La crise financière est une opportunité pour lAfrique !
Par Charles BAMBARA, Londres
Sans
équivoque, DAMBISA MOYO a soutenu
devant un auditoire de chercheurs, gestionnaires de fonds, banquiers,
universitaires et journalistes "quaucun pays au monde ne sest développé
avec laide uniquement". "Laide pour laide nexiste pas"
dans tous les cas. Et, avec la crise actuelle et la dépréciation des principales
devises internationales, les pays Africains devraient comprendre que
linvestissement direct étranger diminuera.
"Il faudrait
donc que lAfrique puisse profiter de cette crise pour inventer son
développement et ne pas rester à attendre et à espérer un hypothétique sauvetage
de son économie par les puissances mondiales qui elles-mêmes cherchent à se
sauver"
Que
faire ?… Se départir de lattentisme actuel et innover en recherchant les voies
et moyens doffrir aux marchés internationaux des produits transformés utiles et
nécessaires. Même si le discours ambiant répète à loisir que lAfrique ne doit
pas être oubliée par les pays développés, on se rend compte, dans les
faits, que très peu dactions concrètes ont été prises ces derniers mois pour
aider lAfrique.
Mme OKONJO-IWEALA, directrice de
département à la Banque Mondiale, demandait récemment au Forum économique de
Davos que les pays développés octroient 0,7% de leur plan de relance économique
à lAfrique. Mais aucune réaction na été enregistrée après cette déclaration.
Profiter de la crise
"Il faudrait
donc que lAfrique puisse profiter de cette crise pour inventer son
développement et ne pas rester à attendre et à espérer un hypothétique sauvetage
de son économie par les puissances mondiales qui elles-mêmes cherchent à se
sauver". Pour ce faire,
léconomiste Zambienne DAMBISA MOYO,
ancienne élève de léconomiste Américain Jeffrey SACHS, mais qui ne se réclame
pas de cette école, ni de cette philosophie, dira que lAfrique a des atouts.
Dabord un taux de croissance moyen qui, ces cinq, voire sept dernières années,
tournait autour de 7% par an. Ensuite la multiplication des bourses de valeurs
Africaines, au nombre de 23 à présent. Une plus grande stabilité politique avec
des démocraties de plus en plus viables même si des problèmes demeurent dans
certains pays.
Rejeter laide basée sur le show-business
DAMBISA MOYO
fera une genèse de laide depuis 1800 jusquà nos jours passant en revue chaque
fois la caractéristique majeure de laide suivant la période. Par exemple,
laide sous les cinq ans du plan Marshall, après la deuxième guerre mondiale,
était axée sur la reconstruction de lEurope. Alors quen Afrique laide est
axée sur le développement, ce qui est un anachronisme.
- Dans
les années 40-50, laide en faveur de lAfrique visait létablissement des
grandes infrastructures comme les routes et les chemins de fers. - Ensuite, dans les années 70, il fallait lutter contre la
pauvreté. - Dans
les 80, il sagissait de soutenir linitiative privée. - Dans
les années 90, le thème de laide portait sur la bonne gouvernance. - Et,
depuis 2000, laccent est mis sur lintervention des stars (BONO, Angelina JOLIE, Bob GELDORF, MADONA…) et autres vedettes qui
viennent sapitoyer sur le sort de lAfrique pour mobiliser laide. Ce qui est
dommage, dira léconomiste Zambienne, déclenchant les applaudissements de
laudience, une centaine de personnes triées sur le volet pour leur intérêt au
thème du jour.
Des trillions de dollars sans résultats
Et pour
elle, laide en tant que
solution pour engendrer la croissance et lutter contre la pauvreté en Afrique a
échoué. En effet, des trillions de dollars ont été investis en Afrique
sans grand succès.
La
corruption reste toujours un problème, lespérance de vie faible, et lon
pourrait continuer cette liste dindicateurs économiques pas encore
satisfaisants sur le continent. Elle donnera encore cet exemple frappant : "Il
est plus cher et plus difficile de transporter un bien dAddis Abbeba sur
Abidjan que de transporter ce même bien de Tokyo à Abidjan". Près dun
demi-siècle après les indépendances Africaines, on en est encore là : le
commerce intra-Africain est dérisoire, malgré la mise en place, ces derniers
jours dans la capitale Éthiopienne, dun embryon de gouvernement Africain tiré
par le guide Libyen Mouammar
KADHAFI.
La Zambienne est catégorique, "laide ne marche pas sur le
continent". Et donc, pour elle, il faudrait que les pays
Africains cessent de gaspiller leurs ressources en allant participer à des
rencontres comme celles de Doha où lon discute du commerce international, car
les gouvernements des pays occidentaux qui y participent représentent les
intérêts de leurs électeurs et naccepteront jamais de modifier les termes du
commerce international en faveur des pays Africains. Car il faut bien quils
protègent et défendent leur base électorale pour pouvoir se faire réélire. "LAfrique doit donc inventer
son développement, et ne plus penser que laide est la solution idoine"