Problématique de lexploitation des voies navigables en Afrique centrale, par Godefroid ngamisata
« Dans notre sous-région encore mal pourvue en infrastructures, la vision quon avait de lusage des eaux internationales sest souvent limitée à la navigation. Il faut dire quavec près de 30.000 km de voies navigables internationales ou intérieures, le fleuve Congo et ses affluents constituent les véritables autoroutes naturelles de la sous- région. Elles sont lun des maillons stratégiques et vitaux du système de transport de desserte des Etats de lAfrique centrale. Les économies et le développement de nos pays en sont largement dépendants ».
Ces propos sont de Benjamin Ndala, secrétaire général de la Cicos. Il sexprimait il y a peu devant un parterre dexperts, représentants de bailleurs de fonds, acteurs étatiques et de la société civile.
Les pays membres de la Cicos regroupant la République démocratique du Congo, le Cameroun, la République centrafricaine et la République du Congo sont tous confrontés aux mêmes difficultés à travers les différents services de navigation.
Les infrastructures et les équipements portuaires sont vétustes. Dans certains ports, on note une insuffisance de magasins et équipements de manutention. Toutefois, on trouve des grues de grande capacité (en moyenne 30 tonnes à 12 m) installés dans les ports stratégiques du réseau tels que Bangui, Brazzaville, Kinshasa et Ilebo. Quant aux services des voies navigables, elles sont entre autres confrontées à linadéquation entre les moyens mis à la disposition de lentretien et à lampleur des travaux à exécuter ; vétusté et insuffisance des unités de servitude (dragues, baliseurs, vedettes hydrographiques, etc), insuffisance de dragage ou de balisage ; ensablement des ports au niveau du Pool Malebo ; diminution des plans deau sur lOubangui (actuellement 8 mois de navigation sur 12) ; présence du seuil rocher de Zinga à 60 Km en aval du port de Bangui.
LA NAVIGATION INTERIEURE
Les participants ont soutenu quil est question de promouvoir le dialogue, lapprentissage et la coopération sur les questions liées à leau dans lensemble de la sous-région de lAfrique centrale en vue déradiquer la pauvreté. Le développement de lAfrique centrale doit tenir aussi compte de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD).
Il convient de souligner que le Bassin dispose dune flotte très importante, estimée à plus de 10.000 unités. La Cicos a collecté, à ce jour, les données relatives à 4.125 de ces unités flottantes dont une proportion importante de bateaux construits en bois communément appelés « baleinières ». Elle est destinée au transport des marchandises tels les grumes, les hydrocarbures, les conteneurs, le bétail sur pied et les produits agricoles.
Malheureusement, le Bassin ne dispose plus de barges pour le transport de passagers. Une grande partie de la flotte appartient au secteur privé. Lexploitation est assurée en général sans respect des normes de sécurité, le personnel navigant est vieillissant et sous qualifié et lunique centre de formation dans la sous région a fermé depuis plus de dix ans. Aucun système de communication nest organisé entre les bateaux et les administrations publiques à terre (Avis aux navigateurs, assistance, sauvetage,..).
Le mode dexploitation le plus utilisé au sein du bassin est le poussage. Les unités exploitées sont dimensionnées en fonction des régimes et des configurations hydrographiques des cours deau. Au cours de lexploitation, les transporteurs sont confrontés à diverses barrières physiques et non physiques, aux contraintes dues aux nombreuses tracasseries administratives et policières aux postes de contrôle érigés le long des voies deau ; aux prolongations des délais de route dues aux attentes à ces postes ; à la réduction des plans deau sur lOubangui et à la présence du seuil rocheux de Zinga. Cette situation réduit le temps de navigation à six mois au cours de lannée, au déficit du balisage de certains tronçons hypothéquant la navigation de nuit…
PARTENARIAT CICOS-IRM
En rapport avec la lutte contre les tracasseries, un atélier sous-régional organisé vers fin octobre à Bangui, en République centrafricaine a opté pour une approche intergouvernementale. Les pays de la sous-région de lAfrique centrale sont tous confrontés aux mêmes tracasseries qui empêchent la fluidité des trafics commerciaux sur les grandes rivières telles que le fleuve Congo, lOubangui et la Sangha. Lors de cet atelier, les participants ont apprécié le modèle IRM/ Usaid (Innovative Ressources management) avec le soutien financier de lUsaid dans la lutte contre la pauvreté à travers le projet « Relance Economique du Fleuve Congo ». A létape actuelle, les experts étudient des mécanismes détudes pour mettre sur pied les stratégies susceptibles de favoriser lactivité commerciale dans le bassin du Congo.
