25.03.12 Congoindependant – Questions directes à Thierry Mbuze
«Plusieurs prévenus attendent depuis 7 à 9 ans dêtre présenté devant un magistrat-instructeur»
Comment allez-vous?
Je
me porte bien. Sauf que jai perdu un être cher! Il sagit dun des mes
oncles paternels : Tshombe Agwabi. Il est décédé alors que je me
trouvais en détention à Makala. Je vis sa disparition comme un vrai
cauchemar. Je voudrais profiter de loccasion qui mest offert pour
mincliner devant sa mémoire.
Vous venez de passer une année de détention à Makala. De quoi avez-vous été accusé?
Dans
le cadre des «Cinq chantiers», la province de lEquateur, à linstar
dautres Régions, avait reçu un lot de matériels. Cest le ministère
dont javais la charge qui devait assurer la réception auprès dA.M.I
Congo à Kinshasa. En fait le rôle de mon ministère se limitait à trouver
un armateur et à obtenir les moyens financiers pour le transport – de
Kinshasa à Mbandaka -auprès du ministère des Finances et Budget. Javais
confié cette mission à un de mes collaborateurs. A ma grande surprise,
japprendrai que le gouverneur a saisi le ministre national en charge
des Infrastructures et travaux publics, linformant que jaurai détourné
à mon profit une partie de ces outils. Ce qui était parfaitement faux !
Quelques temps après, le gouverneur sest rétracté en retirant sa
«plainte» arguant que la faute incombait plutôt à un membre de mon
cabinet. Sur ces entrefaites, Jean-Claude Baende va délivrer un ordre de
mission identique au mien à un de ses conseillers. Un sujet libanais.
Arrivé aux entrepôts dAMI-Congo, ce dernier constatera que quelques
«pièces» manquaient à linventaire.
Une copie de la «dénonciation» du gouverneur Baende atterri malgré tout à lOffice du procureur général de la République…
Un
matin, alors que je me trouvais à Kinshasa, je reçois un appel
téléphonique dun inspecteur judiciaire. «Nous sommes en possession
dune plainte déposée contre vous par le gouverneur de la province de
lEquateur, me dit-il. Nous voulons entendre votre version des faits».
Rendez-vous est pris le lundi 7 mars 2011 à lInspection générale de la
police judiciaire (IGPJ), mieux connue sous lappellation de «Casier
judiciaire». Après audition, un inspecteur me dit que lInspecteur
général (IG) souhaitait me recevoir. Je navais aucun rendez-vous avec
celui-ci. Après trois heures dattente, jai quitté le lieu en
communiquant au préposé à lAccueil à lIGPJ toutes mes coordonnées. Mon
départ a été interprété comme une "fuite". Je recevrai un appel
téléphonique de mon avocat que je venais de quitter minformant que
"jétais recherché par la police judiciaire". Le même jour vers 18
heures, linspecteur qui mavait verbalisé ma contacté au téléphone
pour que je revienne mentretenir avec lIG. Nayant pas de véhicule,
cest un véhicule de lIGPJ qui viendra me chercher à ladresse que
jindiquerai. Jai vu débouler plusieurs inspecteurs et queqlues
policiers débouler chez moi. Jai tout de suite compris ce qui
mattendait.
Vous rentrez donc au «Casier judiciaire»…
Jai
été «gardé à vue» durant 48 heures en ce lieu. Ce nest que le mercredi
9 mars que jai été présenté devant un magistrat-instructeur qui ma
entendu. Les questions portaient sur la mission qui ma été confiée par
le gouverneur de lEquateur et la délégation de pouvoir que javais
donné à un des mes collaborateurs. Après la comparution, le magistrat a
estimé quil devait me placer en «détention préventive» à la prison
centrale de Makala. Au motif, selon lui, que je navais pas de domicile
connu au Congo. Le risque était grand, disait-il, pour que je puisse me
soustraire à la justice. Comment peut-on imaginer que le député
provincial que jai été avant de devenir ministre provincial soit un
«sans domicile fixe»?
Vous êtes donc transféré à Makala…
Oui!
Je ne vous cache pas que jétais meurtri en franchissant la porte de la
prison. A mon entendement, ma détention nétait nullement justifiée.
