Biocarburant : la RDC doit faire le choix entre le palmier elaeis et le jatropha curcas (Le Potentiel)

Il y a moins de deux semaines, quelques journaux de Kinshasa ont fait à leur une de gros titres sur le retour des investisseurs étrangers dans l’industrie de l’huile de palme. Les commentaires étaient dithyrambiques. A croire que ce retour est une très bonne nouvelle pour la République démocratique du Congo. Ce n’est pas le ministre d’Etat de l’Agriculture, Pêche et Elevage qui va le contredire. Il a même signé, au nom de la RDC, un protocole d’accord avec la société chinoise de télécommunication ZTE International qui vise un projet de production et d’exploitation de l’huile de palme. D’un coût d’un milliard de dollars américains, ce projet va s’étendre sur trois millions d’hectares, dans les provinces de l’Equateur et de Bandundu, dans la province Orientale et dans une partie de la province du Kasaï Occidental.

ETAT DES BESOINS

A première vue, le projet semble intéressant surtout que la production locale d’huile de palme est insuffisante et qu’environ 15.000 tonnes sont importées annuellement et ce, depuis plusieurs années. Aujourd’hui, l’offre totale est de 240.000 tonnes. Si l’on table sur une croissance démographique annuelle de 3% et un niveau de consommation identique à celui d’aujourd’hui, les besoins devraient s’établir en 2010 à 280.000 tonnes et au plus tard en 2015 à 323.000 tonnes. Pour maintenir l’équilibre entre l’offre et la demande, les importations passeront ainsi de 15.000 tonnes en 2005 à 55.000 tonnes en 2010 et 98.000 tonnes en 2015. Si l’on retient une hypothèse de consommation alimentaire annuelle de 6 kg par personne et une consommation de savons équivalente à 2,5 kg d’huile de palme, les besoins peuvent être estimés à 465.000 tonnes en 2010 et à 540.000 tonnes en 2015, ce qui se traduit par un déficit de 225.000 tonnes en 2010 et 300.000 tonnes en 2015 (Etude des filières huile de palme et caoutchouc).

Depuis les années 1990, la demande de produits dérivés du palmier à huile d’Europe occidentale est restée à peu près stable, tandis que celle de l’Inde, du Pakistan, de la Chine et du Moyen-Orient a explosé. Ces nouveaux marchés, comme ceux d’Europe orientale, vont se développer davantage du fait que la population de ces pays est en train d’adopter de plus en plus les habitudes de consommation occidentales.

Partout ailleurs, notamment au Cameroun, en Colombie, en Indonésie, en Malaisie, à Bornéo, en Thaïllande, des projets comme celui proposé par ZTE International sont légion. Ces pays se sont avérés attrayants pour les développeurs pour diverses raisons, dont le climat favorable, le coût relativement bas de la main-d’oeuvre, le faible prix de la terre et les plans concertés des gouvernements de développer le secteur au moyen des législations favorables, de prêts bon marché et d’incitations fiscales.

L’HUILE DE PALME SOURCE DE BIODIESEL

Depuis quelques années, l’huile de palme crue fait l’objet d’une forte publicité en tant que source de biodiesel appropriée pour des pays tels que le Japon ou l’Europe, qui ont adopté des politiques favorables aux énergies renouvelables par suite de leurs engagements à mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto. La croissance de ces marchés est le moteur principal de l’expansion du palmier à huile. Selon les experts, la demande mondiale de l’huile de palme aura doublé d’ici à 2020, augmentant au rythme de 4 % par an, alors que l’augmentation serait de 2 % dans le cas de l’huile de soja.

Avec les perspectives qu’offre la production de biodiesel, les planteurs de palmier et les promoteurs de plantations de palmiers à huile ont de nouvelles possibilités de croissance. Cela a amené aussi certains Etats à soutenir et parfois à financer des projets colossaux des plantations de palmiers à huile. Comme on peut le deviner, cela ne va pas sans problèmes sociaux et environnementaux.

