04.06.08 Télécommunications en RD Congo : la commission Mutinga dénonce la démission de l’Etat (POT)

Ce rapport met à nu la confusion, le désordre, l’incurie et l’anarchie à la base des contre-performances enregistrées dans ce secteur, privant ainsi l’Etat des recettes nécessaires non seulement pour la modernisation dudit secteur en vue de répondre aux besoins sans cesse croissants des populations et du pays, mais aussi pour la reconstruction de ce dernier.

Au centre de cette situation se trouvent les services attitrés de l’Etat dans ce secteur avec au premier plan le ministère des PTT. En lieu et place de régenter les télécommunications par la définition d’une politique rationnelle et ambitieuse en la matière assortie d’une réglementation efficiente, il est observé cependant un conflit des compétences à nul autre pareil avec en toile de fond le contrôle des ressources financières générées ; laissant ainsi les opérateurs privés prendre des initiatives pour sauver leurs investissements et remplir, comme ils le peuvent, leur objet social.

Plutôt que de s’attaquer violemment et avec même mépris aux opérateurs privés du secteur (Vodacom, Celtel, Tigo, CCT…) dont la contribution au budget de l’Etat à titre d’impôts, redevances et autres taxes atteint la barre de 30 %, les sénateurs feraient gagner le pays en se posant des questions fondamentales sur la déchéance de ce secteur et en initiant des lois claires, définissant les rôles et les responsabilités de tout un chacun et mettant les régies financières devant leur responsabilité.

Le secteur des télécommunications prospère partout en Afrique et ailleurs, s’érigeant en un important pourvoyeur des ressources financières de l’Etat. C’est malheureusement pas le cas en Rdcongo. Le rapport de la commission Mutinga, qui a suscité un débat houleux ce lundi 2 juin, voire le courroux de certains sénateurs, en la salle des conférences internationales du Palais du peuple, l’a démontré noir sur blanc. Le secteur est, d’une part, caractérisé par un dysfonctionnement qui le fait fonctionner vaille que vaille, et d’autre part, gangréné par la magouille qui ne permet pas à l’Etat congolais de se retrouver.

Selon la commission Mutinga, les principales lois régissant les télécommunications en RD Congo, à savoir la loi-cadre n°013/2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications en RD Congo ainsi que celle n°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications (ARPTC) sont la source des conflits qui opposent le ministère des PTT, y compris le secrétariat général des PTT, et l’ARPTC. En ce sens qu’elles confèrent des attributions concurrentes aux structures précitées, outre la controverse qui existe autour de la tutelle de l’ARPTC chargée d’appliquer la politique du gouvernement, alors qu’elle dépend de la présidence de la République.

Il en résulte une confusion de rôle au point que le ministère des PTT, par le ministre interposé, chargé de concevoir une politique générale sectorielle ne s’empêche pas de se comporter comme Autorité de régulation ; octroyant ainsi fréquences, licences, etc. C’est notamment le cas avec la licence de 3ème génération dont le ministère a confié la vente par appel d’offre international à un partenaire extérieur, en l’occurrence la société Millenium. Cela sans avis de l’Arptc.

Au niveau du secrétariat général des PTT, on ne s’embarrasse pas non plus à obstruer l’ARPTC dans son fonctionnement. La commission Mutinga a observé à ce niveau le refus de céder à l’Autorité de régulation ses attributions. Conséquence : le secrétariat général accorde aussi de manière indépendante fréquences, licences et autres avantages qu’il juge nécessaire. A en croire la commission Mutinga, tout ceci se fait sans coordination aucune. L’on ne peut donc s’étonner que les licences soient bradées et que les fréquences distribuées à la pelle.

Cette guéguerre entre structures étatiques a lieu pendant que l’Ocpt, l’opérateur public, est dans un état de délabrement avancé avec un matériel obsolète. Un matériel d’un autre âge et hors d’usage dans la plupart de cas. Ce qui ne lui permet pas d’assurer la télécommunication au pays et l’interconnexion internationale, faute de switch et de gateway unique ; laissant ainsi les opérateurs privés s’équiper en conséquence.

La RDCongo, note la commission Mutinga, serait totalement enclavée et isolée du monde sur le plan des télécommunications n’eut-été la libéralisation du secteur. Celle-ci a permis l’implantation des opérateurs privés (Celtel, Vadacom, Tigo, CCT…) dont les investissements ont fait en sorte qu’une bonne partie du pays soit joignable avec les communications interprovinciales rendues désormais possibles. Grâce aux technologies nouvelles dont elles se sont dotées, la RD Congo est aujourd’hui connectée sur la toile, symbole du village planétaire.

En plus, leur contribution au budget de l’Etat est de plus en plus évidente, traînant derrière eux les pétroliers et les opérateurs miniers. Elle frôle 30 % des recettes de l’Etat. Dernièrement, trois d’entre eux (Vodacom, Celtel et Tigo) ont rendu public le résultat de leur contribution aux recettes de l’Etat à titre d’impôts, redevances et autres taxes, pour le 1er trimestre 2008 : 40 millions Usd.

Mais seulement voilà. Ces opérateurs n’ont pas été ménagés par les sénateurs qui les ont traités de tous les maux, décriant même certaines méthodes de marketing, pourtant licites, qu’ils utilisent. Ce qui n’encourage guère ceux des investisseurs qui prennent le risque de se jeter à l’eau dans un pays qui occupe une place au bas de l’échelle dans le « Doing Business » de la Banque mondiale avec, notamment les tracasseries de toutes sortes et l’insécurité judiciaire.

En effet, la commission Mutinga a relevé des cas de paiement par les concessionnaires sur base de note de perception et par ordre de paiement dont on n’a trouvé aucune trace ni au niveau de la DGRAD ni au niveau des banques commerciales. Toutefois, la même commission constate un désordre généralisé au niveau de la DGRAD qui occasionne un manque à gagner au Trésor public. Une façon de dire que l’Etat doit d’abord balayer devant sa porte.

Ainsi qu’il se dégage, la situation des télécommunications en RD Congo est catastrophique. Une réforme du secteur est plus qu’indispensable. Les solutions existent. Un préalable cependant, les acteurs du secteur doivent se retrouver. De la sorte, l’Etat, par le gouvernement, pourra définir de manière rationnelle une politique pouvant régenter le secteur. C’est dans ce sens que s’inscrivent les recommandations de la commission Mutinga.

Nouvel élan consuling

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