09.06.10 UdC: Gaspard-Hubert Lonsi Koko : « Je demande que les représentants de la diaspora fassent partie intégrante de la commission d’enquête. »


Photo : Gaspard-Hubert Lonsi Koko et José Maria
Neves,

Premier
ministre du Cap Vert


Comment avez-vous réagi en
apprenant l’assassinat de M. Floribert Chebeya, directeur exécutif de l’ONG la
Voix des sans voix ?

 J'ai éprouvé un grand choc. Je me suis dit que ce qui
venait de se produire aurait pu arriver à n'importe quel individu dont les
actions ne sont pas favorables au gouvernement en place. On a vraisemblablement
assassiné M. Floribert Chebeya parce qu'il dérangeait.

 

Représentait-il un danger pour le régime en place en
République Démocratique du Congo, selon vous ?

D'après les bribes d'informations qui circulent, les
dossiers en possession de M. Floribert Chebeya concernent les massacres de la
population civile dans le Bas-Congo, notamment les partisans du Bundu dia Kongo,
et les mauvaises conditions de détention dans certaines maisons d'arrêt. Si ces
dossiers étaient publiés, on aurait assisté à un véritable tsunami. On peut
déduire que, pour les défenseurs zélés du régime en place, il fallait à tout
prix éviter une éventuelle débandade.

 

Que représentait-il pour vous ?

Je n'ai
jamais connu personnellement M. Floribert Cheyeba. Il me serait donc difficile
de répondre avec objectivité à votre question. La seule chose que je peux dire,
c'est que, en sa qualité d'acteur public, il a représenté un maillon important
dans un pays où l'opposition peine de plus en plus, depuis l'exil de Jean-Pierre
Bemba, à représenter un véritable contre-pouvoir. De ce fait, M. Chebeya a été,
grâce à son combat militant, une sorte de garde-fou aux dérives
gouvernementales. En tout cas, le fait de l'avoir assassiné à révélé sa
dimension internationale.

Si jamais nous arrivons au pouvoir, nous devrons
honorer nos frères et sœurs ayant sacrifié leur vie pour notre liberté, de la
même façon que nous devrons construire un mémorial pour le génocide congolais et
ériger un monument en mémoire de nos compatriotes violés du simple fait d'être
nés Congolais. En tout cas, personnellement, je m'y engage.

 
D’aucuns font le lien entre cet assassinat et les prochaines
élections qui se profilent à l’horizon. Qu’en
pensez-vous ?

Si l'on étrangle aussi aisément un défenseur des
droits de l'Homme, il y a de fortes chances que l'on égorge sans pitié toute
personne crédible susceptible de menacer, par sa notoriété, le pouvoir actuel.
Faut-il croire que cet assassinat est une sorte de mise en garde à l'encontre de
différents candidats, surtout ceux de la diaspora ? Cela n'est pas
impossible.

La communauté
internationale, qui demande à
juste titre
– avec force et vigueur – une enquête indépendante et transparente, doit
sérieusement penser à la protection des candidats à l'élection présidentielle.
C'est la condition sine qua non pour la cohésion nationale et une paix durable.
Agir de la sorte, c'est favoriser l'émergence d'un Congo meilleur et davantage
éclairé.

 
Croyez-vous à la volonté du gouvernement congolais de faire
la lumière sur cet acte odieux ?

D'une part, la famille de la victime et ses
collaborateurs sont en droit de savoir ce qui s'est réellement passé. D'autre
part, le système d'impunité ne doit plus prévaloir en République Démocratique du
Congo. Notre pays doit cesser d'être cette jungle où règne la loi du plus fort,
ce far west où l'on assassine les gens pour leurs opinions politiques. Notre
pays ne doit plus être une sorte de zone de non-droit où  l'on abat purement et
simplement ceux qui dénoncent les violations des droits fondamentaux et la
mauvaise gestion de la chose publique. Voilà pourquoi nous militons pour que nos
compatriotes aient enfin droit à la Liberté, à l'Égalité, à la Sécurité et à la
Prospérité.

Pour répondre à votre question, j'espère de tout mon
cœur que le gouvernement congolais fera toute la lumière sur l'assassinat de M.
Chebeya et de son chauffeur, M. Fidèle Bazana Edadi. Nous sommes très nombreux à
vouloir la condamnation des auteurs de cet acte inhumain.

 

Union du Congo que vous présidez organise un rassemblement
pour un Etat de droit en République Démocratique du Congo à Paris, le 12 juin
prochain. Quel sera votre message à la communauté
internationale ?

En tant que président d’Union du Congo, mon message  à
l'égard de la communauté internationale concernera surtout la  justice en
République Démocratique du Congo. En effet, je demande  non seulement que la
communauté internationale participe dans la mise en place de la commission
d'enquête indépendante sur l'assassinat de Floribert Chebeya, tant demandée par
les organisations non gouvernementales à travers le monde, mais surtout que des
représentants de la diaspora congolaise fassent partie intégrante de cette
commission d'enquête. Je demande  aussi l'engagement de la communauté
internationale dans la protection des défenseurs des droits de l'Homme et des
journalistes. Enfin, les membres d’Union du Congo et moi- même espérons obtenir
des éclaircissements sur les massacres de la population (Bundu dia Kongo et tant
d'autres), les assassinats non élucidés des journalistes (Frank Ngyke, Serge
Maheshe, Didas Namujimbo, Bap
uwa Mwamba…),
les arrestations arbitraires et les conditions de détention dans les prisons
(notamment le sort des prisonniers politiques).

 

                                     Propos recueillis
par Robert KONGO

© Afrique
Rédaction

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