« 2010, Année du Social », dixit Joseph Kabila ! Quelle lecture au regard des effets de la crise mondiale sur le social en RDC ? (YAV KATSHUNG JOSEPH)

En effet, depuis le début du second semestre 2008, sur le plan
international, un thème domine l’actualité économique internationale : «
la crise financière » qui a gagné l’économie mondiale. Dans les tous
premiers mois de cette crise, on s'accordait à penser que les pays
africains ne seraient guère affectés, étant donné leur faible
intégration dans l'économie mondiale. Or, loin d’être un mythe, la crise
financière mondiale est devenue une réalité en Afrique et
particulièrement en République Démocratique du Congo (RDC), revêtant
même plusieurs facettes.

Les conséquences de la crise ont été et demeurent des plus désastreuses
sur les finances et l’économie réelle, avec notamment des faillites de
grandes banques et d’entreprises, une baisse de l’activité économique et
de la demande mondiales, entraînant le développement du « couple
infernal pauvreté-chômage ». Face à cette situation, d’aucuns se
souviennent de l’idée de René Dumont, qui déjà en 1962 avait titré son
livre : « L’Afrique noire est mal partie » ! Ainsi, au milieu de ce
bouleversement mondial, bientôt un demi-siècle après, tout semble
indiquer que le pire n’est pas encore derrière nous. Les nouvelles les
plus récentes d'Afrique viennent malheureusement confirmer chaque jour,
le diagnostic pessimiste émis par René Dumont.

Malgré toutes les mesures prises pour juguler les conséquences de cette
crise, tous les analystes s’accordaient à dire que l’année 2009
demeurera une année de récession et les plus optimistes d’entre eux
projettent la sortie de crise pour 2010. Il est donc temps que les
Africains – mieux les Congolais- sortent de l’ornière en proposant des
solutions à la crise. C’est dans ce cadre qu’en RDC, à l’issue de la
Conférence des gouverneurs de province qui s’était tenu à Kisangani
dans la partie orientale du pays les 24 et 25 juin 2009, le Président de
la République Joseph Kabila a fait le constat suivant : « Au plan
social et économique, la crise multiforme qui frappe notre pays de plain
fouet procède notamment de la conjoncture internationale qui n’épargne
aucun pays du monde. Mais elle ne saurait arrêter notre détermination
d’aller de l’avant dans la mise en œuvre de notre programme de
développement. C’est pourquoi, j’ai instruit les chefs des Exécutifs
provinciaux à remettre nos populations au travail productif de la
terre, avec comme objectif à court terme, la mécanisation de
l’agriculture et à moyen terme, l’autosuffisance alimentaire ainsi que
la transformation de nos produits agricoles en vue de leur exportation…
»

Toutefois, gardons-nous de sous-estimer les défis auxquels la RDC est
confrontée. La crise économique mondiale a fait naître de graves dangers
pour l’économie congolaise en termes de pertes d’emploi et de baisse de
qualité de vie. Cela est d’autant vrai car, il est généralement admis
que la situation économique a une influence sur la situation sociale.
En effet, bien que la crise ait été déclenchée par des événements qui se
sont produits sur le marché immobilier aux États-Unis, elle s'est
propagée à toutes les régions du monde et les conséquences en sont
désastreuses pour le commerce, la croissance et les investissements
mondiaux. En RDC, la crise financière mondiale qui avance rapidement,
emporte entreprises, mines, emplois, revenus et moyens d’existence. Le
temps presse et l’action décisive ne peut plus attendre.

Ainsi, notre priorité absolue et nécessaire doit être d’évaluer
parfaitement les conséquences de ces événements sur l’économie
congolaise et de formuler des réponses qui minimiseront leur impact,
notamment sur les plans des plus vulnérables de notre société.

II. IMPACT DE LA CRISE FINANCIERE SUR LE SOCIAL DE LA POPULATION
CONGOLAISE

Il est généralement admis que la situation économique a une influence
sur la situation sociale. Beaucoup d’économistes estiment qu’une forte
expansion économique est donc indispensable à l’accroissement des
revenus et des niveaux de vie de la population ou des travailleurs en
particulier. Ainsi, comme relevé précédemment, avant la crise
financière mondiale, la RDC avait bénéficié des prix élevés
d’exportation de ses produits miniers et cela a eu un effet
d’entraînement sur l’amélioration du social de la population congolaise.
La situation s’est inversée depuis 2008. L’on a noté une chute des
cours du cuivre, du cobalt et des produits pétroliers sur les marchés
internationaux avec comme conséquences : le ralentissement des flux des
capitaux non générateurs d’endettement ; l’entrée de l’économie
congolaise en récession et ; l’aggravation de l’incidence de la
pauvreté.

