« L’enseignement primaire sera gratuit dès la rentrée scolaire prochaine » (Mediacongo)

KINSHASA – Le porte-parole adjoint du chef de l’Etat, Tina Salama, a communiqué, via son compte Twitter, dans la soirée du mardi 20 août sur l’effectivité de la gratuité de l’enseignement primaire dès la rentrée scolaire 2019 ».

Une assurance de la part du gouvernement qui ne convainc pourtant pas les parents dont mille et une questions taraudent les esprits. La grande question qu’ils se posent c’est : comment ?

« Nous sommes en plein droit de nous interroger ; la rentrée scolaire c’est dans quelques jours. Comment cela se fera-t-il et dans quelles écoles cette mesure portera-t-elle ses fruits ? », soulève d’un air plutôt remonté, une mère s’apprêtant à acheter les fournitures scolaires pour ses enfants.

La coalition nationale de l’éducation pour tous en République démocratique (Conept) qui va bientôt tenir une table ronde sur la validation du schéma sur la gratuité de l’enseignement, a sollicité l’implication personnelle du chef de l’Etat pour que la mesure de la gratuité soit appliquée dès la rentrée 2019-2020. L’organisation de la société civile a également invité les parents à s’abstenir de payer les frais scolaires en attendant les retombées de leur rencontre.

Utopie pour certains enseignants

« Gratuité de l’enseignement », c’est sur toutes les lèvres… mais comment le dissocier de l’amélioration des conditions de l’enseignant. Un sujet pourtant si sensible qui est évoqué avec beaucoup de légèreté dans ce pays qui semble oublier les années blanches qu’il a connues vers les années 90 sous le règne du maréchal Mobutu.

Il y a quelques jours, le micro de Media Congo Press (MCP) a donné la voix à certains syndicalistes. Sous le sceau de l’anonymat, ils ont affirmé que l’effectivité de la gratuité de l’enseignement est un « défi » pour notre gouvernement. « L’Etat qui de tous ses vœux veut une éducation pour tous ne détient que 30 % sur l’ensemble des écoles opérationnelles alors que les 70 % restants reviennent aux privés et aux confessions religieuses ». Et de compléter « la prise en charge des enseignants par les parents a sauvé plus d’une fois nos établissements scolaires contre les grèves similaires à celles des années 1991-1993, qualifiées d’années blanches », renchérissent-ils.

Enjeux

La réalité sur la gratuité englobe plusieurs enjeux. Partant du ministère de tutelle, de l’enseignement en l’occurrence qui se dispute les prérogatives avec celui de la formation professionnelle et artisanat (FPMA), le gouvernement devrait s’atteler à résoudre ce petit conflit qui handicape le bon fonctionnement de la FPMA censée réguler les écoles techniques.

Le financement. C’est là le nœud du conflit, qui attise la convoitise de l’EPSP, éclaire un agent de la FPMA. « Les partenaires internationaux se sont investis dans le financement de la formation professionnelle à hauteur de plusieurs millions de dollars pour limiter le phénomène immigration afin qu’une fois formé, les jeunes gens ne rêvent plus de l’occident en montant leurs propres affaires dans leurs domaines respectifs ». Souci que le gouvernement n’a jamais tranché, et ce sont les écoles techniques qui en pâtissent, butées à deux ministères et, la FPMA subit l’hégémonie de l’EPSP, au vu et au su de gouvernement.

Que dire du nombre croissant des élèves chaque année et la prise de conscience des parents sur la scolarisation des filles qui augmente le nombre de nouveaux écoliers… pour quels établissements ? Avec 30 % d’écoles disséminées dans les 26 provinces que compte la RDC, quel est le chiffre exact des écoles devant accueillir les élèves gratuitement dès la rentrée scolaire 2019-2020 ? Dans quelles conditions ?

Les parents comme les enseignants se regardent pour l’instant en chiens de faïence attendant voir s’accomplir le miracle sur l’éducation pour tous.

Un souhait pour tous, la réalité cependant rend sceptiques lorsque d’aucuns n’ignorent le caractère sensible de ce secteur qui semble être abordé avec autant de légèreté qui friserait le manque de respect envers les enseignants dont l’amour du travail se résume en la « formation des élites » ne les fait reculer devant aucun obstacle.

Combien de fois n’ont-ils pas grevé ? Combien de fois sont-ils revenus sur leur décision ? Ce sentiment frénétique les retourne, malgré les mauvaises conditions, à la poussière de la craie blanche qui rend hommage à leur « beau métier », le disent-ils si bien après un grand soupir.

A l’instar du secteur de la santé qui a été sacrifié par le vent de la perestroïka, bienvenue à la démocratie, les enseignants et parents attendent beaucoup de sérieux du gouvernement pour le redressement de l’enseignement.

« Espérer la gratuité dès la rentrée prochaine relève de l’utopie », martèle le syndicaliste. « Nous gardons les deux pieds sur terre, le défi est énorme ».

« Rome ne s’est pas faite en un jour », dit-on. Et ce n’est pas l’enseignement en RDC, victime de beaucoup de revers qui va connaitre une nouvelle ère par coup de baguette magique. Il faut que tout le monde travaille.

Mediacongo, 21.08.19

Image – source: Mediacongo

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