Entreprendre en Afrique Centrale

Sur l’initiative de Monsieur Armand De Decker, Ministre de la Coopération au Développement, le Service Public Fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement, et plus particulièrement sa Direction générale de la Coopération au Développement (DGCD), ont organisé la conférence « Entreprendre en Afrique centrale » les 27 et 28 juin 2005 à Bruxelles, avec la collaboration de la Chambre de Commerce Belgique-Luxembourg-pays ACP (CBL-ACP) et de l’Institut Royal des Relations Internationales (IRRI).

L’objectif était de mieux identifier les conditions d’un redéploiement du secteur privé en Afrique centrale et d’inciter les entrepreneurs à y investir, et plus particulièrement en République démocratique du Congo, au Rwanda et au Burundi, trois des principaux pays partenaires de la coopération belge et aussi trois pays dont les développements économiques sont étroitement liés.

La session inaugurale de la conférence et l’après-midi réservée aux conclusions ont été rehaussées par la présence de SAR le Prince Philippe de Belgique.

200 personnes ont activement participé aux travaux pendant les deux jours.  Plus de la moitié des participants représentaient des entreprises belges ou africaines.  A ce propos, la conférence a bénéficié de la précieuse collaboration de CBL-ACP, déjà citée, mais aussi de la Fédération des entreprises du Congo, de la Rwanda Private Sector Federation et de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burundi.  Les autres participants représentaient des instances publiques impliquées dans l’appui au secteur privé, divers acteurs de la coopération belge, dont la CTB, BIO et bien sûr la DGCD, les agences régionales belges de commerce extérieur et des organisations internationales de coopération (Banque Mondiale, Commission européenne, Banque européenne d’investissement). 

Monsieur Richard Hecklinger, Secrétaire général adjoint de l’OCDE, l’un des principaux orateurs invités, a pris la parole lors de la session d’ouverture le lundi matin.  Les gouvernements des trois pays africains étaient activement représentés par Monsieur Kaberuka, Ministre des Finances du Rwanda, Madame Wakana, Ministre de la Planification du Burundi, Monsieur Minani, Ministre du Commerce et de l’Industrie du Burundi et Monsieur Kabinga, Vice-Ministre des Affaires étrangères, en charge de la Coopération internationale, de RDC.  Monsieur le Président Kabila était représenté par son conseiller économique, Monsieur Mukanya.  Outre Monsieur De Decker, Ministre de la Coopération au Développement, le gouvernement belge était représenté par Madame Gisèle Mandeila Malamba, Secrétaire d’Etat aux Familles et aux Personnes handicapées.

Lundi 27 juin, matinée, session d’ouverture de la conférence

Intervention de M. Armand De Decker, Ministre belge de la Coopération au Développement

Alors qu’il y a encore quelques années il n’était question de l’Afrique que comme un continent de misère et de désespoir, elle cherche aujourd’hui à se développer en se tournant vers l’avenir et en prenant elle-même son destin en main avec l’aide des autres continents.

Lors des sommets de Monterrey et de Johannesburg en 2002, une série de moyens ont été identifiés pour la réalisation d’un tel objectif, parmi lesquels le besoin d’encourager et de développer l’entreprise et l’initiative privée.

Ceci suppose de créer un environnement favorable au déploiement des entreprises, actuellement freiné par le  manque de transparence des transactions,  par un droit de la propriété déficient ou encore par des  politiques fiscales défaillantes.  La première  condition étant bien entendu une situation politique stable  et la paix.

Après avoir remercié le Prince Philippe ainsi que les autres participants à la conférence pour leur importante contribution au débat sur le développement de l’Afrique centrale au moyen de l’entreprise, le Ministre De Decker a rappelé que cette initiative s’inscrit dans une démarche initiée par son prédécesseur.

L’encouragement de l’esprit d’entreprise en Afrique centrale participe aux idées à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs du millénaire. Mise à l’honneur lors des conférences de Monterrey et de Johannesburg, l’entreprise fait aujourd’hui l’objet de beaucoup d’attention de la part de nombreuses instances comme l’Union des Etats d’Afrique.

Toutefois, le développement de l’entreprise en Afrique centrale ne pourra se faire que pour autant qu’une série de conditions soient remplies.

Il importe ainsi que les pays riches apportent le financement nécessaire. Il peut également s’agir de celui de la diaspora. En contrepartie, les Etats d’Afrique doivent rendre les transactions plus transparentes, remédier à une politique fiscale défaillante et renforcer la sécurité juridique liée au droit de propriété.

Ensuite, les Etats doivent créer un climat propice à l’investissement, ce qui, par ailleurs, répond aux souhaits de la population. Il s’agit notamment de développer la justice sociale, protéger les droits fondamentaux, faire taire les armes, améliorer l’environnement et assurer la paix entre tous les acteurs.

Enfin, il importe d’encourager la prise de conscience de l’ensemble des acteurs régionaux. Les Burundais, les Congolais et les Rwandais vivront encore longtemps côte à côte. Se félicitant des efforts fournis par chaque Etat d’Afrique centrale, le Ministre appelle de ses vœux la relance de la Communauté économique des Grands Lacs.

Intervention du représentant du gouvernement burundais (M. Thomas Minami, Ministre du Commerce et de l’Industrie)

« Cette conférence offre une excellente occasion pour échanger nos optimismes et nos craintes, les avantages et les défis, et elle constituera une force positive pour qu’on ne regarde plus la Région des Grands Lacs uniquement comme une région de conflits et de crises humanitaires. Le commerce peut opérer comme un facteur de croissance et de réduction de pauvreté, comme le disent les Anglais :  aid through trade ».

Ce sont les conditions d’une paix durable qui transformeront la région en une terre d’accueil pour les investissements et le commerce. Le processus d’élections mènera, par le biais de nouvelles institutions démocratiques, vers la bonne gouvernance. L’accord récemment conclu avec les rebelles assurera la sécurité dans le pays.

Au niveau économique, on assiste actuellement au Burundi à la mise en œuvre d’un Plan d’Action qui vise à une plus grande stabilité macro-économique, une réduction des coûts de transaction, une réhabilitation et privatisation des industries traditionnelles du thé et du coton, une réglementation de l’environnement des investissements ainsi que le développement des capacités industrielles. Les partenaires étrangers et du secteur privé ont leur rôle à jouer dans ce processus.

Le Burundi s’inscrit pleinement dans l’objectif d’une intégration régionale à travers la COMESA et la CEPGL : entreprendre au Burundi, c’est aussi entreprendre pour une région qui compte 380 millions de consommateurs.  Pour pouvoir tirer profit de la nature, il y a besoin d’entreprises performantes capables de transformer les richesses brutes dans des produits commercialisables, et d’une plus grande diversification afin de ne pas trop dépendre de produits vulnérables. Les axes de commerce  privilégiés seront le Lac Tanganyika et les routes avec la Tanzanie et le Congo. Les secteurs industriels les plus importants incluent les activités traditionnelles (café, thé et coton), la pêche, les fruits, les cuirs et peaux, les minerais, l’huile de palme et le tourisme.

Un secteur privé réglementé augmentera la capacité de croissance et de compétitivité. Les zones franches continueront à être développées, et la création d’un guichet unique pour les entreprises est envisagée. Une loi sur la faillite et la concordance pour les entreprises en difficultés a été préparée.

L’enclavement est un problème majeur du Burundi. Des pays enclavés font face à des difficultés aggravées, ce qui est illustré par une comparaison entre deux villes comme Nairobi et Bujumbura.  Cette dernière ville doit faire face à 2000 km de routes terrestres supplémentaires à franchir, ce qui accroît le coût de transport et les difficultés d’échange. En plus, le Burundi manque cruellement d’entrepreneurs, de ressources humaines et de know-how. C’est dans cette optique que le pays lance un appel à tous les partenaires, aux entrepreneurs à l’étranger et notamment aux entrepreneurs burundais de la diaspora, à contribuer au développement d’une culture d’entreprise dans le pays. Le gouvernement burundais remercie les organisateurs de la conférence, et promet son appui à travers une assistance aux afflux d’investissements escomptés.

Speech of the representative of the Government of Rwanda (Mr Kaberuka, Minister of Finances).

After decades of destruction and dispair in the Region of the Great Lakes, the sheer meeting of Rwandese and Congolese politicians is an important event.  The Region’s overall growth averages 4 % and efforts to improve public and private governance are set in place. It is obvious that the Region’s development depends mainly on the inflow of foreign direct investment (“FDI”) and for Rwanda particularly on the success of closer economic integration.

As to the FDI three problems ought to be addressed:

  • Serious risks related to political, commercial and economic instability;
  • World Bank reports indicate high costs (financial and time wise) related to the set up of any business;
  • Persisting conflicts make transborder co-operation unfeasible;

Since Rwanda’s markets are too small, its economic development demands regional economic integration through the involvement of both foreign partners (i.e. Belgium) and the private sector. To that effect three elements are crucial:

  • investment aimed at improving the infrastructure;
  • broadening of the skills base (particularly narrowed in Rwanda after genocide);
  • applying of governance criteria in both public and corporate government;

Rwanda has adhered to several African economic institutions with the aim of tapping into a bigger market and reducing investment risks. Belgium could also underwrite to that effect to some of the perceived risks. Building capacity will be achieved trough public private sector partnerships.

