"FESTIVAL GRAND HOTEL EUROPE": CINEMA CONGO
RENCONTRE AVEC BRIGITTE NEERVOORT.
Propos recueillis par SOPHIE MICHALAKOUDIS
"Grand Hôtel Europe" est l'appelation de la deuxième édition de ce festival, c'est au départ un rendez- vous littéraire, quel en est l'objectif ?
C'est un festival qui vise à positionner Bruxelles sur la carte mapemonde de la littérature mondiale. Nous faisons venir des écrivains de plusieurs pays à Bruxelles, ils se rencontrent entre eux, avec le public. C'est donc un festival littéraire mais qui touche également d'autres disciplines artistiques telles que le cinéma, les expositions, la musique etc….
Comment se déroulent ces rencontres ?
Pour cette édition, un des moments phares sera le projet "Cinéma Congo" qui a été développé en collaboration avec la Cinémathèque de Belgique ; celle-ci dispose d'une grande collection de films méconnus sur la période colonniale de la Belgique. Nous avons fait une sélection en fonction des sujets traités mais également de la qualité technique des films et nous avons demandé à six écrivains belges dont 3 francophones et 3 néerlandophones de se laisser inspirer et d'écrire des textes autour de ces documentaires historiques.
Quels regards ces écrivains belges vont-ils poser sur ces films de propagande paternalistes?
Effectivement ce sont des films naïfs, paternalistes et même choquants, il y a notamment un documentaire des années 20 où l'on voit vraiment des coloniaux donner des ordres aux "petits noirs", il y a un discours très raciste derrière cela et nous sommes persuadés que les écrivains vont être très critiques par rapport à cela mais nous insistons également sur la qualité littéraire, nous considérons les écrivains comme des créateurs ayant des idées et qui peuvent développer un discours autour de cela car apparemment ce sont des sujets qui restent toujours "tabous" en Belgique. Nous avons opté pour des écrivains qui sont des gens de lettres mais aussi des défenseurs d'idées tels que : Caroline Lamarche Phlippe Blasband, Jef Geeraerts, Kristien Hemmerechts, Carl Norac et David Van Reybrouck.
Un petit mot sur le contenu de ces films ?
Par exemple, Caroline Lamarche va parler d'un film des années cinquante sur des "Soeurs Congolaises" c'est un reportage sur des religieuses noires dominicaines où l'on montre leurs activités quotidiennes ; il y a des scènes très drôles où elles jouent notamment au football ! Mais en même temps le regard de ces religieuses est "triste", Caroline Lamarche nous a dit qu'elle possède chez elle une prière écrite par une soeur noire qui dénonce le système dans lequel elle a été intégrée par les coloniaux et la vision de sa famille rébarbative face à son choix de devenir religieuse. Il y a aussi un film intitulé "Les belges au travail" pour montrer l'exemple au peuple congolais ! C'est très paternaliste et remplis de louanges pour le zèle des travailleurs belges. Un autre documentaire sur deux marins congolais "Albert et André visitent Bruxelles" et là encore c'est pour montrer au Congolais : regardez comme la Belgique est belle !!" Il y a un très beau film sur les pêcheurs du Wagenia qui touche presqu'à l'anthropologie mais encore une fois c'est montrer les congolais comme des sauvages qui ont des coutumes barbares !