27.01.10 Le Potentiel: Cinq questions à Ernest Mpararo

 

1.Dans un communiqué signé le week-end dernier, vous avez
dénoncé la révocation « abusive » d’un activiste anticorruption à la
Direction générale des impôts. Qu’en est-il au juste ?

Ce qui se passe dans notre pays est regrettable. La Ligue congolaise
contre la corruption est totalement consterné pour avoir appris, via la
presse, la révocation de Henri Bisimwa, activiste anticorruption et
agent à la DGI. On l’a révoqué simplement parce qu’il a dénoncé un cas
de fraude fiscale dans le chef d’une société industrielle au sein de la
Direction générale des impôts et ensuite auprès du procureur général de
la République et dont sa hiérarchie d’alors serait impliqué. Il a été
révoqué au terme de l’arrêté n° CAB.MIN/FP/MBB/TAS/SCB/185/2009 du 06
janvier 2010. La Licoco estime qu’il s’agit d’une révocation abusive et
que Mr Bisimwa doit recouvrer ses droits.

2. Pourquoi réclamez-vous seulement sa réhabilitation,
alors qu’il n’est le seul à être révoqué ?

Les faits reprochés à M. Bisimwa remontent à un communiqué de la
Licoco, publié sous le n°0012/SG/LICOCO/2007 du 13 juin 2007. Dans ce
communiqué, nous dénoncions le fait qu’une société de la place ne payait
pas les impôts dus à l’Etat congolais avec la complicité des autorités
de la DGI de l’époque. Après la publication de ce communiqué de presse,
M. Henri Bisimwa fut arrêté au parquet général près la Cour d’appel de
la Gombe par la plainte conjointe du directeur général des impôts sous
le régime 1+4 et les sociétés précitées, mais libéré après l’implication
du PGR de l’époque. Il convient de signaler que le même parquet général
près la Cour d’appel de la Gombe avait déjà reconnu les faits de la
fraude fiscale et de corruption tels que dénoncé par Henri Bisimwa. Le
PGR avait même intimé l’ordre à la DGI de recouvrer les impôts dus à
l’Etat congolais par les sociétés précitées, soit un montant de
3.226.699 Usd, dans lequel la quotte part revenant à Bisimwa comme
aviseur au titre de prime de contentieux conformément aux lois et
règlements en vigueur s’élevait à 272.251 Usd.

3.Certaines personnes pensent que Licoco s’acharne
inutilement contre cette régie financière. Etes-vous de cet avis ?

Vous devez savoir que notre structure est membre de la Société
civile. Nous ne faisons que notre travail. La question que l’on peut se
poser est celle de savoir pourquoi la Société incriminée avait-t-elle
payée ce montant alors qu’elle clamait haut et fort n’avoir pas commis
d’acte de fraude fiscale ? N’eut été la dénonciation de Bisimwa, cette
société ne payerait pas cette somme ci-haut énuméré comme acompte. C’est
là le commencement du calvaire de M. Bisimwa. Ce calvaire le poursuit
jusqu’à la date de sa révocation au sein de la DGI. Sans toutefois nier
la pertinence de la révocation des agents de régies financières qui
s’adonnent à la corruption et au détournement de deniers publics, la
Licoco estime que le ministre de la fonction publique devrait suivre la
procédure légale au lieu de se contenter à signer des arrêtés avec des
preuves non objectives.

4.Quelles sont, d’après vous, les conséquences de la
révocation de Bisimwa à la DGI ?

La Licoco estime que le fait de révoquer un activiste anticorruption
d’une régie financière comme la DGI entraînera des effets négatifs dans
la maximisation des recettes publiques, étant donné que le personnel des
régies financières ne pourra plus dénoncer les actes de fraude, au
risque de se voir révoqué. Il faut noter que dans ces régies se cachent
certaines autorités complices dans la fraude. Or, ceux-ci sont déjà
dénoncés dans le rapport du Sénat sur le secteur minier et celui du
conciliateur indépendant pour la mise en œuvre de l’Initiative pour la
transparence dans les industries extractives dont la Licoco demande des
sanctions exemplaires.

5. Que préconisez-vous ?

Au président de la République, de demander au ministre de la Fonction
publique de corriger son arrêté n° CAB.MIN/FP/MBB/TAS/SCB/185/2009 du
06 janvier 2010. De réhabiliter Henri Bisimwa dans ses droits, tout en
le félicitant pour avoir pris le courage de dénoncer les fraudeurs
fiscaux. Et de le soutenir dans les actions en justice contre ces
fraudeurs et les corrompus jusqu’au recouvrement intégral des montants
dû à l’Etat congolais, majoré des pénalités. De punir tous les
directeurs des régies financières qui sont impliqués dans les
détournements des deniers publics tel que cité dans le rapport du Sénat
et celui du conciliateur indépendant pour la mise en œuvre du processus
de l’ITIE-RDC. Au ministre de la Fonction publique, de promouvoir les
personnes qui dénoncent quotidiennement les actes de fraude, de
corruption et de détournement des deniers publics dont Henri Bisimwa.
Que le ministre corrige urgemment l’arrêté sus évoqué. Etant donné que
dénoncer un acte de corruption ou de détournement de deniers publics ne
constitue pas une infraction ni moins une faute administrative, mais
plutôt un acte de patriotisme.

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