Intervention de M. Kabinga, Vice-Ministre des Affaires étrangères de la RDC

Le gouvernement de la RDC est bien conscient des avantages que peuvent représenter les entreprises privées par rapport aux entreprises publiques, qui ont fait preuve dans le passé de lourdeurs et d’un laxisme en termes de gestion et de performances.  En contraste, le secteur privé a démontré sa flexibilité, son dynamisme  et sa créativité et il offre des économies d’échelle. C’est pour cela que la RDC c’est lancé sur la voie de l’économie de marché. Elle est consciente de la nécessité de créer les conditions nécessaires pour le développement du secteur privé.

Les freins au développement sont connus : l’instabilité, la dégradation des infrastructures, la rupture soudaine de la coopération au développement et l’insécurité juridique. Dès 2003, le gouvernement a entamé une politique de réforme structurelle et d’assainissement de l’environnement :  stabilisation monétaire ;  reconstruction de l’infrastructure ; nouveau cadre juridique (nouveaux codes et réglementations commerciales, fiscales, droit du travail).

Aujourd’hui, la croissance économique a atteint les 7%, l’inflation a été réduite jusqu’à 12,7% et les taux d’échanges se sont stabilisés. Sur le plan de la sécurité, la RDC a progressé dans sa réunification administrative, la stabilité régionale (accords de paix avec le Rwanda et le Burundi) et la réunification de l’armée avec la réintégration de groupes armés, tout ceci avec le soutien apprécié de la communauté internationale (dont la Belgique). Mais il faut noter la persistance de certains groupes armés (les ‘forces négatives’) notamment dans les provinces de Kivu, de l’Ituri et du Katanga, qui nécessitent une intervention indispensable de la communauté internationale.

La RDC souhaite la relance, avec le soutien de la Belgique, de l’économie régionale dans la Région des Grands Lacs et s’engage à ce que les réformes démocratiques internes aboutissent en 2006.  Le gouvernement de la RDC est en outre engagé dans une logique de marché libre et assure qu’il considère le secteur privé comme le moteur du développement économique. Ceci nécessite la stabilité politique, qui ne peut se produire sans le soutien de la communauté internationale.

Allocution de M. Richard Hecklinger, Secrétaire général adjoint de l’OCDE

  • S’appuyant sur l’expérience qu’elle a acquise depuis sa création (notamment lors de la reconstruction de l’Europe après la seconde guerre mondiale), l’OCDE a intensifié au  cours des dernières années son implication en Afrique et contribué de manière croissante à son développement par la tenue de conférences et l’échange de savoirs
  • Dans ce cadre, l’OCDE constate que de nombreuses opportunités existent aujourd’hui en Afrique pour qui sait les prendre.Pour permettre à des entreprises de les saisir et ainsi créer de la richesse et des emplois, une série d’actions doivent être lancées.

Après avoir remercié les organisateurs et les participants à la conférence, Richard Hecklinger rappelle qu’à l’origine l’OCDE a accompagné la reconstruction de l’Europe après la seconde guerre mondiale avant de prendre en 1961 la forme qu’on lui connaît aujourd’hui. Plusieurs Etats ont dans l’intervalle rejoint l’organisation et le nombre de domaines d’expertise s’est considérablement accru. En outre, les méthodes de travail telles que le « peer review » ou des études comparatives se sont affinées et révélées efficaces.

Forte de son expérience et de son savoir, l’OCDE s’est graduellement impliquée dans les dossiers africains. C’est ainsi qu’elle a le mandat de renforcer le NEPAD, qu’elle développe des programmes de dialogue, qu’elle contribue par un programme exploratoire (INICA) à l’intégration régionale et qu’elle a mis sur pied un programme visant l’amélioration de l’environnement dans lequel les entreprises travaillent. Au niveau des acteurs avec lesquels elle interagit, l’OCDE veille à établir et nourrir des liens tant avec les états qu’avec les acteurs sociaux et la société civile.

Le sentiment de l’OCDE est que les perspectives en Afrique sont aujourd’hui meilleures que par le passé. Afin de renforcer cette tendance, l’OCDE est d’avis que l’Afrique doit être actrice de son développement ; qu’elle doit assurer sa stabilité au plan macro-économique ; que la pauvreté doit être combattue avec vigueur ; que les cadres juridiques ainsi que les infrastructures de base doivent être renforcés et qu’il doit être mis fin à la corruption.

Les Etats africains doivent également créer un climat favorable à l’investissement et aux entreprises et, par conséquent, aux populations. Dans ce cadre, l’OCDE a publié un ensemble de directives utiles qui portent tant sur la mise en place d’instruments efficaces, que l’importance de la bonne gouvernance ou l’encouragement à la création de PME.

En conclusion, l’investissement en Afrique suppose une approche large et nécessite tant le renforcement d’un cadre adéquat que l’implication de tous les acteurs.

Intervention de Monsieur  Rudi Thomaes, Administrateur délégué de la Fédération des Entreprises de Belgique (FEB).

Avant de présider la fin de la session inaugurale, M. Thomaes signale que beaucoup d’entreprises européennes montrent leur intérêt pour les différents marchés en Afrique.  Il est convaincu que le développement du secteur privé est nécessaire pour  le développement durable des différents pays de l’Afrique.

Africa is a promising market and the private sector is the vehicle for sustainable development.  Western investors need the right framework to develop its opportunities further. First they ask for a good administrative framework.  They have to count on the predictability of administrative decisions.  Secondly, because they mobilise their best people, they ask for security for their employees. Thirdly, they ask for investments in the sector of communication (rail, roads and a top class digital network).

Intervention de Monsieur Albert Yuma, Président de la Fédération des Entreprises de Congo (FEC).

La FEC, qui représente 80 % du secteur formel, se considère surtout comme le refuge des survivants parmi les entrepreneurs congolais. M. YUMA évoque les différentes contraintes pour la relance et le développement des différentes initiatives d’investissement. D’abord il signale que certaines initiatives, qui ont été présentées ce lundi matin par les membres du Gouvernement de la R.D.Congo, n’ont pas donné de résultats parce qu’elles ont été prises sans consultation du secteur privé congolais.

La FEC propose des réformes sur quatre axes importants :

  1. le cadre juridique et judiciaire
  2. le cadre macro-économique
  3. la bonne gouvernance
  4. la coopération bilatérale et multilatérale.

Dans le cadre juridique et judiciaire, il faut se débarrasser des textes anachroniques qui date souvent de la période coloniale.  La publication intégrale du Code du Travail doit être réalisée. Les obstacles trop nombreux à la création d’une entreprise (par exemple l’autorisation présidentielle) doivent être levés.

L’adhésion de la RDC à l’OHADA (traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique) doit être réalisée dès que possible.  Le Congo doit se débarrasser d’un  système fiscal et parafiscal qualifié d’anti-économique.  Il est nécessaire que le secteur privé soit impliqué dans la réforme de la fiscalité directe et indirecte.

La FEC déplore également l’absence d’un système bancaire adéquat ainsi que la politique monétaire destructive du pays.

La FEC demande la réforme de l’Administration Publique et l’arrêt des tracasseries administratives.

Un dialogue entre les forces publiques de la Nation s’impose.

En conclusion, la FEC propose que le secteur privé congolais soit impliqué d’avantage dans la coopération bilatérale et multilatérale.

Discussion

M. Ilunga Ilunkamba  (Administrateur du Comité de Pilotage de la Réforme des Entreprises Publiques -COPIREP, RDC)

Comment pourrait-on redonner à l’Afrique centrale son rôle d’espace économique en faveur de tous les habitants ? La CEPGL, oui, mais pour quoi faire ? Est-ce que les opérateurs en Afrique Centrale peuvent se faire confiance ? Que sont devenus les investissements belges en Afrique ? Les hommes d’affaires belges sont absents, et ils ont été remplacés par d’autres, par ceux qui prennent des risques.

En accord avec l’analyse de M. Yuma, M. Ilunga précise: « comment le secteur privé doit-il se transformer en instrument de déblocage dans le pays, contre les intérêts corporatistes ? »

M. A. De Decker

Le « pour quoi faire ? »  à propos de la CEPGL dans la question de M. Ilunga l’étonne, puisque les problèmes d’infrastructure sont communs aux trois pays des grands lacs, et à régler entre eux. Au sujet des investissements belges, il convient de constater que beaucoup d’hommes d’affaires belges ont été « refroidis » les dernières années pour les raisons que M. Yuma a soulevées.

M. R. Thomaes

Au niveau de la prise de risques, la spécificité du Congo est que pour beaucoup d’entrepreneurs, prendre des risques signifierait prendre les risques une deuxième fois, après que des engagements sur place n’aient pas été honorés correctement. Vis-à-vis de ces entrepreneurs, il faut démontrer une amélioration de la situation en RDC.

