24.05.10 Le Potentiel: Cinq questions à Marco Banguli, par DIOSSO OLIVIER

 

1. Vous venez de lancer une nouvelle idée, une nouvelle
philosophie, à savoir l’Identité kinoise. En quoi consiste-t-elle?

Nous voudrions saisir l’opportunité que nous offre l’installation
officielle des comités de base de de l’Action Marco Banguli à Tshangu
pour expliquer la raison d’être et le but poursuivi par notre
Association, en prévision des échéances de 2011. Notre démarche consiste
à offrir aux Kinois de cœur ou de raison – tous ceux qui considèrent
réellement Kinshasa, non seulement comme ville mais également une
province à part entière – un cadre où ils vont pouvoir désormais
revendiquer leur identité kinoise. Car Kinshasa est une ville à laquelle
la Constitution reconnaît le statut de province. Une province est
supposée avoir des ressortissants qui se réclament d’avoir des liens
d’appartenance avec la province : liens d’ordre culturel, sociologique,
affectif, historique. C’est ce qui fait leur identité commune.

2. Dans le cas de Kinshasa, qui sont les ressortissants de
cette province ?

Le fait d’habiter la ville de Kinshasa, capitale de notre pays et
siège des institutions nationales, ne fait pas nécessairement de vous un
fils du terroir, ayant le droit de revendiquer l’appartenance à la
province de Kinshasa. C’est bien sûr, le droit et le libre choix qu’a
tout cotoyen congolais de s’établir dans la capitale, tout en restant
attaché en même temps à sa province d’origine. Cependant, il existe
beaucoup de Congolais pour lesquels Kinshasa n’est pas seulement une
ville mais bel et bien une province, mieux un territoire où ils ont
tissé des liens forts et durables, des liens traditionnels à la fois
matrimoniaux, communautaires, culturels, sociologiaues, etc. C’est le
cas notamment des Teke-Humbu, originaires du territoire où est bâtie la
ville de Kinshasa ; des ressortissants de l’ancienne province de
Léopoldville demeurés à Kinshasa après le découpage territorial de 1967 ;
des Congolais dont les parents sont originaires des autres provinces du
pays, mais qui n’ont plus que Kinshasa comme leur seul territoire pour
la vie, et de génération en génération. Ils sont totalement sevrés des
origines ethniques ou tribales des parents. Ces Congolais ont en commun
leur attachement à la ville-province de Kinshasa : c’est leur identité
commune kinoise. Voilà pourquoi, il est important, pour nous filles et
fils de Kinshasa, de prendre conscience de notre identité et de nous
l’approprier.

3. Comment vont-ils s’y prendre ?

C’est par l’intériorisation de cette identité que nous arriverons à
unir nos efforts pour lutter contre les anti-valeurs et la perversion
des mœurs que nous déplorons tout le temps dans la société kinoise et
que le commun des mortels qualifie, avec moquerie, de kinoiserie. Les
Kinois sont pris pour des individus peu soucieux de leur avenir, peu
soucieux du devenir de leur ville et de leur milieu de vie, comme des
individus sans aucune échelle des valeurs collectives, sans âme. Des
individus prompts à servir de parias aux autres. C’est pourquoi, nous en
appelons aux Congolais qui sont attachés à la ville de Kinshasa, comme
par le cordon ombilical, d’être fiers de revendiquer l’identité
kinoise. Nous donnerons ainsi un sens au droit nous reconnu par la
Constitution, parce que notre province aura alors une âme. A l’instar
des Belges de Bruxelles qui revendiquent l’identité bruxelloise, des
Français de Paris qui revendiquent l’identité parisienne, de Barack
Obama (père kenyan d’origine) qui se réclame de l’identité américaine,
de Sarkozy (parents hongrois d’origine) qui se revendique de l’identité
française. Loin de nous l’idée de prêcher le séparatisme.

4. Quelles peuvent être les conséquences de ce manque de
prise de conscience de cette identité?

L’absence d’une prise de conscience de leur identité en tant que
Kinoises ou Kniois nous conduit inexorablement à des paradoxes tels que :
ce Kinois né, grandi et qui vit depuis toujours à Kinshasa passe pour
un inconnu dans le milieu d’origine de ses parents où on le rejette
comme un importun ; mais, pour des raisons de positionnement politique,
il se voit obligé de recourir à une base délétère en appelant à la
rescousse les ressortissants de la province de ses parents et se réfugie
derrière le tribalisme. Or, le tribalisme est un réflexe qui ne
favorise pas l’unité des Kinois pour une vision commune de notre ville, à
l’instar de ceux de l’«Amicale Lipopo» des années 60, qui avaient brisé
les clivages ethno-tribaux pour se considérer uniquement Kinois. Le
moment est venu, pour les Kinois de se regrouper autour d’un idéal
commun, celui du développement de leur espace vital que constituent la
rue, le quartier, la commune et enfin la ville.

5. Que voulez-vous concrètement ?

Nous voulons inviter les Kinois dans cette voie nouvelle de la quête
d’identité kinoise. Au travers de laquelle nous voulons créer une
dynamique qui vise à identifier les vrais Kinois qui, convaincus de leur
appartenance à la ville-province de Kinshasa, pourront mériter de la
confiance de notre population afin de briguer nos suffrages en 2011 et
de représenter valablement nos couches sociales aux différentes
Assemblées de demain : communales, provinciale et nationale.
Dans cette dynamique, l’Action Marco Banguli doit être considérée comme
une simple onde de choc qui chemine vers un grand mouvement de prise de
conscience de l’ensemble des Kinoises et Kinois, à l’instar de ce dicton
français qui dit : «Ce sont de petites rivières qui font de grands
fleuves». L’Action Marco Banguli est prête à fusionner dans ce grand
movement de masses que nous appelons de tous nos vœux avec les autres
filles et fils de la province de Kinshasa, comme les cours d’eau qui se
jettent et fusionnent avec les eaux de notre grand et majestueux fleuve
Congo.

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