Le Cameroun, depuis 2001, a lancé un projet de palmiers à huile avec l’aide active de la France, du FMI et de la Banque mondiale. L’objectif est d’atteindre au moins 250,000 tonnes pour 2010. Cet objectif repose sur la privatisation de grandes exploitations étatiques et sur la plantation d’au moins 5,000 ha supplémentaires par année. Cela, au prix des forêts avoisinantes. La culture du palmier à huile et sa transformation industrielle dans ce pays sont réalisées par 5 grandes sociétés dont 3 sont détenues par le groupe Bolloré (SOCAPALM, SAFACAM, et la Ferme suisse) qui contrôle quelque 40,000 ha de plantations. SOCAPALM, la plus grande société du groupe, est à l’origine de graves conflits fonciers avec les populations locales auxquelles la terre est confisquée sans compensation.

La Colombie, principal pays producteur de l’huile de palme d’Amérique et le quatrième du monde, après l’Indonésie, la Malaisie et le Nigeria, a fait des projets agro-industriels de palmiers à huile l’une de ses priorités. Vers le milieu des années 60, il y avait 18 000 hectares en production. En 2003, il y en avait plus de 188 000 et, à l’heure actuelle, les plantations couvrent environ 300 000 hectares. L’objectif est d’atteindre un million d’hectares en quelques années. Une fois encore, la stratégie consiste à déplacer les populations et, dès que les terres sont abandonnées, à permettre aux entreprises de plantation de palmiers de les occuper. Les entreprises, ou l’État lui-même, proposent aux membres des conseils communautaires de devenir des entrepreneurs du secteur rural pour pouvoir rester dans le territoire. On les oblige à participer à des alliances ou des chaînes de production avec les entreprises de plantations. Comme conséquence, les forêts humides sont transformées peu à peu en monocultures de palmiers à huile.

L’Indonésie encourage la production du biodiesel à partir de l’huile de palme, autant pour l’exportation que pour la consommation intérieure. En ce moment, près de 6 millions d’hectares sont affectés au palmier à huile, et le triple de cette surface, soit environ 18 millions d’hectares de forêts, a été défriché pour l’expansion de cette culture. Les plans régionaux prévoient d’y consacrer 20 millions d’hectares supplémentaires. Des projets sont en discussion pour établir au coeur de Bornéo une plantation de palmiers à huile de 1,8 million d’hectares, qui sera la plus grande du monde. Près de 1,3 million d’hectares de forêt ont été détruits, en seulement trois ans. Ces plans et projections sont susceptibles d’avoir de fortes répercussions sur les forêts indonésiennes et sur les populations qui en dépendent. Le pays a déjà perdu 72 % de ses forêts anciennes et 40 % de l’ensemble de ses forêts. Les zones visées par ces déboisements sont principalement celles des forêts tropicales marécageuses, qui stockent de grandes quantités de carbone sous forme de tourbe.

En Malaisie, la plus grande partie du déboisement effectué ces derniers temps a été due aux plantations de palmiers à huile. Le gouvernement malais est en train de préparer une politique nationale sur les biocombustibles pour encourager la production et la consommation intérieure de biocarburants à base d’huile de palme. Près de 54 projets de production de B100, un biodiesel d’huile de palme à cent pour cent, ont été approuvés par le gouvernement qui s’est associé à des partenaires privés pour construire trois usines de production du nouveau carburant à des fins d’exportation.

La Thaïlande a décidé de produire du biodiesel à partir d’huile de palme comme source d’énergie. À l’heure actuelle, les zones occupées par les plantations industrielles de palmiers à huile couvrent près de 400 000 hectares dans ce pays. Pour être à la hauteur de ses ambitions, le gouvernement vise la production de 8,5 millions de litres de biodiesel par jour. Cela veut dire qu’il faudra élargir de 800 000 hectares, entre 2006 et 2009, les surfaces plantées de palmiers à huile. En 2029, cette surface atteindrait 1,6 million d’hectares.