Dune part, parce que le plaignant avait retiré sa plainte. Dautre
part, aucun fait infractionnel na été mis à ma charge. Après les
présentations dusage au directeur de la prison, le prévenu est dirigé
vers le «Pavillon» de son «rang». Cest ce qui a été fait dans mon cas.
Tout dépend de votre «rang social» ou du «volume» de votre portefeuille.
Il y a des «Pavillons» beaucoup plus salubres, réservés aux «VIP».
Pouvez-vous décrire une de vos journées-type à Makala?
Il
ny a pas dheure de réveil. Sauf quau cours de la première semaine,
le prévenu na pas le droit de se promener dans la cours. Il reste donc
cloîtré 24 heures sur 24 dans le pavillon. La prison ne sert pas de
petit-déjeuner. Durant ma détention, jai pris en location un poste
téléviseur. Depuis le mois de juin dernier, les visites ont lieu le
mercredi, vendredi et dimanche de 10h à 15h. Les visiteurs (avocat ou
membres de la famille) sont reçus au parloir. Je tiens à signaler que
des religieux gèrent une bibliothèque dans la prison. Il est donc
possible de lire quelques bouquins.
Est-ce la prison qui fait louer les postes téléviseurs?
Non!
Cest un «vieux détenu» qui loue ses TV à dautres pensionnaires. Il en
possède plusieurs. Jai été surpris de constater que les journaux
réputés favorables à lopposition étaient interdits à Makala. En
revanche, la télévision est autorisée.
Quels sont les dysfonctionnements que vous avez eu à constatér durant votre «séjour» à Makala ?
Jai
eu à constater essentiellement que cette prison héberge plusieurs
prévenus qui nont jamais été présentés à un magistrat-instructeur.
Certains dentre eux sont embastignés depuis 2003 ou 2005 sans avoir
fait lobjet dune inculpation. Ils ignorent donc les faits qui leur
sont reprochés. Il y a plus ou moins 6.000 prisonniers à Makala. Au fil
des conversations, jai appris que certains sont accusés en termes très
vagues de «participation à un mouvement insurrectionnel». Plusieurs
militaires originaires de la province de lEquateur se trouvent dans ce
cas. Il y a également des natifs dautres provinces.
Les prisonniers sont-ils suivis au plan médical ?
Il
y a des sœurs religieuses qui leur prodiguent des soins. Il faut bien
reconnaître que seuls les prévenus nantis ou ceux qui ont de la famille à
Kinshasa qui jouissent dune situation meilleure.
Quen est-il de la nourriture ?
La
nourriture servie à Makala laisse à désirer. Cest un euphémisme. Le
"plat du jour" est toujours le même. Ce plat sappelle le «vunguré». Je
nai aucune idée de lorigine de ce mot. Ce plat est composé de haricots
mélangés avec du maïs. Pour le reste, chacun pour soi, Dieu pour tous.
Quelques «privilégiés» sont approvisionnés par des parents ou amis.
Comment reconnaît-on un «privilégié» dans la prison de Makala ?
Comme je lai dit précédemment de pavillon. Le «pavillon 8» est généralement réservé aux «personnalités»…
Voulez-vous dire que les inégalités sociales existent même dans le lieu carcéral?
Tout est question de «moyens». Les "délinquants de grand chemin" peuvent également accéder au pavillon réservé aux VIP.
Avez-vous été jugé ?
Effectivement.
Il y a eu trois audiences au niveau de la Cour suprême de justice:
laudience pré-juridictionnelle, le réquisitoire et la plaidoirie. Ces
trois séquences ont inutilement tiré en longueur. Lors de la seconde
audience, japprendrai que le gouverneur Baende a écrit en date du 21
juin 20111 aux autorités judiciaires pour se rétracter. En clair, il
retirait sa plainte. Jai donc été disculpé par le plaignant. Et comme
lEtat congolais na pas lhabitude dindemniser les justiciables lésés,
la Cour ma infligé une peine égale aux douze mois que je venais de
passer à Makala…
De nombreux justiciables dénoncent la
corruption qui gangrènerait le monde judiciaire congolais. Avez-vous été
obligé de soudoyer un magistrat déboursé pour recouvrer la liberté ?
(Rires).
