Les cuisines populaires favorisent l’insalubrité à Kinshasa, par Stephane Etinga

Parmi les points cardinaux du programme d’action du gouverneur de la ville de Kinshasa, Kimbembe Mazunga, figure en très bonne place, la lutte contre l’insalubrité. Tout le staff dirigeant de l’Hôtel de ville, ainsi que les habitants de la capitale ont adhéré à cette politique afin de voir la capitale revêtir de nouveau sa belle robe d’antan. Il faut reconnaître que l’Hôtel de ville a quand même réalisé certains progrès, même si l’impact du travail accompli dans cette lutte reste nettement invisible compte tenu de l’étendue de la ville et de l’immensité de la tâche.

Il ne peut en être autrement, parce que les sachets qui jonchaient la capitale bien avant l’entrée en fonction de l’actuel gouverneur de la ville et ses adjoints sont encore visibles par endroits. L’année dernière, Kimbembe Mazunga avait annoncé sa décision de fermer les usines qui fabriquent les sachets pour mettre fin à la présence de ceux-ci à travers la ville. La population y avait réagi négativement du fait que la vente de sachets au détail constitue un gagne-pain pour de nombreuses familles démunies.

Pour lutter contre la présence des sachets à travers les rues de Kinshasa, certaines personnes avaient suggéré à l’autorité urbaine leur recyclage. Le travail devait être facilité grâce à l’installation des poubelles sur les places publiques. En même temps, la présence des poubelles devait être rendue obligatoire devant chaque magasin, chaque bureau, chaque service tant public que privé, etc.

LE PHENOMENE « MALEWA » GAGNE DU TERRAIN

A Kinshasa, on mange partout, constate-t-on. C’est la raison de l’appelation « Kin-la-Cuisine » ou « Kin-la-Poubelle ». Ces qualificatifs sont contraires à la ville de Kinshasa que l’on a connue avant l’accession du Congo Belge (Ndlr : aujourd’hui République démocratique du Congo) à l’indépendance en 1960, et même quelques années plus tard, à savoir « Kin-la-Belle ».

Il suffit de parcourir aujourd’hui les marchés et leurs alentours, toutes les places de grandes concentrations et les ronds-points, toutes les grandes artères afin d’observer qu’ils sont pris d’assaut par des cuisines de fortune.

PAROLE AUX FEMMES ET A LEURS CLIENTS

On y prépare des mets de toutes sortes. Les clients se recrutent parmi les travailleurs, les agents et fonctionnaires de l’Etat, les chômeurs, etc. Ils commencent à manger à partir de 5 heures du matin et c’est souvent vers 24 heures que ces cuisines ferment leurs portes.

« Je suis une veuve. J’ai quatre enfants. Depuis six ans, je prépare à manger, ici. J’ai beaucoup de clients. Je prépare tout : le « foufou », le riz, les haricots, les légumes, la viande, du poissons, etc. J’achète les chikwangues auprès de mes fournisseurs pour les clients. C’est grâce aux recettes que génère ce commerce que mes enfants ont se vêtisseurs et fréquentent l’école», raconte Mme Rose âgée d’une quarantaine d’années.

A la question de savoir si le service d’hygiène autorise la vente après le contrôle des mets, elle répond : «Les agents de ce service passent préserver la taxe et nous payons. » Au sujet de l’insalubrité, elle soutient que ses mets sont bien préparés et qu’elle maintient toujours propre l’endroit où elle travaille.

Pour sa part, un jeune homme qui a parlé sous le sceau de l’anonymat raconte : « Je ne peux me passer de « Malewa ». J’habite la commune de Masina et je travaille dans un magasin situé au centre-ville. Célibataire, je n’ai pas le temps de préparer mon petit déjeuner le matin avant de me rendre à mon lieu de travail. C’est pour cette raison que j’ai pris un engagement avec cette femme qui gère une cuisine de fortune, dont les mets sont succulents. Je mange à crédit et paie à la fin du mois comme convenu ».

CONCLUSION

Et d’ajouter : « Le reste de mon salaire me sert à d’autre chose, notamment à aider mes parents, mes frères et sœurs. Concernant l’hygiène, je m’en passe, car je suis en bonne santé».

Demander aux femmes qui cherchent à gagner leur vie de quitter les lieux, où elles exercent ce commerce alors qu’elles sont là depuis plusieurs années, ressemble également à la violence faite aux personnes vulnérables et sans défense. Cela ressemble aussi à la non assistance à personnes en danger que sont ces femmes et leurs familles.

L’autorité urbaine de la ville de Kinshasa devrait étudier à fond la meilleure façon, la meilleure politique pour regrouper par exemple ces femmes à des endroits bien déterminés à travers la capitale.

Ce regroupement lui permettrait de mieux les contrôler, de percevoir la taxe nécessaire, d’assurer l’hygiène de ce qu’elles préparent afin d’éviter les maladies, de veiller à la salubrité. De toute façon, les bourgmestres devraient aussi trouver des sites où les cuisines populaires peuvent être installées afin de permettre à quiconque a besoin de goûter à la cuisine congolaise de s’y rendre.

Ce n’est qu’une piste parmi tant d’autres qui peuvent être mûries et appliquées sans trop de casses. Pour sa part, le service d’hygiène doit prendre son service au sérieux et l’exercer sans faille, malgré la situation de l’heure.

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