter des preuves sérieuses de leurs « capacités
financières », mais le montant soi-disant sérieux qui  leur est exigé doit être
l’ équivalent de 10 années de taxe annuelle. Autrement dit, la capacité
financière exigée pour obtenir un carré minier est de $ 15 (85 ha) pour
l’exploration et $ 4250 pour l’exploitation… Et, malgré ces taux dérisoires,
près de 80% des bénéficiaires ne paient pas la taxe annuelle. Pourtant, la loi
autorise l’annulation des droits à la première défaillance, mais les déchéances
ne sont guère décidées.

A ce jour, la contribution des mines au budget
national est dérisoire. Les discours officiels en parlent en termes de PIB ou
chiffres d’affaires. A une époque où les diamants rapportaient aux producteurs $
1 milliard annuels, ce sont à peine $ 40 millions qui allaient à l’Etat, et
seulement $ 15.000 environ par mois à la province du Kasaï-Oriental. En 2007, le
Katanga a exporté pour $ 1,5 milliards de minerais pour seulement $ 15 millions
de taxes.
 
Hormis la taxe superficiaire de $ 1,5 ou $ 425 par carré
minier, il existe une redevance à l’ exportation de 1% sur les minerais bruts,
2% sur les concentrés et métaux  ( basés sur les prix de vente particuliers), 4%
sur les matières précieuses ( or, diamant).
 
Les exploitants miniers
bénéficient d’ importantes et multiples exonérations ou réductions fiscales. Ils
paient 3% de droits de douane, en période de recherche et 5% à en cours d’
exploitation, 5% de ICA et 30% sur les bénéfices. Ce dernier impôt est
actuellement invisible, soit parce que les exploitations amortissent leurs
investissements, ou à cause de la minoration des gains réels ou du fait de l’
exagération des charges d’ exploitation. A titre d’ exemple, les miniers
katangais déclarent un prix de revient de la tonne de «  cuivre non raffiné »
pour environ $ 3.500, soit près du double du coût de référence de USD 2.000 du
«  cuivre raffiné » à 99,9%.

 

NB.
Une présentation a été effectuée par Georges Bokundu  à  l' «  Atelier sur le
Moratoire d'octroi des permis de recherche en RDC » à Kinshasa le 6 juin 2009

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