10 05 13 Le Potentiel Prospérité – En attendant la tenue du dialogue national, Gaspard-Hubert Lonsi Koko déclare: « Mes amis du DCFD et moi-même continuons à nous y préparer sérieusement »


Le
dialogue national républicain et inclusif promis par le président
Joseph Kabila se fait attendre. Cela vous surprend-t-il ?

Il
n’y a rien de surprenant. En effet, à partir du moment où une
partie de l’opposition et quelques Congolais de la diaspora ont
réagi favorablement à l’initiative présidentielle relative au
dialogue républicain et inclusif, cela est devenu, pour les tenants
du pouvoir à Kinshasa, une véritable équation à plusieurs
inconnus. Ainsi sont-ils en train de chercher un schéma qui ne
risque pas de remettre complètement en cause leurs acquis. Ce qui
est sûr, mes amis du groupe DCFD et moi-même continuons à nous y
préparer sérieusement.

Qu’attendez-vous
de cette 
rencontre,
si elle aura bel et bien lieu un jour ?

Contrairement
aux compatriotes ayant à l’esprit le partage du pouvoir, les
membres de notre structure poursuivent une démarche avant tout
patriotique. Ils attendent de cette rencontre un travail de fond,
au-delà des divergences, afin de doter la RD Congo des institutions
solides et viables pouvant garantir des élections transparentes et
crédibles, le respect des principes démocratiques et des droits
fondamentaux de la personne humaine, la sécurité et la paix, la
cohésion 
nationale,
ainsi que l’intangibilité de nos frontières nationales.

Qu’en
est-il du cahier des charges déposé par votre groupe la « Diaspora
congolaise favorable au dialogue » au bureau du président de
l’Assemblée nationale,  Aubin Minaku ?

Nous
avons introduit en bonne et due forme notre cahier des charges auprès
des services du président de l’Assemblée nationale, en
l’occurrence Aubin Minaku, et nous attendons la suite des
événements. En tout cas, quelques-unes de nos propositions –
notamment la tenue des assises à Kinshasa sous la direction des
Congolais et l’observation de la communauté 
internationale,
leur financement par le gouvernement congolais, la qualité et la
compétence des participants… – semblent faire l’unanimité.

Que
propose le groupe « DCFD » en prévision de ce dialogue ?

Au-delà
des thématiques relatives à la réforme des institutions étatiques,
à la sécurisation des biens et des personnes, ainsi qu’à la
défense du territoire national (armée républicaine et aguerrie,
police et gendarmerie performantes), les problématiques de la
nationalité congolaise d’origine, des droits civils et politiques
des Congolais de la diaspora, du contentieux foncier, du recensement
de la population en vue de l’attribution d’une carte d’identité
et de la constitution du fichier électoral, d’une commission «
vérité et réconciliation » en vue de la prise de conscience
occupent une place primordiale dans nos propositions. Nous insistons
aussi sur la réconciliation, car il est antinomique de préconiser
le dialogue national tout en maintenant en prison et en faisant
arrêter quelques personnes du fait de leurs opinions.

Tous
les Congolais, en l’occurrence de la diaspora, prétendent avoir
leur place dans ce forum. Qu’en pensez-vous ?

Certes,
tout citoyen congolais est de prime abord habilité à participer aux
assises concernant le dialogue national. Néanmoins, il faudra des
compétences sûres dans divers domaines pour trouver les voies et
moyens pour la stabilité du territoire national, du développement
économique et du bonheur du peuple congolais. Comme il n’est pas
question d’une foire d’empoigne en vue d’une redistribution des
cartes ou d’un partage des postes ministériels, les critères de
sélection doivent donc se faire sur la base de la compétence, de
l’expérience, de la notoriété morale et intellectuelle, d’une
préparation politique certaine…

Pensez-vous
qu’il soit possible de faire représenter à ces assises les
Congolais de l’étranger, notamment ceux des pays de Schengen, par
une structure unique ?

Personne
n’ignore que l’unité des Congolais de l’étranger permettra un
rapport de force à l’avantage des propositions ayant trait à
leurs droits civils et politiques. Mais l’esprit partisan et
l’animosité stérile entre quelques factions constituent un frein
considérable à l’homogénéité. Ces raisons me poussent à miser
sur la diversité de la diaspora dont la richesse et la dynamique, si
elles sont judicieusement exploitées, peuvent aboutir aux résultats
escomptés. Face à la réalité, nous devons nous montrer
pragmatiques. Alors, faisons en sorte que, peu importe les
différentes voies empruntées, nous nous retrouvions à la croisée
des chemins pour mieux accorder nos violons.