En plus, il existe une forte concurrence parmi les pays susceptibles d’attirer des investissements. Il n’y a pas que les pays de l’Afrique centrale, mais aussi la Bulgarie, la Roumanie et bien d’autres. Cherchons donc la « unique selling proposition » de l’Afrique.

M. B. de Gerlache, président de CBL-ACP

Parallèlement au mouvement de repli hors de l’Afrique centrale, on constate un départ des grands groupes étrangers de la Belgique. Ceci ne veut pas dire que les Belges sont ou seront absents des pays des Grands Lacs. Par leurs contacts interpersonnels, leurs réseaux et leur expérience sur le terrain, les Belges seront toujours indispensables. Ce qui compte maintenant, c’est de créer avec la pépinière de PME chez nous, une pépinière de PME « chez vous ». Il reste cependant le problème des créances non-honorées, et la difficulté de créer ainsi des « bons ambassadeurs » pour de nouveaux investisseurs.

Au sujet du choix du Congo pour telle ou telle alliance économique régionale, il est force de constater que la voie de l’est (vers Mombasa) restera toujours prioritaire à côté de celle vers l’ouest et de celle vers le sud (l’Afrique australe).

M. Christian Kabinga (Vice-Ministre des Affaires étrangères, RDC)

Dans le contexte de l’intervention de M. Hecklinger, il faut mentionner le projet de la construction d’un chemin de fer d’Ilebo vers Matadi, avec l’appui du NEPAD.  En complément du discours de M. Yuma, il faut également prendre en compte l’existence d’un forum de concertation entre le gouvernement et les entrepreneurs.

A propos de  la relance de la CPGL, il n’y a pas d’exclusion ni de contradiction avec d’autres formes de collaboration régionale. Il s’agit du même gouvernement qui a décidé d’un rapprochement avec la SADEC. Il faut noter, aussi, que les produits de base viennent surtout de l’Est du pays.

M. Minami (Ministre de Commerce et de l’Industrie, Burundi)

Ce que propose M. Yuma est une sorte de « coup d’état » pacifique du monde des entreprises : est-ce que le secteur privé est prêt à l’assumer ?

M. Hecklinger

According to a Tanzanian minister, « if you get the infrastructure right, you will have opportunities for investment ». As far as the OECD is concerned, the organization is involved in creative forms of financing, private-public partnerships, and attempts to facilitate the legislative environment (which is crucial for sectors such as telecom).

M. Yuma

En réponse à M. Kabinga : le conseil de concertation ne s’est réuni qu’une fois ! Il y a donc lieu d’associer davantage le secteur privé à la politique gouvernementale.

Intervention de M. Bernard de Gerlache de Gomery, président de la Chambre de Commerce CBL-ACP

M. de Gerlache indique que, vu les difficultés et l’instabilité de la région, les investisseurs privés en Afrique centrale demandent un taux de rentabilité très élevé avec une période très courte de retour sur investissements.

Le défi pour les gouvernements (belge et locaux) sera de modifier le contexte pour que l’Afrique centrale devienne une région ‘normale’ pour les investisseurs. Pour les gouvernements locaux, le défi sera d’assurer la bonne gouvernance de moyens, et surtout d’assurer le lien entre les discours d’un côté et des réalisations concrètes de l’autre côté. Trop souvent dans le passé des projets prometteurs n’ont jamais abouti.

Du côté belge, le jeu complexe entre coopérations au niveau fédéral et au niveau des Régions et des Communautés, avec leurs propres plans, résulte sur le terrain dans un dialogue trop complexe pour les gouvernements locaux. Par ailleurs, les interférences entre le secteur informel et le secteur doivent être prises en considération.  Pour citer le dicton congolais “puiser n’est pas toujours synonyme de remplir”.

M. de Gerlache appelle tous les secteurs, le privé comme le monde académique, les ONG comme le secteur public, à mettre le doigt sur les vrais problèmes et de remplir “le grand vide” qui existe entre l’aide budgétaire du côté des instances multilatérales et le terrain. Il met l’accent aussi sur l’importance des relations interpersonnelles entre les entrepreneurs belges en congolais, rwandais et burundais.

Il évoque les atouts de la RDC pour les investisseurs: ses richesses minières; son agro-industrie; ses forêts; l’immense potentiel énergétique et les possibilités pour le tourisme.

M. Vermeesch, également de CBL-ACP ajoute les atouts du Rwanda et du Burundi. Bien que petits et avec une histoire récente de guerre civile ou de génocide, ces pays disposent quand même de beaucoup d’atouts. L’agriculture reste le moteur de l’économie locale et elle pourrait même envisager d’exporter des produits bio vers l’Europe. Les infrastructures routières et leur position centrale ouvrent la possibilité de devenir un centre de distribution pour toute la région. La pisciculture dans les lacs pourrait nourrir une grande population, et les produits séchés pourraient être exportés. Les volcans, les lacs, la richesse naturelle (faune et flore) ouvrent la porte à un tourisme exigeant.

Le dialogue entre la coopération belge et le secteur privé exige un langage franc, non pour critiquer ou viser des personnes, mais bien pour se concentrer sur des situations concrètes et pour trouver des solutions.

M. De Gerlache évoque et déplore le fait que le gouvernement belge ait décidé d’arrêter le financement des chambres de commerces belges à vocation internationale, y compris celles en Afrique centrale.

Le ministre De Decker répond que la coopération belge envisage de relancer le financement pour l’Afrique centrale, dans la mesure ou les chambres évoluent vers de chambres de commerce et de développement.

Lundi 27 juin 2005 apm

1ère session : Analyse du climat d’investissement et présentation de recommandations par les opérateurs privés étrangers et de la diaspora.

Secteur de l’infrastructure

Le rapport des représentants de firmes du secteur de l’infrastructure s’attache essentiellement aux problèmes d’accessibilité,  le manque de moyens de communication et de transports étant le principal handicaps pour le développement des pays concernés. Bien qu’enclavés, le Rwanda et le Burundi disposent d’un réseau routier et ferroviaire, ce qui n’est pas le cas pour la RDC.

L’axe Matadi-Kinshasa est vital pour la RDC, où la situation s’est beaucoup améliorée avec la réfection de la route Matadi-Kinshasa et la coopération entre le Port d’Anvers et le port de Matadi et celle entre le Port de Kinshasa et celui de Bruxelles.

Pour l’intérieur du pays, la voie fluviale est la plus économique et la plus efficace, mais aujourd’hui, elle reste une véritable aventure. Le dragage et balisage du parcours Kinshasa-Ilebo permettrait de désenclaver les deux Kasaï et le Katanga. Toute l’infrastructure dans la région est également à refaire.

Dans le Nord-est, la reconstruction du port de Niemba s’impose. Le Katanga est accessible au départ de l’Afrique du sud via la Tanzanie, mais le réseau ferroviaire se dégrade de jour en jour. Ceci ralentit l’activité économique, et la réhabilitation du chemin de fer Benguela mérite notre attention.

La formation d’une nouvelle génération de techniciens qualifiés doit être assurée d’urgence.

M. De Gerlache fait référence à la « Commission for Africa » qui elle aussi a mis les infrastructures à l’agenda, tout comme la coopération belge. Il attire l’attention sur le fait que les entreprises belges rencontrent des problèmes face à la lourdeur des formalités à remplir et aussi sur une certaine naïveté de la coopération belge vis-à-vis de nos concurrents européens au sujet de l’aide non-liée.

Panel aspects juridiques :

Mes. Francis Goffin, Herman Lemaire, Patrick De Wolf

Pour la Région des Grands lacs, et notamment pour la RDC, il s’agit au niveau juridique d’une œuvre colossale. Les textes juridiques en cours de révision ou à revoir intégralement sont nombreux : le droit des sociétés, le régime foncier, le droit fiscal, le code des investissements, etc.

Le droit des sociétés congolais est basé principalement sur un décret de 1887 relatif aux sociétés commerciales et n’a été adapté que par quelques 10 amendements. Ainsi, la fondation d’une S.A.R.L. est soumise à une ‘autorisation présidentielle’, jugée vétuste et encombrante. Pour la fondation d’une S.P.R.L., le législateur n’a rien prévu pour ce qui est de son fonctionnement et il reste aussi muet à propos du montant minimum de capital pour toutes sortes de sociétés pourvu que celui-ci soit « suffisant ». On prévoit un minimum d’associés (7) nécessaires pour une S.A.R.L., nécessitant ainsi parfois des « hommes de paille ». Le dépôt de l’acte de constitution de société d’une S.A.R.L. donne lieu à la perception d’un droit proportionnel de 6%, alors qu’un droit fixe suffit pour les autres sociétés, encourageant ainsi l’investissement par prêt et non pas par capital à risque. Des dispositions en matière de rétrocession à leurs anciens propriétaires des entreprises zaïrianisées sont bien tombées en désuétude mais ne sont juridiquement toujours pas abrogées. En matière de la propriété foncière, l’octroi de la concession du sol, limitée à 25 ans, est assujetti à une valorisation souvent arbitraire par l’administration. Il importe alors de reconnaître dans un code foncier révisé le droit de propriété privée. Pour ce qui est du code des investissements, toute garantie de sécurité juridique aux investisseurs ne peut fonctionner que lorsque les modalités en sont bien précisées.

