Bretton Woods ou Broken Woods (Afrikara)
Les thérapies du développement économique qui devaient amener les pays africains, américains et asiatiques à élever leur bien-être au niveau des standards occidentaux, à tout le moins sen rapprocher, traversent une période de turbulences persistantes. Lhallali pour bien des observateurs aurait déjà sonné et la page nécrologique des PAS serait à lordre du jour. Il faut se souvenir que les PAS sétaient auto-proclamés inévitables, incontournables, seule voie du salut, de la vraie rédemption de masses de tiers-mondistes laissées sur la route du progrès.
Les échecs répétés et les tares génétiques de lEtat développeur étaient tellement patents que cest tout juste si les keynésiennes années 60 et 70 nappartenaient pas à une ère de réelle indigence intellectuelle des policy makers. LEtat interventionniste, prométhéen, omniprésent, producteur, investisseur, consommateur, répartiteur, planificateur, régulateur navait réussi quà semer des promesses restées lettres mortes. A la place des mirages de lEtat deus ex-machina se cumulaient les déficits économiques, sociaux, lendettement saccroissait, le sous-développement se développait. Il était temps de passer à autre chose !
A lorée des années 80, le Sénégal inaugurait une thérapeutique économique dun genre nouveau qui allait déferler sur le continent africain et sur les tiers-mondes avec une odeur deschatologie. La destruction de lordre ancien, celui de lEtat développeur et limposition dune nouvelle religion retournaient les décideurs et plus encore les acteurs de lère nouvelle. Banque mondiale, FMI, les oracles de cette cosmogonie libérale reprenaient les rênes de la procession en marche vers le développement. Enfin la malédiction du sous-développement avait trouvé une religion et un clergé à sa mesure, éclairé et volontaire. Il suffisait dajuster les économies, mais dans leur structure, entendue comme leur système de prix, de propriété, tout simplement. Libéraliser, privatiser, déréglementer tout ce qui était susceptible de se présenter à lesprit sous la forme dune offre et dune demande. Léducation revenait à un marché de base en définitive peu éloigné dun marché de voitures doccasion ou de produits pharmaceutiques, lachat dun ticket dentrée à un match de football se ramenant à la même réalité.
Idem des comptes de lEtat dont la tâche ingrate et absurde déquité, de péréquation sociale était subordonnée à léquilibration des entrées et des sorties dargent, quitte à amorcer les bombes sociales des arriérés de salaires, de bourses détudiants, les marchés publics impayés etc…Bref le ministre des finances apprenait avec modestie à rejoindre le calcul économique du commerçant du coin, cétait le fin du fin de la politique économique canonisée par Bretton woods. Pourtant des hérétiques ont entrepris timidement et quasiment sous le manteau de confronter les promesses des PAS avec les faits de développement pour se retrouver en porte-à-faux avec le monisme de la nouvelle donne libérale.
30 ans dajustements dits structurels ont abouti à laggravation des caractéristiques du mal à soigner : lendettement à cédé la place au surendettement, situation paradoxale dans laquelle les Etats ne contractent plus de dettes pour leur prospérité mais bien pour survivre au poids de leurs engagements financiers antérieurs ; la croissance reste accrochée à la conjoncture internationale des matières premières et aux caprices des incertitudes climatiques, elle perd toute consistance au regard de la croissance démographique par ailleurs.
Point de bien-être collectif donc à lhorizon, point daugmentation des capacités de maîtriser son environnement, sinon des tares anciennes empirées ou réapparues, massifiées : paludisme, tiphoïdes, malnutrition, prostitutions, servages… Les situations de survie se sont multipliées sous les formes variées de criminalisation, de corruptions massifiées, dun grouillement de fabriques de tout et de nimporte quels expédients.
Le remède de cheval des PAS aura probablement été plus nocif que la maladie en attendant quun véritable bilan en soit fait, avec la même publicité on lespère que les promesses dil y a 30 ans.
Aujoudhui les développeurs de « Broken Woods » gèrent la faillite tantôt par empilement plus ou moins volontaire des médications, optant pour la libéralisation tous azimuts, pour la liquidation de lEtat mais en même temps pour lamélioration de ses capacités institutionnelles, comptant sur cet Etat pour édicter des règles saines de bonne gouvernance…Tantôt par sous-traitance pusillanime des missions impossibles aux ONG, à la société dite civile, tantôt par des jeux sémantiques de haute facture, développement durable, participatif, équitable, endogène, autant de récupérations thématiques censées rallonger le cycle de vie et de légitimité de politiques inopérantes.
Des conditionalités multiformes apparaissent ponctuellement et se retirent en clignotant selon les pays, les bailleurs de fonds, larbitraire des intérêts en présence. Les nouvelles espérances semblent se sédimenter autour de la constitution de grands espaces économiques sans infrastructures de communication, lannulation de la dette, linternet omnipotent, la prise en compte de lenvironnement et, last but not least,
Quand des institutions financières dont le savoir-faire avéré est de faire de largent sinvestissent dans un discours à lopposé de leur métier réel sans que cela en soi ne fasse tiquer les consciences collectives on peut se demander ce qui de lhilarité et de la perplexité devrait lemporter. En tout état de cause il y a bien une autorité inoubliable que les PAS auront canonisée cest lancien patron du FMI, Michel Camdessus, qui a quitté la noble institution avec des trémolos dans la gorge pour se réfugier dans un rôle de conseiller financier …auprès du chef de léglise catholique, le pape Jean-Paul II ! Lutte contre
Lalchimie passe mal, en effet si Bretton Woods a pratiqué avec tant de cœur à louvrage les ajustements structurels et se retourne aussi abruptement sur la lutte contre la pauvreté des esprits tatillons pourraient en déduire que les PAS ont aggravés la pauvreté qui sétale sans fards sur une immense partie de la planète.
Ze Belinga