06.04.06 Le secteur privé reste la clé du développement agricole congolais (Mediacongo)

L’Etat congolais n’y investit que maigrement et n’atteint pas encore les 10% des ressources budgétaires tel qu’il a souscrit en juillet 2003, lors du Sommet des chefs d’Etat de l’Union africaine tenue à Maputo (Mozambique). L’engagement que l’Etat congolais a pris à ce sommet africain prévoyait également de consacrer, dès l’exercice 2006, 15% du budget national au secteur agricole dont l’importance sur le plan socio-économique n’est plus à démontrer. Dans cette perspective, seul le secteur privé peut être porteur de croissance de la production agricole en Rdc.

En Rdc, des 27 millions que compte la population active, 74 % se trouvent dans le secteur primaire, dont 59 % sont dans l’agriculture, selon le Cahier sectoriel « Eau, Energie, Environnement, Agriculture » de l’ambassade de Belgique en Rdc. A en croire cette source, 92 % des ménages congolais sont frappés par l’insécurité alimentaire. Le contraste c’est que l’environnement de la Rdc offre des potentialités agropastorales, halieutiques et forestières énormes et largement sous-exploitées. Bien plus que les autres principaux secteurs économiques tels que le secteur minier ou forestier, l’agriculture est le secteur qui doit permettre le plus vite et au plus grand nombre de personnes pauvres et affamées d’obtenir des revenus.

Dans le lot de contraintes qui entravent le développement agricole on peut noter : infrastructures en perpétuelle dégradation limitant l’accès aux marchés et aux services sociaux de base ; difficulté d’approvisionnement en semences améliorées, en géniteurs performants, en intrants vétérinaires et halieutiques ; non maîtrise des techniques de conservation, de transformation et de stockage des produits agricoles avec pour conséquence d’importantes pertes après récolte ; effondrement du système d’encadrement des agriculteurs, persistance des conflits fonciers, difficulté d’accès aux services financiers…

L’agriculture a très fortement souffert des guerres récentes avec leurs pillages, l’impossibilité de circuler et la déstructuration généralisée du secteur. Elle est largement retournée à un niveau de subsistance. Au cours de la dernière décennie elle a régressé de 15 % alors même que la population augmentait au rythme de 3 % par an.

Les recettes d’exportation ont chuté radicalement par abandon des cultures industrielles. Les petits agriculteurs sont décapitalisés. Il n’y a pratiquement pas de classe moyenne dans le secteur. Une partie des grands investisseurs nationaux a été pillée avant et pendant les guerres. Il faudra de nombreuses années pour que le secteur puisse se redresser et se recapitaliser. Les importations destinées à combler l’écart entre les besoins et les disponibilités se sont considérablement accrues.

APPEL AUX CAPITAUX PRIVES

Malgré le potentiel important et les contraintes nombreuses et lourdes, le budget national affecté à l’agriculture et au développement rural reste extrêmement faible à 1.5 % du budget, ce qui témoignage de la faible priorité et des faibles ressources que l’Etat réserve au secteur agricole. Cependant, le potentiel de production agricole devrait encourager les investissements privés, potentiellement très rentables pour autant que l’environnement sécuritaire, physique, fiscal, juridique ou légal était favorable. Or, en plus de l’état désastreux des routes et de la sécurité, de nombreuses taxations légales ou illégales, de nombreuses tracasseries administratives et une attitude généralisée de prédation d’un grand nombre d’acteurs étatiques en réduisent considérablement la rentabilité.

En face de cette situation, le système judiciaire et le faible degré de fiabilité de la gouvernance en place ne donnent malheureusement aucune sécurité juridique aux investisseurs. Selon les experts, le cadre fiscal en agriculture est mal délinéé, mal connu et mal appliqué, donnant lieu à une série d’abus. Pour pallier cette situation et donner à l’agriculture des références aussi explicites que les codes minier et forestier, il est proposé de créer un code agricole. Il reprendrait notamment les compétences et grandes lignes de la fiscalité agricole, les cahiers des charges correspondant ou encore les droits et obligations de chacun.

Une réponse en ce sens stimulerait les capitaux privés, par ricochet le développement du secteur agricole surtout que l’Etat n’a plus les moyens de fonctionner, ni en termes de ressources financières disponibles, ni en termes de qualité de services à rendre.

Continuant cependant à fonctionner comme un outil de collecte de taxes sans contrepartie, il a perdu une grande partie de sa légitimité et crédibilité. A tout prendre, investir dans le secteur agricole reste une vraie lutte contre la pauvreté en Rdc.

AMEDEE MWARABU KIBOKO
Kinshasa, 6/04/2006 (, via mediacongo.net)

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