La diplomatie belge au secours de Kagame ? Par Jean Jacquse Wondo
Une visite à contre-courant pour les analystes congolais
dans la mesure où les propos surréalistes tenus par le ministre belge ne sont
pas de nature à contribuer à encourager une résolution systémique globale de la
crise qui ravage la région des Grands-Lacs voici bientôt vingt ans. Que
nenni ! Les déclarations de M. Labille viennent plutôt renforcer le Rwanda
et le réconforter à maintenir sa politique belligène et dexclusion dont londe
de choc secoue lEst du Congo depuis 1994.
Le motif de cette visite, selon le socialiste wallon, est de
renforcer les relations bilatérales entre le Rwanda et
pays considère le Rwanda un partenaire clé dans la région. Il la fait savoir
en ces termes: « Lors de ma rencontre avec le Président (Ndlr :
Kagame), nous avons parlé des problèmes régionaux et les solutions possibles et
bien dautres choses liées à notre partenariat. Nous considérons le Rwanda
comme notre principal partenaire dans la coopération au développement dans la
région et nous sommes impressionné par ce que le Rwanda est en train de réaliser
et de ce quil est devenu. Le Rwanda demeure lun des rares pays susceptibles
datteindre les Objectifs millénaires de développement.
Derrière ces déclarations liées officiellement à son
portefeuille ministériel, la vraie face cachée de cette visite concerne la
situation sécuritaire de la région des Grands-Lacs. Ainsi, commentant la
proposition du président tanzanien Jakaya Kikwete invitant le Rwanda à
envisager des négociations politiques inclusives et directes avec les FDLR, une
déclaration saluée par tous, le ministre belge, membre dun gouvernement
accouché à la suite dâpres négociations politiques au moment où
à une crise de régime sans précédent a plutôt voulu demeurer , fidèle à la
tradition du « fantôme du statu quo colonialiste nostalgique de
région qui subit aujourdhui encore les répercussions néfastes de la taxinomie
anthropologique belge réductrice ethnique, séparatiste, binaire et manichéenne
à connotation raciste au service du colonialiste. Cette anthropologie de la
première heure (selon D. Van Reybrouck, « Congo. Une
Histoire », 2012, pp.131-136) établit des monographies ethnographiques où
les tribus se virent attribuer des caractéristiques, comme des nationalités en
Europe. Au Congo, écrit Van Reybrouck, apparurent des équivalents de lEcossais
pingre, du Sicilien paresseux, de lespagnol crasseux et de lAllemand
travailleur mais sans aucun sens de lhumour. Les habitants de la colonie
commencèrent aussi à adopter ce regard sur eux-mêmes et entre eux…
plus en plus admis par une large majorité dobservateurs et experts de cette
crise régionale très violente comme la voie de passage obligée à une solution
systémique globale, c.à.d., encourager davantage le Rwanda douvrir son espace
politique et démocratique par un dialogue franc et sans faux-fuyant avec les
FDLR, voici le ministre Labille venir prôner le statu quo qui
maintient la région des Grands Lacs à feu et à sang depuis depuis deux
décennies par des déclarations inadmissibles qui montre que
de tirer les leçons de lHistoire de son action apocalyptogène en
Afrique Centrale :
«Nous devons rester prudents lorsquil sagit de traiter la crise au
Congo si nous devons trouver une solution. Je ne suis pas tout à fait sûr du
contexte dans lequel le Président tanzanien a fait les commentaires au sujet
des négociations avec les FDLR, mais je crois que nous ne pouvons pas
exiger du Rwanda de négocier avec les génocidaires alors que le pays se remet
encore du génocide. Il sagit plus dune provocation que dune suggestion
pour une solution ». Voilà une déclaration provocatrice dun ministre
fédéral belge piégé, qui vient de mordre à lhameçon de la falsification de
lhistoire par le lobby de loligarchie Tutsi au pouvoir à Kigali, à linstar
de son compatriote wallon Louis Michel qui a traité le 9 septembre 2012 Kagame
dun grand Leader. Le même M. Michel qui a initié en septembre 2012 le
club de lobbying en faveur des actions de Kagame quil a baptisé Les Amis
du Rwanda.
Une sortie médiatique qui a suscité lindignation des
Congolais et amis du Congo par ce communiqué de presse du 12 septembre
2012 :
12.09.12 Paul Kagame, un grand leader?
LAncien ministre et ex-commissaire européen,
le libéral francophone belge Louis Michel (MR), a décrit le président rwandais
Paul Kagame dans le magazine belge flamand « De Zondag » (Lire : Le Dimanche )
du 9 septembre 2012, comme « un dirigeant très compétent» et «un grand leader»,
mais aussi comme un homme avec une vision et une personne intelligemment
raisonnable.
– Réponse à ce
communiqué
Pareilles déclarations
sont choquantes pour quiconque suit avec une grande attention et préoccupation
lévolution de la situation en République démocratique du Congo et en Afrique
centrale. Personne ne se doute que Kagame est malin, pour ne pas dire
subtilement rusé et roublard. Il est connu par tous que cest son régime qui
soutient les rebelles dans lEst du Congo, en sapant la souveraineté nationale
congolaise. Même si Kigali rejette en bloc avec véhémence ces allégations.