Une prochaine adhésion au traité dit de l’ODAHA , qui vise à instaurer une pratique légale simple mais adaptée aux pays intéressés en Afrique, pourra résoudre certains problèmes. 16 pays africains ont  déjà adhéré à cet instrument d’intégration juridique couvrant le droit des sociétés, le recouvrement des dettes, la sécurité des investissements, le commerce et l’arbitrage. Il vise à l’instauration d’une école de magistrats et d’une cour d’arbitrage. L’instrument sera directement applicable et ira de pair avec tout effort de coopération économique régionale des autres enceintes existantes.

Problèmes monétaires et financiers

Interventions des Mm. Thierry Claeys Bouüaert, Daniel Wouters et Thierry Lienart (groupe Belgolaise)

M. Claeys Bouuaert insiste sur des progrès qui restent à faire pour éviter des perturbations monétaires comme la RDC en a connu les derniers mois, par une meilleure concertation entre l’Autorité monétaire, les Banques et les opérateurs économiques. 

Les pays engagés en RDC et les bailleurs de fonds doivent accorder la priorité à l’appui aux efforts des autorités congolaises à la reconstruction des structures de l’Etat.  Les priorités sont les Finances, les Douanes, la Justice et l’Armée. 

Une autre priorité de premier plan est la création d’un fonds de garantie par les organismes de financements internationaux au bénéfice des investisseurs, tant pour la couverture du risque politique que dans la mise à disposition de moyens de financement.

En ce qui concerne l’activité de conseil, l’offre internationale est aussi diversifiée sur l’Afrique Centrale que sur le reste du continent.  En revanche, l’offre de services expérimentés sur la Région est relativement plus rare que sur d’autres régions d’Afrique.

L’Afrique Centrale ne dispose pas encore de suffisamment de banques commerciales établies.  En plus, leurs moyens et leurs bilans restent souvent très modestes.

Il est difficile de trouver des banques capables de prendre massivement du risque de paiement sur des entreprises qui achètent des biens et services destinés au marché local.

M.  Wouters décrit l’offre de services financiers disponible mais limitée et fragmentée.  Pour entreprendre en Afrique Centrale, il faut avoir recours aux conseils d’un « arrangeur » qui e.a. connaisse le secteur d’activité de l’entrepreneur et le contexte africain dans lequel s’exerce son activité.

Mr. Thierry Lienart décrit le secteur bancaire Rwandais, qui est dominé par trois banques : la BK (appartenant à la groupe Belgolaise), la BCDI et la BCR qui représentent ensemble 80 % des activités bancaires du pays.

Problèmes rencontrés par les firmes sur place

Mme Bjoke Wuyts, Siemens ; Mme Peggy Esseldeurs, SN Brussels Airlines

A travers une série d’exemples, les deux intervenantes soulignent un ensemble concret d’obstacles auxquels les entreprises doivent faire face. Elles pointent également le fait qu’elles se retrouvent aussi bien dans les pays européens qu’africains.

Elles appellent à l’engagement tant du secteur privé que du secteur public et à une meilleure collaboration entre tous et à tous niveaux de pouvoir.

D’entrée de jeu, Mme Wuyts souligne le potentiel que recèle l’Afrique centrale pour les entreprises. Toutefois, ceci n’est possible que pour autant qu’elles y trouvent un cadre permettant:

  • une continuité dans l’exercice de l’activité
  • un engagement
  • un transfert des connaissances
  • un partenariat durable entre acteurs
  • une plus grande confiance.

Parmi les problèmes rencontrés par les entreprises en Afrique, elle pointe le niveau de qualification, l’insécurité juridique et l’état des infrastructures. Elle note également les importants retards et blocages d’une administration lente et complexe, le peu de clarté en matière de taxes, d’impôts et de politique sociale ainsi que le flou qui entoure la vision des hommes politiques à l’égard de l’économie. Tous ces éléments vont à l’encontre des caractéristiques du cadre recherché par les entreprises pour l’exercice de leurs métiers.

Elle note enfin la prospérité de l’économie parallèle en Afrique et plaide pour que les investissements réalisés tant par les entreprises que le secteur public fassent l’objet d’un contrôle par une administration plus efficace.

Pour sa part, Peggy Esseldeurs complète l’analyse en pointant deux faiblesses. Premièrement, des procédures tatillonnes tant du côté européen qu’africain en matière de visa. Les procédures sont lentes et complexes, à l’opposé ce qu’exige le monde des affaires. Outre une plus grande collaboration des pays concernés, elle propose par ailleurs d’établir un document de libre circulation à l’intention des hommes d’affaires et valant pour toute une zone.

Deuxièmement, s’appuyant sur l’exemple du mauvais état de la piste de l’aéroport de Kinshasa qui pourrait conduire à la fermeture de l’aéroport par les instances internationales, elle plaide pour une meilleure définition des besoins et des financements ainsi que l’engagement de tous et à tous niveaux comme conditions préalables à toute relance de l’activité économique.

Sociétés de holding belges ayant des intérêts en Afrique centrale

Texaf – M. Philippe Croonenberghs

Une suggestion à la DGCD : instaurez la déductibilité pour le capital à risque d’origine belge investi dans les pays cibles de la coopération; ceci constituerait une aide considérable au secteur privé.

Groupe Sucrier – M. Paul Lippens

Le groupe sucrier est un bon exemple d’une petite société à deux sièges (un en Belgique, un au Congo) qui a pu se développer par après, jusqu’à être représenté dans plusieurs pays maintenant, y inclus sur les marchés asiatiques tellement convoités.

Un avis aux gouvernements des pays des grands lacs : réduisez le risque plutôt que de le nourrir, afin d’attirer les bons investisseurs et non plus les « bandits » qui vous présentent des prospections de bénéfices mensuels rapides.

Intervention de la diaspora de la RDC

La diaspora congolaise s’est organisée sous le nom de UNICOB. La communauté congolaise en Belgique fait preuve d’un esprit d’entrepreneur, en ne manque pas de visions et d’aspirations. Selon la diaspora, le handicap principal de la RDC est la désorganisation sur tous les niveaux de l’administration, l’instabilité monétaire et l’insécurité, autant pour l’intégrité physique et de la santé que pour celles des biens des entreprises.

La diaspora participe au développement du RDC par le transfert de compétences, par la formation des cadres et par le transfert de technologies, p.e. par la voie des PME. Ces interventions sont encore loin d’apporter le développement en RDC.

Pour augmenter les activités des entreprises, il est impératif que s’instaure dans toute la région un climat de sécurité, par une fin effective de guerre, une réconciliation et l’arrêt de toute manipulation politique. Il est également nécessaire de mettre l’expertise et la connaissance du terrain à la disposition des entreprises et de la diaspora. La création des emplois locaux doit se faire par la logistique et les ressources financières.

A très court terme, il faut restaurer l’autorité de l’Etat et le respect de la loi; la bonne gouvernance; assurer la formation des cadres compétents pour instaurer le professionnalisme et pour lutter contre la corruption.

Dans le cadre de la coopération bilatérale, il faut créer des incentives à la création d’entreprises; privilégier les investissements dans les secteurs de l’énergie, de la santé, des communications et des transports. Pour l’aide multilatérale, il est prioritaire d’annuler la dette et de favoriser les investissements. Dans les deux cas, il faut un code de bonne conduite.

Intervention de la diaspora rwandaise

La diaspora rwandaise apprécie qu’elle soit, pour la première fois, invitée à s’exprimer sur le développement économique. Elle met l’accent sur la position de la femme et sa position centrale dans la vie économique et le monde des entrepreneurs. Elle soutient le leadership responsable du gouvernement rwandais et ses mesures pour assurer la parité homme/femme. Ceci étant, la diaspora insiste sur des mesures anti-corruption pour que le développement puisse avoir un caractère durable.

Pour le développement, il faudrait davantage utiliser le réseau humain que représente la diaspora, autant les cadres formés et pour la recherche scientifique. La diaspora déplore que la coopération belge préfère ne pas envoyer de coopérants rwandais dans leur pays d’ascendance.

Intervention de la diaspora burundaise

La diaspora burundaise estime que les pays d’Afrique centrale ont besoin d’un plan Marshall, pour que la région puisse se rétablir après des années de guerre civile et de conflits entre les populations et les pays. Dans ce plan Marshall, on devrait aussi assurer la protection des investissements.

La diaspora burundaise espère que ce type de séminaire sera répété aussi dans l’avenir sur base régulière afin de pourvoir adapter les projets et de faire le constat des avancements.