L’EXPANSION DU PALMIER A L’HUILE, CAUSE DE DEFORESTATION

Quel constat général se dégage de ce qui précède ? Pour tous ces pays, c’est que l’expansion du palmier à huile est l’une des causes principales de la déforestation. Cela conduit à des changements importants de l’affectation des terres et des ressources, à des modifications radicales de la végétation et des écosystèmes locaux, à investissements considérables et de nouvelles infrastructures, à des mouvements et réinstallations des populations, à de grandes transformations du commerce local et international qui affectent les communautés locales.

Les populations locales dans tous les pays mentionnés sont confrontées à de graves problèmes et la plupart d’entre elles ont des conflits d’ordre foncier avec les entreprises des plantations de palmiers à huile. De nombreuses irrégularités sont observées dans la manière dont les entreprises des plantations à huile acquièrent et conservent les terres. On pourrait citer la non-reconnaissance des droits coutumiers, les plantations établies sans permis gouvernemental, l’absence d’information aux communautés, les accords non négociés, la manipulation des leaders traditionnels pour forcer les ventes, les indemnités non payées, les avantages promis mais non fournis, les terres non attribuées aux petits agriculteurs ou non aménagées, les petits agriculteurs accablés de dettes injustifiées, les études d’impact sur l’environnement effectuées trop tard, les terres non aménagées dans les délais prévus, l’emploi de la coercition et de la force pour écraser la résistance communautaire, les violations graves des droits de l’homme.

Ceux qui vantent la production de biodiesel d’huile de palme n’ont jamais relevé que la terre affectée à la plantation de palmiers à huile est souvent détériorée à cause de la production en régime de monoculture et l’utilisation de produits chimiques en abondance. Il est difficile de produire des palmiers à huile de manière intégrée parce que les palmiers sont volumineux et que leurs racines fibreuses s’étendent très loin. Chaque palmier pèse plus de trois tonnes et les types de plantes que l’on peut cultiver dans la plantation sont très peu nombreux. Pour les animaux qui vivent dans le sol, tels les vers de terre, il leur est très difficile de s’y frayer un chemin. En outre, il est également difficile et cher de se débarrasser des palmiers morts et de leurs racines, car il faut payer une rétrocaveuse pour les déraciner ou utiliser des produits chimiques pour les détruire.

LA RDC ENCORE EPARGNE

La RDC est encore préservée, mais elle ne le sera plus pour longtemps car l’exploitation forestière est devenue l’utilisation de sol la plus extensive en Afrique centrale avec plus de 50 millions d’hectares de forêt tropicale humide qui sont contrôlés déjà par les sociétés forestières. En 2003, on y a identifié 51 916 km de routes forestières. L’expansion de l’exploitation forestière est en plein accroissement à l’intérieur de la République démocratique du Congo, qui contient 63 % de la forêt de l’Afrique centrale. La construction des routes forestières est passée de 336 km par an entre 1986 et 1990 à 456 km par an entre 2000 et 2002. Cette donnée, sur les routes forestières, montre que les forêts denses et humides du Bassin du Congo ne sont plus aussi inaccessibles qu’elles y étaient il y a quelques années. Le pillage des forêts est en marche : 30 % de nos forêts, soit 15 millions d’hectares, sont légalement sous contrats avec des compagnies forestières. Pourtant, après la colonisation belge, la dense forêt tropicale était presque impénétrable. Cela a des conséquences graves sur les populations locales. Pour citer l’exemple de la forêt de l’Ituri, les pygmées Mbuti (Efe) qui y vivent sont depuis le début des années 1990 dépossédés de leurs terres et de moyens de subsistance par des entreprises forestières européennes et malaises qui s’y sont installées. Depuis la mi-2006, la réparation et la reconstruction des routes ont permis aux exploitants de pénétrer plus facilement dans la forêt… avec pour conséquence la destruction de l’habitat naturel des Efe qui se retrouvent acculés dans une impasse qui met leur vie en danger.

