Le Développement : Genèse, Echecs et Nouvelles Stratégies en Afrique ( Mzee Mwembo, Ph. D.)
Beaucoup de personnes qui ont lu mon article sur
le développement endogène mont écrit pour exprimer leur satisfaction sur
larticle en général. Un correspondant a écrit que la section de mon article
qui parlait de la genèse du mouvement du développement lavait beaucoup intéressé.
Dans le présent article, je donne plus de détails sur lhistorique du mouvement de développement. Ensuite,
janalyse les échecs du mouvement du
développement en Afrique et je propose les stratégies que proposent les têtes
pensantes de lAfrique.
Historique du Mouvement de Développement
Comme
touchait à sa fin en 1944, les gouvernements des pays occidentaux qui se considéraient
les plus puissants du globe se rencontrèrent dans la ville de Bretton Woods en
New England pour établir des institutions et des règles qui gouverneraient des
activités économiques internationales de l'après-guerre.
Les réunions de Bretton Woods ont établi trois
organisations économiques internationales clé qui sont toujours importantes
pour les politiques du développement aujourd'hui. Ces organisations sont (1) le
Fonds Monétaire International (le FMI), qui a été au départ conçu pour réglementer et diriger le système monétaire
international; (2)
pour
et le Développement, maintenant connu sous le nom de
Celle-ci a été conçue pour financer des projets de développement industriels
différents dans les ‘pays en développement; (3) the General Agreement on
Tariffs and Trade (GATT), maintenant
connu comme l'Organisation Commerciale Mondiale, the World Trade Organization
(WTO), qui a été conçue pour façonner et faire respecter des accords
commerciaux globaux.
A lorigine, ces organisations ont été établies
pour aider à reconstruire l'Europe occidentale déchirée par la
guerre, mais elles deviendront plus tard les organisations de politique principale dans le développement
international. Cependant, le terme " développement" et sa définition
comme l'avancement du progrès moderne des conditions économiques d'une nation,
est venu en existence comme résultat de
l'adresse inaugurale du Président américain, Harry Truman en 1949. En effet,
dans son discours inaugural, parlant de la période de la décolonisation
internationale, et de la manière daider
les ex colonies, le Président Truman définit le terme développement selon le
point de vue de la culture occidentale qui considère le développement
principalement sur son aspect matériel. Il faut ajouter que pour loccident,
posséder peu en termes matériels est un vice ou une déficience à corriger coûte
que coûte.
Echec du Mouvement du Développement
Les paroles du Président américain, Truman, ont été
adoptées pour toujours pour définir le développement comme étant ‘l'engagement de sociétés Occidentales à
étendre la prospérité matérielle aux pays moins développés par l'assistance
sociale et économique. Par engagement,
il faut entendre la promesse, le contrat que lOccident a signé sans les
africains pour aider lAfrique. Cette promesse [dette] est-elle
accomplie ? La réponse est connue de toutes les personnes honnêtes.
De 1949 à nos jours, les fondations et les
organisations charitables et humanitaires de développement ont poussé comme des
champignons dans la brousse, mais sur terrain les résultats ne sont pas
proportionnels aux investissements consentis par lindustrie de développement. Au
regard de léchec du mouvement de développement, certains proposent que les
politiques des organisations de développement soient revues et que les normes
de politique de développement actuelles soient entreprises par ceux qui les ont créées afin daméliorer les
effets positifs de développement et permettent à ces politiques d'aider ceux
qu'ils sont destinés d'aider.
Lerreur
que beaucoup de personnes commettent est de croire et faire croire aux
africains que laide occidentale aidera les africains à se développer à la manière occidentale sans
les africains. Dans Promises Not Kept: Poverty and The Betrayal of Third World Development
, John Isbister (1998), chercheur en développement économique, reconnaît que la
promesse faite par lOccident daider les pays dits de Tiers Monde na pas été
tenue. Isbister va plus loin et déclare que les pays occidentaux ont trahi les
pays du Tiers Monde et ont provoqué leur pauvreté.