Analyse du climat d’investissement et présentation de recommandations par le secteur privé africain

Monsieur Rugenera, Soras s.a. Rwanda

Dès 1990, le Rwanda a introduit une série de réformes qui ont été poursuivies après la guerre à partir de 1995. A titre d’exemple on pense à :

  • L’instauration d’un cadre légal pour les privatisations ;
  • La réduction du droit d’entrée à l’importation de 100% à 30% ;
  • La refonte de la chambre de commerce et d’industrie ;
  • Un appui aux PME par une régulation spécifique, …

Si le taux d’investissements reste au-dessous des attentes, trois problèmes méritent notre attention. Primo, du fait de son enclavement, le Rwanda, se trouvant à 1600 km de Dar Es Salaam et à 1.800 km de Mombassa, n’est accessible que par la route. Il s’y ajoute que le tonnage par containeur se voit limitée à 14 tonnes pour un droit de 250 $ par tonne par marchandise : un handicap pour la compétitivité. Secundo, un besoin d’énergie qui ne cesse de grandir. Tertio, il résulte de l’étroitesse du marché Rwandais (3 millions d’habitants avec un revenu de 250$ per capita) que le commerce n’est pas en mesure de fournir suffisamment de devises.

Quelques projets d’infrastructure visant à pallier  ces déficits sont proposés. D’abord l’on devrait attirer les investisseurs étrangers pour la construction de centrales hydrothermiques. Le secteur privé peut s’y joindre par l’installation de micro centrales similaires.  Ensuite, on pense à la mise en œuvre d’un projet de renfort du réseau ferroviaire vers les marchés voisins, ceci éventuellement par un partenariat entre le public (rail) et le privé (locomotives). Un pipeline aurait également son rôle dans le ravitaillement en pétrole. Finalement, on pense à l’implication indispensable des enceintes économiques à vocation régionale tels que East African Community, SADEC, CEPGEL et la Banque de Développement des Grands Lacs.

Chanic – Vincent Bribosia

Il est important de remettre à l’ordre du jour le problème récurrent de la double imposition et des inhibitions fiscales comparables, qui restent d’actualité.

Pierre France (société Metalubia, Burundi)

S’associe pleinement aux suggestions faites en matière de sécurité, de concertation avec le gouvernement et de l’importance de l’enseignement technique. Un renforcement du droit des affaires est souhaitable, notamment en ce qui concerne le recouvrement des créances. L’attitude bienveillante vis-à-vis des entreprises étrangères de la part du gouvernement et de la population constitue un atout au Burundi.

Eliane Munkeni (PME Audit, Conseil et Fiscalité, RDC)

Fait référence aux propos de M. Yuma auparavant, et met l’accent sur la gestion de l’environnement fiscal dans la promotion, l’assurance et le développement des entreprises.

PME Audit, Conseil et Fiscalité offre de la médiation entre acteurs économiques et les autorités (impôts), et milite parfois pour un allègement d’obligations. Des séminaires de formation et d’information sont organisés afin de sensibiliser et de former les entrepreneurs en matière de fiscalité et afin de créer un climat de confiance. Le cadre de concertation permanente entre le gouvernement et les entreprises en matière fiscale devrait permettre de créer des mécanismes qui stimulent les investissements.

Les mesures prioritaires au niveau de l’Etat congolais devraient inclure des avantages fiscaux comme l’exonération d’impôts pendant la première année d’exploitation ; les mêmes avantages pour des entreprises en autofinancement; des stimuli dans les secteurs clé comme la pêche et l’élevage ; la diminution de taxes sur le secteur formel ; l’élargissement de l’assiette fiscale par des mesures qui touchent tous de la même façon ; l’encouragement de l’interaction entre le fisc et les entrepreneurs.

Pour la Coopération belge, il est suggéré de prendre des mesures en faveur des investisseurs, surtout pour les PME et les femmes.

L’horizon pour les entreprises congolaises dans les 3 à 5 années à venir devrait s’inscrire dans le cadre de l’amélioration et l’assainissement des institutions politiques prévus. 

M. Goussa (secteurs de consultants)

Le secteur des consultants en RDC a connu 15 ans d’inactivité, qui a eu comme résultat que beaucoup d’expertise a été perdue. Quand en 2002 la Banque mondiale a commandé une étude (de 20 mln USD) sur la RDC elle a écarté les consultants congolais en faveur des ONG (exemptées de taxes), une pratique qui perdure encore aujourd’hui.

En plus de cette concurrence inégale, les consultants congolais ont aussi des problèmes structurels. L’agrément nécessaire et les références pour l’obtenir sont absurdes dans un secteur qui a connu 15 ans d’inactivité. Les garanties et le préfinancement sont impossible dans un pays ou les banques ne fournissent même pas des hypothèques. En plus, la fiscalité congolaise taxe même les pertes.

Comme solution, il propose un fonds de garantie. Il évoque le bon exemple que donne la CTB qui travaille en partenariat avec les consultants congolais.

M. Kasengo, entrepreneur, RDC

Le manque de financement force les entreprises en RDC à chercher l’investissement ailleurs. Il est malheureux que la plupart des investisseurs venant de l’UE préfèrent investir indirectement (par la voie du gouvernement) au lieu de directement dans le secteur privé.

Dans son expérience, le modèle d’une franchise est particulièrement adapté aux circonstances congolaises. Il permet aux investisseurs (américains, comme Western Union) de coopérer avec les entrepreneurs congolais et de tirer les bénéfices d’une négociation commune, du marché financier américain de la connaissance de terrain des congolais.

Représentant des entreprises LEDIA, RDC

Les entreprise LEDIA on beaucoup diversifié leurs activités, partant des la vente du papier et de l’huile jusqu’aux hôtels.

M. Mukanya, conseiller du Président de la RDC

Le gouvernement de la RDC veut insister sur le fait que l’assainissement de l’économie et du climat d’investissements est un processus continu. Beaucoup a été fait. La stabilisation de l’économie, la décroissance des impôts, le paiement de la dette publique intérieure.

Il appelle tous les secteurs à dresser une liste commune des ce qui reste à faire. Il invite les investisseurs étrangers à investir directement dans la RDC, vu qu’il y a assez de partenaires congolais. Même dans les années les plus troublés, la RDC connu des influx importants d’investissements (dans le secteur de la communication).

***

Un participant évoque le fait qu’on assiste à une conférence organisée par la Belgique sur les investissements étrangers dans le secteur privé, mais que dans les faits la coopération belge préfère investir par la voie des ONG (belges).

Un autre membre du public indique la situation pénible de l’informatique dans la RDC et le retard considérable dans l’enseignement. Une fiscalité très lourde sur l’importation des moyens informatiques bloque l’accès à l’informatique et à Internet pour les étudiants

Mardi 28 juin, matinée, première partie

Réactions des organisations officielles d’Afrique

Sylvestre Nsengiymva, directeur-général adjoint de Rwanda Investment & Export Promotion Agency (« RIEPA »)

On connaît les frustrations que le monde de l’entreprise rencontre au Rwanda : harcèlement par les autorités, taxes forfaitaires, problèmes au niveau du dédouanement et de la Rwanda Regulatory Authority ;  Le RIEPA se veut un facilitateur (dit « babysitter »), offrant aux investisseurs étrangers un service de one-stop, un centre de ‘service clearance’, et cela grâce à la présence en son sein d’agents représentant différentes instances officielles : Rwanda Authority, le Service d’Immigration, Le Ministère de la Fonction publique, et un notaire.

Les atouts d’un investissement au Rwanda sont la stabilité politique, une remontée de l’initiative privée et un fort leadership. Des réformes institutionnelles ont été introduites en vue de revaloriser le Rwanda aux yeux des entreprises privées : l’appui au secteur privé (PME), la modernisation des infrastructures et des services, une fiscalité attractive, l’instauration de zones de libre-échange. Il s’agit de diversifier l’économie (fruits, légumes, artisanat, fleurs, cuirs et peaux, mines) et de moderniser les secteurs existants, porteurs de croissance (café, thé, tourisme).

Janine Mabunda, Fonds de Promotion de l’Industrie, RDC

L’économie de la RDC affichait fin 2004 une croissance de 6,2 %, par rapport à une moyenne dans la région de 5,1%, et une inflation particulièrement basse.

D’importantes réformes ont été introduites dans différents secteurs. Pour le volet financier, il s’agissait de pallier au non-accès au crédit (mobilisation de l’épargne privée) et au manque de crédit aux investissements. Une restructuration a été entamée au niveau des banques locales (libéralisation) et le micro-crédit est facilité par l’établissement de nouveaux intermédiaires financiers. Pour ce qui est l’appui aux entreprises, l’instauration de la taxe de promotion à l’industrie a facilité l’octroi de prêts et des subventions et les participations. Il importe d’établir une meilleure interaction entre les autorités publiques et le secteur privé pour en finir avec l’opacité des fonds affectés dont certains acteurs ne cessent de se plaindre. On mise également sur la mobilisation de l’épargne privée et sur une présence plus accentuée des investisseurs étrangers tels que BIO.

