30.11.09 Le Potentiel: Cinq questions à Cyrille Mbwembwe
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1. Depuis quelque temps, le Franc congolais est en train
de se déprécier par rapport au dollar américain. Comment expliquez-vous
cette situation ?
Lopinion se souviendra que, depuis des années, léconomie de la RDC
était centrée sur la production agricole et minière. Mais avec la
baisse de la production des minerais (cuivre, cobalt, diamant…),
léconomie du pays a été affectée. Pire encore, ces minerais, qui
rapportaient autrefois des devises au pays, se vendent actuellement à
vil prix sur le marché international. Une situation qui sest beaucoup
dégradée, à cause de la crise financière internationale. Comme le
malheur narrive jamais seul, la production agricole et minière a
totalement baissée. Surtout dans la partie Est de la RDC, à cause de
linsécurité récurrente provoquée par les forces négatives. De nos
jours, la demande est de loin supérieure à la production. Une telle
situation a des conséquences directes sur la monnaie locale qui ne peut
que se déprécier. Pour un lendemain meilleur, la relance de la
production demeure un palliatif non négligeable.
2. Quels sont, les problèmes du territoire de Luiza ?
Le territoire de Luiza éprouve de sérieux problèmes. Les Congolais
doivent se rendre compte de sa position géo-stratégique qui est un
territoire carrefour. Cest-à-dire se trouvant entre lAngola et la
RDC. A noter quà partir de Luiza, on peut facilement atteindre
Tshikapa, Kananga, Angola, le Kasaï Oriental et le Katanga. Le sol et
le sous-sol de ce territoire sont très riches. Il suffit de réhabiliter
la route de Mwenya-Mbule ou celle de Kalamba-Mbuji pour désenclaver
Luiza. Laccès à lAngola sera facile. Ce qui fait que la marchandise
peut quitter Luanda et arriver à Kananga ou Mbuji-Mayi dans une
semaine. Dautres provinces telles que le Maniema, lEquateur et le
Bandundu peuvent aussi bénéficier de cet avantage. Par conséquent, le
centre du pays sera inondé des produits manufacturés provenant de
létranger et la matière première produite en RDC pourrait atteindre
lextérieur du pays sans difficulté. Si lon jette le pont sur la
rivière Kasaï, les véhicules commenceront à parcourir en un temps
record les 375 km qui séparent Kananga de Nzaji en passant par Luiza.
Pour réussir ce pari, limplication du gouvernement central est plus
quindispensable. Surtout pendant cette période où la RDC occupe la
présidence de la SADC.
3. Que répondriez-vous à ceux qui estiment quil est encore précoce damorcer le processus de décentralisation en RDC ?
Le problème majeur qui se pose dans notre pays est un problème
dhomme, cest-à-dire celui de bons gestionnaires. La décentralisation
fait directement allusion à la gestion de la chose publique au niveau
de la base. Comment peut-on vouloir gérer dans la transparence
lorsquon na pas de bons gestionnaires ? Les nouvelles en provenance
de provinces en disent long. Pour preuve, la mégestion est signalée
dans les différents services de lEtat disséminés à travers le pays. Et
pourtant, on pensait quavec la décentralisation, le Congo allait
facilement trouver des solutions aux problèmes qui se posaient avant le
déclenchement de ce processus. Malheureusement, ce nest pas le cas.
Cest pourquoi, il nous faut encore du temps pour arriver à lidéal. Un
autre problème, et non des moindres, qui mérite dêtre évoqué est celui
relatif à limpunité. En labsence de sanctions, bien des gestionnaires
se comportent en « maîtres absolus ». Ils gèrent parfois les services
de lEtat comme un bien sans maître. Le remède à ce fléau na pas
dautre nom que la bonne gouvernance.
4. Le 30 juin 2010, la RDC va célébrer le 50ème
anniversaire de son accession à lindépendance. Comment appréciez-vous
le parcours effectué jusquà ce jour ?
A la veille de cet anniversaire, nous pouvons dire et avouer que le
parcours nest pas élogieux. La raison fondamentale est simple : les
Congolais étaient pressés dccéder à lindépendance, contrairement au
plan conçu par les Belges. 50 ans après, le pays continue à sombrer.
Tous les indicateurs macro-économiques sont au rouge. Il y a quelques
années, le Congo occupait une place de choix sur léchiquier
international, grâce à lexportation dun nombre important de ses
matières premières. A cette époque, il concurrençait le Canada sur le
plan économique. Ce qui nest pas le cas actuellement. Il y a quelques
années, la Gecamines et la Minière de Bakwanga (Miba) faisaient la
fierté du pays sur le plan de la production minière. De nos jours, la
Miba est en faillite. Ses activités sont à larrêt avec du gravier dans
les machines, au motif que celles-ci sont devenues vétustes. Du côté de
la Gecamines, on assiste à la prolifération de minings. Conséquence :
il est difficile dévaluer la production de minerais exportés en RDC.
Ces minings creusent le sol congolais et envoient la matière brute à
létranger pour la vente. Doù la nécessité de revisiter les contrats
miniers. Pire encore, on pille avec armes et larmes aux yeux dans
lEst. Dans le reste du pays, on pille avec applaudissements et sourire
aux lèvres. Le Rwanda exploite déjà le gaz naturel dans le lac Kivu.
LAngola et lOuganda exploitent, à leur tour, le pétrole sur la côte
Atlantique pour le premier pays et dans le lac Albert pour le second.
Entre-temps, la RDC observe. Voilà, les 50 ans dindépendance. A tout
Seigneur, tout honneur, dit-on ! Les Belges ont fourni un effort pour
nous faire sortir de la forêt et de la savane pendant 80 ans. Mais 50
ans après, nous sommes retournés dans la forêt et la savane.
5. Que conclure ?
La date du 30 juin 2010 doit être, pour nous, une journée de
réflexion et de méditation. Elle est une occasion offerte aux Congolais
pour faire un regard rétrospectif sur le passé et jeter de nouvelles
bases pour un avenir radieux et prospère. Cest le moment pour les
Congolais de tisser un partenariat avec les Belges. Car ces derniers
ont prouvé par leur bonne volonté en servant le Congo et la Belgique au
même moment, tout en laissant le Congo très prospère. Nous devons
valoriser notre hymne national qui nous invite à nous tenir debout. Pas
pour encourager la gabegie financière et le népotisme, mais plutôt pour
promouvoir la bonne gouvernance, combattre limpunité et retrousser nos
manches afin de développer notre pays.
PROPOS RECUEILLIS PAR A.T.M.
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