19.08.09 Le Potentiel : CINQ QUESTIONS A BUABUA WA KAYEMBE

 

1. En juin prochain, la RDC commémore son 50ème
anniversaire en tant qu’Etat indépendant. Quel résumé faites-vous,
aujourd’hui, de son parcours au plan politique ?

Le chemin parcouru est marqué de plusieurs faits au point qu’il
m’est difficile d’être exhaustif en les énumérant. Toutefois, il y a
moyen d’en épingler les plus saillants.
Sur le plan politique, tout part du 30 juin 1960, date de la
proclamation de l’indépendance de notre pays, fruit de dures épreuves,
de maints efforts et de rudes sacrifices. En évoquant le 30 juin 1960,
je voudrais ici saluer la mémoire de tous les compatriotes, martyrs de
l’indépendance, qui ont versé leur sang et payé de leurs vies pour que
notre pays fût affranchi du joug colonial. Quelques mois après
l’indépendance, soit le 16 janvier 1961, il y a eu l’assassinat du
Premier ministre, Patrice-Emery Lumumba. En 1965, plus précisément le
24 novembre, il y a eu le coup de force et la prise du pouvoir par
Mobutu Sese Seko qui, en 1972, institua un Parti unique, le Mouvement
populaire de la révolution qu’il venait de créer en 1967. Je peux aussi
relever l’enrôlement de force des étudiants dans l’armée en 1971. Bref,
c’était le règne de la dictature mobutienne avec son Parti-Etat. Il a
fallu attendre 1990 pour que le multipartisme puisse de nouveau voir le
jour au pays.

En 1997, s’est déclenchée la lutte armée menée par l’AFDL
(Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo) avec à
sa tête Laurent-Désiré Kabila, qui connut son triomphe le 17 mai 1997.
M’Zee Kabila prend alors le pouvoir et s’emploie à instaurer une autre
vision de la gestion de la chose publique, qui met à l’avant-plan les
vertus nationalistes.

2. Qu’est-ce qu’il y a eu par la suite ?

Une année plus tard, le pays fut attaqué par une coalition armée
rwando-ougandaise qui, heureusement, fut mise en échec par les Forces
armées congolaises appuyées par les forces alliées. M’Zee
Laurent-Désiré Kabila est assassiné en janvier 2001 et sa disparition
crée une désolation populaire sans pareil. C’est alors que Joseph
Kabila Kabange accède à la magistrature suprême. Sans tarder, il
relance le processus démocratique avec la tenue du Dialogue
intercongolais à Sun City qui déboucha, en 2003, à la formation d’un
gouvernement de type singulier : 1+4 (un président de la République et
4 vice-Présidents). Mettant au premier plan les valeurs démocratiques,
Joseph Kabila organise les élections libres, démocratiques et
transparentes en 2006 qui dotent désormais le pays des autorités issues
de la volonté du peuple.
Comme vous pouvez le constater, c’est un processus émaillé de beaucoup
de difficultés, ce qui a retardé le décollage du pays. Mais je crois
que l’important maintenant est de regarder le présent et projeter le
futur de manière positive.

3. Que retenir de particulier sur le plan économique ?

Sur le plan économique, l’on retiendra que peu avant l’indépendance
était intervenue la loi sur l’option de la nationalité, qui a conduit
les grandes compagnies établies au Congo belge et les compagnies à
charte, à opter soit pour la nationalité belge, soit pour la
nationalité congolaise. La plupart d’entre elles optèrent pour la
nationalité belge. En 1960 surgit ainsi le contentieux belgo-congolais
qui fut une dispute entre le Congo et la Belgique sur le portefeuille
congolais. Un autre fait important qui mérite d’être relevé, c’est la
promulgation en 1966 de la loi Bakajika qui proclame la propriété
exclusive du sol à l’Etat. Il s’en est suivi la nationalisation de
plusieurs unités de production, dont l’Union minière du Haut-Katanga.
La Zaïrianisation intervint en 1973 et frappa plusieurs sociétés,
grandes comme petites. C’est également en 1973 que surgit le premier
choc pétrolier, qui sera suivi en 1980 par l’effondrement de la mine de
Kamoto et, du coup, de l’effondrement de la production nationale du
cuivre. La dégradation continue de la situation économique connut son
paroxysme en 1990 avec une hyperinflation à 4 chiffres jamais connue
auparavant dans un pays africain. En 1993, ce fut, après ce qui s’était
passé en 1991, les pillages généralisés des magasins et diverses autres
unités de production dans les grandes villes du pays.

