Mon pays va mal ! (Par Frère Justin Kakule)

En lisant les accords de LEMERA (voir à la fin de
ce texte), on peut se poser la question de savoir si le souverain
primaire a une place dans la conception de ceux qui veulent présider a
la destinée du peuple même. A voir comment la RD Congo est gouvernée, on
ne peut s’empêcher de dire que, aux yeux des politiques congolais, les
vies humaines sont moins importantes que la raison d’Etat. – Peut-on
comprendre alors pourquoi les s signataires de fameux accords de
Lemera ne pouvaient les publier car trop compromettants.

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Une chose est certaine, et je voudrais qu’on croise
la plume avec quiconque soutiendrait le contraire, le Congo se meurt
faute des dirigeants. Mais n’oublions pas l’adage selon le quel le
peuple a le chef qu’il mérite. Delà, trois choses : amateurisme
politique, favoritisme et déni de la justice.

L’homme politique congolais est un aventurier. Il
suffit de jeter un œil sur la voracité du pouvoir des politiciens qui en
permanence, sont en quête d’un bonheur toujours solitaire et partisan.
Ne se construisant que sur les malheurs et les aspirations à un bonheur
du peuple par eux différé, déféré à l’hypothétique tribunal de leurs
promesses jamais tenues. L’action politique se réduit ainsi de jour en
jour à une exploitation systématique des existences les plus meurtries
et des espoirs les plus profondément rentrés, pour construire un
semblant de bonheur.

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La sphère politique congolaise laisse à désirer.
Une recherche effrénée du pouvoir pour le pouvoir introduit un
capitaliste sauvage qui engendre l’esprit de compétition et
l’individualisme. L’envie, la jalousie, l’inimitié et l’avidité chez
l’individu en sont subséquentes. Chacun veut être plus compétitif que
l’autre qu’il considère comme concurrent. L’individualisme, caractérisé
par un amour et une recherche de soi, engendre l’égoïsme politique.

L’homme politique congolais est porté par
l’acquisition et la jouissance des richesses matérielles. Pour lui, tous
les moyens sont bons. Ceci a abouti au manque de partage, d’honnêteté,
de respect, d’hospitalité, de solidarité et de communion vitale. Le
respect du bien commun est manifestement une denrée inconnue dans cette
situation. Rien n’étonne alors lorsque les biens publics, communs, sont
confondus aux biens individuels et privés, de la classe dirigeante.

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Dans cette zizanie politique, chacun s’emploie à
privilégier les gens de son terroir ou de sa famille, (pensons à la
mésentente au sein de la COFEDEC de Venant Tshipasa et ses collègues) en
pensant qu’ils sont seuls capables de diriger. C’est le début du
tribalisme, du régionalisme et de l’ethnisme, qui sur l’accord de la
solidarité destructive entre les gens qui se réclament d’une même
colline, d’une seule tribu, dans l’exclusion des autres dans une
"communauté plurielle". Dans ce népotisme, la recherche effrénée du
pouvoir despotique trahit la morale d’une solidarité sans frontières.
Alors, on interprète mal certains slogans (PAKA SIYE) pour vouloir
s’attirer des amis d’ailleurs (?) et on verse dans un discours aussi
mielleux que fallacieux de la démagogie. Comment accepter qu’un chef
vienne dire : « Je vous demande pardon de vous avoir dit de voter pour
tel », alors qu’il continue à composer avec lui ? Un homme politique
français disait : Un ministre, ca ferme la bouche ou ca démissionne.
Bien dit, car la solidarité gouvernementale exige que l’on défende le
bilan de son équipe. Quel hiatus entre la profusion des discours des
politiques et la stérilité de la pratique de transformation sociale. Il y
a disproportion entre théorie et pratique, l’institué et le vécu, le
conçu et l’éprouvé. Au Congo, les politiques sont produisent constamment
des analyses globales sur la condition actuelle, développent des
théories toujours plus séduisantes les unes que les autres. Ils vont
même jusqu’à proposer des diagnostics et des remèdes. Le paradoxe est
que malgré une telle profusion de discours ardents et d’évidences
arrangeuses, le pays demeure encore dans un état de désorientation
totale et de crise chronique. Mais comment expliquer ce paradoxe ? La
démagogie du discoureur reste la seule réponse. Celle- ci ressort
clairement de cette déclaration de l’épiscopat congolais (alors zaïrois)
: « Pendant que le pays est complètement détruit et que le peuple se
meurt, les acteurs politiques zaïrois se complaisent dans les
débats artificiels et sans issue. Ils signent des accords, fixent les
règles du jeu politique et refusent de les suivre… » (Des dirigeants
nouveaux pour le salut du peuple. Message des Evêques du Zaïre, Editions
du Secrétariat général de l’Episcopat, Kinshasa, 1995, n°15).

