30 05 14 Le Phare – UDPS et Alliés : Samy Badibanga critique le calendrier des élections urbaines, municipales et locales

Le besoin de juguler les effets pervers de cette contre-vérité me conduit à
faire une analyse qui s’articule essentiellement sur trois points :

– La nature du calendrier électoral

– La conditionnalité de la programmation des autres scrutins

(Provinciales, législatives nationales et présidentielle)

– Critique du calendrier

I. De la nature du calendrier

Le calendrier électoral rendu public par la CENI ce 26 mai 2014 se rapporte spécialement aux
élections urbaines, municipales et locales. Il paraît clairement que c’est un
calendrier partiel. Et pourtant, aux termes de la loi organique de la CENI telle que modifiée et
complétée

à ce jour, il est stipulé que la
CENI
a pour attribution entre autres : « élaborer des
prévisions budgétaires et le calendrier relatifs à l’organisation des processus
électoraux et référendaires ».

En ceci, le législateur a bien voulu préciser en parlant de « le » calendrier
(au singulier) et « des » processus (au pluriel).

Le processus électoral étant l’ensemble d’activités d’un cycle électoral devant
se dérouler dans un temps bien circonscrit. Aussi, le cycle électoral étant une
suite ininterrompue des phénomènes qui se renouvèlent dans un ordre immuable, la CENI a l’obligation d’élaborer

un calendrier de tout un cycle conformément à la loi et non des calendriers
particuliers selon différents scrutins.

Etant donné que ce cycle part de 2013 à 2016, la loi exige l’unicité du budget
et du calendrier pour le cycle électoral.

II. De la conditionnalité de la programmation des autres scrutins par la tenue
préalable du recensement de la population

Cette affirmation est dénuée de tout fondement, se référant aux dispositions
légales relatives aux élections en RDC, aucune loi en vigueur ne conditionne la
programmation d’une élection, quel que soit son degré, par la tenue de
l’organisation d’un recensement, soit-il administratif ou scientifique.
Néanmoins, les données démographiques de la population sont nécessaires pour
l’attribution des statuts des entités administratives (ville et commune) à
certaines agglomérations par l’autorité compétente (Gouvernement) desquelles
découle le

découpage des circonscriptions électorales par la CENI.

Quant à ce, la
CENI
a plutôt besoin des données démographiques fiables et
crédibles des électeurs pour faciliter la répartition des sièges des différents
types de scrutins.

Une certaine confusion semble s’afficher dans l’interprétation de la
disposition suivante de la loi organique de la CENI : « découper les circonscriptions
électorales au prorata des

données démographiques actualisées ».

En effet, il existe plusieurs manières d’actualiser les données démographiques,
soit par la consolidation des rapports des entités de base (rapports des
groupements, secteurs, chefferies,

communes, villes, territoires et provinces sur la population) ou par un
recensement administratif ou alors par un recensement scientifique.

On peut affirmer que les données démographiques sont actualisées et sont
disponibles au niveau du ministère de l’intérieur à la division de la
population ; car ces données ont servi à

l’élaboration des décrets du Premier Ministre du 13 juin 2013 conférant le
statut de ville et de commune à certaines agglomérations des provinces de la
RDC.

A ce jour, aux termes des différents décrets précités, la RDC dispose d’une nomenclature
précise des 98 villes, 145 territoires et 603 communes.

Malgré tout, la seule nomenclature qui reste est celle des groupements, elle
est indispensable pour la programmation, l’organisation et la tenue des
élections locales.

III. Critique du calendrier

Au regard de ce qui précède, il y a lieu d’émettre une
critique sur le calendrier électoral publié qui privilégie les élections
locales, lesquelles, selon Malumalu, «s’imposent aux élections provinciales». Cette
affirmation est tout simplement pathétique.