LES AVANTAGES DU JATROPHA CURCAS

On doit aujourd’hui tirer la sonnette d’alarme. Les inquiétudes exprimées à travers le monde à propos de l’extension des plantations d’huile de palme ou de canne à sucre, sous la justification de l’expansion nécessaire au développement des combustibles propres, doivent interpeller nos autorités politiques. Déjà la FAO s’inquiète en ce qui concerne les perturbations à la sécurité alimentaire, les organisations du domaine environnemental posent le problème des perturbations écologiques. Il ne faut pas que notre pays soit victime du genre de désastres causés aux forêts en Indonésie, Malaisie et ailleurs. Certes, ils sortent 80% de la production mondiale d’huile de palme, mais cela au prix des expulsions de leurs terres des autochtones. En Indonésie, ces expulsions pourraient concerner plus de 5 millions de personnes.

La RDC a des avantages comparatifs indéniables en ce qui concerne la culture du palmier à huile, mais son gouvernement doit être attentif sur ce qui se passe dans les pays qui se sont lancés dans de grands projets des plantations de palmiers. Des voix attirent l’attention sur de possibles dérèglements économiques et écologiques liés à la production massive de carburants issus de la canne à sucre, du maïs ou de la betterave (destinés à la fabrication de l’éthanol) et du palmier à huile, du soja, du colza, ou du tournesol (pour le biodiesel) ne doivent pas nous laisser indifférents. De nombreuses mises en garde viennent de tous les horizons.

Concernant l’évolution de la culture de palmiers à huile en République démocratique du Congo, 1970 pourrait être considérée comme l’année de référence car ce fut l’année où l’on avait enregistré la forte étendue des plantations en exploitation : 214.000 hectares, avec une production de 213.000 tonnes d’huile de palme et 50.350 tonnes d’huile palmiste. C’est à partir de cette année que le pays a amorcé sa descente aux enfers. Après trois décennies et demi d’aléas politiques marqués par la zaïrianisation, la rébellion et les guerres, les surfaces du secteur elaeicole ont été réduites de plus de 40% et les productions, faute de rajeunissement des plantations, de près de 60%.

Si l’on s’en tient à sa première destination qui est de produire l’huile alimentaire, la filière palmier à huile offre des opportunités intéressantes, notamment l’accroissement de la demande nationale et régionale et les tendances à moyen et long termes des prix internationaux. Avec les avantages comparatifs dont il dispose, pour satisfaire ses besoins actuels et à venir, la RDC a l’obligation, à condition que cela se fasse dans le respect, notamment des mesures de protection de l’environnement, de réaliser les plantations sur des friches, sur d’anciennes plantations et de ne pas déboiser la forêt primaire ou les forêts en croissance, en relançant et développant son secteur elaeicole. L’avènement des biocarburants a entraîné certains paysans abritant les forêts tropicales à se lancer dans la production de biodiesel d’huile de palme. Pour cela, ils accueillent des investissements des transnationales européennes, japonaises, chinoises et américaines. Bien que le biodiesel d’huile de palme ait de graves conséquences pour l’environnement, les transnationales intéressées aux résultats financiers le voient comme une opportunité.

Est-ce la voie que doit suivre la RDCs ? Ses forêts sont déjà attaquées par les sociétés forestières, faut-il encore les offrir aux transnationales des biocarburants ? Trois millions d’hectares de sa cuvette centrale pour un milliard de dollars américains. Le jeu n’en vaut pas la chandelle. A plus forte raison si c’est pour produire du biodiesel d’huile de palme. Le problème est que l’utilisation de l’huile de palme pour produire du carburant risque d’accroître le prix de celle-ci et de perturber l’approvisionnement pour la consommation humaine. Cela n’est pas acceptable.