Cest une vérité de Lapalisse que de clamer que la justice congolaise
est souillée par la corruption à tous les niveaux. Lofficier de police
judiciaire (Opj) qui vous arrête nhésite pas à vous faire comprendre de
manière subliminale que vous devez le "motiver" pour pouvoir retrouver
la liberté. Malheur à celui qui rechignera à mettre la main dans la
poche. Il sera renvoyé devant un magistrat. Aujourdhui, la justice
congolaise est devenue plus une histoire de sous quun cadre pour
résoudre des différends par lapplication stricte de la loi. Jai été
surpris de ne pas trouver des magistrats parmi les pensionnaires de la
prison de Makala. Si lopération «Tolérance zéro» était réellement
appliquée, plusieurs juges et autres procureurs devraient remplir les
prisons. Le moins que je puis dire est que des «grands délinquants à col
blanc» courent les rues pendant que des «petits kuluna» sont provés de
liberté.
Combien avez-vous payé pour retrouver la liberté ?
(Rires).
Sil
vous était donné de rencontrer le ministre congolais de la Justice que
lui diriez-vous après lexpérience que vous venez de vivre?
Je
lui ferai comprendre la nécessité dinstituer une sorte de «juge
dinstruction» au Congo. En Belgique et en France, cest un magistrat
indépendant qui joue ce rôle au niveau du parquet. Le rôle de ce
magistrat se limite à instruire à charge et à décharge. Le procès sera
conduit par dautres magistrats. Au Congo, le magistrat qui instruit une
affaire est souvent le même qui va conduire le procès. Le risque est
grand que ce magistrat devienne juge et partie.
Avez-vous croisé à Makala quelques «prisonniers célèbres»?
Bien sûr !
Lesquels ?
Jai
eu des contacts quasiment chaque jour avec le colonel Eddy Kapend,
lancien aide de camp du président LD Kabila. Nous avons des liens de
parenté par alliance. Jai eu des entreteins avec lancien patron de
lANR, Georges Leta Mangasa. Il en est de même du Pasteur Fernando
Kuthino. Celui-ci pourrait retrouver la liberté lannée prochaine,
ma-t-on dit.
Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant 2003-2012
25.03.12 Congoindependant – Questions directes à Thierry Mbuze
«Plusieurs prévenus attendent depuis 7 à 9 ans dêtre présenté devant un magistrat-instructeur»
Comment allez-vous?
Je
me porte bien. Sauf que jai perdu un être cher! Il sagit dun des mes
oncles paternels : Tshombe Agwabi. Il est décédé alors que je me
trouvais en détention à Makala. Je vis sa disparition comme un vrai
cauchemar. Je voudrais profiter de loccasion qui mest offert pour
mincliner devant sa mémoire.
Vous venez de passer une année de détention à Makala. De quoi avez-vous été accusé?
Dans
le cadre des «Cinq chantiers», la province de lEquateur, à linstar
dautres Régions, avait reçu un lot de matériels. Cest le ministère
dont javais la charge qui devait assurer la réception auprès dA.M.I
Congo à Kinshasa. En fait le rôle de mon ministère se limitait à trouver
un armateur et à obtenir les moyens financiers pour le transport – de
Kinshasa à Mbandaka -auprès du ministère des Finances et Budget. Javais
confié cette mission à un de mes collaborateurs. A ma grande surprise,
japprendrai que le gouverneur a saisi le ministre national en charge
des Infrastructures et travaux publics, linformant que jaurai détourné
à mon profit une partie de ces outils. Ce qui était parfaitement faux !
Quelques temps après, le gouverneur sest rétracté en retirant sa
«plainte» arguant que la faute incombait plutôt à un membre de mon
cabinet. Sur ces entrefaites, Jean-Claude Baende va délivrer un ordre de
mission identique au mien à un de ses conseillers. Un sujet libanais.
Arrivé aux entrepôts dAMI-Congo, ce dernier constatera que quelques
«pièces» manquaient à linventaire.
Une copie de la «dénonciation» du gouverneur Baende atterri malgré tout à lOffice du procureur général de la République…
Un
matin, alors que je me trouvais à Kinshasa, je reçois un appel
téléphonique dun inspecteur judiciaire. «Nous sommes en possession
dune plainte déposée contre vous par le gouverneur de la province de
lEquateur, me dit-il. Nous voulons entendre votre version des faits».