De ce qui précède, il ressort que l’homme zaïrois
dépendait d’une politique qui n’assurait aucune destinée humaine et qui
n’était nullement destinée à répondre au besoin de l’espèce humaine.
Curieusement le peuple s’aligne derrière cette démagogie. Celle- ci a
atteint son plus haut niveau aux pendant des élections- moment couronné
de multiples promesses- et lors d’une visite à une ville. Le politicien
tient un langage plein de promesses. Mais tant en emporte le vent, dit
ingénieusement un proverbe français.

Ou en sommes-nous avec les cinq chantiers ? Les
Accords de Mbudi ? La reconstruction marche-t-elle ? Mon pays va mal !

Devant cette inadéquation entre le dire et le faire
politique, la masse populaire se forge des moyens de subvenir à ses
besoins et d’organiser ses communautés. C’est ainsi que les entreprises
se sont fixées arbitrairement le salaire des ouvriers : une maigreur
salariale s’en suit. Quel secteur, au Congo, ne connaît-il pas de
grève faute de salaire? Alors ne vous étonnez pas que la gent
fonctionnaire se serve ses poches au lieu d’alimenter les caisses de
l’Etat. Au pays de Kabila, la question de juste rémunération du travail
accompli reste l’apanage des seules entreprises. Le salaire du
travailleur (fonctionnaire ou pas) n’est plus qu’un appoint qui ne
permet de vivre que moyennant une débrouillardise de plus imaginative.
Le problème n’est plus tellement de vivre que de survivre. La
reconstruction en marche !

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Dans cette condition, nul n’hésite devant les
moyens malhonnêtes ; ce qui engendre l’effritement de la conscience
professionnelle avec une kyrielle de maux subséquents. L’impasse
salariale est générateur des graves maux : corruption, pillages
militaires, vols, spoliation, extorsion, détournement, superfacturation,
etc. Les conséquences directes de cette pratique sont, entre autre, la
paupérisation des administrations publiques, le déficit financier ; la
baisse manifeste de la productivité, la destruction de la conscience
personnelle. C’est ainsi qu’on assiste au recours à des taxes illégales,
à des falsifications et à des ventes frauduleuses de dives documents,
qui, devenu monnaie courante, engendre au sein de la société les hausses
des coûts de la vie et une méfiance envers l’administration publique.
Dans cette impasse, la mendicité et la prostitution ont acquis droit de
cité. On dirait qu’on retourne à l’époque de la cueillette et de
ramassage. Avec toutes les potentialités que regorge le pays, on ne peut
pas comprendre que le Congo soit littéralement à genou.

Ce mal a atteint un tel degré de saturation qu’il
débordait les initiatives privées, éparses et séparées. Il en appelle
donc solennellement aux décisions souveraines de l’Etat.
Malheureusement, le gouvernement est déjà atteint à tous les niveaux
qu’il parait avoir démissionné : la faiblesse du politique.

A force de céder au mensonge et à l’égoïsme, le
politique congolais perdu la confiance du peuple : son autorité
s’étiolait. Et Dieu seul sait quel discours sera produit pendant les
électorales qui, en principe, approchent.