La satisfaction des besoins du pays en biocarburants pourrait aussi se concevoir en dehors des méga plantations de palmiers à huile, de la canne à sucre, etc. On devrait explorer d’autres voies. Protégeons nos forêts, étendons les puits de carbone qu’elles sont, et valorisons plutôt des millions d’hectares disponibles dans nos savanes en y établissant des plantations d’autres espèces oléagineuses aussi performantes et moins exigeantes que le palmier à huile sur le plan agro-écologique. Vu les étendues incommensurables de terres arables (estimées à environ 100 millions d’hectares) et de terres marginales qui sont disponibles, tout porte à croire que la RD Congo réunit les chances de devenir, demain, l’un des plus grands producteurs et exportateurs de carburant biologique du monde sans pour cela détruire massivement la forêt, comme l’est l’Arabie Saoudite pour le pétro carburant. Il faut que le gouvernement congolais s’y engage formellement et prudemment.

Parmi les plantes oléagineuses pérennes qui conviennent pour les plantations dans les savanes et les écosystèmes marginaux de notre pays, le Jatropha curcas semble être le plus indiqué. Ce n’est pas une plante indigène en RD Congo, mais on la trouve en petites quantités partout. On s’en sert principalement dans les haies vives pour délimiter les parcelles et pour faire des enclos pour bétail. C’est la plante dont on parle beaucoup depuis quelques années et qui semble bien être la plante d’avenir en matière de production de biodiesel. L’industrialisation de sa culture dans les régions où il est déjà établi et son introduction dans celles où il n’existe pas encore ne devraient pas rencontrer des contraintes sociologiques majeures.

En ce moment où l’envolée des prix des matières premières agricoles semble de plus en plus menaçante pour la sécurité alimentaire, la graine de cet arbuste, connue jusqu’alors pour ses vertus médicinales, offre de nombreux atouts. Non comestible, l’huile de cet arbuste employée dans la filière biocarburant contribue à faire retomber la pression sur les huiles de cuisine. En plus de ses qualités comme matière première pour la production de biodiesel, elle est aussi utilisée dans la savonnerie et comme huile pour éclairage (fabrication de la bougie), le résidu d’extraction (tourteau) est utilisé comme engrais organique de valeur comparable à la fiente de volaille. Une tonne de tourteau de Jatropha équivaut à 200 kg d’engrais minéral (NPK 12 :24 :12). Par ailleurs, comme il pousse volontiers sur des terres arides. Il n’entre donc pas en concurrence avec les cultures vivrières pour occuper leurs bonnes terres, il n’exige pas de forêts. A côté du palmier à huile, plante plutôt bourgeoise qui entraîne des déforestations massives, le Jatropha apparaît comme une plante prolétaire car n’importe qui peut la faire pousser. En plantation, son coût d’exploitation est de très loin inférieur à celui du palmier à huile. Autre avantage écologique, c’est un agent efficace de lutte contre l’érosion. C’est un outil efficace au service du reboisement.

A l’échelle internationale, les avantages offerts par le jatropha curcas suscitent énormément de l’intérêt. En effet, des compagnies anglaises, américaines et des autres grandes économies du monde s’intéressent de près à cet or vert. D’aucuns y voient une réelle perspective de développement des pays économiquement fragiles et faibles. Plusieurs expériences de culture intensive sont menées actuellement par les pétroliers et les Etats. L’Inde est l’un des précurseurs. Elle a lancé un vaste programme de plantation et de sélection des cultivars de meilleurs rendements. L’objectif est de cultiver 11 millions d’hectares. Des plantations sont également développées dans le reste de l’Asie (Indonésie, Chine, Vietnam, Philippines, etc.), en Amérique Centrale (Nicaragua) et aussi en Afrique (Madagascar, Ghana, Mali, Zimbabwe, Malawi, etc.).

Le Mali et le Nicaragua ont mis en place des projets pilotes de production de biodiesel. Le Président du Brésil, Lula da Silva, a annoncé son intention de se lancer dans cette voie, afin de lutter contre la pauvreté qui sévit au nord-est de son pays. Le Sénégal et la Chine prennent des initiatives. En Indonésie le prix des semences s’envole, la tonne de cette graine soudain très recherchée coûterait jusqu’à 1.000 dollars américains.

