Tshiteya Mbiye (musicien et homme de radio)
Ce
samedi 22 mars, au Crématorium Père la chaise à Paris, le mot d'au
revoir du Bâtonnier Mbuyi MBIYE à son jeune frère a été émouvant. Il a
demandé à l'assistance nombreuse présente de s'exprimer en langues
congolaises. Le Bâtonnier MBIYE a parlé en swahili " Tshiteya uli kuwa
muloko yangu, tulukuya ba rafiki…" " Tshiteya tu étais mon jeune
frère mais nous étions amis.." Après avoir remercié son épouse Mayé et
ses enfants, il a terminé en tshiluba en lui demandant de saluer leur
maman et d'autres membres de familles qui l'ont précédés. Un grand
"Radioteur" nous a quitté. Tshiteya MBIYE était depuis sa création en
1992, Directeur du réseau EPRA- Echanges et Productions Radiophoniques,
composé de 130 radios associatives en France. Il était un ancien
responsable d'actions de formations pour les cadres de radiodiffusion,
également responsable d'actions de formations en droit de l'audiovisuel
à l'Institut Nationale de l'Audiovisuel (INA). Tshiteya MBIYE fut dans
sa vie, producteur à France Culture, France Musique et RFI. Il était
diplômé d'Economie Appliquée de la Sorbonne-Paris I Panthéon. Le métier
de la radio , il l'avait appris à "la voix du Zaire" le grand Tam-Tam
de l'époque grâce notamment à Papa Isidore Kabongo, directeur à la
Radio Télévision Nationale Congolaise (RTNC). C'est ce dernier qui le
mettra dans l'avion qui l'amènera en France pour ses études. Nous
avions l'habitude de l'appeler "Mukubwa Tshiteya". Sa silhouette, était
connu de la majorité des radioteurs membres de l'ARCO.Tshiteya MBIYE à
participé à la majorité de nos " Festival Fréquences Libres ". Au
Cimètière du Père-LaChaise, après la lecture des e-mails des
condoléances dont principalement celui de Papa Isidore Kabongo,
l'épouse de Tshiteya, Mayé a invité les personnes présentes à prendre
une fleur pour déposer sur le cercueil de Tshiteya. C'est rempli des
fleurs que les agents funéraires ont emporté le cercueil, l'assemblée
s'étant mis débout pour la circonstance.
Tshiteya
MBIYE et Joseph TSHIDIBI,de la Radio télé Universelle de Tshikapa
(Kasaï Occidental) au Palais du Peuple , à Kinshasa,lors du Festival
"Fréquences Libres" le 19 mars 2001
Dans son mot de
circonstance, le professeur Elikia M'BOKOLO a mis en exergue l'homme de
culture et de rencontre qu'était Tshiteya MBIYE. Sa passion
radiophonique, son amour et ses recherches pour les sonorités de la
musique Congolaise ont été évoqués. A trois occasions, j'ai eu à
déjeuner chez lui, au 62 du Faubourg Poissonnière. La dernière fois, il
y a quelques mois , c'est lui qui avait préparé à manger: du feuille de
manioc, avec du riz ….la musique de Kabasele Grand Kallé et de Tabu
Ley Rochereau qu'il m'avait fait écouter je ne l'ai jamais entendu
ailleurs. Même pas à Kinshasa, source de cette même musique. Tshiteya
MBIYE était un collectionneur de la musique congolaise. Certes la
France a perdu un citoyen de préférence, l'EPRA a perdu son directeur,
mais la République Démocratique du Congo a perdu un fils, un
partenaire…Tshiteya MBIYE a permis aux Radios Associatives et
Communautaires ARCO-Kinshasa, de proposer des émissions de 20 minutes,
à l'Epra. L'achat des émissions par la banque de programmes de l'Epra a
permis à nos radios : Radio Elykia, Réveil FM, Radio ECC, Radio
Kintuadi …de s'acheter des minidisques. Tshiteya MBIYE est venu
souvent en République Démocratique du Congo participer à nos assises:
Palais du Peuple (2001), Halle de la Gombé (2004), Halle de
l'Etoile-Lubumbashi (2005). Il aimait beaucoup Lubumbashi, cette ville
qui l'a vu naître et grandir. Dans l'entre temps lorsqu'il venait voir
la famille notamment à Kinshasa, il n'hésitait pas à signaler sa
présence. Lorsqu'il était pour le décès de sa mère dans la commune de
Lemba, les radioteurs de Kinshasa: Radio ECC, Radio Elykia, Réveil FM,
Radio Kintuadi avaient organisé une réception à son honneur à la salle
de réunion de la Cathédrale du Centenaire Protestant à Lingwala. Le
pasteur Nkulu NKANKONDE s'y était beaucoup investi.Tshiteya MBIYE et
ses grands enfants étaient très ému par cet accueil. On lui avait fait
une grande surprise en invitant Papa Isidore KABONGO, directeur de la
RTNC. Un grand baobab est tombé, certes la vie est faite des
itinéraires et rencontres, nous sommes comblé que le notre ait pu
rencontré le sien.
