Sans des réformes en profondeur, le journalisme restera un métier à risque en RD Congo (JED)
KINSHASA – La célébration, le 3 mai 2021, de la Journée mondiale de la liberté de la presse en RD Congo coïncide avec l’investiture du nouveau Gouvernement dit de « l’Union Sacrée de la Nation », après la rupture de la coalition politique entre l’actuel Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, et son prédécesseur Joseph Kabila. Dans son discours-programme prononcé, le 26 avril 2021, devant l’Assemblée nationale, le nouveau premier ministre, Jean Michel Sama Lukonde, a déclaré : « Il est plus que temps de redorer l’image de marque de notre pays au travers d’une communication stratégique structurée, présentant la RDC comme un pays où la démocratie se consolide, où les droits et libertés sont respectés, où la presse fonctionne en toute liberté, dans la responsabilité, et donc un pays où tous les espoirs sont permis ».
Les attaques continuelles contre la presse au cours de cette période de la crise sanitaire mondiale due à la présence de la pandémie de Covid-19 a aggravé une perspective déjà sombre depuis l’ancien régime politique en RDC. Les bonnes promesses et l’espoir suscité à l’avènement du nouveau pouvoir n’ont pas suffit pour améliorer les conditions de travail des journalistes en mettant notamment fin à l’impunité qui prévaut pour les cas d’attaques contre les journalistes ou leurs médias.
Plus de deux ans après l’accession au pouvoir du Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, JED constate une recrudescence inquiétante d’attaques contre les journalistes et les médias. La petite détente observée quelques mois après sa prise du pouvoir, en janvier 2019, n’a été que de courte durée au vu de la recrudescence des violations de la liberté d’informer.
Les différentes statistiques des atteintes à la liberté de la presse démontrent une tendance croissante des arrestations arbitraires, des intimidations, des menaces, et la censure imposée aux médias en vue de réduire les journalistes en RDC au silence.
Depuis le début du quinquennat du Président Tshisekedi, JED a déjà enregistré 228 cas d’atteintes à la liberté de la presse sur l’ensemble du territoire national dont 47 cas depuis le début de cette année 2021qui se répartissent de la manière suivante :
· 14 journalistes ayant reçu des menaces directes ou indirectes pour des raisons professionnelles
· 11 journalistes interpellés, c’est-à-dire détenus pendant moins de 48 heures
· 9 journalistes agressés ou torturés dans l’exercice de leur profession
· 7 journalistes incarcérés, c’est-à-dire ayant été privés de sa liberté pendant plus de 48 heures
· 5 cas des censures ou d’entraves à la libre circulation de l’information
· 1 Journaliste porté disparu
Dans le dernier classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF, la RDC occupe la 149ième place sur 180 pays, soit une place de plus par rapport à l’année 2020 où elle a occupé la 150ième position. Au simple regard de cette légère évolution de la position occupée, l’analyse actuelle de l’environnement du travail des journalistes indique une dégradation de l’état de la liberté de la presse dans le pays.
Au cours de cette année 2021, la détérioration de la situation de la liberté de la presse a été plus constatée dans la province de la Mongala où l’on enregistre, depuis quelques mois, de plus en plus des cas d’attaques et des menaces contre les journalistes et les médias.
Depuis la reprise des hostilités militaires et la résurgence des foyers de tensions dans la province de l’Itiru, il devient de plus en plus difficile pour les journalistes d’exercer librement leur travail sans être des cibles des miliciens opérant dans cette province. Dans cette province, plusieurs journalistes ont été victimes des graves menaces de mort de la part d’un groupe de miliciens. A Kinshasa et dans certaines provinces, plusieurs journalistes ont été soumis aux diverses pressions judiciaires depuis le début de cette année.
Le thème de la célébration de la journée mondiale dédiée à la liberté de la presse retenu pour cette année, à savoir : « L’information comme bien public » est un appel à renouveler l’engagement du gouvernement congolais en faveur de la liberté d’expression et la liberté de la presse et des professionnels des médias pour l’exercice de cette liberté avec responsabilité.
Compte tenu du niveau de violence à l’encontre des journalistes et des médias, JED lance un appel pressant pour des réformes de la loi sur la presse et la lutte contre l’impunité doit être une priorité. Sans lesquelles, la situation des journalistes restera toujours précaire.
Source: communiqué de presse Journaliste en Danger, 03.05.21