1568 : NOUVELLES REVELATIONS SUR LA REINE NZINGA DANS LE MANUSCRIT EGARE DE CAVAZZI

C’est, en fait, la version française du « hand-written », initial du
prêtre italien, date de 1568, qui servira de base a la publication, censurée, de
la fameuse « Istorica Descrizione de’ tre regni Congo, Matamba e
Angola… », éditée, a Milan, en 1690. Ce document a été retrouve, à
Modène, en Italie, il y a quelques années, c’est à dire, pratiquement, trois
siècles après.

 

Scelle en 415 pages, sous la préface de l’ érudit couple d’ historiens
nord- américains, constitué de Linda Heywood et John K. Thornton, l’ouvrage
s’articule en une quinzaine d’axes dans laquelle est relatée, notamment, une
partie de la vie de la Regina et l’organisation de la Mission de
Matamba.

L’on y retrouve les précieuses illustrations du texte, original,
superbement, restituées du  missionnaire, le témoignage du voyage
en Angola de Barthelemy de Massiac, les controversés chapitres VII et VIII, de
cette narration, première, intitulée, « Missione evangelica al regno del
Congo
 » et la fameuse lettre de la Reine au Gouverneur de la Colonie d’
Angola, Dom Luis Martins de Sousa Chicorro, prés d’une dizaine de cartes, de
bonne qualité, de l’ancienne configuration politique du Septentrion angolais et
une rétrospective chronologique très utile, des événements dans la
region.

En
effet, celle-ci va de 1482, année d’arrivée des deux caravelles de Diego Cao,
devant l’embouchure du « Rio Poderoso » a l’inattendue découverte par
Giuseppe Pistoni, en 1969, dans la bibliothèque de la famille Araldi,
du « manoscritti » de Montecculo.

Enfin, l’on notera, l’indispensable chapitre sur les notes
explicatives, prés de 350, qui permet de comprendre l’évolution des événements,
la signification des anthroponymes, des titres politiques, militaires et des
toponymes, ainsi que le sens de certains faits et réalités
anthropologiques.

L’on soulignera que le manuscrit de Modene comportait une série
d’aquarelles coloriées, croquis bien élémentaires faits de la propre main du
confesseur de la Regina, dont certaines n’ont pas été transposées dans
les versions imprimées du livre. L’édition Chandeigne les a reproduites, toutes,
 – une trentaine.

La
lecture de la version autographe du missionnaire apostolique permet de
comprendre les réserves émises par la Propaganda Fide sur la publication
de sa relation et le retard pris pour sa sortie. L’on autorisera, finalement,
son impression, sous condition de modifier ou de supprimer certains passages.

MANUSCRIT D’ARALDI

En
effet, de nombreux passages du capucin italien étaient, visiblement, sujets à
caution, résultant d’une appréciation religieuse, dichotomique, obscurantiste,
ou franchement, primitive. Il voyait la main salvatrice de Dieu et celle,
destructrice du Diable, partout.

Le
natif de Montecuccolo traina avec lui, toute sa vie, un jugement de médiocrité
intellectuelle. Apres sa formation religieuse de base, il ne fut
pas autoriser à continuer… Il fut ordonné prêtre, en 1649, sans droit de
prêcher…Très embarrassé par le profil de cet homme atypique, la hiérarchie de
l’Eglise romaine ne trouva d’autre solution que de l’envoyer, naturellement, en
Afrique, et plus précisément vers la Colonie d’ Angola.

C’est cet homme, d’une crédulité étonnante, que la Regina
Ginga, comme elle signait, elle-même, et non Njinga, utilisera dans la
dimension psychologique de sa longue résistance contre la cancéreuse colonie
portugaise, voisine. Par ailleurs, son mépris, avéré, des noirs influencera,
nettement, ses récits.

Dans le manuscrit d’Araldi, de plusieurs détails sur l’éclosion de
nombreux miracles, actes d’inhumanité et de perversion, et même une description
physique de Ginga – Ginga, ne furent insérés dans la
Descrizione.

Cavazzi sera l’un des témoins qui transmettra aux occupants portugais,
la dimension, terriblement, diabolique, tyrannique, de la fille de Mbandi,
créant l’épouvante à Sao Paulo de Loanda et en Europe occidentale.

S’il avait eu, l’opportunité et les moyens, la Double – Reine, devait
subir le feu de l’Inquisition.

