12/03/09 Le Vif/L'Express _Thierry Michel : "ce qui se passe au Katanga est fascinant "
Thierry Michel ne fait pas le procès des capitaines d'industrie
occidentaux, ni celui de la Chine en Afrique. Il raconte la saga des
hommes forts du Katanga et des travailleurs des mines. –
Saga industrielle, Katanga Business montre l'une des régions les
plus riches du globe prise dans les rets de la finance internationale.
Un Katanga où, pourtant, la population continue à vivre dans une
pauvreté extrême. Projeté cette semaine en première mondiale au
Fespaco, le festival panafricain du cinéma de Ouagadougou, le film sort
en salle en Belgique le 1er avril.
Le Vif/L'Express : Qui gagne,
qui perd au Katanga ? C'est l'une des questions posées dans votre
nouveau film, "Katanga Business", qui sort le 1er avril en Belgique.
Quelle est la réponse ?
Thierry Michel : Les aventuriers venus en
éclaireurs ont su profiter des « soldes ». Ils ont acheté à bas prix
des concessions minières, revendues à des sociétés cotées en bourse.
Aujourd'hui, avec la crise, les capitalistes ont perdu leur mise. Mais
la province minière reste un théâtre où s'agitent des entrepreneurs
venus des quatre coins de la planète : des Chinois, des Indiens, des
Libanais, des Israéliens, des Américains, des Canadiens, des
Australiens, des Sud-Africains…
Les Africains, eux, forment toujours la piétaille. Moïse Katumbi, le
gouverneur flamboyant du Katanga, fait figure d'exception. Est-il l'un
de ces hommes providentiels qui sauront mettre le Congo sur les rails
de la bonne gouvernance et du renforcement de l'Etat ? Ceux qui iront
voir mon film jugeront.
Cette personnalité charismatique ne mériterait-elle pas un film à elle seule ?
Sûrement ! En Afrique, il représente les leaders de la nouvelle
génération. Homme d'affaires immensément riche, quadragénaire issu des
élections, il n'a aucun compte à régler avec le passé. Quand il évoque
l'époque coloniale belge, c'est en termes positifs.
En revanche, il accable Mobutu, accusé d'avoir ponctionné la
Gécamines jusqu'à son effondrement. Fils d'un juif italien de Rhodes et
d'une femme d'ethnie bemba, il est appelé par certains Congolais le «
demi blanc ». Il joue sur la symbolique forte de son prénom biblique,
Moïse, qui est aussi celui de Tshombe, l'ancien président du Katanga
sécessionniste.
Quels obstacles avez-vous rencontré pendant le tournage ?
Au Katanga, les entreprises minières m'ont souvent prié de contacter
leur siège canadien, britannique ou sud-africain pour obtenir une
autorisation de tournage. Heureusement, quand une porte s'ouvre,
d'autres suivent. Avoir la confiance de Paul Fortin, patron de la
Gécamines, donne ainsi un accès privilégié aux grands opérateurs
chinois.
Grâce à mes films précédents, en particulier Mobutu roi du Zaïre,
dont des copies pirates circulent toujours au Congo, je ne suis pas un
inconnu dans le pays. De même, les projections de Congo River
organisées il y a deux ans dans les grandes villes congolaises ont joué
en ma faveur. Mes amis journalistes locaux, eux, m'ont aidé à entrer
dans le monde des creuseurs artisanaux.
Souvent, la police des mines, la sûreté intérieure ou les militaires
ont compliqué ma tâche par leurs tracasseries. Il faut alors sortir
quelques dollars ou le nom d'un contact haut placé. Parfois, quand tout
se débloque enfin, il se met à pleuvoir et la journée de tournage est
perdue !
Entretien : Olivier Rogeau
La version intégrale de l'entretien dans Le Vif/L'Express du 13 mars 2009.
Le site officiel du film Katanga Business est disponible à l'adresse window.open("http://www.katanga-lefilm.com");
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