27.01.09 Le Potentiel : CINQ QUESTIONS à Willy Katambwe (Freddy mulumba kabuayi)

 

 

1. Comment expliquez-vous la popularité du nouveau président américain auprès du Congolais moyen?

Le président Wade a fait preuve de lucidité en déclarant que, «noir
ou non, tout président des Etats-Unis est avant tout Américain», vous
comprenez pourquoi la popularité du nouveau président en Afrique et,
particulièrement en RDC, ne repose sur aucun outil de rationalité
intellectuelle, c’est le domaine de la passion et de l’émotion, en
fonction bien entendu des considérations ethniques vouées à être
substituées rapidement par une attitude de désenchantement. Pourtant,
du point de vue purement congolais, le président Bush a été un bon
président pour avoir accompagné le pays dans le processus de
pacification et de démocratisation de 2000 à 2008, une période cruciale
dans l’histoire de notre pays. Les Etats-Unis ont apporté un concours
financier important à la Monuc, la comparaison avec son intervention
auprès de l’Onuc en 1960 est riche en enseignement. Mais il est
important de savoir que l‘unilatéralisme américain a frustré l’Europe,
choquée dans son amour-propre que son impuissance soit révélée au grand
jour, elle s’est ainsi adonnée à un matraquage médiatique au point
d’influencer négativement l’image des Etats-Unis en Afrique. Comme les
Africains sont incapables de réfléchir par eux-mêmes depuis un certain
temps, ils semblent avoir identifié malencontreusement leurs intérêts
respectifs à ceux des Européens au point d’avoir oublié que, sous Bush
Junior, le continent a bénéficié d’un concours financier important,
notamment en matière de lutte contre le Sida, rien n’indique que le
nouveau président, beaucoup plus soucieux de relancer la machine
économique de son pays pourrait nettement relayer son prédécesseur.
L’Europe espérant, cette fois-ci, être associée comme lors de la Guerre
froide par les Etats-Unis au règlement des problèmes mondiaux, se
frotte déjà les mains alors que lors de l’unilatéralisme, elle a fait
moins de mal à l’Afrique Noire… Il convient également de stigmatiser
cet «opium bouc-émissairiste», celui qui fait croire naïvement au
congolais moyen depuis 1960 que le sous-développement de notre pays
serait entièrement imputable à l’occident au point de disculper
maladroitement les petits hommes politiques congolais apparemment
satisfaits de ces impressions vulgaires…

2. Vous semblez donc disculper l’Occident par le nuancement que vous appliquez à cette thèse…

La question ne se pose pas en ces termes, chacun sait que des
auteurs comme Cantillon au 17ième siècle avait soutenu que les colonies
devraient servir éternellement des réserves des matières premières et
des sources des débouchés, c’est parce que les Américains résistèrent
aux anglais qu’il eût la guerre de l’indépendance au 18ème siècle,
l’Afrique noire ne s’est jamais investie suffisamment pour recouvrer
son indépendance politique et économique. A l’exemple de la RDC, on est
resté comme au 19ème siècle exportateur des ressources naturelles et
importateur des produits finis sans ambition réelle comme en Malaisie
ou en Thaïlande de développer une industrie locale par une politique
comme au Brésil dans le passé en matière d’automobile
d’import-substitution.

3. Vous faites allusion aux dernières déclarations du président français devant le corps diplomatique étranger…

L’Europe ne tient nullement à améliorer des relations psychologiques
avec l’Afrique, comme si certains trouvaient du plaisir à entretenir
une tension complètement inutile, voire futile de basse distraction,
sans tenir compte de l’évolution des mentalités sur le continent
africain. Ils s’étaient essayés dans la provocation futile au Sénégal,
c’est facile lorsqu’on est né dans une puissance coloniale de
considérer la traite négrière et le colonialisme comme des causes
mineures du sous-développement du continent africain, on semble de nos
jours en des termes voilés prôner le révisionnisme frontalier dans la
région des Grands Lacs. En 1885 lors de la fameuse conférence de
Berlin, en effet, ce sont les mêmes par goût abject du gain qui
retouchèrent les frontières en Afrique, et c’est dans la douleur en
1964 que les africains s’étaient désespérément résolus d’opter pour le
principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation,
on semble vouloir le contredire sans être capable d’en assumer les
conséquences politiques… Au moment où aux Etats-Unis, on parle
désormais « valeurs » et « idéaux », certains comme d’anciens négriers,
sans morale ni pudeur, ne voient que fric ou sous, avec toujours cet
orgueil bassement entretenu de vouloir toujours se considérer
supérieurs en intelligence par rapport à d’autres sans aucun message
consistant à transmettre à l’humanité…

4. Il y va aussi de la responsabilité des dirigeants congolais…

Bien sur, depuis 1960 de petits hommes politiques comme disait
François Mitterrand ne comprennent guère les dangers récurrents
qu’encoure un Etat circonscrit par neuf pays voisins, au nom d’une
certaine science personnelle dont la viscosité ne peut que scandaliser
les états collectifs de conscience. Après la démocratie si l’on veut,
il faut leur apprendre le sens de l’intérêt général bref le
fonctionnement d’une République.

5. Que conclure ?

La crise financière nous est profitable parce qu’elle oblige ceux
qui exportent des produits manufacturés de nous donner les moyens de
les consommer, à nous de nous organiser mieux que dans le passé.

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