Le sens de la responsabilité étatique est en
baisse. Cette crise d’autorité ne peut qu’aboutir à une désorganisation,
à un manque de gestion efficace. C’est ainsi qu’on entend des gens dire
: Nous sommes au Congo, c’est cette situation qui devait prévaloir !
Quelqu’un avait même dit : Mboka oyo ekobonga lisusu te (ce pays ne sera
plus jamais en ordre). Le comble, c’était le gouverneur de la capitale,
et cela était devant un camera. Imaginez le sort du journaliste qui fit
passer la séquence à la télévision.

2006 a suscité de nouveaux espoirs. On voyait
l’avènement d’un Etat de droit pointer à l’horizon. Malheureusement, la
barbarie des tenants de l’imperium décuple pour annihiler toutes formes
d’expression démocratiques. Le nouveau régime inaugure une ère malsaine
de terreur, de mensonges et des grandes prédations. Les péripéties
sociopolitiques en sont les preuves éloquentes. Quel gâchis ! Combien de
cases de pauvres paysans ont-elles été brulées ? Combien de pauvres
débrouillards commerçants ont-ils été dévalisés et tués sur la route de
Beni-Kasindi ? Pourquoi l’Equateur burle-il ? Et la communauté Enyele,
pourquoi prend-elle des armes contre les autres dans la localité de
Makanza ? Dans le pays où l’activité politique est devenue une
compétition de vassalisation et de clientélisation de la classe
politique et des agents de l’Etat, chacun se cherche un point d’appui
pour soulever la poussière. Ceci explique donc cela. Les poches de
rebelles ou des insurgés par-ci par-là (CNDP, PARECO, etc.).

.

Il et vrai que cela n’est pas la solution, mais
comment comprendre que les gens au pouvoir dépensent sans compter pour
leur propre confort. Ils hypothèquent ainsi les ressources minières du
pays qui auraient dû servir à la reconstruction du pays par des contrats
scandaleux et ignominieux, aujourd’hui dénoncés par tout le monde, sauf
par les affidés du cartel des prédateurs, à savoir, le RCD-PPRD-MSR-CDR
et j’en passe, tous regroupé sous le vocable majorité présidentielle.
Je n’oublie pas que le PALU du patriarche s’est enlisé dans ce marigot
et, aujourd’hui, il patauge facétieusement puisqu’il n’avait pas pesé
les conséquences de son attelage contre nature avec l’AMP, cautionnant
ainsi les turpitudes d’un régime qui restaure l’instrumentalisation des
institutions sécuritaires du pays, un climat et une stratégie qui
associent de plus en plus avec le contrôle de l’appareil politique,
judiciaire et de l’Etat, l’intimidation permanente et la violence à
l’Etat brut. Alors, au revoir Madame la justice. Bosco Ntaganda, on
t’enverra un jour à la CPI, je suppose ! Et la tolérance zéro ou
est-elle ? Alors, il faut laiser la justice faire son travail.

Comment comprendre que les gens censés assurer la
sécurité soient cités dans les affaires de meurtre d’un paisible
chauffeur (cfr les événements de Butembo, 7 mars dernier, où
les militaires commis a la garde du Coordonnateur des Operations
militaires Amani Leo semblent impliques dans les assassinats qui
endeuillent le Nord Kivu) ? Quelle paix servent-ils ? Dans un pays sans
justice, rien ne se fera. Et le pouvoir restera sourd aux cris du
peuple.

Si on veut changer le Congo, il faudrait que la
paix soit d’abord le "télos" de toute justice et de toute politique. De
cette façon, le "si vis pacem, para bellum" des Romains devrait se dire
désormais : « Si tu veux la paix, prépare la justice ». De cette façon,
le pouvoir cesse d’être justicide et rend à chacun son dû. Il s’en suit
la garantie de la confiance du peuple au gouvernement, car ce dernier
respecte la dignité, les droits de l’homme comme "l’idéal commun à
atteindre afin que tous les individus et tous les organes de la société
s’efforce de développer le respect de ces droits et libertés et d’en
assurer la reconnaissance et l’application universelles et effectives"
(Préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme).

