Risques d’épidémies: les ministres africains de la santé s’accordent sur une nouvelle stratégie d’intervention
La nouvelle stratégie vise à faire en sorte que les pays puissent faire face aux grandes épidémies et autres urgences sanitaires
BRAZZAVILLE – Avec un événement de santé publique aigu signalé tous les quatre jours sur le continent, il est plus important que jamais pour les pays africains de pouvoir répondre aux urgences sanitaires. Les ministres africains de la santé ont adopté aujourd’hui une stratégie régionale décennale visant à renforcer la surveillance et la réponse intégrées aux maladies et à atténuer les effets dévastateurs des épidémies, comme celle d’Ebola.
L’Afrique connaît plus d’épidémies et d’autres urgences sanitaires que toute autre région du monde, et un grand nombre d’elles pourraient être évitées ou contrôlées grâce à des interventions de santé publique éprouvées.
Il est inquiétant de constater que des analyses récentes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) indiquent que les maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes et d’autres urgences de santé publique sont à la hausse, de façon prévisible dans certains domaines et imprévisible dans d’autres endroits. Cette augmentation est en grande partie attribuable à la croissance des mouvements transfrontaliers et des déplacements internationaux, à l’augmentation de la densité de la population humaine et des établissements informels, ainsi qu’aux impacts du changement climatique et aux changements dans la façon dont les humains et les animaux sauvages interagissent. Plus de 80% des urgences de santé publique dans la Région africaine de l’OMS entre 2016 et 2018 étaient dues à des maladies infectieuses.
La nouvelle stratégie vise à faire en sorte que les pays puissent faire face aux grandes épidémies et autres urgences sanitaires. Il est essentiel que tous les pays disposent d’un système de surveillance efficace, capable de suivre les maladies courantes et de déclencher des alarmes pour endiguer à temps les épidémies de maladies ou pour détecter et enquêter rapidement sur tout regroupement anormal de cas ou de décès liés à un nouvel événement.
La Stratégie régionale pour la surveillance intégrée de la maladie et la riposte 2020-2030 a été adoptée par les ministres de la santé lors de la 69ème session du Comité régional de l’OMS pour l’Afrique, qui se tient à Brazzaville, en République du Congo. Le Comité régional est le mécanisme directeur auquel participent les ministres de la santé des 47 États membres de la Région africaine de l’OMS.
La nouvelle stratégie s’appuie sur plus de 20 ans de travail avec un système de surveillance intégré complet et fondé sur des données probantes qui permet aux pays de garder une longueur d’avance sur de nombreux agents pathogènes dangereux.
« L’épidémie d’Ebola qui sévit actuellement en République démocratique du Congo nous rappelle de manière poignante l’importance d’un système de surveillance solide », a déclaré le Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique. « Ce n’est que lorsque chaque cas sera détecté rapidement, qu’il sera rapidement hospitalisé et qu’on lui offrira des soins médicaux en temps opportun – et que tous les contacts étroits seront vaccinés et surveillés adéquatement – que l’épidémie d’Ebola prendra fin. Tout aussi important, les épidémies dévastatrices peuvent être « tuées dans l’œuf » si les cas sont détectés rapidement avant qu’ils ne se propagent à grande échelle dans les communautés. »
La stratégie régionale exhorte les 47 États Membres de l’OMS à mettre en place et à maintenir des systèmes robustes de surveillance de la santé publique et des systèmes de santé résilients et à engager les ressources financières nécessaires (nationales et extérieures) pour les interventions prioritaires, notamment : assurer un bon leadership et des cadres de responsabilisation rigoureux, promouvoir la disponibilité de travailleurs sanitaires qualifiés à tous les niveaux, fournir une rétroaction aux communautés et partager les informations entre États membres, renforcer une surveillance communautaire de qualité pour détecter et signaler rapidement les maladies prioritaires et améliorer les laboratoires nationaux.
Un rapport d’étape de l’OMS portant sur les cinq dernières années de surveillance et de riposte intégrées à la maladie constate que les pays ont fait des progrès significatifs. Parmi les principaux progrès soulignés, on note l’effectif régional multidisciplinaire en place qui a joué un rôle déterminant dans la riposte aux épidémies majeures. En outre, un grand nombre de pays de la Région africaine de l’OMS disposent d’un centre d’opérations d’urgence en santé publique et ont procédé à l’établissement de profils et de cartes des risques. En 2018, 38 États membres avaient procédé à des évaluations externes conjointes volontaires de leurs capacités d’intervention d’urgence.
Les États membres sont signataires du règlement sanitaire international (RSI) (2005) et sont donc légalement tenus de travailler ensemble pour arrêter la propagation internationale des maladies. En 2017 et 2018, les 47 États membres ont tous soumis leur rapport annuel RSI, contre 22 seulement en 2016. Il demeure très préoccupant qu’aucun État membre ne dispose de toutes les capacités requises en matière de RSI et qu’aucun pays ne dispose donc de toutes les capacités nécessaires pour empêcher les épidémies de se propager au-delà de ses frontières.
Seuls six pays ont mobilisé des ressources suffisantes pour mettre en œuvre le RSI, et moins d’un tiers des États membres disposent d’un système de laboratoire fonctionnel.
« Grâce à ce nouveau plan de renforcement de la surveillance et de la réponse de l’Afrique aux maladies, nous espérons que les pays feront les investissements nécessaires pour renforcer leurs capacités », a déclaré le Dr Moeti. « En payant maintenant pour une surveillance robuste, on améliorera considérablement la santé des Africains, non seulement aujourd’hui, mais aussi à l’avenir. »
La nouvelle stratégie invite l’OMS et ses partenaires à fournir un appui technique et financier pour sa mise en œuvre et à documenter les progrès accomplis.
Source: communiqué de presse WHO / OMS, 21.08.19