28.01.09 Le Potentiel : Cinq questions à Achille Mutombo-Cyayi

1. Nicolas Sarkozy a proposé un schéma de sortie de la crise dans l’Est de la RDC dénommé « Plan Sarkozy ». Avez-vous un commentaire à ce sujet ?

Sur le plan formel, je félicite le président français pour sa franchise. Contrairement à ses prédécesseurs, il dit ouvertement ce qu’il pense. S’il n’avait pas dévoilé ce plan, bien des Congolais n’auraient pas sû qu’il y a un plan élaboré dans les coulisses contre la RDC depuis 1996, l’année du début de la guerre de libération menée par l’AFDL. A mon humble avis, l’attitude du président Sarkozy est positive dans la mesure où, elle permet aux Congolais de mieux saisir la quintessence des jeux et enjeux politico-diplomatique de l’heure. Sur le plan matériel, ce plan est récusable dans ce sens qu’il déboucherait sur la balkanisation subtile du Congo-Kinshasa. En outre, ce Plan révèle, une fois de plus, le soubassement des conflits armés dans l’Est du pays. Il s’agit du partage irrationnel des ressources naturelles de la RDC avec des tiers.

2. Une mobilisation des Congolais ne pourrait-elle pas bloquer la balkanisation de la RDC ?

Il y a toujours moyen de bloquer l’exécution des plans de balkanisation montés par de grandes puissances contre notre pays. Malheureusement, il y a carence de « leadership visionnaire et dynamique au Congo ». Ce constat fait dernièrement par nos évêques catholiques est réel. En outre, il faut reconnaître que la classe politique congolaise actuelle privilège généralement ses intérêts personnels en lieu et place de l’intérêt supérieur de la nation. Ce qui explique parfois l’indifférence qu’elle affiche face à la misère de nos populations.

3. Membre de l’opposition extra-institutionnelle. Quel est votre commentaire sur le déroulement des activités parlementaires ?

La situation qui prévaut actuellement au pays n’est pas reluisante. Par conséquent, elle nous interpelle et nous pousse à affronter les échéances électorales prochaines, sans faux fuyants. Cela, dans le souci de travailler pour le bien-être de tous. C’est pour ainsi dire que la politique est pour nous un apostolat à l’instar du sacerdoce. Dans ma vie, j’ai toujours apprécié les actes posés rationnellement, même s’ils émanent des adversaires politiques. L’essentiel est que le peuple congolais trouve son compte. Pour ce qui est de nos députés et sénateurs, ils jouent généralement leur rôle pendant cette législature. Mais, ce qui est condamnable chez eux, c’est l’adoption tardive et précipitée des lois essentielles. Le cas de la loi budgétaire de l’Etat pour l’exercice 2009 en est une illustration éloquente. L’absence de contrôles parlementaires efficaces et efficients est également parmi les griefs qu’on articule contre les parlementaires. Il en est de même pour les interpellations complaisantes des ministres et de chefs d’entreprises. Pour un lendemain meilleur, les élus du peuple ont tout intérêt de sauvegarder leur dignité en évitant d’être cités dans des cas de corruption comme tout le monde l’a suivi lors des plénières qui ont précédées la clôture de la session budgétaire. De telles attitudes choquent énormément les bonnes consciences !

4.Les troupes rwandaises sont entrées au Nord-Kivu depuis le 20 janvier, en vue de traquer les FDLR aux côtés des FARDC. Qu’en dites-vous ?

Beaucoup de personnes se sont déjà prononcées sur cette question. Notre point de vue vient enrichir ce qui a été dit par les autres en ce sens que l’invitation en soi n’est pas mauvaise, si elle est adressée dans le but de ramener la paix au Kivu. Toutefois, il fallait au préalable une concertation inter-institutionnelle d’une part et celle d’avec la Monuc, d’autre part. Sans oublier de mener une campagne d’information auprès des leaders d’opinion, surtout ceux de l’Est du pays. Actuellement, la population veut connaître le contenu des accords signés par Kigali et Kinshasa sur ce dossier. Cela, pour éviter ce qu’on a connu lorsque les troupes rwandaises ont accompagné l’AFDL au Congo en 1996. C’est pourquoi, la convocation d’une session extraordinaire de l’Assemblée nationale s’avère indispensable.

5. Que dire de l’arrestation de Laurent Nkunda ?

Si Nkunda est réellement arrêté, pourquoi on ne l’a pas fait quand il était sur le sol congolais ? N’est-ce pas une stratégie subtile de négociation ? Que deviendra l’actuel leader du CNDP (Bosco Ntaganda) qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI ? Quelle sanction doit-on infliger aux parrains du CNDP qui a endeuillé de nombreuses familles au Kivu ? Le ministre congolais en charge de la Coopération régionale et chef de la délégation gouvernementale aux négociations de Nairobi devrait en tenir compte, même après ces pourparlers, pour l’avènement d’une paix durable.

Propos recueillis par T.M.E.

Président national de la Convention des démocrates socialistes (CODES).

Laissez un commentaire

Vous devez être connectés afin de publier un commentaire.