Le
fait de vivre hors des frontières nationales ne constitue-t-il pas
un obstacle à la participation des Congolais de l’étranger à ce
forum, comme le prétendent certains acteurs politiques ?

D’aucuns
savent qu’un tel obstacle est dû à ceux qui tiennent absolument à
écarter, par tous les moyens, la diaspora de la gestion de la chose
publique. Ne dit-on pas que celui qui veut noyer son chien l’accuse
de la rage ?  Pourtant, la constitution du 18 février 2006
garantit – notamment dans ses articles 5, 6, 12, 50 et 66 –
l’égalité de tous les Congolais indépendamment du lieu de
résidence. Ces acteurs politiques  feraient mieux d’initier
un travail de fond en vue de l’abrogation des lois injustes qui
portent préjudice aux droits civils et politiques des Congolais de
l’étranger. Au lieu d’essayer de monter une faction de la
population contre une autre, ils doivent plutôt s’atteler à
l’harmonisation des clauses inconstitutionnelles en vue de la
cohésion nationale.

Etes-vous
favorable à un gouvernement d’union nationale pour affronter
efficacement les principaux problèmes qui se posent actuellement en
RDC ?

Notre
participation au dialogue inclusif et républicain se rapporte à la
mise en place des institutions démocratiques, à la sécurisation et
à la pacification du territoire national. Si, à l’issue des
assises nationales, les tenants du pouvoir éprouvent la nécessité
d’un gouvernement d’union nationale – sous quelle forme et pour
quelle finalité ? – ils le diront et nous réagirons en fonction
du contexte politique et des pesanteurs
institutionnelles.

Pensez-vous
que le déploiement d’une brigade d’intervention spéciale dans
l’Est de la RDC soit une solution à la situation sécuritaire qui
y prévaut ?

L’envoi
d’une brigade d’intervention dans la partie orientale est sans
aucun doute, dans un pays où l’armée ne parvient guère à se
déployer sur l’ensemble du territoire, une partie de la solution.
Cette brigade sera-t-elle dissuasive ? L’avenir le dira. De toute
évidence, la présence de la brigade onusienne ne doit nullement
empêcher la RD Congo, pays souverain, de prendre quelques
dispositions en matière de défense nationale.

Que
vous inspire la nomination de Mary Robinson comme envoyée spéciale
des Nations unies pour la région des Grands Lacs ? 

La
nomination de Mary Robinson est conforme à l’accord-cadre
d’Addis-Abeba sur la paix en RD Congo signé le 24 février 2013.
Encore faut-il qu’elle puisse imposer la volonté des Nations Unies
aux présidents Museveni et Kagamé, s’agissant des opérations
offensives et ciblées contre les bandes armées, et faire respecter
l’Accord-cadre à tous les contractants dans le cadre du mécanisme
de suivi.

Alors, 
que pensez-vous de cet Accord-cadre signé par onze pays africains

L’accord-cadre
pour la paix en République d’Addis-Abeba signé par les pays des
Grands Lacs, de la SADC et de l’Afrique centrale – sous l’égide
des Nations unies – est globalement satisfaisant dans la mesure où
les contractants ont manifesté la volonté de s’atteler aux causes
profondes du conflit et de mettre un terme aux cycles de violence
récurrents. Néanmoins, quelques engagements de cet accord-cadre
constituent une ingérence dans les affaires intérieures de la RD
Congo tandis que d’autres méritent d’être clarifiés. Il me
semble que seules les ressources frontalières doivent être
partagées grâce à l’exploitation commune par des sociétés
publiques d’économie mixte, et que l’on doit réaménager la
CEPGL et non la relancer sans tenir compte des causes ayant contribué
à la déstabilisation de la région. Par ailleurs, il ne revient pas
à la communauté internationale de s’attribuer les compétences du
Parlement national en imposant à un pays souverain la
décentralisation et la promotion de la réforme structurelle des
institutions étatiques.

La
RDC ne souffre-t-elle pas d’une crise de légitimité ? 

Dès
lors que le scrutin du 28 novembre 2011 avait été bâclé, on peut
aisément confirmer la crise de légitimité politique qui fragilise
les institutions étatiques, en RD Congo, et a de facto débouché
sur la faillite de l’Etat. Celle-ci a encouragé le recours aux
armes dans les régions abandonnées à elles-mêmes. Les Congolais
doivent à tout prix se parler, dans un cadre inclusif et
républicain, pour consolider la cohésion nationale et mieux faire
face aux enjeux qui, si rien n’est entrepris comme cela se doit,
risquent de balkaniser le pays.

Propos
recueillis par Robert Kongo, correspondant   en France

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.