L’année 1997 inaugure l’ère de l’application de la politique
économique nationaliste par M’Zee Laurent-Désiré Kabila, sans recours à
l’endettement extérieur.
Avec l’avènement de Joseph Kabila s’installe la politique de l’économie
sociale du marché. Il s’en est suivi plusieurs mesures économiques
d’envergure pour remettre l’économie nationale sur les rails. D’où
l’option de libéralisation de l’ensemble du marché (libéralisation des
secteurs pétrolier et minier notamment), la promulgation de nouveaux
textes de lois pour revigorer la vie économique, dont le code des
investissements, le code minier, le code forestier, etc…, l’adoption du
taux de change flottant en remplacement du système de fixing
gouvernemental, et j’en passe. En même temps, il y a la mise en place
des structures d’appui au secteur privé à la tête desquelles se trouve
l’ANAPI, à côté du Cadastre minier et autres Copirep, Ucop, etc. Comme
résultat de tout ce dispositif l’on observe à partir de 2002 le
mouvement de relèvement progressif de la situation économique et
sociale, attesté par des taux de croissance désormais positifs (3,5% en
2002 ; 5,8% en 2003 ; 6,6% en 2004 ; 6,5% en 2005 ; 5,1% en 2006 ; 6,3%
en 2007 ; 6,3% en 2008).

4. Et sur le plan social ?

Sur le plan social, enfin, il y a lieu de relever trois mouvements
qui se sont succédé.
Le premier est celui qui part immédiatement de l’indépendance. Il est
marqué par la prospérité sociale, effet de l’héritage de
l’indépendance. Le deuxième mouvement s’observe à partir de 1973, et
c’est le début de la dégradation des paramètres économiques et sociaux,
laquelle a connu son apogée avec les pillages perpétrés dès les années
1990. La misère de la population est à son comble. Celle-ci n’aura
l’espoir de voir ses conditions sociales s’améliorer qu’en 1997 avec la
nouvelle vision de M’Zee Laurent-Désiré Kabila. Mais comme je l’ai
souligné précédemment, cet espoir a été contrarié par de nombreuses
attaques extérieures.
Le dernier mouvement démarre en 2001 avec la renaissance de l’espoir à
la faveur de la nouvelle politique appliquée par le nouveau régime. On
observe depuis lors une relative stabilité des prix et de l’inflation,
la reprise des activités économiques dans certains secteurs et la
création des emplois dans un rythme progressif (secteurs de
l’immobilier, des télécommunications, de banques, d’industries
diverses, d’agriculture, de mines, etc).

5. Que dites-vous de l’opération « Mains propres » lancée
par le président de la République, à travers la lutte contre la
corruption « Tolérance zéro » ?

Je pense qu’il faut absolument encourager cette opération dont
l’objectif est de régulariser le fonctionnement de l’Etat. Nous devons
faire confiance aux autorités vouées à la recherche de l’intérêt
général. Il est vrai que tout le monde n’est pas saint, et tout le
monde n’est pas diable non plus. Il est absolument nécessaire
d’instaurer la moralité dans l’appareil de l’Etat. C’est un pilier
fondamental pour le développement du pays. Et c’est ce que poursuit
cette opération, qui mérite ainsi d’être soutenue.

Directeur général de l’Agence nationale pour la promotion des investissements (ANAPI)

Par  Marcel lutete

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