La question de leau, a reconnu Bedoumra Kordje, directeur Facilité Africaine de lEau, est une question vitale. Le processus délaboration du PAS de gestion durable du bassin du Congo sera long et complexe, mais certainement très passionnant, car il sagit du bassin du Congo dont limportance régionale et mondiale est connue de tous. Cest dans cette optique quon a noté la présence de plusieurs institutions qui tiennent à jouer un role de premier plan sur cette épineuse question.
Il sagit entre autres de lOrganisation météorologique mondiale (OMM), lOrganisation mondiale pour lalimentation (Fao), lUnion européenne, la Banque mondiale, lAgence américaine de développement (Usaid), la Convention pour les Zones humides (RAMSAR), le Fonds mondial pour la nature (WWF), la Coopération Technique Allemande (GTZ), la Facilité africaine de lEau (FAE), lUnion mondiale pour la nature (UICN), le Fonds Mondial pour lEnvironnement du Programme des Nations unies pour le développement (FEM/PNUD), la Communauté économique et monétaire de lAfrique centrale (Cemac), la Communauté Economique des Etats dAfrique Centrale (CEEAC), le partenariat mondial de lEau/ Afrique centrale (GWP/CFTAC), lOrganisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS), Inovative Resources Management (IRM), lAfrican Society Network on water and Sanitation (Anew) … ainsi que les usagers du transport fluvial dans les deux Congo. Un mot sur le PAS
Le Plan daction stratégique (PAS) pour la gestion durable de leau du Bassin du Congo est le cadre de référence qui définit la stratégie dintervention pour la gestion durable du bassin du Congo ainsi que les modalités de son opérationnalisation. Il permet de déterminer les principales actions qui seront menées sur le terrain, les organisations à impliquer dans la mise en oeuvre de chacune de ces actions et den fixer les échéanciers de réalisation.
Pendant deux jours, soit du 24 au 25 janvier au Grand Hôtel Kinshasa, les experts et de pays africains de lAfrique centrale membres de la Cicos ont contribué efficacement aux débats. Lobjectif principal de la CICOS est de promouvoir lintégration régionale à travers une exploitation durable et équitable des voies deau que constituent le fleuve Congo et ses principaux affluents – lOubangui, Kasaï et la Sangha – à des fins de navigation.
A ces missions initiales, se sont greffées celles de la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE). Aussi, un additif à lacte constitutif de la CICOS a été élaboré et approuvé par le Comité des Ministres de la CICOS élargi aux ministres en charge de la gestion des ressources en eau des pays membres en novembre 2005 à Brazzaville. Cet additif jette les bases pour la création dun environnement favorable en vue de la collaboration et la coordination dune mise en valeur durable et mutuellement bénéfique du bassin. Ladditif à laccord, instituant le régime fluvial uniforme et créant la CICOS, offre une chance exceptionnelle pour la mise en œuvre de la gestion des ressources en eau transfrontalières et la transformation de la CICOS en une organisation de bassin fluvial. Les attentes des pays riverains en termes de résultats et de retombées de la coopération sont donc renforcées et leur satisfaction constitue ainsi le plus grand pari à gagner pour assurer le succès de la CICOS.
Dans cette optique, la CI COS a décidé dentreprendre lélaboration dun Plan dAction Stratégique (PAS) pour la gestion durable du Bassin du fleuve Congo au cours des 12 à 18 prochains mois. Ce qui lui permettra dengager laction une fois sa mutation institutionnelle complètement réalisée. A cet effet, elle a sollicité le concours financier de la FAE qui est une initiative du Conseil des Ministres Africains chargés de lEau (AMCOW) logée et gérée par la BAD et dont la mission consiste notamment à mobiliser des ressources destinées à financer des activités liées à la création dun environnement propice, à attirer des investissements pour la mise en valeur des ressources en eaux en Afrique et à soutenir la création et le renforcement des organisations du bassin. La FAE a donc marqué son accord pour fournir à la CICOS lappui sollicité.