C’est donc avec raison que Irène Khan (2009), souligne que la récession
économique est propice à un certain nombre de facteurs, dont la
convergence risque de se traduire par une augmentation du nombre d’êtres
humains vivant dans la pauvreté et dont les droits fondamentaux sont
bafoués… À l’heure actuelle, alors que l’économie est au bord du chaos
et que le chômage est en hausse, nombreux sont les habitants de la
planète qui se retrouvent privés d’une partie, voire de la totalité, de
leurs revenus et, de surcroît, dépourvus d’un système d’aide sociale
susceptible de leur permettre d’affronter ces temps difficiles.

Ainsi, au fur et à mesure que la récession mondiale marque le pas,
l’impact de la crise économique et financière sur les plus pauvres
s’aggrave. À quelques rares exceptions près, l’incidence du phénomène
sur bon nombre de pays africains se fait sérieusement sentir et affecte
d’une manière ou d’une autre la fermeture des entreprises,
l’augmentation du taux de chômage, la baisse du pouvoir d’achat de la
population congolaise. Retirer un enfant de l’école ou disposer de
moins de nourriture en raison d’une perte d'emploi et de revenu
induisent des conséquences qui continueront à peser lourd bien après la
fin annoncée de la récession économique et le début de la relance
attendue.

– Amplification des effets la crise alimentaire

Notons que la crise financière mondiale vient accentuer la crise
alimentaire que le monde connaît depuis quelques années. Cette crise
arrive en RDC dans un contexte difficile, le pays étant encore sous
l’effet de triple chocs (alimentaire et énergétique et de la guerre à
l’Est), aggravera la crise de la pauvreté et des inégalités, plombera
beaucoup plus la population déjà miséreuse. A ce sujet, la Banque
mondiale renseigne que 55 à 90 millions de personnes pourraient être
propulsées dans la pauvreté extrême à la suite de la crise financière,
et venir grossir les rangs des 160 à 200 millions d’individus dont on
estime qu’ils ont sombré dans la misère à la suite de la hausse des prix
des denrées alimentaires entre 2005 et 2008.

En effet, en RDC, du fait que le pays est importateur de denrées
alimentaires, qui sont une composante majeure de l'indice des prix à la
consommation, les dépréciations entraînent à coût sur, une hausse des
prix des produits alimentaires, que les moins nantis ont plus de mal à
se procurer. Ainsi, l’on peut constater le fait la crise financière a
amplifié les effets de la crise alimentaire. L’impact est
particulièrement marqué sur l’économie de la RDC qui affiche
d’importants déficits dans le commerce des produits alimentaires. Les
populations urbaines sont particulièrement touchées, à mesure que
s’effritent les possibilités d’emploi. Les tentatives visant à
subventionner les prix des produits alimentaires ne produisent pas
d’effets, compte tenu du faible niveau des recettes publiques et de la
diminution des réserves en devises.

– Impact sur le plan de l’emploi découlant entre autres de la fermeture
des entreprises minières et autres unités de production

La RDC dispose des structures de formation et des régulations de
l’emploi : l’Office National de l’Emploi (ONEM) et l’Institut National
des Préparations Professionnelles (l’INPP). Mais il sied de noter que
la situation de l’emploi y est préoccupant. En effet, selon les études
récentes menées par le Bureau International du Travail et la Banque
Centrale du Congo, le chômage et l’auto-emploi englobent une grande
partie de la population congolaise. Actuellement, lorsqu’on ne prend en
compte que le secteur formel, le taux de chômage est estimé à 96%. Lors
des années prospères de la RDC jusqu’au recensement scientifique de
1982, ce taux était estimé à 8%. La crise financière mondiale vient sans
nul doute renforcer cet accroissement du taux de chômage. Ses
conséquences sur le plan économico-social se traduisent par le fait que
le chômage augmente et les entreprises licencient.