En
réalité, le capucin assombrit, profondément, la personnalité de la
Kiluanje de Santa Maria de Matamba afin de considérer comme un vrai
miracle, le baptême de la redoutable Jaga, a Luanda, 1622.

L’auteur de la Relation historique de l’Ethiopie occidentale…assombrit
le cadre social de Matamba, influencé par les répugnants Imbangala afin
d’inciter à occuper et a évangéliser, le plus rapidement possible,
 ce pays de ténèbres.

La
hiérarchie de l’Eglise, a Rome, avait raison d’émettre de réserves
sur les témoignages, à la limite, paranoïaques, de leur missionnaire dans les trois Royaumes. 

En
effet, l’autre Père capucin italien, Antonio da Gaeta, premier confesseur de la
Ngola, contemporain de Cavazzi à la cour de Santa Maria, est, nettement,
a contre-pied de son collègue. Il comprend l’alliance de Singa avec les infâmes
Giagues, et la trouve, absolument, conjoncturelle.

Pour lui, la Dona Ana de Sousa est «  une femme fondamentalement
intelligente, spirituelle,
charmante et les pieds sur terre ». Le
franciscain la décrit, comme, presque, une sainte. 

TIGRESSE HYDROPIQUE

L’
on notera que le reviseur de l’Istorica Descrizione, Fortunato de Alemandini,
avait propose a Fra Giovanni, l’ insertion de données venant, justement, de ce
capucin napolitain, qui séjournera, durant trois ans, de 1655 a 1658, a la cour
de la souveraine. Il y était, donc, avant Cavazzi.

Les témoignages des deux prédicateurs de Saint-François sont, donc,
manifestement, contradictoires.

Cela résulte de la différence de personnalité des deux missionnaires et
du contexte d’action politique et sociale de la Kiluanje, dans le Matamba
« jagaise ». En réalité, le deuxième royaume de la Warrior Queen est un
immense kilombo, un camp de guerre, avec sa discipline de fer. Et, la, Xinga,
qui est bien une femme doit s’imposer avec, vraisemblablement, des
excès…

L’on ne peut pas ne pas tenir compte du témoignage, parfaitement,
histor, du missionnaire apostolique. Mais, ses restitutions semblent
découler d’une stratégie, évidente, de la Reine, de mettre a contribution son
précieux témoin…On lui présente, a la moindre opportunité, sans qu’il ne puisse
avoir la possibilité de vérifier, de l’huile d’extraction humaine…

La
soumission a des scènes, très dures, sera éprouvante pour Cavazzi. Son
traumatisme se reflétera dans son manuscrit, original ; texte répétitif sur les
atrocités et la présence du Diable dans ces contrées…

Cavazzi qualifie, finalement, la Nzinga van Matamba, ni plus, ni
moins, de tigresse hydropique.

La
publication de la « Njinga, Reine d’ Angola, La Relation d’Antonio Cavazzi de
Montecuccolo 1687) », dans une édition non amputée, permet de mieux apprécier,
avec plus d’elements, à sa juste mesure, la personnalité de  « A Queen saved
her People
 ».

En
effet, l’ID a servi d’une des sources qui a propagé la sulfureuse réputation de
la fille de Kengela-ka –Nkombe, mais aussi, d’une des principales références
pour des analyses sur l’ évolution historique et les réalités anthropologiques
des sociétés de l’ Afrique centrale occidentale, au XVII eme siecle.

En
effet, elle avait été rééditée, juste trois ans après la parution de la première
édition, adaptée en allemand et en français, au début du XVIII eme siècle et en
portugais, au XX eme siecle, en 1965, plus precisement.

Œuvre d’une grande rigueur scientifique, a l’image de son presque clone,
romancé, « Zingha, Reine d’Angola. Histoire africaine », de Jean
Louis Castilhon, publié, en 1770, a Paris, et réédité, remarquablement, il y a
 quelques temps, par les brillants médiévistes français Patrick
Graille et Laurent Quillerie, ce livre doit, absolument, servir d’ une des bases
pour la prise d’initiatives de déclinaisons scientifiques , pédagogiques et
artistiques sur la résistance africaine contre l’ expansion de l’
Europe mercantiliste et esclavagiste sur le continent noir. 

Par

Simao SOUINDOULA

Historien. Expert UNESCO

C.P. 2313 Luanda (Angola)

Tel. : + 244 929 79 32 77

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