Le Congo!!! (Eric Nduwimana/ Burundi.)
Kivu, une région instable
Le Kivu est instable depuis les années 1960. Cette région a rarement
admis le pouvoir de Kinshasa malgré l'autonomie accordée à certains
royaumes. La rébellion des années 60 a été mâtée par la jeune armée
burundaise sur demande du Président Mobutu.
La première guerre du Congo pour renverser Mobutu est parti de l'Est
avec la participation du Rwanda, Burundi et Ouganda. Ces pays
soutenaient le rebelle Kabila qui revenait après plus de 30 ans d'oubli.
Il avait organisé une rébellion dans le Kivu avec la participation
rapide de l'Argentin cubain le Ché Guevara.
La deuxième guerre du Congo contre Kabila qui venait de chasser l'armée
rwandaise de Kinshasa a démarré à l'Est. Le CNDP de Nkunda a commencé
dans le Kivu aussi. Le M23 reprend la guerre au Kivu aussi. La région de
Katanga s'est stabilisée après deux révoltes du temps de Mobutu vite
mâtées par des armées étrangères.
Un pays incapable de se défendre avec son armée
Le Congo est un pays très particulier. Il est riche en ressources
minières mais n'arrive pas à payer ses fonctionnaires. C'est un pays
peuplé mais qui ne peut pas organiser son armée pour se défendre. Jamais
l'armée congolaise n'a gagné une guerre contre une rébellion interne.
Ce pays fait appel à ses amis quand il est attaqué. Contre le M23, il a
demandé une intervention des Angolais mais le Président Museveni de
l'Ouganda a pu les dissuader.
Aujourd'hui, cette armée se fait ridiculiser par la rébellion du M23
dont certains pensent qu'elle est soutenue par le Rwanda. Selon la
logique élémentaire, un petit pays comme le Rwanda, pauvre en ressources
minières, ne pourrait pas disposer d'une armée capable d'inquiéter le
Congo. Pour le moment, certains parlent de soutien et rarement de
participation directe d'une armée régulière.
Un général congolais à Kinshasa s'étonnait de l'esprit va-t-en en guerre
des pays de l'Est du Congo. Il expliquait que les Congolais n'aimaient
pas la guerre. Il avait raison, les militaires congolais ne sont pas
préparés à des guerres. Depuis 1994, les militaires burundais et
rwandais sont souvent sur les théâtres d'opération et sont aguerris. Le
Congo n'a pas pu former une vraie armée, bien entraînée, motivée et
capable de se battre. En plus, ce pays d'une superficie cent fois plus
que le Rwanda et ayant une population dix fois que le Rwanda, a besoin
d'une grande armée pour sécuriser ses frontières. Or, c'est ce qui
manque.
Une zone de non droit, propices aux rébellions
La zone de Kivu appartient à celui qui la contrôle. Plusieurs localités
sont sous le contrôle des FDLR, rebelles rwandais, Mayi Mayi, M23,
etc… La désorganisation du Congo et l'absence d'une politique
coordonnée de sécurité laissent le champ libre à toute rébellion.
Cette région permet aux rébellions voulant attaquer d'autres pays
voisins du Congo de s'implanter. Ainsi, les pays voisins peuvent trouver
un cassus belli pour attaquer l'Est du Congo sous prétexte de
poursuivre les rebelles. En plus, cette région est tellement riche en
or, coltan et autres minerais qu'elle peut entretenir et financer des
rébellions.
Le génocide de 1994 au Rwanda, un cauchemar des Congolais
En intervenant aux côtés de l'armée de Habyalimana lors de la guerre
contre le FPR, l'ancien Président Mobutu ne savait pas que c'était ce
même FPR qui le fera quitter le pouvoir. Pourtant, Mobutu aurait pu
jouer un rôle de médiation et aussi intervenir auprès de Habyalimana
pour arrêter le mouvement des milices Interahamwe.
L'assassinat de l'ancien Président Habyalimana et le génocide contre les
Tutsi ont précipité la chute du pouvoir hutu au Rwanda. Des millions de
hutu rwandais ont pris le chemin du Congo sous la protection de
l'opération française turquoise.
Arrivée au pouvoir au Rwanda, l'armée rwandaise issue de l'ancienne
rébellion FPR a souvent franchi la frontière sous prétexte de poursuivre
les anciens interahamwe voulant rentrer par la force au Rwanda.