Les faits parlent
deux-mêmes et sont confirmés par un rapport dexperts de lONU. Ce rapport
doit, selon Michel, « être objectivé ». Nous nous demandons si une récente
recherche menée par Human Rights Watch sur base de 200 entretiens, nest pas
suffisamment objective pour Michel. Les résultats de cette enquête parlent
dassassinats, de tortures et de viols en masse commis par les rebelles du M23
soutenus par Kigali. De plus, le rapport mentionne des recrutements forcés de
600 hommes rwandais, dont des mineurs dâge. Malgré ces accusations accablantes
à lencontre de limplication de Kagame, ces recrutements se poursuivent
normalement comme si de rien nétait.
Sur le plan intérieur,
le président rwandais nest pas non plus scrupuleux à légard des droits de
lhomme et il na pas hésité à poursuivre et à réduire au silence les voix
dissidentes. Un autre allié proche de Kagame, le seigneur de guerre Bosco
Ntaganda, na toujours pas été extradé vers
main dans la main, la rébellion du M23 dans les Kivu.
Il est vraiment très
infâme pour Louis Michel de chercher insidieusement à soutenir un homme comme
Kagame, qui serait responsable de nombreux faits quil a sur son ardoise.
Signataires
Els Schelfhout –
Sénatrice honoraire CD&V
Denis Bouwen –
CongoForum asbl
Jean-Jacques Wondo –
Analyste politique
Mieke Berghmans –
Broederlijk Delen
Nadia Nsayi –
Broederlijk Delen et Pax Christi Vlaanderen
Enfin pour conclure avec cette ultime manœuvre politicienne
belge contre les Congolais, il me semble opportun de rappeler au ministre
belge, le wallon Mabille, la réponse parlementaire de son homologue flamand
chrétien, Pieter de Crem de
Défense.
(Question nr 4-5089 du 01 décembre 2009 posée par la sénatrice Els
Schelfhout sur
Coopération
dans sa réponse du 5 janvier 2010, na ni plus ni moins reconnu limplication
active du Rwanda dans la crise à lEst de
quentretient le Rwanda avec les pays considérés comme bailleurs de
«… le général Charles-Henri Delcour (Ndlr :
ancien chef dEtat-major général de lArmée belge), a rencontré au début
septembre 2009 lors dune visite de deux semaines le président Paul Kagame, le
premier ministre Bernard Makusa et le chef détat-major de larmée James Kabarebe
(qui fut chef détat-major de larmée congolaise sous Laurent Désiré Kabila).
On connaît les liens étroits qui unissent
les États-Unis au régime de M. Kagame. Il nest donc pas surprenant que ces
deux États entretiennent un partenariat fort avec larmée rwandaise. En
revanche, depuis la prise de pouvoir par le Front patriotique rwandais (FPR),
diminué sa coopération militaire active avec le Rwanda. La visite du chef
détat-major belge laisse toutefois supposer que notre pays veuille renforcer
la coopération militaire bilatérale avec le Rwanda, comme elle la fait avec
du Congo et le Burundi.»
«Je vous fais part de ma préoccupation quant à cet
éventuel renforcement du partenariat militaire entre
Rwanda. Je pense que notre pays doit éviter que sa coopération militaire
ne contribue au renforcement dun régime non démocratique qui affecte une très
grande part de son budget à des dépenses militaires et dont larmée joue un
rôle néfaste et ambigu dans lEst du Congo, une zone de lAfrique centrale où
nous essayons par des voies diplomatiques de contribuer à des solutions
durables au conflit qui séternise.» (Les Armées au Congo-Kinshasa,
Radioscopie de
publique aux FARDC)
Une préoccupation qui malheureusement nest pas partagée ni
suivie par les wallons des institutions fédérales belges qui naviguent à
contre-courant de la recherche des solutions durables au conflit qui séternise
au Congo. De plus, ce que le ministre Labille oublie est que le nombre de
victimes du génocide rwandais causé par les interhamwe Hutu au Rwanda, moins de
1.000.000 suivant les estimations fantaisistes les plus élevées, est de très
loin inférieur aux plus de 6.000.000 de morts congolais du fait de la guerre
exportée du Rwanda par Kagame au Congo, via notamment le M23 interposé [un
groupe négatif au même titre que les FDLR qui ne sont pas tous
génocidaires, rappelons-le (une autre falsification de la vérité par les officines
de renseignement de Kagame)]. Un Groupe armé de tueurs et violeurs des
congolais avec lequel tout le monde, y compris
manière schizophréniquement paradoxale, au Gouvernement congolais de
négocier. Deux poids deux mesures non !
Il ne reste plus quaux Congolais de prendre leur
responsabilité car leur salut ne viendra jamais de lOrient encore moins de
lOccident qui ne cesse de démontrer jour après jour son « Congo
pessimisme) et son hypocrisie !