La Sphère Kabila au fil du temps (hermes du Congo)

Arrivé par hasard à la tête du géant en janvier 2001, celui qui n’était qu’anglophone-swahiliphone-rwandophone s’est d’abord fié aux « précieux » conseils d’un sérail restreint composé entre autres de Jeannot Mwenze Kongolo, Didier Kazadi Nyembwe et Augustin Katumba Mwanke. La stratégie édictée au « petit » appelé à devenir le « raïs », fut simple : nouer avec l’occident, parler de paix, parler reconstruction, parler élections et enfin gagner les élections. Il fallait donc mettre en place, autour du Président Kabila, une équipe resserrée porteuse d’espoir.

Ainsi, l’on fit appel aux fonctionnaires internationaux (Freddy Matungulu Mbuyamu, André-Philippe Futa, Hélène Mathey Boo), aux techniciens (Lazare Dakahudyno, Simon Tumawaku, Polycarpe Nkondi Mbaki, Jean-Pierre Kalema) et aux colombes (Léonard She Okitundu, Alphonse Ntumba Luaba, Kikaya Bin Karubi) avec pour mission de donner de la crédibilité à l’action du futur raïs et d’entourer le noyau (Mwenze Kongolo, Kazadi Nyembwe, Katumba Mwanke, Kalume Numbi, Jean Mbuyu Lunyongola).

En un an, la stratégie commença à porter ses fruits. Joseph Kabila était invité par ses pairs et appelé à participer à des forums internationaux. Dans l’entretemps, les « appelés » grandirent en influence et se taillèrent une place dans le sérail présidentiel. Les colombes étaient plus impliquées politiquement et diplomatiquement, l’un des fonctionnaires grimpait dans l’estime du Chef, certains techniciens étaient, dorénavant, au cœur de la machine à sous du régime.

A ce noyau élargit, vint s’y greffer des « turcs » comme Vital Kamerhe, Guillaume Samba Kaputo, Norbert Nkulu, Théophile Mbemba, Didier Etumba, etc. Ainsi fut constituée la première sphère Kabila.

Vint donc le temps du partage, la période dite « 1+4 ». Ce fut aussi la période des appels du pied. Très vite, certains membres de la sphère ont entrepris la tâche facile de débaucher dans les camps adverses (Antoine Ghonda d’abord, Olivier Kamitatu après). Néanmoins, le débauchage dans le RCD fut un peu plus compliqué ! Toujours est-il que des ex-RCDiens se sont montrés eux aussi très disponible, ce fut le cas de Lambert Mende qui échangea très rapidement des emails avec le Président Kabila.

Face aux mouvements politico-militaires, la « composante Gouvernement », jusque-là hétéroclite, a dû se donner une personnalité politique homogène : le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie « PPRD », une sorte de variation du PNRD (de Théophile Mbemba) et du PRP (de feu Mzee Kabila).

La nouvelle machine de la Sphère Kabila avait comme objectif premier de gagner les élections en ratissant larges. Ainsi, il fallait mettre à l’écart les récalcitrants tels qu’André-Philippe Futa avec son PANU, Timothée Moleka avec son UPPA, et les autres et leurs « petits partis » : M17, PCBG, etc. Pourtant créés avec l’aval du Chef !
Quelques années après, en 2006, la Sphère Kabila était pratiquement à son apogée avec la création de l’Alliance pour la Majorité Présidentielle « AMP ». Des partis de gauches, du centre, de droite, des personnalités indépendantes et de la Société civile, étaient venus prêter allégeance au Raïs Joseph Kabila Kabange (exit le Général-Major Joseph Kabila). Les hyper-PPRDiens avaient finalement compris l’importance d’élargir le champ d’action et avait mis sur pied l’appendice du PPRD, le MSR. Ainsi, avec l’appui des débauchés ou achetés (Forces du Renouveau du tandem Mbusa-Kamitatu, PDC d’Endundo, UNADEF de Mwando Nsimba, DCF/COFEDEC de Tshipasa, UNAFEC de Kisimba, CCU de Mende, MSDD de Lutundula, UNADEC d’Engulu), la Sphère Kabila était finalement en ordre de bataille pour les élections. La sphère s’était étendue.