Rendez-vous est pris le lundi 7 mars 2011 à lInspection générale de la
police judiciaire (IGPJ), mieux connue sous lappellation de «Casier
judiciaire». Après audition, un inspecteur me dit que lInspecteur
général (IG) souhaitait me recevoir. Je navais aucun rendez-vous avec
celui-ci. Après trois heures dattente, jai quitté le lieu en
communiquant au préposé à lAccueil à lIGPJ toutes mes coordonnées. Mon
départ a été interprété comme une "fuite". Je recevrai un appel
téléphonique de mon avocat que je venais de quitter minformant que
"jétais recherché par la police judiciaire". Le même jour vers 18
heures, linspecteur qui mavait verbalisé ma contacté au téléphone
pour que je revienne mentretenir avec lIG. Nayant pas de véhicule,
cest un véhicule de lIGPJ qui viendra me chercher à ladresse que
jindiquerai. Jai vu débouler plusieurs inspecteurs et queqlues
policiers débouler chez moi. Jai tout de suite compris ce qui
mattendait.
Vous rentrez donc au «Casier judiciaire»…
Jai
été «gardé à vue» durant 48 heures en ce lieu. Ce nest que le mercredi
9 mars que jai été présenté devant un magistrat-instructeur qui ma
entendu. Les questions portaient sur la mission qui ma été confiée par
le gouverneur de lEquateur et la délégation de pouvoir que javais
donné à un des mes collaborateurs. Après la comparution, le magistrat a
estimé quil devait me placer en «détention préventive» à la prison
centrale de Makala. Au motif, selon lui, que je navais pas de domicile
connu au Congo. Le risque était grand, disait-il, pour que je puisse me
soustraire à la justice. Comment peut-on imaginer que le député
provincial que jai été avant de devenir ministre provincial soit un
«sans domicile fixe»?
Vous êtes donc transféré à Makala…
Oui!
Je ne vous cache pas que jétais meurtri en franchissant la porte de la
prison. A mon entendement, ma détention nétait nullement justifiée.
Dune part, parce que le plaignant avait retiré sa plainte. Dautre
part, aucun fait infractionnel na été mis à ma charge. Après les
présentations dusage au directeur de la prison, le prévenu est dirigé
vers le «Pavillon» de son «rang». Cest ce qui a été fait dans mon cas.
Tout dépend de votre «rang social» ou du «volume» de votre portefeuille.
Il y a des «Pavillons» beaucoup plus salubres, réservés aux «VIP».
Pouvez-vous décrire une de vos journées-type à Makala?
Il
ny a pas dheure de réveil. Sauf quau cours de la première semaine,
le prévenu na pas le droit de se promener dans la cours. Il reste donc
cloîtré 24 heures sur 24 dans le pavillon. La prison ne sert pas de
petit-déjeuner. Durant ma détention, jai pris en location un poste
téléviseur. Depuis le mois de juin dernier, les visites ont lieu le
mercredi, vendredi et dimanche de 10h à 15h. Les visiteurs (avocat ou
membres de la famille) sont reçus au parloir. Je tiens à signaler que
des religieux gèrent une bibliothèque dans la prison. Il est donc
possible de lire quelques bouquins.
Est-ce la prison qui fait louer les postes téléviseurs?
Non!
Cest un «vieux détenu» qui loue ses TV à dautres pensionnaires. Il en
possède plusieurs. Jai été surpris de constater que les journaux
réputés favorables à lopposition étaient interdits à Makala. En
revanche, la télévision est autorisée.
Quels sont les dysfonctionnements que vous avez eu à constatér durant votre «séjour» à Makala ?
Jai
eu à constater essentiellement que cette prison héberge plusieurs
prévenus qui nont jamais été présentés à un magistrat-instructeur.
Certains dentre eux sont embastignés depuis 2003 ou 2005 sans avoir
fait lobjet dune inculpation. Ils ignorent donc les faits qui leur
sont reprochés. Il y a plus ou moins 6.000 prisonniers à Makala. Au fil
des conversations, jai appris que certains sont accusés en termes très
vagues de «participation à un mouvement insurrectionnel». Plusieurs
militaires originaires de la province de lEquateur se trouvent dans ce
cas. Il y a également des natifs dautres provinces.