Professeur Ilunga, RDC (COPIREP)

Les FMI et la BM démontrent la nécessité de continuer à stabiliser la RDC au niveau macro-économique. Ensuite, il faudra que l’Etat se désengage du secteur de production et  se limite au rôle de prestateur de services et de normateur de l’initiative privée. Le secteur privé devrait alors reprendre son rôle de spécialiste de la production une fois qu’on aura fait sauter bon nombre de monopoles. On songe notamment à 5 secteurs principaux : les mines, l’énergie, les télécom, le transport et le système financier.  Les instruments pour y arriver sont au nombre de 2 : l’adhésion à l’Agence pour le Commerce en Afrique et à l’OHADA.

Particulièrement pour le cadre juridique public (juges, avocats et notaires), l’adhésion à l’OHADA servira à moderniser d’une manière multinationale le droit des affaires, sans pour autant oublier que les résultats ne seront perceptibles qu’à long terme.

Gervais NKANAGU, D-G Commerce, Burundi

Depuis la signature de l’accord de paix entre le Gouvernement et les mouvements rebelles le 28 août 2000 et la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, d’importantes mesures visant à faciliter le commerce ont été prises telles que l’adhésion du Burundi à la zone de libre échange du COMESA depuis 2004. Le dédouanement s’est vu accéléré considérablement pour les marchandises grâce à l’application du système SYDONIA.  Un projet de loi est étudié pour la mise en place d’une agence pour la promotion des investissements et des exportations APIE (guichet-unique). On pense aussi à la révision du code des investissements et à la promulgation d’une loi sur la zone franche.

A l’heure où d’importantes réformes sont attendues au niveau fiscal et douanier,  les partenaires économiques, le gouvernement et le secteur privé rencontrent un certain nombre de problèmes :

  • l’absence de ressources longues pour les investissements, contribuant ainsi à la faiblesse de l’épargne intérieure ;
  • l’étroitesse du marché intérieur burundais et le fait que le marché extérieur demeure trop limité à cause d’une offre insuffisante ;
  • la faiblesse des infrastructures de base.

Mardi 28 juin, matinée, deuxième partie

Réactions des instances belges

Martine Van Dooren, Directrice générale de la Direction générale de la Coopération au Développement (DGCD)

Martine Van Dooren souhaite lever un malentendu : « De commentaires que j'ai parfois entendus, j'aurais pu conclure que certains pensent qu'à la coopération au développement on estimait n'avoir rien à faire avec le développement du secteur privé des pays en développement. C'est faux. »

Il est vrai que la loi de 1999 qui a fixé les priorités de la coopération belge ne parle pas explicitement du secteur privé en tant que tel mais à la coopération belge et dans toutes les enceintes internationales qui traitent du développement, le rôle du secteur privé est de plus en plus mis en avant. « Nous partageons le point de vue selon lequel la façon la plus durable de contribuer la lutte contre la pauvreté est créer un maximum d'emplois productifs ».

Les secteurs d'intervention prioritaires de la coopération sont, dans la région des grands lacs en particulier:

    • la santé publique;
    • l'éducation de base, la formation professionnelle;
    • l'agriculture et la sécurité alimentaire;
    • les infrastructures de base, eaux, routes, électricité, infrastructures portuaires;
    • la prévention des conflits et la consolidation de la société.

Beaucoup de programmes et de projets financés par la Coopération belge relèvent du secteur privé notamment dans le secteur agricole et de la sécurité alimentaire.

La construction des infrastructures de base est également un facteur qui favorise le développement des petits et moyennes entreprises notamment dans le secteur de la construction.

En contribuant par des programmes de développement à l'instauration d'un état de droit, en renforçant le système judiciaire, en finançant des programmes de réforme des administrations publiques, des programmes de démobilisation visant à instaurer la paix et la sécurité, la Belgique participe à la création d'un climat favorable au développement du secteur privé.

Par la formation des ressources humaines dans le domaine de la gestion, dans les domaines techniques de la maintenance… nous créons les conditions pour que les entreprises puissent engager de la main d'œuvre qualifiée et des cadres compétents.

D'autre part, la coopération belge dispose de plus en plus d'instruments qui lui permette d'intervenir directement en soutien au secteur privé, principalement BIO. ne nouvelle étape dans le soutien au secteur privé a été franchie en 2004 lorsque le conseil des Ministres a approuvé la note stratégique intitulée "entreprendre contre la pauvreté et pour le secteur privé". Cette note rappelle, d'une part, les principes essentiels de toutes les interventions financées par la coopération belge : pour le développement, pertinence, transparence, contrôle, aide non liée et propose, d'autre part, quelques pistes d'action pour la coopération belge tellese:

    • créer un environnement favorable propice au développement du secteur privé e.a. dans le domaine de la formation, dans le domaine judiciaire, lutte contre la corruption. Ce type d'intervention peut peuvent être négocié dans le cadre de la coopération gouvernementale, lors de la préparation des Programmes Indicatifs de Coopération.
    • snsibiliser les entreprises belges au développement du Sud : la manifestation d'aujourd'hui en est un bon exemple.
    • pomouvoir les investissements directs dans le sud, BIO était l'instrument principal de cette politique.

Plusieurs acteurs financés par la coopération belge, principalement des ONG spécialisées et le Fonds de survie, réent ou soutiennent des organisations de micro-crédits.  La coopération belge soutient différentes initiatives visant à promouvoir le commerce équitable des produits du sud.

Dans le cadre de sa coopération avec les banques de développement, la BM, les organisations du système des NU, la coopération belge finance également des interventions qui contribuent au développement du secteur privé.

Martine Van Dooren rappelle également la responsabilité sociale des entreprises : responsabilité sociale interne (application des normes fondamentales du travail de l'OIT et donc, par exemple, rejet de toute forme d'exploitation des travailleurs, rejet de l'exploitation des enfants, etc), meilleure prise en compte de l’égalité des chances mais aussi des capacités des femmes en entreprises.  La seconde responsabilité sociale des entreprises est externe. En Afrique centrale, aucune entreprise d'une certaine taille ne peut négliger le contexte social dans le quel elle évolue. Les réalisations sociales (dispensaires, écoles, …) de certaines grandes entreprises en Afrique centrale peuvent nous rassurer sur la volonté des entrepreneurs d'assurer des conditions de vie décentes à leurs travailleurs et à leur famille. Les potentialités mais aussi les nécessités pour les entreprises de lutter contre le sida et de déployer des activités respectueuses d’un développement durable sont énormes.

Martine Van Dooren conclut en rappelant une grande leçon apprise par des décennies de coopération. Les aides extérieures ne peuvent venir qu'en accompagnement d'un processus interne favorable au développement, à des politiques qui favorisent la bonne gouvernance, qui créent un climat de confiance indispensable au déploiement du capital à risque. Car il est évident que la coopération tout comme le secteur privé procède à des analyses du risque de ses interventions dans la perspective d'en assurer la durabilité. Elle est disposée à appuyer mais pas à se substituer ni à assumer seule tous les risques. Le partenariat équilibré est le credo de la coopération belge.

M. Hugo Bosmans, CEO de BIO sa

La mission de BIO, créée en 2001 par la coopération belge, est de financer dans les pays en développement la création et l’expansion des micro-entreprises et des PME aux conditions du marché et de façon justifiée au niveau du social et de l’environnement.

BIO dispose de divers instruments, principalement un Fonds de développement pour des participations dans des institutions financières intermédiaires et un Fonds de soutien pour des investissements directs dans des PME ;  Le fonds de développement doit intervenir pour au moins 35% dans des PMA.  Le Fonds de soutien doit intervenir pur au moins 2/3 dans les 18 pays prioritaires de la coopération gouvernementale belge. Le Fonds de soutien intervient par des participations et des prêts de 250.000 à 5 millions euros.  Le Fonds de soutien par des prêts subordonnés de 45.000 à 700.000 euros.

BIO n’est pas encore actif au Burundi et en RDC. Sa première intervention au Rwanda est très récente, dans le fonds d’investissement Rwandan Enterprise Investment Company (REIC), créé en juin 2005 à Kigali afin de favoriser la création et le développement de petites et moyennes entreprises.  Capital : $ 2 millions par BIO et $ 4 millions sous forme de prêt par le gouvernement rwandais en collaboration avec la Banque Mondiale.

A compléter

Kauri

Sofinex

Jérôme Roux, Attaché économique et commercial pour les Régions Flandres, Bruxelles, Wallonie, Ambassade de Belgique, Kinshasa

Dans un pays à fort potentiel économique comme la RDC, mais où 75 % de la population vit avec moins d’un dollar par jour, il est difficile de promouvoir le commerce extérieur belge sans tenir compte de la coopération au développement.

