02.04.11 Le Climat Tempéré – Dans une interview à RFI Delly Sesanga définit les voies du changement
A quelques mois des élections présidentielles à un seul tour, les grandes manoeuvres ont commencé dans tous les camps. Delly Sesanga, ancien directeur de cabinet de JP Bemba, ancien ministre du plan, député national pour le compte du MLC, avec lequel il a pris des distances, a créé son propre mouvement d'actions civiques « ENVOL)) qui atout l'air d'un parti.
Il vient de publier chez l'Harmattan un ouvrage intitulé « la voie du changement » il s'est entretenu en milieu de semaine avec Christophe Boibouvier.
Votre livre c'est un peu la potion amère ? Vous dites que le Congo va moins bien qu'il y a 15 ans, c.à.d. sous l'ère de Mobutu; vous n'exagérez pas un petit peu?
Oui, il va moins bien parce que sur la démocratie le pays a considérablement régressé. Il y a moins d'Etat, pas d'armée, pas de justice, pas un semblant d'administration publique. Je crois que le Congo est dirigé sur base de l'émotion pure.
Nous nous versons plus souvent dans une forme d'hystérie par rapport aux décisions publiques dans la conduite des affaires de l'Etat. Nous pensons qu'il faut sortir de l'impasse éthique dans laquelle nous sommes aujourd'hui où l'affairisme, la corruption font le lit de tous les désordres que nous connaissons aujourd'hui.
Cette absence de sens de l'Etat comme vous le dites, ça vient seulement es dirigeants, ça ne vient pas aussi de la population elle-même?
Vous savez, notre pays est gouverné sur base de trois piliers l'ignorance, la corruption et la pauvreté. C'est une tare que nous avons héritée de la colonisation Les Belges souvenez-vous, ils disaient « Pas d'élite, pas d'ennuis ».
Le ministre limogé, des fonctionnaires interpellés, depuis quelques semaines le régime de Joseph Kabila lance une opération « mains propres » à Kinshasa. Qu'est-ce que vous en pensez?
Ecoutez, nous sommes partisans de la lutte acharnée contre la corruption. Cependant, nous avons souvent l'impression que nous nous limitons aux effets d'annonce et que d'autre part on s'attaque le plus souvent aux lampistes. Je pense que mon ami Luzolo, le ministre de la justice, devra se pencher sur les vrais dossiers ; d'ailleurs sur lesquels le Parlement a eu à plancher. Ça serait bien qu'il s'attaque à ce dossier là.
Vous dénoncez la dérive autoritaire du régime, pensez-vous comme certains que Joseph Kabila marche sur les traces de Mobutu?
Je pense que ce régime ne diffère pas de grand-chose par rapport à ce que nous avons connu avec Mobutu : l'antiparlementarisme qui était clairement affiché, la crainte d'avoir une liberté publique épanouie, l'évocation de la démocratie simplement dans l'objective de se maintenir au pouvoir et nous courrons à une nouvelle catastrophe.
Vous ne citez pas dans vos exemples la suppression du second tour des élections pour novembre prochain. Pour vous, ce n'est pas très important ça?
C'est très important. C'est l'une des marques de cette dérive. Le second tour de l'élection présidentielle avait été pensé pour rassembler la nation et pour permettre la diversité, d'opinions congolaises qui s'expriment au premier tour.
Alors que maintenant l'opposition est obligée de s'unir, pensez-vous que Tshisekedi, Bemba et Kamerhe vont pouvoir s'entendre sur une candidature unique?
Je pense que l'opposition a le devoir si elle veut provoquer l'alternance, de pouvoir présenter un candidat commun.
Et qui pourrait être ce rassembleur de l'opposition?
Je pense d'abord qu'il faut écarter l'idée de Kamerhe parce que Kamerhe vient de rejoindre récemment les rangs de l'opposition. Il aurait du reniement, si vous voulez, dans le combat pour le changement que de pouvoir dire l'alternance aujourd'hui aurait la forme d'une dissidence interne à l'AMP.
En novembre prochain Jean-Pierre Bemba risque encore d'être en prison au Pays-Bas. Que doit faire le MLC ? Présenter un autre candidat ou soutenir le candidat Tshisekedi ou un autre?
Quand on est sérieux, on ne présente pas un candidat à l'élection présidentielle à cinq ou six mois.
Donc ça veut dire que le MLC se rallie à l'élection d'un autre opposant ? C'est ça?
Je pense que nous ne devons pas faire l'erreur à laquelle nous avions assistée dans l'opposition en 2006 à travers l'UDPS. Si nous voulons que l'opposition l'emporte, il faut qu'on se mette autour d'un candidat commun. Et à ce jour, quand on regarde maintenant ce qui reste, celui qui a plus un ton ce serait bien entendu Monsieur Tshisekedi. A condition qu'il puisse rassembler l'ensemble de l'opposition autour d'un projet et qu'il puisse admettre le principe d'une gouvernance ensemble, sur les autres responsabilités du pays. Et ça, je pense qu'il y a encore du chemin à faire.
LCT