En effet, la RDC commence à payer le plus grand prix de cette crise dans
la mesure où elle subit un effondrement des cours des matières
premières qui rend son économie encore plus vulnérable qu’auparavant.
Cela est d’autant vrai car, la RDC est un pays à l’économie très
dépendante du secteur minéraux-métaux. Elle possède 34% des réserves
mondiales de cobalt, 10% de celles de cuivre, mais aussi des diamants,
de l’or, de l’uranium, du coltan et autres matières. Les experts ont
fait remarquer que depuis cet été, le cuivre a perdu 75% de sa valeur,
le diamant 40%, et le cours du cobalt a été divisé par cinq. Ce
retournement intervenait au moment où le secteur minier était déjà
plongé dans l’incertitude en raison de la volonté du gouvernement de
renégocier les contrats miniers octroyés au début des années 2000.

Cette situation a occasionné la fermeture de certaines entreprises
minières. Les raisons de fermeture sont liées entre autres à
l’incapacité de couvrir leurs coûts de production aussi, la plupart des
sociétés qui opèrent en RDC (dans le secteur minier) mobilisent leurs
fonds en bourse étrangère où cette opération devient difficile à cause
de l’influence négative sur les places boursières de la réunion de la
baisse des capitalisations et des valeurs boursières et, du fait aussi
du risque en RDC. Ce qui amènera tous les autres acteurs de ce secteur
dont les fondeurs, les creuseurs artisanaux, les comptoirs ainsi que les
négociants a également fermer leurs portes. En conséquence, plusieurs
projets d’investissement initiaux ou d’expansion sont arrêtés. Les
premiers touchés sont les emplois nouveaux ou existants dans le cadre
des dits projets. Ils ont été supprimés.

Le cas le plus patent est celui de la province minière du Katanga -au
sud-est de la RDC- dans laquelle plus de 300.000 emplois ont été
supprimés, dont plus de 80% dans le secteur minier posant donc des
problèmes sociaux et d’insécurité. Des milliers d’ouvriers et de
creuseurs artisanaux se trouvent au chômage. Une cinquantaine
d’entreprises minières et des centaines de petits comptoirs d’achat ont
fermé leurs portes depuis fin 2008. Selon le gouvernement provincial du
Katanga, la faillite de ces entreprises a contraint au chômage un peu
plus de 300.000 ouvriers dans cette province cuprifère. Il s’agit ici
d'emplois dans le secteur formel, sachant ce que représente un emploi
décent en Afrique, en termes de soutien aux familles, aux communautés ou
aux villages.

Sans sécurité sociale et indemnités payées au bon vouloir des
entreprises, les anciens employés de ce qu’on appelle localement les «
Mining » ne baissent pas les bras et, en bons débrouillards, ils
trouvent des moyens alternatifs pour survivre. La plupart de ces anciens
ouvriers et creuseurs artisanaux se tournent vers l’agriculture. Tel
est le cas de Blaise Kayumba, un ancien travailleur d’une « Mining »
qui déclare : «… Avec la somme que j’ai reçu comme décompte final, j’ai
acheté un lopin de terre que je compte exploiter pour cultiver des
fruits et des légumes… Ce n’est pas la première fois que ce genre de
crise se déclare, les entreprises minières tomberont en faillite et
décevront toujours mais avec mon petit champ, je serais autonome ».

Il convient de noter que les mêmes répercussions sont également
perceptibles dans la province diamantifère du Kasaï Oriental où la
production est allée au plus bas de l’échelle. Le président de
l’Assemblée provinciale, François Kabala a rapporté que la mendicité a
augmenté dans cette partie du pays, situation qui poussent certains
habitants à commencer à vendre leurs biens dans les rues. Au delà de la
perte d’emploi, quelles sont les répercussions potentielles de la crise
financière mondiale sur la pauvreté?

– Potentielles répercussions sur la pauvreté

En Afrique, la Banque Africaine de Développement (BAD) estime que le
nombre de personnes pauvres augmentera de 27 millions et l’Organisation
Internationale du Travail (OIT) prévoit que le chômage atteindra 8,5 %
en 2009. Cela pourrait sérieusement menacer les progrès en cours en vue
de la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement sur
le continent. Quelle est la situation en RDC ?