En réalité, on remarque une certaine précipitation de la part de la CENI de programmer avant tout
les élections locales bien que certaines conditions préalables ne sont pas
encore réunies (cadre juridique incomplet : la loi portant organisation des
groupements, la loi portant répartition des sièges pour les élections locales,
mise en place et opérationnalisation des tribunaux de paix), en négligeant la programmation
de l’organisation des élections provinciales et spécialement l’élection
présidentielle.

En clair, l’élection présidentielle ne nécessite pas la répartition de siège ni
le découpage de la circonscription électorale car ils sont prédéfinis par la
loi électorale en vigueur (un siège et

une circonscription).

Aussi, pour les élections provinciales, la loi électorale en vigueur a
déterminé la circonscription électorale et avec la publication des décrets du
13 juin 2013 du Premier ministre sur les villes et communes, la CENI est à même de faire le
découpage des

circonscriptions électorales sans attendre un quelconque recensement ; d’où le
nombre de circonscriptions est connu (266 circonscriptions : 145 territoires,
97 villes et 24 communes de Kinshasa) mais comme souligné ci-dessus, le nombre
de circonscriptions pour les locales

n’est pas jusque-là connu.

Pour rappel, les modalités présidant à conférer le statut de ville ou commune
précisent que pour devenir ville, l’agglomération doit avoir au moins 100.000
habitants et pour la commune, elle doit dénombrer au minimum 20.000 habitants
(articles 6 et 46 de la loi

organique n°08/16 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation

et fonctionnement des entités territoriales décentralisées).

IV. Sur le fond

Si par l’absurde, on pouvait considérer ce calendrier, il
faudra relever qu’il viole la Loi
électorale. A titre d’exemple, selon la loi électorale, l’élection des
conseillers urbains intervient quatre jours après l’installation du bureau du
conseil municipal. Cette installation du bureau définitif se faisant le 18 août
2015, l’élection des conseillers urbains devrait intervenir le 22 août 2015 et
non le 29 août 2015 comme repris dans le calendrier de la CENI.

Dans le même ordre d’idées, selon la loi électorale,
l’élection des bourgmestres et bourgmestres adjoints intervient trois jours
après l’installation du bureau définitif du conseil municipal (18 août 2015).
Par voie de conséquence, l’élection des bourgmestres et

bourgmestres adjoints devrait intervenir le 21 août 2015 et non le 29 août 2015
comme repris dans le calendrier de la CENI. De même, l’élection des maires et des
maires adjoints ne pourrait pas légalement avoir lieu le 15 octobre 2015.

V. Avis et considérations

On peut qualifier ce calendrier de fantaisiste et irréaliste
pouvant occasionner ainsi le glissement de la tenue de l’élection présidentielle
de 2016.

La priorité accordée aux élections urbaines, municipales et locales ne justifie
aucunement leur nécessité et opportunité compte tenu des conditions non réunies
pour leur tenue.

Tenant compte des exigences de la loi, le calendrier et les prévisions
budgétaires du cycle électoral 2013-2016 doivent couvrir tout le processus, il
apparait absurde que la CENI
ne soit pas en mesure de rendre public un calendrier des élections générales
alors qu’il a déposé un budget couvrant tout le processus.

Par rapport à la possibilité de combinaison des élections provinciales et
locales, on ne peut pas considérer le nombre de circonscriptions comme une
contrainte majeure car le nombre de bureaux de vote reste stable pour toute
élection directe faisant référence à un même fichier électoral (le nombre de
bureaux de vote est fonction du nombre d’enrôlés et non du nombre de
circonscriptions électorales).

Au regard de ce qui précède, je considère que la CENI n’est pas de bonne foi
et elle fait douter de sa volonté ainsi que de sa capacité à conduire un
processus électorale crédible, transparent et apaisé. Cela est d’autant plus
visible qu’elle se comporte en appendice du pouvoir, elle s’occupe à présenter
techniquement les options politiques levées par la majorité, ce qui témoigne de
l’étroite connexité de son management au pouvoir sortant.

 Pour le Groupe UDPS et alliés

Samy BADIBANGA

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