20.02.10 Le Potentiel : Cinq questions à Jean-Louis Ernest Kyaviro, par Louis-Paul Eyenga Sana

 

1. L’an 2009 appartient désormais à l’histoire. Qu’est-ce
qui vous marqué au cours de cette année ?

L’année 2009 a été difficile. Tout au long de cette année, j’ai été
de tous les combats et j’ai consenti beaucoup de sacrifices dans ma vie
politique. En effet, pour arrêter le bras de fer engagé entre le chef de
l’Etat, Joseph Kabila et le président de l’Assemblée nationale d’alors,
Vital Kamerhe, et ainsi arrêter la crise institutionnelle grave, j’ai
dû accepter de lire la Déclaration de l’AMP exigeant la démission du
président Vital Kamerhe. Je savais que cette déclaration allait
produire un effet détonateur dans la vie politique nationale. Mais, je
n’ai rien exigé ni rien obtenu, contrairement à ce que d’aucuns ont
insinué. Enfin de compte, l’objectif visé était la stabilité des
institutions et c’était le bon combat.
Par ailleurs, la dernière session parlementaire de 2009 était pour moi
un véritable succès, car nous députés, avons voté les lois. Nous avons
travaillé dans la sérénité et voté neuf lois, dont certains
permettront d’améliorer le climat des affaires dans le pays. Nous avons
également adopté le budget revisité pour l’exercice 2010. Enfin, pour
la prochaine session, je souhaite que le projet de loi sur l’aviation
civile, « une matière très technique » puisse être examinée afin de
restaurer de l’ordre dans le secteur.

2. Que se passe-t-il au sein de l’AMP ? Y aurait-il tempête
dans un verre d’eau?

C’est certainement une tare congénitale et contraire à l’esprit
démocratique parce qu’on voudrait mettre à l’écart les élus dans la
gestion de cette plate-forme politique. Aujourd’hui, on constate qu’il
n’y a aucun élu au sein de l’exécutif de l’AMP. Ces derniers exigent
qu’ils en fassent partie. Deuxièmement, beaucoup de ministres continuent
à siéger comme chefs des partis politiques au sein du comité politique
de l’AMP. Cela constitue l’antithèse de la « Tolérance zéro » parce que
le monde entier sait que les Congolais ont choisi la Constitution par
référendum qui interdit ce chevauchement. En effet, il a été demandé aux
ministres de quitter la tête de leurs partis, conformément à leur
serment. Que constatons-nous ? Ils s’accrochent à leurs fonctions au
point de dire que la « Tolérance zéro » est combattue actuellement au
sommet.
L’AMP doit être restructuré en respectant la Constitution et ainsi
permettre aux élus de s’impliquer dans son fonctionnement et dans la
prise des décisions.

3. L’imminence d’un remaniement n’a-t-il pas entraîné de
l’agitation au sein de l’AMP ?

C’est normal parce que dernièrement, le chef de l’Etat, Joseph
Kabila, a décidé de procéder au remaniement avec le concours d’un petit
nombre de patriotes déterminés à l’aider dans sa délicate tâche. Mais,
il y a une majorité qui cherche à tirer les bénéfices du profit pour des
intérêts égoïstes en s’accrochant à leurs postes au sein du
gouvernement et du parti. Il faut que le Premier ministre ait la
politique de ses moyens. Présentement, il est comme le capitaine de
cette équipe dont les joueurs sont des associés du patron de l’équipe et
considère l’entraîneur ou le capitaine comme un collaborateur. Ce qui
explique l’indiscipline au sein du gouvernement.

4. Comment expliquez-vous les turbulences observées ces
derniers temps dans les assemblées provinciales ?

Cela résulte de trois choses. La première observation est celle-ci :
lorsque nous députés interpellons les ministres, on nous dit que nous
cherchons de l’argent comme si nous étions nourris à la soupe publique.
Cette façon de voir les choses vise à mépriser le contrôle
parlementaire. Cela constitue une agression à la démocratie.
Deuxièmement, il y a une tendance de l’exécutif à échapper au contrôle
parlementaire en utilisant le patri et les liens sociales ou familiales,
alors que la population veut qu’on puisse recourir au cadre
constitutionnel pour régenter la vie politique dans le pays. Enfin, le
rôle de Kinshasa dans ce combat n’a pas été toujours heureux. Il y a,
par exemple, des informations sur la persistance des opérations retour
en rapport avec la rétrocession provinciale. C’est cette collaboration
obscure qui avait fait éclater les scandales dans les provinces de
l’Equateur, du Katanga, dans la Province Orientale. Dans cette dernière
province, la récente motion de défiance contre le gouverneur a obligé le
ministre de l’Intérieur à convoquer à Kinshasa le gouverneur, les
membres du Bureau de l’assemblée provinciale. Les membres de cette
délégation nous ont contacté et ont fait état de pression qu’ils étaient
en train de subir. C’est un scandale ! En effet, on pouvait comprendre
que le ministre de l’Intérieur puisse se rendre à Mbandaka et à
Lubumbashi, où l’ordre a été perturbé, mais pas convoquer l’exécutif et
le législatif provincial de la Province Orientale à Kinshasa. Kisangani
n’était pas la même chose que Mbandaka, ni Lubumbashi. Chose grave, un
ministre du gouvernement central et même les ministres provinciaux de
Kisangani ont tous déclaré à la presse des choses qui tendent à
présenter la motion comme le signe d’un conflit pour justifier cette
violation massive de la Constitution. Cette tendance est dangereuse, car
de tels propos, sans le savoir, peuvent allumer le feu

5. Quelles sont les perspectives pour l’année 2010 ?

Le Congolais a trois devoirs et obligations pour 2010. Le premier,
c’est d’accepter que le pays soit dirigé par la Constitution et les lois
pour l’intérêt suprême du souverain primaire. Deuxièmement, le
Congolais est la seule personne à développer demain la RDC. Ce ne sont
ni les Chinois, ni les Arabes et encore moins les Français qui le feront
à sa place. Notre défi est de compter sur la qualité des hommes à
diriger au regard de cinq chantiers initiés par le chef de l’Etat. Je
voudrai que l’on ne puisse pas admirer les chantiers et s’en approprier.
Il faut que le Congolais puisse assurer la grandeur de la RDC, car ce
n’est pas à 50 ans que le Congolais doit continuer à rester dans le
berceau. C’est humiliant. Nous avons maintenant 50 ans. Quittons le
berceau.

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