La RDC est un pays où plus ou moins ¾ de la population vit avec moins de
un dollar par jour ce qui la place à la 167ème position sur 177 en ce
qui concerne le classement des Indicateurs de développement humain.
Elle est aussi un pays dont la guerre à l’Est est presque devenue
monnaie courante accentuant la crise qui secoue déjà la situation
sociale en RDC. La crise financière mondiale vient donc assommer le
social de la population congolaise qui ne sait plus à quel saint se
vouer.

La baisse des exportations limite l’entrée de devises étrangères et
entraîne une dépréciation du Franc congolais, et cela a pour conséquence
le fait que la RDC n’a presque plus les moyens de payer les
fonctionnaires et l’on observe une récurrence des mouvements de grève
dans presque tous les secteurs, avec risque de rendre rapidement
explosive une situation sociale déjà très dégradée. La tendance
d’effondrement du franc congolais au marché parallèle de change entraîne
l’alignement des prix sur le cours du dollar. Ce qui n’a pas manqué
d’affecter les prix à la consommation qui tendent à s’élever comme
habituellement. Cette hausse entraîne certainement la paupérisation des
congolais – travailleurs ou pas-, car elle fait fléchir la consommation à
cause de la baisse du pouvoir d’achat qu’elle entraîne, même si cette
baisse peut être compensée par le revenu procuré par le secteur informel
ou par la solidarité.

– Impact de la crise sur les personnes vulnérables

Dans la plupart des pays africains, les femmes et les enfants sont
particulièrement vulnérables. Aussi, le potentiel des femmes à devenir
des facteurs économiques sur le plan commercial n’est pas reconnu et
elles font toujours l’objet d’images stéréotypes en ce qui concerne le
potentiel de croissance. En RDC, l’on assiste à un contraste du fait
que les femmes occupent une place stratégique du point de vue économique
car, elles s’impliquent dans diverses activités en vue d’accroître le
pouvoir économique de leurs ménages. La majorité d’hommes, avec les
guerres à répétition, n’ont pas de travail. Malheureusement la dignité
de la femme n’est pas respectée car elle est devenue l’élément de viols
et de violences. La reconnaissance des droits de la femme est une
variable dépendante de l’environnement socioculturel (traditions,
coutumes et de l’application des dispositifs légaux et réglementaires y
relatifs).

Ainsi, dans un pays en proie à la crise économique et financière grave
et lancinante et en mutations, la situation des femmes devient plus que
précaire à partir du moment où celles-ci doivent faire encore face aux
injustices, aux inégalités, aux sévices, aux viols et aux violences de
toutes sortes. Moins de 18% des femmes économiquement actives se
trouvent dans l’emploi rémunéré. Les autres sont des travailleurs
indépendants ou s’occupent de leurs familles. Elles ont tendances à
exercer dans le secteur informel qui implique à peu près 34% des foyers
dans le pays et 46% de la population active. Les revenus de plus de 80%
des femmes en RDC proviennent du secteur informel fait essentiellement
des petits métiers artisanaux générateurs de revenus (couture, coiffure,
services, broderie, commerce de vivres frais, travaux domestiques) et
l’agriculture de subsistance (maraîchers, légumes, maïs, haricots,
arachides, pommes de terre, patates, bananes, manioc, l’élevage de
volailles, etc.)

L’impact de la crise ne se limite pas seulement à l’aggravation de
l’état de pauvreté et des privations actuelles. En effet, en RDC, il
entraîne déjà des implications en matière d’éducation, de santé,
d’emploi et de croissance. Cela est d’autant vrai car, au fur et à
mesure que leurs revenus s’amenuisent, les femmes -de surcroît pauvres-
se retrouvent dans l’impossibilité de se procurer les denrées
alimentaires de base, d'accéder aux soins de santé élémentaires et
d’envoyer leurs enfants à l’école. Ceci se produit fatalement quand le
budget du gouvernement se rétrécit, notamment avec la diminution des
recettes fiscales, des exportations, des investissements étrangers et
d’autres sources de revenus suite a la crise alors que les besoins en
dépenses accroissent pour financer les services publics essentiels.

Au-delà de la perte de revenus des femmes, la situation des enfants est
aussi atteinte par d’autres facettes de la crise. À ce sujet, une
diminution du produit intérieur brut (PIB) accentuée par la crise
financière, se traduit par une grave détérioration de la santé des
enfants, puisque l’eau potable, les aliments nutritifs et les soins de
santé prénatals et postnatals deviennent de plus en plus difficiles
d’accès. La malnutrition infantile menace de se répandre et les
enfants risquent d’être amenés à abandonner l’école en grand nombre.
Déjà, l’on constate que dans certains coins de la RDC, la faim empêche
les enfants d'aller en classe, spécialement ceux qui doivent marcher de
longues distances pour se rendre à l’école.