Quelques idées pour améliorer le climat d’investissement en Afrique Centrale :

  • information et sensibilisation sur comment prospecter le marché congolais, sur les moyens de communication, sur le Droit des Affaires au Congo, sur la participation aux appels d’offres des bailleurs de fonds.
  • Ces informations intéressent aussi les entreprises congolaises mêmes si seuls 5% des appels d’offre organisés par la Banque Mondiale ont été remportés par des entreprises congolaises

Promouvoir les partenariats d’entreprises: les trois Régions organisent régulièrement des missions économiques. Elles sont généralement constituées davantage de PME que de grosses sociétés et les participants sont plus exportateurs que de véritables investisseurs. Il n’en demeure pas moins qu’un exportateur peut à terme se transformer en un véritable investisseur. C’est le cas par exemple d’une société active dans le domaine de l’électricité ; elle enregistre deux commandes par semaine en moyenne, depuis son retour de mission de mars 2005 et prévoit un CA de 400.000 euro sur le Congo pour cette année. Cette même société n’avait encore aucun contact en République Démocratique du Congo, il y a trois ans !

  • Plusieurs petites missions organisées de façon sectorielle auraient plus d’impact qu’une grande mission multisectorielle
  • Il serait également intéressant d’envisager une invitation d’acheteurs congolais en Belgique.
  • Pour ce qui est de l’accès au financement, la coopération au développement belge -qu’elle soit fédérale ou régionale – pourrait jouer un rôle important de promotion du secteur privé en apportant sa garantie aux projets d’investissement qui lui semblent valables.
  • En ce qui concerne le rôle que pourrait jouer la Coopération belge en matière de formation professionnelle, nous pensons qu’il est indispensable de partir des besoins réels en formation des entreprises déjà présentes en République Démocratique du Congo.

Mardi 28 juin, matinée, troisième partie

Coopération multilatérale

M. Paul Frix, représentation permanente de la Belgique auprès de l’Union européenne.

Le contexte  pour la reconstruction économique du Congo a fondamentalement changé  par rapport à ce qu’il  était au lendemain de la décolonisation et à la fin du régime Mobutu. A souligner les caractéristiques nouvelles suivantes:

  •  L’Etat  et l'économie sont largement  déstructurés  et les infrastructures sont pour la plupart détruites ou à réhabiliter en profondeur:
  • le modèle économique de référence n’est plus, sur le plan spatial, celui privilégiant la voie nationale mais bien l'ouverture des marchés et l’intégration économique régionale. Dans cette nouvelle optique, il semble essentiel  de bien mettre en évidence le rôle  de plaque tournante principale  dans l’intégration régionale en Afrique  sub-saharienne que  pourrait  jouer la  RDC, si la communauté internationale aide le Congo à  orienter en conséquence une partie de programmes d'infrastructure dans ce sens; 
  • dans le cadre du réchauffement climatique, le potentiel d’Inga comme source d’énergie propre et à bon marché est  devenu  aujourd'hui,  et beaucoup plus que  ce que l’on pouvait imaginer dans le passé, un  des  atouts majeurs  du Congo pour son propre développement économique  et industriel.  En même temps  il s'agit du  projet intégrateur du continent  le plus important  au niveau  du NEPAD.  Il serait  par exemple dommage que  dans le contexte actuel, où sa capacité propre de négociation est extrêmement faible  face aux partenaires  extérieurs, le Congo ne puisse pas défendre convenablement ses intérêts à moyen et à long terme et valoriser à sa juste valeur le potentiel d'Inga. 
  • les nouveaux pays émergeants d'Asie, surtout la Chine et l’Inde, mais aussi l'Afrique du Sud et le Brésil, sont devenus aujourd'hui des partenaires clés pour le continent africain et en particulier pour l'Afrique Centrale.  Ils ont un  rôle  de plus en plus important  à jouer à côté de l’Europe et des Etats-Unis. Il s'agit là d'une donnée à intégrer d'urgence dans les approches belges et européennes vis à vis du continent africain.

En ce qui concerne la présence économique belge en Afrique Centrale,  elle n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était dans le passé.  Parallèlement, l'économie belge s'est profondément transformée. Elle est notamment devenue plus internationale et européenne avec notamment la disparition en tant qu'entité belge de la "Société Générale de Belgique" qui avait été durant des décennies le fer de lance non seulement  du développement de l'économie belge mais aussi de sa colonie: le Congo.  De plus, aujourd’hui, l’économie belge repose en bonne partie sur les PME.

Il faut noter dans ce contexte que la Commission européenne se fait remarquer de plus en plus comme un partenaire de l’Afrique centrale. Elle dispose de plusieurs instruments de coopération multilatérale. La Centre pour le Développement de l’Entreprise a maintenant 26 ans d’expérience.  Il y a aussi Proinvest et la Facilité d’Energie.

En ce qui concerne les partenariats public-privé, la Banque mondiale met à la disposition des instruments comme la facilité FIAS, Arpesco, MIGA, et s’intéresse également à des problématiques comme la dette intérieure congolaise.

M. Yvan Rossignol, Banque mondiale :

Le rapport de force entre les gouvernements et le secteur privé a changé en Afrique centrale. La vraie question est "comment pouvoir maximiser nos partenariats". Il y a 3 ou 4 pistes.

Le rôle du secteur privé n’est pas seulement commercial mais aussi politique. Il contribue à la stabilité post-conflit. Partageons donc notre optimisme. Le rôle du secteur privé n’est pas non plus purement « culturel ». Dans ce contexte, on peut s’étonner de l’absence à cette conférence de pays comme le Congo-Brazzaville, l’Angola et le Cameroun, des organisations comme la COMESA ou le CENAC, ou encore d’autres pays investisseurs comme l’Afrique du Sud et les pays asiatiques. Sortons donc d’une approche culturellement belge de la coopération.

Il y a lieu de développer de vraies stratégies compétitives, qui supposent un certain réalisme. Où sont, par exemple, les avantages compétitifs en tourisme, pour les trois pays représentés ici ? Il serait sans doute utile d’identifier des secteurs moins « sexy » mais plus réalistes.

En tirant des leçons des évolutions en Asie, force est de constater que plus de dialogue inter-étatique et intra-étatique est nécessaire en Afrique centrale.

Le rôle des bailleurs ne devrait pas être sous-estimé. Poussons la Banque mondiale à faire mieux, puisque les moyens existants ne sont pas suffisants pour créer un climat d’investissements. Pourtant, la Banque dispose de 3,5 milliards de dollars pour l’Afrique centrale (en comparaison, la taille économique de la RDC est de 4 milliards de dollars).  Il s’agit surtout de pouvoir décaisser ces montants plus rapidement que ce qui est le cas aujourd’hui, afin d’améliorer les ratings, qui permettront de libérer des nouveaux fonds. Le moment de tirer la sonnette d’alarme est venu, puisque les résultats ne sont pas suffisants : beaucoup de lignes de crédits n’ont pas fonctionné dans le passé, tout simplement parce qu’elles n’ont pas été utilisées. C’est au secteur privé d’aider le gouvernement à atteindre les objectifs dans cette matière. Dans ce contexte, également, prêter en euro dans une économie qui n’utilise pas cette monnaie pose un problème.

En bref, il faut parier sur les institutions, comme quelques exemples en RDC l’ont démontré ce matin. On doit encourager le secteur privé de jouer son rôle de bon citoyen, et on devrait inciter les bailleurs à prendre plus de risques et de « sortir du cadre traditionnel », comme le suggère Jeffrey Sachs.

Question de M. Paul Frix :

Quelles sont les approches régionales de la Banque mondiale dans la région (autres que celles appliquées dans le bassin du Nil) ?

Réponse de M. Rossignol :

Des projets pour une valeur de 1 milliard de dollars, incluant de l’assistance technique, sont en cours de préparation. Il faut avouer que la Banque, elle aussi, a du mal à changer ses approches et à s’adapter à des réalités nouvelles.

M. Amadou Traoré (DG Développement Commission européenne)

L’accord de Cotonou donne un cadre de travail à l’aide européenne au secteur privé en Afrique centrale. La priorité est donnée aux PME et aux domaines d’action incluant la création d’un environnement incitatif, le soutien aux micro-entreprises par des micro-crédits. Les atouts des instruments adaptés de l’Union européenne se situent surtout dans la rapidité d’action et l’autonomie des structures étatiques.

Premièrement, et en ce qui concerne le climat d’investissements, une facilité pour la promotion d’un environnement incitatif pour le secteur privé, à la hauteur de 20 millions d’euros est mise en place, avec l’objectif direct d’améliorer la législation, surtout en matière de fiscalité.

Pour la promotion des investissements et la coopération entre le cadre institutionnel et les entreprises, Proinvest prévoit 110 millions d’euros pour une durée de 7 ans. L’objectif se situe dans la promotion des investissements, tant au niveau national qu’étranger.

L’Union européenne fournit ensuite des ‘prêts des prêts’, en monnaie locale. 2,2 milliards d’euros qui sont destinés au financement de l’investissement et le développement des marchés financiers.

Au niveau de la fourniture de services aux entreprises, le CDE fournit 90 millions d’euros sur 5 ans, en assistance aux secteurs-clé dans les pays ACP.

