Le représentant du FMI
au Congo-Kinshasa, M.
Xavier Maret, a déclaré que "la
préoccupation de la communauté internationale était d'éviter un nouvel
endettement public de la RDC". Il rajoutait, selon selon la dépêche de l'AFP,
qu'on devrait prendre des précautions à cause de l'importance des sommes qui
sont en jeux et qui pourrait avoir un impact sur l'ensemble de l'économie du
pays. En d'autres mots, après 15 jours passés dans le plus grand hôtel de
Kinshasa, marqués par le va et vient de son cortège de limousines et de 4 x 4,
entre l'hôtel et le ministère des finances, voici le pronunciamiento de M.
Maret.
Selon l'Obsac, M. Maret agite
ici non seulement le traditionnel spectre de l'inflation, mais aussi une
préoccupation géopolitique qu'il aurait mieux fait de garder pour lui-même. On
se demande, par exemple, de qui ou de quoi au juste il est question quand M.
Maret parle de "la communauté internationale"? S'agit-il des pays du G8, ou de
ceux qui sont membres de l'OCDE, ou alors est-ce qu'on parle de l'Europe ou de
l'Empire étasunien? Bref, le concept de "communauté internationale" n'a aucun
des avantages et pas mal plus de défauts comparativement à ce que le général De
Gaulle, appelait "le Machin", c'est à dire l'ONU.
En d'autres mots M.
Maret prend ici le relais de la guerre des mots qui s'est récemment amplifiée
entre les États-Unis et de la Chine. M. Maret parle également pour les Européens
qui se chagrinent de voir leurs liens coloniaux et néo-coloniaux se déliter à
vue d'oeil face à l'assaut politique et économique de la Chine sur le continent
africain. Bref, l'offre chinoise aux chefs d'État des démocratures africaines
c'est une Françafrique, sans les désavantages de Françafrique (faut le faire!).
Malheureusement, il faut bien reconnaître qu'il n'est pas sage de mettre tous
ses oeufs dans le même panier et que, avec la probabilité de plus en plus élevée
d'une récession mondiale à l'horizon (because, justement que le $US pique du nez!),
ce n'est pas vraiment le moment de virer les Nokos belges, français ou autres.
De toute manière on verra avec le prochain remaniement du gouvernement quel
seront les politiciens congolais les mieux placés pour cueillir la manne
chinoise.
M. Maret a évidemment rajouté le petit couplet diplomatique
d'usage, concernant le "bon élève" qu'était devenu la RDC, en félicitant le
gouvernement qui, depuis sa formation en février dernier, a introduit une
politique fiscale serrée qui aurait permis, non seulement une certaine
appréciation du Franc congolais (par rapport au dollar) mais aussi un déclin
substantiel de l'inflation qui se situe maintenant à neuf pourcent, sans compter
une augmentation des réserves de devises étrangères de la Banque centrale de la
RDC.
L'Obsac vous offre ici une traduction supplémentaire dans le
paragraphe précédent des propos de M. Maret. Lorsque le représentant du FMI
affirme que la politique fiscale serrée du gouvernement Gizenga a permis une
appréciation du franc congolais par rapport au dollar US, c'est de la rigolade.
Pourquoi? Parce qu'à peu près toutes les monnaies du monde se sont appréciées
par rapport au dollar US. Le dollar canadien qui, il y a quelques années valait
à peine 0,70 $US est maintenant à parité avec la devise de son grand voisin
étasunien, mais il n'a pas cessé de piquer du nez par rapport à l'euro (1 euro =
1,49$CAN)! M. Maret aurait donc mieux fait de nous parler de l'évolution du
franc congolais par rapport à l'euro, car cela nous aurait donné une bien
meilleure idée de la performance économique véritable de la RDC. Soit, le maître
de M. Maret réside à Washington, mais ce n'est pas une raison pour faire preuve
de mauvaise foi dans ses déclarations publiques.
En ce qui a trait au
taux d'inflation au Congo-Kinshasa, il est de connaissance notoire que que la
méthodologie utilisée par le FMI (et la Banque Mondiale) pour jauger de la
"stabilité macro-économique" des pays du sud, est quelque peu bancale.
L'évolution du prix du panier d'épicerie de la ménagère congolaise est trop
souvent minimisé, ou noyé dans un ensemble abracadabrant de prix de biens
durables, du secteur immobilier, de biens industriels, de produits importés à
bas prix de Chine qui font en sorte, au bout du compte, que les importants
mouvements à la hausse (ou, plus rarement, à la baisse) des denrées alimentaires
et de premières nécessités, encaissés par la population congolaise malnutrie et
à la santé précarisée, sont minimisés et même cachés par ce taux "officiel"
d'inflation de 9 pourcent.
Pierre
Bigras