08.03.12 Le Potentiel – Cinq questions à Paul Augustin Madimba (*)

1. « Autonomisation de la femme rurale, pilier pour la lutte contre la faim et la pauvreté ». Comment commentez-vous ce thème choisi pour la célébration du mois de mars dédié à la femme congolaise?

Nous avons ici au Congo, la spécialité de trouver des termes, des thèmes pour expliquer un événement. C’est le cas de ce qui est retenu comme thème national pour la célébration de la journée de la femme. Autonomisation de la femme rurale, pilier de la lutte contre la faim et la pauvreté, c’est vrai. Mais concrètement, faut-il dire, qu’est-ce qui est fait pour rendre effective cette autonomisation. Quels sont les projets concrets en faveur de la femme rurale pour matérialiser cette volonté exprimée? Quand on s’arrête aux conférences, aux colloques, c’est la femme intellectuelle, la femme cadre qui va se mettre à réfléchir. Et déjà, si dans ces genres de réflexions la femme rurale n’a pas sa place, qu’attendrait-elle de plus ? Pour qu’elle parvienne à vaincre la pauvreté et à mener un train de vie acceptable, il y a un préalable majeur qu’il faut prendre en compte, et c’est au-delà des discours, des conférences et autres.

2. Quel est donc ce préalable ?

La femme rurale au Congo et en Afrique accouche encore dans des conditions difficiles. Elle ne trouve pas un médecin à sa portée pour lui assurer une éducation sur les naissances désirables. Elle est analphabète. Par conséquent, elle reste vouée à la dépendance pour sa survie. Pourtant, on ne devient autonome que par l’éducation. Quand cette femme rurale demeure analphabète, elle ne pourra jamais devenir autonome dans sa vie. C’est cela le préalable majeur qu’il faut prendre en considération.

3. Quel est, d’après-vous, le véritable sens de cette journée?

Depuis qu’on a commencé à célébrer avec faste cette journée, sa grandeur ne se résume malheureusement qu’au défilé, aux ports de pagnes et retrouvailles dans les débits de boissons. Qu’on nous dise l’impact positif dans la société de cette célébration ou encore, l’impact des initiatives du ministère qui s’occupe des questions des femmes (le genre) pour relever le niveau de la femme rurale. La femme rurale ne va pas cesser de l’être aussi longtemps qu’il y aura des milieux ruraux. L’important serait de trouver des initiatives pour l’aider. Sinon, ce serait une campagne pour les intellectuelles féminines qui, elles, tirent profit. Pour preuve, quand on parle de 30% de la participation des femmes dans les institutions de la République, je ne vois pas la place de la femme rurale. C’est plutôt la femme intellectuelle qui se bat et pour elle-même.

4. L’Eglise, peut-elle aussi œuvrer pour l’autonomisation de la femme ?

C’est l’église qui a été la première, dans notre pays, à assurer une formation équitable, à la femme tout comme à l’homme. Remarquez que partout où l’église créait une école pour garçon, elle en créait au moins une pour les filles. Les politiques aujourd’hui pensent mieux faire. C’est bien, c’est d’ailleurs dans le cadre de leurs prérogatives. Ils oublient, cependant, cet aspect des choses. Je crois que l’église doit toujours être prise en compte dans la démarche de l’autonomisation de la femme rurale, dans la mesure où le premier contact avec cette femme, c’est d’abord l’église qui l’effectue.

5. Comment l’Eglise, conçoit-elle l’émancipation de la femme ?

Nous ne devons pas perdre de vue que Dieu, Lui-même, a été le premier à honorer la femme. Lui-même, le Créateur avait ainsi déjà pensé à faire jouer à la femme un rôle important en prenant une d’elle comme la mère de notre Seigneur Jésus-Christ. C’était déjà là, une élévation de la femme. Marie mère de Jésus n’avait pas été choisie parmi les femmes de grande classe. C’était plutôt une paysanne humble. J’ai toujours dit à nos fidèles mamans catholiques que le modèle parfait de la femme émancipée qu’elles doivent suivre, c’est Marie, mère de Jésus Christ. Elle a su très bien jouer son rôle jusqu’à remplir la mission lui confiée par Dieu, celle de devenir la mère du sauveur de l’humanité. Elle est ce jour, la reine de tout le temps. Il ne faut donc pas croire, que par rapport au 8 mars, ou au mois de mars, la femme doit oublier son rôle lui attribué par Dieu depuis la création et faire celui de l’homme. Si la femme s’évertue à jouer le rôle qui revient à l’homme, ce serait un monde planté, d’autant plus que deux personnes feront un même travail, alors que les deux ont deux travaux différents à exécuter. L’homme et la femme sont partenaires au regard de la parole de Dieu. Les deux doivent travailler et dominer le monde, et en cela chacun accomplissant précisément sa tâche. Rappelez-vous, Marie a joué son rôle de maternité pour garder l’enfant dans son sein, et Joseph devait à son tour jouer le sien, celui de père et protecteur de l’enfant et de sa mère. L’ordre des choses ne peut donc pas être changé, sinon le monde cesse d’être naturel.

PROPOS RECUEILLIS PAR PITSHOU MULUMBA (*) Curé de la paroisse Notre-Dame de Grâce.

© Le Potentiel 2005

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