29.07.09 Le Potentiel: Cinq questions à Emmanuel Cole (*), par Louis-Paul Eyenga Sana

 

1. Le chef de l’Etat a pris acte de prestation de serment de
nouveaux hauts magistrats après avoir « fait la toilette de la Cour ».
En votre qualité d’acteur des droits de l’homme, qu’en dites-vous ?

Nous tenons à féliciter le président de la République pour son
initiative, dont l’objectif est la lutte contre la corruption, la
préservation des droits de l’homme en RDC et le respect de la
Constitution. Beaucoup de magistrats se considéraient comme des
intouchables et agissaient selon leur bon vouloir au mépris des lois.
Je suppose que la nomination de nouveaux magistrats a pris en compte,
les critères tels que la compétence, l’intégrité morale, la probité,
puisqu’on a appris qu’ils avaient jeté en prison environ plus de 6.000
prévenus sur un ensemble de 9.000 condamnés. Bien sûr, certains
seraient élargis dans les conditions que l’on sait. Il appartient aux
nouveaux magistrats de démontrer que le choix du Conseil supérieur de
la magistrature n’était pas un simple hasard. Il y a lieu qu’il fasse
preuve de leur compétence et probité, afin de démentir les allégations
de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH)
selon laquelle la Justice congolaise est sous-tutelle. Je profite pour
rappeler au gouvernement de créer de bonnes conditions de détention
pour les prévenus des prisons en RDC, notamment celle de Makala. En
plus, il y a lieu d’améliorer les conditions salariales des magistrats
pour les mettre à l’abri de la corruption.

2. A propos de la corruption, un colloque patronné par Mgr
Laurent Monsengwo, archevêque de Kinshasa, s’est tenu, du 26 au 27 juin
2009 sur la justice sociale qui a effleuré la question. Vous y avez
pris part. Quel est votre avis à ce sujet ?

Sur la question de lutte contre la corruption et la bonne
gouvernance, la Fondation Bill Clinton pour la paix en RDC estime que
cela peut amener la paix au pays et stabiliser le processus
démocratique dans le pays. Néanmoins, j’aimerais ajouter qu’il est bien
de lutter contre la corruption dans le monde, en général et en RDC, en
particulier, sans pour autant prendre en compte la réalité sur le
terrain ; c’est-à-dire examiner sous toutes ses coutures, la question
des salaires et les conditions sociales des agents et fonctionnaires de
l’Etat, y compris les magistrats, les militaires et les policiers.
Souvent, un officier supérieur de l’armée ou un haut fonctionnaire de
l’Administration touche environ 55.000 Fc alors qu’il doit prendre des
décisions pour des montants supérieurs à 1.000 dollars Us. Le
gouvernement a tout intérêt d’envisager d’autres perspectives pour se
mettre à l’abri de la tentation des fonctionnaires qui doivent être
payés à temps. Il y a beaucoup à faire pour assainir la société
congolaise. L’Etat doit se faire accompagner de la Société civile pour
assainir et moraliser la société congolaise. Il doit prendre en compte,
les observations des religieux dont l’Eglise catholique qui a bien
analysé la situation.

3. Votre commentaire sur l’atelier des acteurs de la Société
civile de l’Afrique centrale sur la bonne gouvernance et
l’environnement démocratique d’une vie associative où le respect des
procédures et mécanismes de validation des pouvoirs à travers les
élections.

Il était question de mettre en place une stratégie afin que les
élections se déroulent en toute transparence et dans le respect des
droits de l’homme comme c’est le cas au Ghana. La Société civile de la
sous-région de l’Afrique centrale s’est engagée à lutter contre toutes
sortes de germes de conflits capables de déstabiliser l’Afrique
centrale. A ce sujet, il a été demandé aux gouvernements de la
sous-région de prévoir dans leurs budgets, le financement des ONG de la
Société civile pour qu’elles participent au processus démocratique de
leur pays, au lieu qu’elles recourent à l’aide étrangère, notamment de
l’Occident ou de l’Union européenne. En plus, les ONG doivent
travailler en toute liberté et sans restriction. Enfin, au cours de cet
atelier, nous avons abordé la question de la tripartite
RDC-Angola-Congo/ Brazzaville pour garantir les droits des réfugiés
conformément à la Convention de Genève et des textes réglementaires de
l’Union africaine.

4. La FIDH a publié un rapport sur la RDC qui fait allusion à la « dérive autoritaire ». Qu’en pensez-vous ?

Je félicite le courage des membres de cette ONG internationale des
droits de l’homme après leur mission d’enquête à Kinshasa, du 7 au 17
avril 2009. Mais, l’on doit souligner que la communauté internationale
a une part de responsabilité dans cette «dérive» pour n’avoir pas
accompagner le gouvernement dans le processus démocratique d’un pays
post-conflit. Paris interférerait sur la situation qui prévaut en
République Centrafricaine, au Congo-Brazzaville, au Tchad et même en
RDC depuis les mandats des derniers chefs de l’Etat français. Nous
souhaitons que la France puisse changer le fusil d’épaule et aider
l’Afrique à résoudre la question des immigrés et des réfugiés.

5. Avez-vous un message à donner aux acteurs politiques, des droits de l’homme et de la Société civile ?

Aux acteurs politiques, ils doivent préparer dans la transparence et
éviter les violences pour préparer les élections de 2011, respecter la
Constitution, préserver les droits de l’homme et l’unité nationale. Ils
doivent éviter la corruption. Aux activistes des droits de l’homme, ils
doivent avoir la volonté d’amener le gouvernement à éviter les actes de
violences pour faire taire les voix dissidentes et la Société civile
d’établir un véritable dialogue avec les autorités politiques en
assumant la pleine participation des acteurs de la société civile à ce
dialogue.

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