La présence de ces millions de réfugiés hutu rwandais au Kivu fragilise
le Congo sur plusieurs points de vue. Sa population souffre de cette
présence encombrante et armée. Le territoire devient vulnérable car les
Rwandais peuvent intervenir à l'intérieur du Congo dans le but de
"protéger" ses frontières. Les Rwandais soutiennent des rébellions
congolaises pour contrôler la zone frontalière afin de ne pas la laisser
aux mains du FDLR compte tenu de la désorganisation de l'armée
congolaise.
Ne pouvant pas mettre de l'ordre à sa frontière, le Congo sera soumis
aux assauts de son ou ses voisins de l'Est. A moins que le Congo décide
de déplacer ces réfugiés hutu rwandais loin de la frontière rwandaise.
Néanmoins, le Congo n'a pas les moyens de le faire. Ces réfugiés,
encadrés par des groupes armés, ont déjà la maîtrise du terrain.
La meilleure solution était de combattre ensemble ces groupes armés. Le
Rwanda et le Congo l'ont déjà fait, sans y arriver. Soit, ces pays y ont
mis peu de moyens, soit une des parties ne voulait pas la reddition
complète de ces groupes.
Une région riche, qui suscite des convoitises
Prenons un pays qui sort de la guerre et dont ses caisses ont été
vidées, il sera intéressé par une région riche pour renflouer ses
caisses. Si cette région s'y prête, la conquête sera pécuniaire.
L'immense et riche Congo mal exploité, mal administré dans plusieurs
provinces ne manque pas d'attirer les conquérants. Nous sommes à l'heure
de la mondialisation. Les minerais du Congo très recherchés sont
souvent vendus par des pays qui ne les produisent pas. Il fut un moment
où le Burundi était parmi les premiers pays exportateurs d'ivoire alors
qu'il disposait que de deux éléphants qui passaient une nuit sur deux au
Burundi. Le Burundi continue d'exporter plus de trois fois d'or qu'il
ne produit. Ne parlons pas du Rwanda. Il est devenu un grand pays minier
sans mine.
Le Congo est capable de développer un voisin. Nul n'est prophète chez
lui. Le Congo est capable de rendre un service aux autres qu'il ne peut
se rendre. La richesse du Congo pourrait transformer le pays en
Singapour. Or, cette richesse du Congo appauvrit le peuple congolais.
Les salaires des dirigeants sont hors norme, les petits fonctionnaires
reçoivent rarement leurs maigres salaires. Ces fonctionnaires se
débrouillent tant qu'ils peuvent. Ils sont plus tournés vers les petits
arrangements. Les déçus se tournent vers des rébellions aidées par des
pays voisins. Ces derniers ont surtout besoin de mettre la main sur
cette économie plus que l'aide à une rébellion qui finira par trahir
celui qui l'a armé.
Les solutions pour le Congo
La première solution pour les Congolais est de s'organiser, d'organiser
ses services de la base au sommet. Lutter contre la corruption, payer
les fonctionnaires à temps, revoir l'économie du pays, relancer le
secteur de transport pour faciliter les communications.
La deuxième solution est de créer une vraie armée, une armée de métier,
une armée de professionnels. Certains disent que les Congolais ne sont
pas de bons militaires. Pourquoi les Mai Mai, les Banyamulenge, les
Kasaiens sont-ils de bons guerriers? Ne sont-ils pas de Congolais? Tant
que le Congo ne sera pas protégé par une vraie armée, mobile, capable de
déplacer des régiments à moins de trois jours du Nord au Sud, de
l'Ouest à l'Est, le Congo n'aura pas la paix. Nous sommes à une période
de rapport de force. Le plus pauvre doit développer une grande
diplomatie. Le Vatican et la Suisse sont les pays forts en diplomatie
car les deux ne disposent pas d'une armée de métier. Le Congo n'a ni une
diplomatie forte capable de combler la faiblesse de son armée.
Sans armée, sans diplomatie forte, le Congo est pris dans un tourbillon.
La solution est dans son camp. personne n'ira organiser le Congo en
trois autres Etats, si non quatre. Certains de ces Etats se tourneront
vers les voisins protecteurs. Seul un grand sursaut de patriotisme des
Congolais pourra sauver le Congo.
Eric Nduwimana/ Burundi.