Les prisonniers sont-ils suivis au plan médical ?
Il
y a des sœurs religieuses qui leur prodiguent des soins. Il faut bien
reconnaître que seuls les prévenus nantis ou ceux qui ont de la famille à
Kinshasa qui jouissent dune situation meilleure.
Quen est-il de la nourriture ?
La
nourriture servie à Makala laisse à désirer. Cest un euphémisme. Le
"plat du jour" est toujours le même. Ce plat sappelle le «vunguré». Je
nai aucune idée de lorigine de ce mot. Ce plat est composé de haricots
mélangés avec du maïs. Pour le reste, chacun pour soi, Dieu pour tous.
Quelques «privilégiés» sont approvisionnés par des parents ou amis.
Comment reconnaît-on un «privilégié» dans la prison de Makala ?
Comme je lai dit précédemment de pavillon. Le «pavillon 8» est généralement réservé aux «personnalités»…
Voulez-vous dire que les inégalités sociales existent même dans le lieu carcéral?
Tout est question de «moyens». Les "délinquants de grand chemin" peuvent également accéder au pavillon réservé aux VIP.
Avez-vous été jugé ?
Effectivement.
Il y a eu trois audiences au niveau de la Cour suprême de justice:
laudience pré-juridictionnelle, le réquisitoire et la plaidoirie. Ces
trois séquences ont inutilement tiré en longueur. Lors de la seconde
audience, japprendrai que le gouverneur Baende a écrit en date du 21
juin 20111 aux autorités judiciaires pour se rétracter. En clair, il
retirait sa plainte. Jai donc été disculpé par le plaignant. Et comme
lEtat congolais na pas lhabitude dindemniser les justiciables lésés,
la Cour ma infligé une peine égale aux douze mois que je venais de
passer à Makala…
De nombreux justiciables dénoncent la
corruption qui gangrènerait le monde judiciaire congolais. Avez-vous été
obligé de soudoyer un magistrat déboursé pour recouvrer la liberté ?
(Rires).
Cest une vérité de Lapalisse que de clamer que la justice congolaise
est souillée par la corruption à tous les niveaux. Lofficier de police
judiciaire (Opj) qui vous arrête nhésite pas à vous faire comprendre de
manière subliminale que vous devez le "motiver" pour pouvoir retrouver
la liberté. Malheur à celui qui rechignera à mettre la main dans la
poche. Il sera renvoyé devant un magistrat. Aujourdhui, la justice
congolaise est devenue plus une histoire de sous quun cadre pour
résoudre des différends par lapplication stricte de la loi. Jai été
surpris de ne pas trouver des magistrats parmi les pensionnaires de la
prison de Makala. Si lopération «Tolérance zéro» était réellement
appliquée, plusieurs juges et autres procureurs devraient remplir les
prisons. Le moins que je puis dire est que des «grands délinquants à col
blanc» courent les rues pendant que des «petits kuluna» sont provés de
liberté.
Combien avez-vous payé pour retrouver la liberté ?
(Rires).
Sil
vous était donné de rencontrer le ministre congolais de la Justice que
lui diriez-vous après lexpérience que vous venez de vivre?
Je
lui ferai comprendre la nécessité dinstituer une sorte de «juge
dinstruction» au Congo. En Belgique et en France, cest un magistrat
indépendant qui joue ce rôle au niveau du parquet. Le rôle de ce
magistrat se limite à instruire à charge et à décharge. Le procès sera
conduit par dautres magistrats. Au Congo, le magistrat qui instruit une
affaire est souvent le même qui va conduire le procès. Le risque est
grand que ce magistrat devienne juge et partie.
Avez-vous croisé à Makala quelques «prisonniers célèbres»?
Bien sûr !
Lesquels ?
Jai
eu des contacts quasiment chaque jour avec le colonel Eddy Kapend,
lancien aide de camp du président LD Kabila. Nous avons des liens de
parenté par alliance. Jai eu des entreteins avec lancien patron de
lANR, Georges Leta Mangasa. Il en est de même du Pasteur Fernando
Kuthino. Celui-ci pourrait retrouver la liberté lannée prochaine,
ma-t-on dit.
Propos recueillis par Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant 2003-2012
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