Le soutien aux micro-entreprises, enfin, s’élève à 15 millions d’euros sur 5 ans. L’idée est de renforcer la capacité des institutions de micro-financement et du FMI à travers la CGAP.

Les problèmes de mise en œuvre se situent surtout au niveau de la coordination entre les instruments eux-mêmes, et avec les autres bailleurs.

Des nouveaux chantiers de l’aide au secteur privé consistent en un renforcement et un équilibrage entre le soutien au secteur privé et l’aide budgétaire. La Commission européenne veut également jouer un rôle plus important dans les opérations de privatisation et dans la conclusion des public-private partnerships (PPP).

Mme Jacqueline Noël, Banque Européenne d’Investissement:

La Banque européenne d’investissements dispose de 1,7 milliard d’euros de ressources propres et de 2 milliards d’euros au titre de Cotonou, avec une attention particulière pour le secteur financier et le secteur privé. Pour ce dernier budget, le caractère évolutif vis-à-vis de l’accord de Lomé est bien illustré par le fait que la subvention d’intérêts n’est plus automatique.  Les conditions sont devenues plus market-related, avec quelques exceptions notables comme les travaux d’infrastructure sur les réseaux de distribution d’eau et d’électricité quand ceux-ci sont dans les mains d’acteurs publics. Dans ce dernier cas, il n’y a pas de prêts possibles aux conditions de marché.

Les lignes de crédit ont beaucoup de succès, ce qui est par exemple illustré par l’essor qu’a connu le secteur des fruits et légumes au Kenya. Au niveau du tissu industriel, la BEI fait des prises de participations, par le biais des opérations de leasing.  D’autres intervenants – comme BIO, mais aussi les banques commerciales – sont considérés par la BEI comme, à la fois, des concurrents potentiels et des partenaires avec lesquels on peut échanger des vues. Avec la Commission européenne, on constate une complémentarité : là où la dernière utilise des dons comme instrument de travail, la BEI opère plutôt dans des conditions de marché.

Mardi 28 juin, après-midi

Conclusions de la conférence

Conclusions de M. Adrien SIBOMANA (ancien Premier Ministre du Burundi)

M. Sibomana considère que la réussite de la conférence peut être réelle et elle dépendra du suivi qui sera donné à cet événement.  Les informations fournies sont d’une utilité importante. 

En ce qui concerne le Burundi, des fonds importants sont nécessaires pour :

  • améliorer l’infrastructure routière et diminuer les coûts du transport
  • transformer le Burundi en pays transit
  • mener des actions de réhabilitation pour les réfugiés et les déplacés
  • renforcer les ressources humaines (techniciens)
  • le financement des petites entreprises privées par des micro-crédits
  • diminuer la dette intérieure
  • améliorer en renforcer le cadre légal
  • l’organisation de l’encadrement du secteur privé.

Il compte sur ses amis belges et demande l’organisation d’une mission de la Chambre de Commerce Belgo-Burundaise.

Conclusions de M. Robert BAYIGAMBA, président RPSF Rwanda

Dhr. Bayigamba pleit voor een redynamisering van de CEPGL, het herstel en de heringebruikname van het spoorwegennet en de verdere ontwikkeling van het potentieel aan electriciteit.

Hij wenst jaarlijks gelijkaardige bijeenkomsten met dezelfde vier partners in Centraal-Afrika te organiseren en roept de Belgische zakenwereld op om in de regio te investeren.

Conclusions de M. Albert YUMA MALIMBI, Président de la FEC

M. Yuma suppose qu’il est possible d’arriver à une stabilité politique grâce à la croissance économique. Il demande la reprise des activités bilatérales des Chambres de  Commerce Belge et Congolaise.  La société BIO doit jouer son rôle et M. Yuma espère que cette organisation deviendra dans le futur une banque d’investissements pour l’Afrique Centrale. Finalement, il demande aux hommes d’affaires belges de former des partenariats avec leurs confrères congolais.

Conclusions de M. Bernard de GERLACHE de GOMERY, Président de la Chambre de Commerce CBL-ACP

M. De Gerlache de Gomery retient 5 idées forces de cette conférence :

1° l’aide doit consacrer la priorité à la réhabilitation des infrastructures essentielles (fer, fleuve, routes, ponts, aéroports) indispensables à l’éclosion des initiatives privées

2° la nécessité géographique d’une CEPGL est évidente pour tous.  Le Burundi et le Rwanda doivent devenir des plates formes logistiques vers l’est pour les richesses de la RDC

3° la promotion des relations inter-personnelles entre les nouvelles générations est très importante

4° le besoin d’institutions financières assurant du co-investissement à moyen et long terme approprié ainsi que la protection du secteur formel contre la concurrence déloyale du secteur informel

5° il est indispensable de prolonger cette conférence par une plate-forme qui réunirait des représentants des 4 pays afin de découvrir les enjeux réciproques, de supprimer les incohérences et de développer les facteurs d’intégrité.

Conclusions par Monsieur l’Ambassadeur Pierre VAESEN, Directeur de la cellule politique, au nom du Ministre de la Coopération au Développement

Que peut-on retenir de ces deux journées de travaux et d'échanges très denses ?

  1. le fait même d'avoir réuni les représentants des pouvoirs publics et du secteur privé des trois pays concernés  pour un tel séminaire est extrêmement positif en soi. Après une décennie de guerres fratricides, il est essentiel de rappeler les liens historiques qui existent entre vos trois pays. Il ne s'agit pas uniquement du passé, d'ailleurs,  mais d'une réalité géographique et économique qui impose une communauté de destin aux trois pays.

    La Région des Grands Lacs est l'espace naturel dans lequel les trois pays pourront en effet assurer leur développement économique de façon harmonieuse. Comme cela a été dit au cours des travaux, certains secteurs sont complémentaires, tels les transports, les télécommunications et l'énergie. Le commerce transfrontalier est déjà une réalité qui est appelée à se développer. En termes de marché, cet espace des Grands Lacs devrait aussi offrir des débouchés élargis pour les trois pays.

    A cet égard, je voudrais rappeler l'engagement du Gouvernement belge, encore souligné par le Ministre De Decker dans son discours du lundi, en faveur d'une relance de la Communauté des Grands Lacs et de ses instruments, en particulier sa Banque.

  2. Nous avons eu au cours de ces travaux des échanges très francs et très substantiels. Sans y revenir en détails, on peut rappeler en particulier pour ce qui est des défis à relever, trois groupes bien identifiés  :
    • comme l'a indiqué également le Ministre De Decker, il est essentiel de consolider paix et sécurité, institutions démocratiques et état de droit. Ce sont les préconditions à tout développement économique durable;
    • certaines réformes légales et réglementaires sont indispensables pour assurer un cadre juridique, judiciaire et fiscal positif. A noter en particulier l'accent mis par tous les participants sur la nécessité absolue d'une fiscalité transparente et équitable. Ces réformes relèvent en grande partie d'une volonté politique, mais une expertise, tant nationale qu'internationale, devra aussi y contribuer ;
    • il faut assurer un environnement favorable à l'entreprise : disposer de matières premières, d'une main d’œuvre qualifiée et d'infrastructures correctes.  Ce sont les critères retenus par tout investisseur potentiel. Tous les participants ont insisté sur la réhabilitation des infrastructures.  A propos de l’expertise de haut niveau, certains ont souhaité qu'il soit plus souvent recouru à l'expertise locale ou à celle de la diaspora, plutôt qu’à des expatriés dont le coût salarial est très élevé et qui n'ont pas nécessairement une bonne connaissance du contexte culturel du pays. C'est une remarque qui mérite d'être prise en considération.
  3. Quel suivi assurer à la conférence, quelles conclusions opérationnelles peut-on en tirer?

Tout d'abord, ce qui est frappant, c'est la volonté des entrepreneurs africains d'assumer eux-mêmes le développement de leur secteur privé. Ils sont parvenus à maintenir le cap contre vents et marées, ces dernières années, et leur endurance et courage méritent d'être soulignés.  Ceci n'exclut pas l'aide de pays amis, dans un esprit de partenariat.

La Belgique, pour sa part, a réaffirmé la priorité absolue qu'elle donne à l'Afrique centrale dans sa politique de coopération. Celle-ci maintiendra aussi son appui au secteur privé comme l'un de ses axes principaux.  Nous mettrons sur pied un mécanisme de suivi qui examinera dans les meilleurs délais comment poursuivre notre réflexion et surtout lui donner un format concret.  Le type de rencontre générale comme cette conférence des 27-28 juin pourrait être répété une fois par an, mais il faudrait aussi envisager des rencontres plus ciblées, portant sur des thèmes d'intérêt régional (par exemple les infrastructures, l'énergie, la fiscalité) ou sur des mécanismes d'intervention qui intéressent les trois pays (les aides aux PME, le micro-crédit par exemple).

(Actes du Colloque tenu au Palais d'Egmont à Bruxelles, fin juin 2005)

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.