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Le développement de la richesse humaine reste
important d’un pays en voie de démocratisation. Le Congo ne devra pas
s’en passer. Il convient que son changement socio-politique passe par la
responsabilité et l’assomption de la citoyenneté. C’est seulement comme
responsable que le congolais pourra engager son pays sur la voie du
développement et lui faire recouvrer sa place et sa fierté dans le
concert des nations. Dans le cas contraire, on peut encore se demander :
"Où va la République démocratique du Congo ?".

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Il faudra donc combattre cet "apartheid noir"
qu’instaure le régime des prédateurs. Ce système réduit à un niveau de
misère insoutenable la grande majorité les congolais dans un pays qui
dispose de tous les atouts pour s’en sortir. Comprendre et réaliser ce
projet est notre souhait au peuple congolais. Les sources d’inspiration
sont nombreuses. Quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse la RDC relèvera
la tête parce que ceux qui sont dans le vrai sont plus nombreux que les
missionnaires de dessein funeste. Malgré la longueur de l anuit, le
jour finit toujours par paraitre. Et si la vérité conserve sa vigueur
même si son lot est l’échafaud. Et si le mal règne sur le trône car cet
échafaud exalte l’avenir et derrière l’obscurité de l’inconnu, Dieu
veille dans l’ombre sur les siens.

Nous devons, tous et chacun, verser notre goûte
dans ce vaste océan de la démocratie au Congo. C’est dans cet espoir
dans la lutte que nous crions : « Demain la liberté pour les congolais
».

.

Fr. Justin KAKULE Emery, MccJ

Email :   
justin_mek@hotmail.comCet e-mail est protégé contre les
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Le Caire, Egypte

Beni-Lubero Online

 

 

ACCORDS DE LEMERA

Le 23 Octobre 1996 par les camarades fondateurs de
l'AFDL ( NDRL : Il s'agit de Laurent Kabila du PRP, « Parti de la
Révolution Populaire », de André Ngandu Kisase du MNC/L-CNRD « Mouvement
National Congolais/Lumumba -Conseil National de résistance pour la
démocratie », de Anselme Masasu du MRLZ, « Mouvement Révolutionnaire
pour la libération du Zaïre », de Deogratias Bugera De l'ADP « Alliance
Démocratique des peuples » et de Bizima Kahara, qui les a approuvés ;

Art.1. Il est Créé en ce jour du 23 octobre 1996 à
l'hôtel Lemera, une Alliance des Forces Démocratique pour la Libération
du Congo qui sera soutenue militairement par les forces combattantes de
l'AFDL.

Art.2. Le sol et le sous-sol congolais
appartiennent à l'Alliance.

Art.3. L'Alliance devra demeurer une institution de
l'Etat canalisatrice de l'idéologie de libération.

Art.4. Prêchant le panafricanisme, l'Alliance
s'engage à céder 300 kilomètres aux frontières congolaises, à
l'intérieur du pays, pour sécuriser ses voisins Ougandais, Rwandais et
Burundais contre l'insurrection rebelle.

Art.5. Dès que l'Alliance aura gagné la
victoire, une rétribution spéciale sera allouée aux Alliés. Sa
détermination est de la compétence de l'instance supérieure de
l'Alliance.

Art.6. Tous les politiciens des années soixante en
RDC et ceux ayant collaboré avec le régime Mobutu seront mis en retraite
politique.

Art.7. La nationalité congolaise sera accordée
collectivement aux « camarades Banyamulenge et aux autres populations
d'origine rwandaise » établies au pays avant la date de l'indépendance
de notre pays ( le 30 Juin 1960)

Art.8. L'Anglais et le Swahili devront concurrencer
le français dans l'espace linguistique de notre pays.

 

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