OFFRIR L’EMPLOI A TOUT LE MONDE

Le pays, par sa grande étendue et par l’abondance des terres arables (plus de 130 millions d’hectares de terres arables dont environ seulement 4% sont annuellement utilisés pour l’agriculture) et de la main-d’œuvre disponible (près de 80% de la population active est au chômage), réunit le potentiel pour développer la culture de cet arbuste et devenir l’un des principaux exportateurs de biodiesel. L’arbuste est bien adapté aux conditions écologiques du pays. La promotion et le développement de la culture de Jatropha curcas rencontrent des conditions favorables, notamment l’existence d’une certaine tradition dans la pratique des cultures de rente (palmier à huile, caféier, cacaoyer, canne à sucre, etc.).

Les investissements massifs public et privé dans la filière Jatropha (plantations commerciales et villageoises) pourraient être l’une des solutions face aux problèmes de pauvreté et de chômage. Le développement de cette filière permettrait à la fois: – De satisfaire les besoins et la demande en gasoil du pays, ce qui signifie relance des secteurs industriels, de transport, de l’énergie, etc. ; – De respecter les obligations du pays vis-à-vis du protocole de Kyoto; – De toucher plusieurs catégories sociales, à savoir les entrepreneurs ruraux, les petits paysans et les ruraux pauvres (source additionnelle de revenus) et de créer des centaines de milliers d’emplois tant permanents que temporaires (l’établissement d’un hectare permet de mettre au travail 250 HJ, l’usinage de la production de cet hectare – extraction d’huile- permet d’en mettre 23 HJ et, enfin la transformation de l’huile en biodiesel permet d’en mettre 2 HJ) ; – De générer des milliards de dollars nécessaires à la modernisation des infrastructures, à la relance de l’activité économique et à la réhabilitation sociale de la population (épargne et gain de devises, amélioration de la balance de paiement) ; – D’initier un développement rural durable (transfert des savoirs, reboisement des sols dégradés et réduction des érosions, production d’électricité sous forme renouvelable dans les zones rurales, électrification rurale, etc.) ; – De développer des micros business associés à l’industrie : production des bio fertilisants, du miel, de l’énergie domestique, etc.

Le défi doit consister à trouver un moyen d’exploiter cette plante dans son intégralité, pour offrir de l’emploi à tout le monde et optimiser les profits des paysans et des planteurs.

UNE RECETTE ANNUELLE DE 5,5 MILLIARD USD

Le développement des carburants verts classiques a un impact environnemental non négligeable: en Afrique, en Amérique latine, en Asie du Sud-Est, des forêts très riches sur le plan de la biodiversité sont détruites pour planter des palmiers à huile. Au Mexique, le prix de la tortilla, aliment de base de la population, a flambé récemment du fait de l’achat du maïs par les USA pour produire de l’éthanol. Au Brésil, on assiste à la perte annuelle de 2,4 millions d’hectares de forêt amazonienne, notamment pour cultiver de la canne à sucre et du soja pour produire respectivement de l’éthanol et du biodiesel.

L’énorme avantage écologique de Jatropha curcas, dans la perspective d’une production en masse de carburants verts, est que sa culture n’entre pas en compétition avec les cultures alimentaires ou les forêts. Comparativement au colza (rendement en huile : 572 litres par hectare), au tournesol (rendement en huile : 662 litres par hectare) et au soja (rendement en huile : 446 litres par hectare), cet arbuste avec son rendement moyen en huile d’environ 1.900 litres par hectare (des rendements plus élevés sont possibles) est le plus intéressant. Si seulement 3% de la superficie de la RD Congo étaient plantés en Jatropha curcas, soit environ 70.350 km2 (7.350.000 hectares), avec une production minimale de 1,5 tonne d’huile par hectare, le pays produirait 11.025.000 tonnes d’huile brute. Ce qui représente une recette annuelle d’environ 5,5 milliards de dollars US.

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