De plus en plus de parents retirent leurs enfants de l’école pour les
forcer à travailler en faisant des petits négoces ou carrément dans
certaines mines. Pendant ce temps, de plus en plus d’enfants, de
fillettes et de jeunes femmes deviennent des victimes de la traite des
êtres humains et des travailleurs forcés de l'industrie du sexe à la
suite de la précarité de la nourriture et du travail. Ainsi, un nombre
croissant de filles et de jeunes femmes se tournent-elles vers
l'industrie du sexe par désespoir économique et obligées d’échanger des
faveurs sexuelles contre la nourriture.

Comme on peut bien s’en rendre compte, la pauvreté, même passagère, peut
avoir des conséquences néfastes à long terme. En retour, ceci affecte
les perspectives de développement économique et humain d’un pays au long
cours, ce qui signifie que les pertes d’aujourd’hui se traduisent en
pertes pour des générations à venir. Il sied donc que des solutions
soient trouvées afin de faire face à l’impact de la crise financière sur
le social de la population congolaise.

– Impact de la crise sur l’immobilier

La crise financière ne touche pas seulement le secteur de l’emploi dans
les mines. Dans la province du Katanga, le secteur de l’immobilier
subit un sévère contrecoup de l’effondrement du cuivre consécutif à la
crise financière. Elle a des effets néfastes sur l’immobilier au
Katanga, où les bailleurs sont confrontés aux harcèlements des
locataires réclamant la restitution des garanties locatives consenties
au temps de bonnes affaires du cuivre

Les bailleurs peinent à rembourser les garanties locatives démesurées
qu’ils avaient perçues au moment du boum des matières premières. Ceux
qui avaient demandé de très fortes garanties locatives, tentés par la
forte demande de logement, ne peuvent plus aujourd’hui les rembourser.
De nombreux locataires partent depuis la baisse des cours des matières
premières sur le marché mondial. Suivre la loi leur aurait évité ces
problèmes, pense un habitant de Lubumbashi. Monsieur Alfred Samboy, un
habitant de Lubumbashi interviewé raconte ceci : « J’ai été obligé de
morceler ma parcelle et mettre une partie en vente pour rembourser la
garantie locative à un trio de Chinois qui louait l’une de mes maisons à
usage résidentiel ». Ce père de 6 enfants, qui a l’habitude de faire
du commerce avec la garantie locative, raconte la mésaventure qui l’a
amené à vivre désormais dans sa propre parcelle émiettée. « Quand les
Chinois sont venus solliciter chez moi, ils étaient prêts à se plier à
toutes mes conditions parce qu’ils étaient dans le besoin. Je leur ai
demandé 10.000 dollars de garantie locative et fixé à 200 dollars le
loyer mensuel ». Six mois après, la chute des cours des métaux a poussé
plusieurs entreprises minières, dont les chinois, à fermer. Alfred
s’est retrouvé dans l’incapacité de rembourser l’argent aux locataires
qui l’exigeaient avant de rentrer chez eux.

Prendre l’argent de plusieurs locataires. Des cas pareils se sont
multipliés dans la ville avec l’arrivée des milliers de gens attirés par
les mines. N’ayant que l’embarras du choix pour les locataires, les
bailleurs ont mis en location leurs maisons sans suivre la loi. D’autres
ont pris l’argent de plusieurs personnes pour une seule maison.

