04.04.12 Le Potentiel – Baisse du taux dintérêt directeur de la BCC : la voie de la rationalité
La Banque centrale du Congo (BCC) semble avoir pris en compte le point de vue exprimé il y a quelques jours par le ministre des Finances, Matata Ponyo Mapom, lors de sa dernière apparition devant la presse. En effet, faisant le point de la situation économique, financière et monétaire en janvier et février 2012, Matata Ponyo Mapom sest montré réticent face au taux dintérêt nominal de 20% appliqué par la Banque centrale du Congo dans la souscription du Billet de trésorerie, instrument de régulation de la liquidité émis par linstitut démission.
Sans remettre en cause lindépendance de la Banque centrale du Congo dans la mise en œuvre de la politique monétaire, le ministre des Finances avait estimé quil serait bon pour linstitut démission de ramener ce taux à la baisse au regard de la stabilité du cadre macroéconomique. Se référant aux orientations des experts de son ministère, Matata Ponyo pensait quun taux dintérêt directeur proche de 10% serait à la fois réaliste et compatible avec la situation actuelle de léconomie nationale.
Selon lui, le taux de 20%, appliqué jusque-là par la Banque centrale, ne pouvait se justifier que dans un contexte dinflation. Ce qui, pensait-il, nétait plus le cas pour la RDC qui connaît depuis des mois une stabilité sans pareil de son cadre macroéconomique.
CHOIX DE LA RAISON
Décidément, la Banque centrale du Congo semble avoir pris en compte la thèse défendue par le ministère des Finances. Pour preuve, lors de la dernière réunion du Comité de politique monétaire tenu le vendredi 30 mars 2012 à son siège de Gombe, linstitut démission a décidé de revoir à la baisse son taux directeur. Ce qui, du coup, devait agir sur le taux dintérêt nominal applicable sur le BTR. Le taux directeur de la BCC est donc passé de 20% à 17%. Quant au coefficient de la réserve obligatoire, il est reste inchangé, soit 7% comme auparavant.
Dans le communiqué diffusé à lissue de cette réunion du CPM, la BCC, comme lavait prédit le ministère des Finances, motive sa décision au regard de la consolidation de la stabilité sur tous les marchés. A travers cette baisse du taux directeur, indiquait dailleurs le communiqué, le CPM a voulu donner un signal à léconomie, en procédant à lassouplissement de la politique monétaire.
De toute façon, il ne pouvait pas en être autrement. Car, sur le marché des biens et services, la BCC a fait part dune décélération du rythme hebdomadaire des prix, sétablissant à 0,03% contre 0,04% une semaine auparavant. En glissement annuel, le taux dinflation se situe à 14,02%, revenant de 16,59% à fin février. Ainsi, le cumul dinflation à fin mars atteint 4,61% contre un objectif annuel de 9,9%. En même temps, la BCC rendait compte de la poursuite de la stabilité sur différents segments du marché des changes.
En effet, les cours indicatif et parallèle se sont appréciés de 0,1% dune semaine à lautre, sétablissant respectivement à 923,27 Fc et 930,67 Fc le dollar américain au 28 mars.
En ce qui concerne le marché monétaire, la séance dadjudication des BTR du 28 mars sest traduite, selon la BCC, par une injection globale de 12,7 milliards Fc contre 115,0 milliards à fin décembre. Sagissant des taux dintérêt, la marge de positivité du taux directeur sest améliorée suite au recul de linflation en glissement annuel, se fixant à 6,0 points contre 5,4 points une semaine plus tôt. Le taux moyen pondéré des BTR, quant à lui, sa marge samenuise suite au recul de son niveau nominal, indiquait enfin le communiqué.
POSSIBLE DEDUCTION
La baisse du taux dintérêt directeur de la Banque centrale du Congo est la preuve que le spectre de linflation sest éloigné de léconomie nationale. Tout compte fait, dans létat actuel des agrégats macroéconomiques, linflation se conjugue désormais au passé. Ce qui doit inévitablement se traduire par une certaine souplesse dans la conduite de la politique monétaire pour permettre enfin de libérer lépargne nationale qui a été depuis des années fortement rongée par linflation.
Avec des taux dinflation hebdomadaires de moins de 1%, il ny a théoriquement pas de raison de renchérir davantage le coût du crédit. Avec un taux de bancarisation qui frôle le ridicule, soit à peine 2% pour une population estimée à plus de 70 millions dhabitants, la Banque centrale du Congo doit redoubler defforts pour faciliter laccès au circuit bancaire.
De ce point de vue, le taux dintérêt directeur est la variable principale sur laquelle doit porter laction de linstitut démission. Sous dautres cieux, particulièrement en ce temps de crise – cest le cas des pays occidentaux – les banques centrales telles que la BCE pour lUnion européenne et la FED pour les Etats-Unis appliquent des taux dintérêt proches de zéro pour ramener dans les circuits les liquidités oisives promptes à déstabiliser le système.
Cest vrai que les réalités économiques congolaises ne sont pas celles des pays de lUnion européenne ou des Etats-Unis rendant irréaliste un taux dintérêt directeur proche de zéro, il est tout aussi vrai quil y a moyen de faire quelque chose pour baisser davantage le coût du crédit en RDC.
Le fait pour la BCC de baisser son taux dintérêt directeur va dans le sens. Pourvu quelle maintienne le même élan tout en veillant à la stabilité du niveau général des prix. Cest tout ce quon peut souhaiter. Pour quenfin lépargne ait droit de cité en RDC, alors que le pays entre dans une ère nouvelle, celle de la révolution de la modernité suivant le leadership tracé par le président de la République, Joseph Kabila.
Par Faustin Kuediasala