Affaire Minembwe : Germain Nzinga Makitu fait l’autopsie d’un mensonge présidentiel (Libre Tribune)
Analysant la sortie médiatique du président Tshisekedi face à la clameur nationale provoquée par d’instauration de Minembwe comme commune rurale, la critique exégétique appliquée au discours politique de Tshisekedi de l’analyste politique et géostratégique, Germain Nzinga Makitu, en trois verbes soigneusement choisis (permettre, ordonner, suspendre), conclut au mensonge présidentiel.
« Je promets d’ordonner de suspendre la mesure d’instauration de Minembwe comme commune rurale », c’est en ces termes que s’est exprimé avant-hier le président Félix Tshisekedi à Goma face à la clameur générale du peuple congolais. Il nous suffit d’analyser les trois verbes-clé (promettre, ordonner et suspendre) pour pouvoir déchiffrer le fond codé de son message.
Promettre sans assumer
Un chef qui tient à agir et à assumer ses responsabilités ne promet pas. Il prend illico des mesures concrètes pour passer à l’acte en vue d’affirmer l’autorité de l’Etat. Dès lors qu’il promet, c’est là un autre métalangage qui lui fait jouer avec le temps pour ne jamais rien faire du tout.
Ce qui en deux ans du pouvoir, cadre si bien avec la gouvernance Fatshi à savoir « beaucoup de promesse pour presque pas de réalisations. ». Comme les autres promesses, celle de la suspension de la démarche d’ériger Minembwe en commune rurale ne se réalisera jamais… Elle aura juste servi d’enfumer le peuple congolais.
Ordonner sans ordonnance
En attendant l’ordonnance présidentielle, demandons-nous à qui elle s’adressera : à son gouvernement, à son ministre de Décentralisation ou aux nouveaux administrateurs et administrés de Minembwe. Cette ordonnance viendra-t-elle biffer un décret déjà en vigueur ? Sur quelle base juridique s’est faite cette érection et quel pourra être le pouvoir de Fatshi pour y mettre un terme ? Azarias Ruberwa aura-t-il agi sans l’aval du président de la République ? Aurait-il décidé d’ériger cette commune rurale sans en avoir informé au préalable le président au moment où tous les hauts fonctionnaires de l’Etat étaient présents ? L’aurait-il fait sans l’autorisation expresse du commandant suprême et du garant de l’intégrité du territoire ? Si oui, qui serait hiérarchiquement supérieur à qui en RDC? Et si le concerné affirme l’avoir fait sur instruction du chef de l’état, c’est que le président ment sur ses promesses car il ne pourra jamais se dédire en ordonnant contre soi-même ! Je me perds en conjectures…
Suspendre et non abroger
En langage juridique, la suspension est caractérisée par un simple arrêt PROVISOIRE. Elle peut juste affecter le déroulement d’un contrat ou le moment de l’exécution de la décision contractuelle devenue définitive. Ce caractère provisoire est encore bien rendu par ce que Fatshi disait au caucus des députés de Kivu venus lui exprimer leur inquiétude à Goma quand il leur promettait de « surseoir » la décision.
En plus, l’acte de « suspendre » ou de « surseoir » ne veut pas dire abroger. Pourtant toute cette colère populaire des congolais attend vivement que soit abrogé une fois pour toutes ce décret scélérat portant érection d’une commune rurale à Minembwe afin de ne pas créer un précédent qui autoriserait désormais les occupants du Congo à procéder de la sorte sur le reste du territoire national.
Le jeudi matin, le président nous a réservé une autre rengaine en ces termes : « C’est une situation explosive… J’ai décidé purement et simplement d’ANNULER tout ce qui a été fait à Minembwe. C’est arrivé quand j’étais absent du pays et je n’ai pas été mis au courant ». De là à nous poser deux questions fondamentales : comment un Chef de l’Etat peut-il invoquer son voyage à l’étranger pour justifier d’ignorer l’existence d’une si gravissime cérémonie de Minembwe à laquelle ont pris part Membres de son gouvernement, Députés, Officiers militaires de haut rang et Diplomates étrangers ? Quand bien même on est président, mais peut-on vraiment annuler VERBALEMENT un décret signé par un Premier Ministre sans la présence d’un acte officiel authentifiant cette annulation?
A ce propos, dans un point de presse accordé cette semaine par Sieur Azarias Ruberwa aux ressortissants banyamulenge, ce dernier dit clairement ceci : « Notre guerre de citoyenneté, nous l’avons vaincue (gagnée). Qui dit le contraire est un fou (…) Que les fils Minembwe aient leurs racines dans le territoire de Minembwe où ils doivent vivre avec les autres en paix. Qui veut vivre avec eux, vivra avec eux et on verra parmi les congolais ceux qui ont la tête normale comme Tshisekedi qui comprennent que les banyamulenge doivent construire avec eux (…) Notre Etat nous l’avons conquis à tous les échelons et nous avons même l’ancien président et nous avons aussi le Haut Commandement de l’armée. »
Ruberwa parle de Minembwe comme « notre état conquis » et ce n’est pas rien. Prétendre suspendre ou supprimer la mesure fâcheuse sans jamais démettre ni déférer devant les cours et tribunaux un tel Ministre qui débite des déclarations menaçant directement l’intégrité du territoire, c’est fournir la preuve indiscutable d’une RDC devenue un Etat failli et de l’actuel mandat présidentiel transformé en une gouvernance par procuration et au service de l’ennemi.
Germain Nzinga Makitu