Qui a compris la portée du discours de Joseph Kabila au Nord-Kivu ? (JP Mbelu)

C’est
fort bien de stigmatiser la raffinerie d’or de l’Ouganda. Mais il y a
des installations rwandaises, notamment une « bourse aux matières
premières », qui mériteraient d’être pareillement citées. Et,
étonnamment, même les rebelles rwandais du FDLR ont disparu de la  liste
des « éléments négatifs » qui ne comportent plus que des rebelles
ougandais, des Mai Mai et, fait nouveau, des milices d’auto-défense
villageoises. Ce dernier reproche équivaut en pratique à faire grief aux
villageois du coin de ne pas se laisser égorger comme des moutons. Les
plaintes incessantes des habitants concernant le CNDP, que ce soit à
propos de son administration civile ou pour les actions de ses soldats
« intégrés » dans les FARDC sont considérées non pas comme matière
négligeable, mais comme inexistantes, et l’existence d’un réseau mafieux
mondial ayant des ramifications jusqu’à Kinshasa est traitée comme s’il
s’agissait de banales affaires de contrebande locale et de règlements
de comptes un peu rudes entre commerçants !  Pour aller aussi loin dans
la volonté de ne pas voir un réseau mafieux, il faut en faire partie ! »
Il est possible que plusieurs d’entre nous n’aient pas lu ce texte ! Il
peut être positivé. Face à la résistance des « milices d’auto-défense
villageoises » à l’endroit de toutes les forces d’occupation de notre
pays, Joseph Kabila avoue que celles-ci ont tenu le coup. Mais faisant
partie du réseau mafieux tenant à mettre le Congo de Lumumba à genou, il
recourt à la recette de la tribu néolibérale contre les forces
populaires qui lui résiste : leur criminalisation. Ce faisant, il
réaffirme à quel camp il appartient : celui des agresseurs ; il est de
la tribu néolibérale écrasant tout sur son passage pour avoir accès aux
matières premières stratégiques de notre pays. Néanmoins, la
criminalisation de la résistance à la tribu néolibérale n’est pas une trouvaille joséphiste. Partout où elle est pratiquée, elle est
un appel à redoubler d’effort pour écraser ceux et celles qui tiennent à
protéger leurs terres. La criminalisation de la résistance aux assauts
de la tribu néolibérale sans frontières sert plusieurs objectifs :
étouffer toute culture de la résistance, dénier la réalité de la mort
que cette tribu sème au travers de ses hommes et femmes liges (du CNDP,
des FDLR et des MaïMaï version Kigali, etc.), désinformer les éventuels
résistants afin qu’ils ne rejoignent pas la lutte, plonger les
fanatiques du discours dominant et les autres faibles d’esprit dans une
ignorance obscurantisante, etc.

 

Il est un peu dommage que malgré cet aveu de la force de la résistance nord-kivutienne, il y ait encore
des compatriotes qui estiment que les Congolais(es), dans leur immense
majorité, sont des imbéciles. Le discours dominant et l’histoire
officielle ont eu tellement de l’emprise sur nos cœurs et nos esprits
que plusieurs d’entre nous ont perdu toute capacité de lire certains
discours entre les lignes. Comment voulons-nous que celui qui prétend
être le chef de l’Etat de tous les Congolais et de toutes les
Congolaises arrive dans l’une des parties de notre pays les plus
meurtries et qu’il s’adresse à nos populations en les culpabilisant sans
qu’il prenne soin d’observer ne fût-ce qu’ une minute de silence pour
nos millions de morts ? Il y a là quelque chose qui ne va pas.

 

De
toutes les façons, il y a des vérités qui prennent du temps avant de
triompher. Les minorités d’acteurs-créateurs ont compris depuis
longtemps que Joseph Kabila participe de la mort de tout un peuple.
Plusieurs compatriotes sont en train de comprendre, de
plus en plus, en quoi consiste le rôle que joue Joseph Kabila. Certains
d’entre eux, pour lui barrer la route, ont organisé une résistance
multiforme. Les modestes victoires de celle-ci ne sont pas sujettes au
temps que la tribu néolibérale dicte. L’essentiel serait que les
différentes forces résistances se reconnaissent et poursuivent leur
lutte commune, en dépit et malgré tout. Les forces de la résistance ont
une grave mission : se réarmer de courage, de connaissance et de
persévérance pour résister. Mais surtout pour construire le pouvoir.
Construire un autre pouvoir au Congo. Dans la rupture et en synergie.

 

J.-P. Mbelu

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