C’est l’après élections qui fut la période la plus amère pour la Sphère Kabila. Il fallait tenir les promesses et partager le pouvoir à nouveau, avec d’autres forces politiques qui n’étaient pas du sérail, notamment le PALU et l’UDEMO ; donc moins de postes, moins d’argent.

Les Premier-Ministrables de l’AMP ont été mis de côté au profit du guru de Gungu, Antoine Gizenga. Les luttes intestines, les règlements de comptes et la faible candidature proposée au perchoir du Sénat ont permis l’élection du mobutiste Léon Kengo wa Dondo. Donc à part le Président de la République et la présidence de l’Assemblée nationale, l’AMP ne fut pas correctement rétribuée.

Dans l’entretemps, la Sphère Kabila s’était contractée. La clique katangaise reprit les choses en main avec comme nouveau venu Célestin Mbuyu. Comme alliés de deuxième rang, on ira chercher Pierre Lumbi, Marcellin Cishambo, Evariste Boshab, Adolphe Lumanu, Antoine Ghonda, etc. Exit Kamerhe, She Okitundu, Futa, Kazadi Nyembwe, Mwenze Kongolo et Kalume Numbi. Ici, il fallait être soit pro-Katumba, soit pro-Samba pour survivre politiquement dans cette marre à requins.

Ce fut ainsi jusqu’à ce qu’un séisme viennent perturber l’ordre des choses. Guillaume Samba Kaputo mourut et Augustin Katumba Mwanke devint l’homme au centre de tout ! Politique, finance, défense, sécurité, diplomatie, … tout passait par lui. La Sphère Kabila était désormais celle de Katumba. Durant cette ère, l’on régla davantage les comptes aux « marginaux » : Mwenze, Kamerhe, Futa et on fera monter de nouvelles têtes : Aubin Minaku, Augustin Matata, Gustave Beya et Raymond Tshibanda.

Après les difficultés rencontrées dans la cogestion avec le PALU, la Sphère Kabila était déterminée à régner seule tout en restant ouverte à gouverner avec des proxys. Sous la tutelle de Katumba, Evariste Boshab le chef d’orchestre du PPRD aura la « brillante » idée de créer une vraie machine de guerre électorale : la « mosaïque ». Cette mosaïque est, en somme, une constellation de partis politiques, plus de 50, dans lesquelles l’on y déversa des cadres du PPRD pour mieux positionner la Sphère Kabila dans l’Assemblée nationale ; le scrutin proportionnel du plus fort reste n’était plus au gout de la Sphère, mais pas moyen de la contourner surtout après la révision constitutionnelle.

2011, le tour est joué ! Le Raïs Joseph Kabila Kabange est réélu dans des conditions douteuses, mais réélu tout de même. Malheureusement pour le Raïs, il ne sera pas en mesure de compter sur son Mazarin ; Augustin Katumba Mwanke meurt dans un crash d’avion à Bukavu.

La magnitude du séisme de la mort de Samba Kaputo ne fut rien comparée à celle-ci. Kabila pleura, Boshab pleura des larmes de crocodile pendant que d’autres sortiront les bouteilles de champagne. Désemparé, le Raïs ira consulter ses « vieux » dans la région et reviendra avec une solution pour sa sphère. Son pré-carré sera dorénavant constitué d’un groupuscule de katangais dans lequel l’on y ajoutera Aubin Minaku, Lambert Mende et la sœur du Raïs, Jaynet.

Ne voulant pas céder à l’occident sur leur candidat Premier Ministre, il leur opposera leur prétendu bon élève, en la personne de Matata Ponyo, qui avait reçu au passage le soutien de Didier Reynders.
Boshab et la Majorité Présidentielle « MP » faisaient dès lors office de figurants.

Mais avec trop d’opposants (Kamerhe, Tshisekedi, Kengo) à l’affut, il fallait refaire les choses. Les concertations nationales. Encore partager le pouvoir, mais cette fois-ci pour préparer et sécuriser sa sortie et peut-être revenir. Il faut donc se réconcilier avec sa majorité, apaiser une partie de l’opposition et miser sur l’avenir. Le Raïs, esseulé, réorganise donc la nouvelle Sphère Kabila pour l’avenir. Va-t-elle se contracter davantage ?

 

 

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