Festival "Fréquences Libres" 19 au 22 mars 2001
Sous
le regard attentif de Ricky Mapama, modérateur,Tshiteya MBIYE en train
de parler du pluralisme radiophonique comme socle d'une démocratie
médiatique
Kinshasa, du 19 au 22 mars 2001, s'est tenu au Palais
du Peuple dans la salle qui sert de plénière aux sénateurs, notre
premier Festival "Fréquences Libres". Les radioteurs du Kasaï Oriental,
du Kasaï Occidental, du Bas-Congo, de Bandundu , de Kinshasa , du
Congo-Brazzaville, du Tchad, du Cameroun, du Gabon et du Burundi ont
mis en place l'ARCO pour la défense du troisième secteur du Paysage
Audiovisuel Congolais (PAC) et le GRAC pour l'Afrique Centrale. Les
médias associatifs et communautaires sont alternatifs et non
commerciaux.Ce secteur médiatique est ignoré par la loi 002/96 du 22
juin 1996 qui régit l'exercice de la liberté de presse en République
Démocratique du Congo. Une délégation des invités étaient venus de
Paris , dont Tshiteya MBIYE qui était tout heureux de fouler la terre
de ses ancêtres. Dans un contexte politique extrêment difficile, le
Festival "Fréquences Libres" s'était tenu à 1mois1/2 de l'assassinat de
M'zée Laurent Désiré KABILA au Palais de Marbre. Notre discours sur la
libération des ondes en République Démocratique du Congo, le libre
choix des Congolais d'écouter les radios et de regarder les télévisons
de leur choix, n'avait pas plus à Dominique SAKOMBI INONGO ministre de
l'information et presse, membre très influent du Comité de Pouvoir
Populaire (CPP). Dominique Sakombi va délaisser son discours préparé va
répondre à notre discours pendant 45 minutes, disant tout ce qu'il
avait apporté à la RDC: les stations terriennes (qui ne fonctionnent
plus), les cars de reportages,… avant de déclarer l'ouverture du
Festival " Fréquences Libres". Disons qu'avec quelques années de recul,
nous avons le droit de penser que nous étions bien encadré par SAKOMBI
INONGO.
C'est ici l'occasion de rendre hommage à deux radioteurs
africains du Festival "Fréquences Libres"2001 qui nous ont également
quitté: David N'DACHI TAGNE correspondant de RFI au Cameroun. Il était
arrivé en avance à l'aéroport de N'Djili, David N'DACHI TAGNE (décèdé
le 10 octobre 2006) a eu la mesure de sa popularité dans la capitale
Congolaise. Les agents de la Direction Générale de Migrations (DGM)
l'avaient entouré , puis l'ont amené au salon d'honneur. Ils voulaient
tous connaître la suite de son reportage sur le dessèchement du lac
Tchad. Les agents de la DGM l'avaient choyé voire gâté. Par contre
notre confrère Antoine NTAMIKYEVO (décèdé le 31 juillet 2003),
directeur de la Radio Sans Frontière Bonesha du Burundi, fut cueilli
par les agents de la DGM qui l'ont accusé d'être un espion, il fut
soumis à un interrogatoire simplement parce qu'il était Burundais et
dans l'entendement des agents de la DGM, son pays était l'un des trois
pays agresseurs de la République Démocratique du Congo donc tout
Burundais était un agresseur potentiel. Ils s'étaient donné comme
consigne de l'expulser sur n'importe quel vol international d'un avion
qui atterrirait à N'Djili. J'étais personnellement allé le chercher à
l'aéroport. Antoine NTAMIKYEVO avait été retenu durant 4 heures.
Freddy
MULONGO et Dominique SAKOMBI, ministre de l'information et presse,
membre très influent des CPP, après le discours d'ouverture du Festival
"Fréquences Libres", le 19 mars 2001
En faisant cet hommage à Mukubua Tshiteya, nous pensons aussi à
eux qui nous ont permis de vivre cette unité radiophonique en Afrique
centrale. La richesse de cette rencontre du Palais du Peuple provenait
dans la diversité des participants et la contribution de tout un chacun
fut un pas en avant vers le pluralisme radiophonique sur le continent.
A Bernard SEXE et Francis JOSEPHE, de l'Ambassade de France à Kinshasa.
Nous ne pouvions terminer sans penser à nos aînés: Papa
Isidore KABONGO, Papa Herman Mushagasha, Tshitenge Malika…tous amis
de Tshiteya MBIYE. Eux qui par souci patriotique ont décidé un jour
après leur formation de rentrer au pays pour apporter leur expertise à
la Nation. Eux qui depuis des années sont cantonné au rang de
Directeurs, payés au lance-pierres…Eux à qui on refuse de mettre à
leur disposition les moyens nécessaires pour apporter les innovations
qu'il faut à la Radio Télévision Nationale Congolaise (RTNC), la voix
du peuple. Eux qui voient souvent les gens parachutés, venus de nulle
part, sans C.V qui deviennent leur supérieur hiérarchique et à qui ils
doivent apprendre le métier. Eux qui sont nos bibliothèques vivantes de
l'histoire médiatique de notre pays … qui voient de leurs propres
yeux la RTNC mettre sa costume de "la voix de son Maître" et boutonner
la pensée unique.
Certes, Tshiteya MBEYA est mort loin de la terre de ses ancêtres, mais ses compétences et aptitudes ont été reconnues par tous.