Les Kinois et le syndrome des « ayants droit »

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Aux yeux des Kinois, ce sont les "Bawuta" qui ont détruit leur ville et ses infrastructures…

Bien sûr, être Kinois, c’est un état d’esprit et un mode de vie proche de la paresse. Ici, on maîtrise le temps en relation avec le parcours de l’astre solaire, de son réveil le matin du côté de Lovanium – Livulu, à son coucher au delà du fleuve Congo. Un temps reparti entre les séances de jeu de dames en matinée, autour du « moteke » à midi et l’ambiance du soir au couloir, en partageant une bière, une danse et pourquoi pas les femmes, selon l’artiste Koffi Olomide (*).

Une situation qu’ils n’ont pas choisie mais à laquelle ils ont été réduits par la force des choses à cause de la prédation des autres, les Bawuta, les non – Kinois qui ont détruit les emplois et créé le chômage selon les Kinois

Pour comprendre ce rejet des "non – Kinois", il faut revenir aux prémices de l’indépendance jusqu’au début des années quatre-vingt.

A cette époque, Kinshasa était un grand centre économique et culturel. Les grandes sociétés kinoises, créées dans les années 30, comme ONATRA, Chanic, Utexco, Snel ou la TCC, ont donné du travail, des logements et développé des activités partout dans la ville. Chanic et Utexco disposaient de leurs camps où logeaient leurs travailleurs du côté de Kintambo. Les fonctionnaires et cadres de l’administration avaient leurs quartiers à Bandal, Matonge et Immocongo (20 mai), tandis que camp Cito ou Kauka, avec ses complexes sportifs hébergeaient les employés de l’ONATRA. Mieux, à la retraite des parents, les enfants – ces Bana Kin, étaient assurés de les succéder , soit à un poste similaire soit à un poste plus important. Cette situation était doublée d’une protection sociale qui faisait des enfants des « ayant – droits » de leurs parents, aussi bien pour les soins médicaux, les fournitures scolaires que l’accès à l’emploi.

La politique d’accès à la propriété permettait également aux parents de devenir propriétaires de leurs logements. Les enfants de ces derniers, Kinois à part entière, de par leur statut d’ « ayant droit », étaient bénéficiaire de ces acquisitions. Ce qui a fait que, dans l’éducation du Kinois, le respect du bien public, de l’espace public, comme des biens de l’entreprise sont sacrés, si l’on veut que les générations futures ne manquent de rien.

Ce leitmotiv, les Kinois l’ont respecté mais pas les autres, les « Mapeka » qui, fort de leurs diplômes et de leurs positions, se sont emparés de ce que les Kinois et leurs parents ont conservé pour se les partager sans vergogne. On peut aussi se demander si ces Kinois n’avaient pas de diplômés pour faire le contrepoids, bien sûr qu’il y en avait.

C’est ainsi qu’au milieu des années quatre-vingt, Kabaidi, un Kinois, « enfant terrible » essayera, lorsqu’il sera nommé gouverneur de la ville de Kinshasa, de rendre à sa ville son éclat d’antan par la réhabilitation des espaces verts et des ronds-points de Kinshasa ; mais son successeur, Tshimbombo, non – Kinois, prédateur et corrompu, en arrêtera l’expérience.

Et c’est de cette période que date, selon les Kinois, leur aversion à l’égard des « Yuma », « Bawuta » et « Mapeka ». Qui , à leurs yeux, ont détruit leur ville et ses infrastructures, mis en faillite toutes les entreprises que leurs pères ont bien gérées aux côtés des « Blancs » parce que ignorant complètement leur histoire, l’histoire de leur ville et de ses entreprises qui leur appartenaient un peu. Puisqu’ils y avaient investi aussi. Les autres, les « Bawuta », prédateurs, ont tout détruit, inconsciemment ou sciemment.

Alors, ils leur en veulent parce qu’ils ne savent pas ce que c’est que d’être un Kinois. N’avoir pour village natal qu’un quartier ou une commune de Kinshasa et non un obscur village au fin fond de Kisangani, Katanga, Goma, Masi manimba ou Boma, et le voir détruit par l’incurie, la corruption des venants de….

Oh , vous me direz que les autres n’y sont pour rien, et que des Kinois au gouvernement ou à la tête des entreprises publics ou privés il y ‘ en a eu et qu’ils n’ont pas fait mieux ? Oui, sauf que les autres n’ont pas le réflexe et le comportement d’ « ayant droit », « mwana kolo lopango afutelaka té. » Et çà, on n’y peut rien : c’est un syndrome qu’on attrapait à la naissance, jusqu’au début des années 80. Et cela est un droit qu’ils transmettent à leurs enfants quelque soit l’endroit où ces derniers naissent. | JOP, Un Kinois

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