Tenke Fungurume Mining : la nation congolaise flouée

Pour comprendre comment la Nation congolaise a été flouée dans cette première partie, nous revenons sur le contrat antérieur, celui-là même qui avait été violé, avec ses contours flous. Dans nos prochaines éditions, nous passerons au peigne fin l’actuelle convention et ses dessous de table. La crise multiforme, qui sévit en R.DC, s’explique en partie par la faillite savamment entretenue du géant Gécamines (G.C.M).

Une gestion hasardeuse et maffieuse de ses ressources par les dirigeants en complicité avec les autorités de l’Etat, les pillages successifs et l’épuration ethnique au Katanga, les ponctions faites dans les caisses de la GCM par les autorités étatiques ainsi que son isolement politique à la suite de tristes événements de l’université de Lubumbashi en 1990, ont fini par donner le coup de grâce au poumon économique de la R.D. Congo. La guerre de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) a consacré le début d’une véritable action de sape menée contre la GCM. Des requins financiers, qui avaient programmé la désintégration de cette entreprise en vue d’affaiblir la RDC, étaient à l’affût, attendant le moment opportun pour faire mains basse sur la GCM.

C’est dans ce contexte malsain que la GCM a décidé, avec l’accord de l’Etat, de faire face à la crise et pour financer la réhabilitation de ses infrastructures, de négocier et de signer des contrats de cession d’une partie de son patrimoine. Contrairement aux attentes, les contrats ainsi signés n’ont rien apporté. Ils ont précipité et accéléré sa chute. Le patrimoine de la GCM est bradé avec la complicité de ses dirigeants et des hautes autorités de l’Etat, sacrifiant les intérêts suprêmes de la nation et occasionnant d’importants manques à gagner pour le trésor public. Parmi les contrats décriés, le projet Ténke Fungurume Mining (TFM) mérite une attention particulière à cause de l’ampleur de la fraude et de la flagrance du préjudice causé à la GCM et par ricochet, à la RD Congo. Depuis qu’il a été initié en 1996, il n’a connu un début d’exécution qu’il y a à peine deux mois. Neuf ans sont passés au grand préjudice de la Nation.

QU’EN EST-IL DE TENKE-FUNGURUME ?

Le secteur minier de Tenke Fungurume, qui abrite le plus grand gisement de cobalt du monde non encore exploité, est une propriété de la GCM. La nappe de Tenke Fungurume comprend 13 gisements identifiés sur une étendue de ± 14 km2 et contiendrait plus de 10 millions de tonnes de cuivre et plus de 700.000 tonnes de cobalt. S’agissant de la situation d’un partenariat par elle pour le développement de Tenke Fungurume, la GCM, ayant obtenu du gouvernement zaïrois d’alors la rétrocession de la concession de Tenke-Fungurume, initie le 23 décembre 1994 une procédure d’appel d’offres international restreint à dix entreprises minières présélectionnées. Au premier semestre 1995, 5 des 10 sociétés sont retenues. Avant la présentation et l’ouverture des offres, 3 entreprises désistent, peut-être parce qu’elles avaient pressenti l’arnaque. Deux entreprises restaient en compétition : Lundin et Iscor.

A la surprise générale, alors que le comité d’adjucation mis en place par la GCM à cet effet s’apprêtait à présenter le rapport, il s’est vu convoquer par le président gélégué général ( Umba Kyamitala) de l’époque qui leur a lu, pendant 1 h 30, un document déjà élaboré faisant objet de rapport final et pointant froidement Lundin comme le premier à manifester le désir de développer avec la GCM, un partenariat et que «le pas de porte» -comprenant la prime de cession, la prime d’option et la prime de production était le plus important (250 millions $ US).

DEFAUT DE CONSTITUTION DU CAPITAL SOCIAL

Et pourtant à l’ouverture des offres techniques, Lundin avait fait preuve d’inquiétantes insuffisances techniques et concernant la contre-partie financière, aucun des 5 candidats pré-qualifiés n’avait franchi le seuil de 20 millions de dollars. En fait, Lundin et le PDG de la GCM avaient élaboré en sourdine un document qui était un plagiat d’une bonne offre technique de l’un des soumissionnaires et les 250 millions seraient en réalité financés par Tenke FungurumeMining Sarl. Le décor d’une fraude et d’une corruption gigantesques était déjà planté.

La valeur du bien désignant les concessions minières 198 et 199 dénommées Tenke et Fungurume que la GCM en tant qu’actionnaire a cédé à TFM Sarl, n’est pas clairement déterminée. En outre, alors que l’article 6 alinéa 5 de la convention prévoit qu’avant le 31 décembre 1997, TFM procédera à l’augmentation de son capital non encore déterminé après évaluation du bien par la GCM, jusqu’à ce jour rien n’a encore été fait. Par ailleurs, que représente la somme de 1.685.000.000 $ US laquelle Lundin Holdings s’est engagé à financer totalement mais de manière progressive par rapport à la valeur des gisements de cuivre, de cobalt et de toutes autres substances minérales concessibles de Tenke et Fungurume, les bâtiments et autres biens immobiliers, les mines et usines sans que l’énumération soit limitative sur une période de 25 ans ? Cela veut tout simplement dire que ni les représentants de l’Etat congolais, ni la GCM n’ont tenu compte de la valeur réelle du bien et encore moins du profit qu’il pouvait procurer aux actionnaires.

Tous les indices laissent croire que la valeur de l’apport GCM avait été minorée. Y a-t-il eu des pots de vin ?

GENTO KOLELA & EMMANUEL KAKWANDA «Les Grands Enjeux» n°003/2005

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