III. FAUT-IL CONCLURE ?

Non, seulement dire qu’en RDC, les causes de la crise financière
mondiale sont constituées principalement par les difficultés de lever
des fonds à l’extérieur et par la détérioration des cours des matières
premières sur les marchés internationaux. En effet, la crise multiforme
arrive en RDC dans un contexte difficile, le pays étant encore sous
l’effet de triple chocs (alimentaire et énergétique et de la guerre à
l’Est). L’impact de la crise financière internationale sur l’économie
congolaise est multidimensionnel avec des implications sur le plan
social, aggravant la crise de la pauvreté et des inégalités et plombant
beaucoup plus la population déjà miséreuse:

• Sur l’économie réelle : les cours des matières premières (minerais,
hydrocarbures, bois, etc.) ont chuté depuis le dernier trimestre de
l’année 2008, entraînant la fermeture de plusieurs entreprises minières
de la province du Katanga, le chômage des milliers de travailleurs
œuvrant dans ce secteur et l’arrêt des exportations. Cette situation a
entraîné un tarissement des devises et un ralentissement net du taux de
croissance du PIB, depuis le début de l’année 2009 voire 2010. En
conséquence, l’Etat ne pourra pas être vertueux car, il ne disposera pas
des moyens de sa politique et comme d’habitude, ce sont des projets à
caractère social (écoles, centres de santé,…) qui vont être touchés.
L’origine de l’inflation étant essentiellement budgétaire, l’aggravation
du déficit budgétaire provoquera ipso facto des tensions
inflationnistes, la dépréciation du franc congolais face au dollar
américain et la baisse du pouvoir d’achat des congolais.

• Sur le système bancaire et financier : il y a eu une diminution
drastique de l’offre de devises sur le marché, d’énormes difficultés de
trésorerie dans les banques commerciales, la perte de la valeur du franc
congolais face au dollar américain. La surchauffe observée sur le
marché de change, depuis le mois de septembre 2008 s’est amplifiée au
courant de l’année 2009 et présentement (1USD = 950 CDF) , entraînant
une accélération du rythme de formation des prix intérieurs. L’érosion
du pouvoir d’achat des ménages est la conséquence de ce mouvement des
prix à la hausse.

• Sur les finances publiques : les prévisions de recettes du Budget de
l’Etat pour l’exercice 2010 ne seront pas réalisées, appelant ainsi à
une politique budgétaire prudente et à un collectif budgétaire, dans la
mesure où, en plus, le cadrage macroéconomique est complètement dépassé.
Cela a comme conséquence sur le plan social que le gouvernement n’a pas
les moyens de payer les salaires des fonctionnaires ; il n’a plus les
capacités de fournir des services nécessaires à la population (eau,
électricité, santé, etc.)

La lutte contre les effets de la crise financière internationale sera
longue et complexe. Il faut des solutions énergiques et novateurs qui ne
dépendront pas seulement des initiatives du Gouvernement, mais aussi et
surtout de ce qui peut venir de la société civile, des penseurs, des
chercheurs, des scientifiques, bref du génie qui se manifeste
paradoxalement en temps de crise, comme le témoigne l’histoire de
l’humanité.

Alors que nous concluons cette étude, l’on constate un rebond des cours
du cuivre et l’espoir se lit déjà sur les visages des congolais et des
opérateurs miniers. En effet, après la chute, aujourd’hui, la tendance
est au renversement. Le rebond des cours du cuivre se confirme. Il cote,
à ce jour 7.473 USD sur le London Metal Exchange (LME). Bonne nouvelle
donc pour les miniers de la RDC. Après la panique née de la brutale
chute des cours des métaux de base, dont le cuivre, et qui aura étendu
ses effets jusqu’à la province minière du Katanga, l’on assiste ce
dernier temps à un renversement des tendances à la suite du rebond des
cours du cuivre. Avec un cours qui file désormais vers les 8.000 USD la
tonne, les entreprises minières sont presque rassurées de couvrir, sans
trop d’inquiétudes leur coût de production. D’où, l’accalmie qui se lit
sur tous les visages aussi bien des miniers que de l’administration des
mines et d’autres services de l’Etat qui espèrent tirer d’importants
dividendes de ce renversement des tendances.

Toutefois, relevons que nonobstant cette montée du coût du cuivre, il
faut avoir présent à l’esprit que le problème des populations
congolaises étant la pénurie des produits de consommation de masse à
laquelle elles sont confrontées, il sied que le gouvernement élabore un
plan spécifique devant faire face à cette pénurie. L’avenir de la
demande et l’offre de ces produits de consommation de masse ne pourra
atteindre un équilibre qu’à condition d’adopter des politiques adaptées
dans les divers secteurs, celui de l’agriculture notamment. Mais de
quelle façon ? Faut-il contraindre les sociétés minières à faire les
champs ? Ça c’est un autre débat. [Lire la reflexion de Me BAMBI KABASHI
a ce sujet]

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