En
effet, pendant près de 400 ans, loccident a détruit lAfrique en kidnappant
les africains les plus jeunes, les plus forts et ceux en bonne santé. Ensuite, pendant la colonisation de lAfrique,
lOccident a forcé les africains à cultiver le coton, le café, les palmiers
pour le profit de lindustrie du colonisateur. A cela ajouter limpôt [mpalata
ou kodi] exorbitant que les africains devaient payer au Mbula Matari. Les
connaissances traditionnelles ont été systématiquement détruites et remplacées
par les connaissances occidentales à travers les écoles et les églises. Peut-on
résister lexploitation et les guerres et se développer en même temps ?
Après
les indépendances politiques des pays africains, lexploitation du continent
africain sest intensifiée par la naissance de lindustrie du développement qui
compte de milliards de dollars américains. Il ya des gens qui ne veulent pas
entendre parler de lesclavagisme et la colonisation. Pour eux, si lAfrique ne
se développe pas, cest de leur faute. Pire, ils imposent des méthodes
déficitaires qui consistent à blâmer les victimes et accentuer ses déficiences.
Il est vrai que lAfrique a une part de responsabilité, mais la responsabilité
est partagée entre les africains et ceux qui continuent dexploiter lAfrique
tout en montant une attitude hypocrite. Ceux qui blâment lAfrique de sa propre
pauvreté citent les pays qui ont été colonisés en Asie et qui aujourdhui
commencent à se développer. Cet argument est une demi-vérité car ces gens ne disent
pas que les occidentaux, fuyant des taxes élevés dans leurs pays ont investi en
Aise, mais pas en Afrique. Depuis longtemps, les occidentaux suivent le mot
dordre de leurs philosophes qui ont dit : « oublions
lAfrique ; LAfrique ne compte pas ».
A
notre avis, ce ne sont pas les changements opérés par les occidentaux qui
apporteront le développement en Afrique. Ils ont essayé plus de mille fois sans
obtenir les résultats escomptés. Selon Ngugi Wa Thiongo, «Toute étude sur les africains
doit les placer comme sujets et non comme objets. Dans le passé, les africains
ont été [décrits] comme objets, et condamnés à être traités comme des sauvages
non civilisés qui avaient besoin de salut. » Plus dun demi-siècle
laide occidentale pour le développement de lAfrique na pas produit les
fruits attendus, mais au contraire la situation sest empirée. Beaucoup de
têtes pensantes de lAfrique proposent dautres modèles pour aider lAfrique à
sortir de la misère. Parmi ces têtes pensantes, outre le professeur Ki-Zerbo, citons le grand
économiste égyptien, Samir Amin, qui propose un modèle déconnecté de
loccident.
Les Défis du Développement au Congo et en Afrique
Les problèmes du Congo ne sont pas à séparer de ceux de lAfrique,
car ce qui touche le Congo touche toute lAfrique et vice-versa. Pierre Ernie a
raison de dire que le monde africain ressemble à une toile daraignée dont
le plus petit de ses éléments ne peut être touché sans que toute la toile
sébranle. Les récentes guerres au Congo ont provoqué une crise dans beaucoup
de pays dAfrique.
lAfrique du Sud et tant dautres pays africains sont envahis pas les
déplacements massifs des congolais. La présence des congolais dans ces pays a
causé des sérieux problèmes sociaux et économiques dans les pays daccueil.
Aucun pays Africain ne peut se développer indépendamment des autres pays
africains. LAfrique plus que tout autre
continent est marquée par un lien de lunité culturelle, linguistique et social
qui provient dune même source. Dr. Anta Diop le dit mieux.
Ceci étant dit, Il serait naïf de croire quen éliminant
leurocentrisme et le paternalisme occidental le développement de lAfrique se réalisera
comme sur des roulettes. Cela nest pas vrai car, il existe au Congo et en
Afrique des éléments de cultures et des croyances qui nous bloqueront si nous
ne les rejetons pas sagement et agressivement. Par exemple, la dépendance des
membres de la famille élargie sur une personne qui travaille ou qui a de
largent. Au lieu de faire dautres choses, le ‘Joseph de la famille va sentir
tous les poids de dix, voire vingt personnes sur lui ou sur elle à tel point
que ni la personne fortunée ni les membres de la famille, personne ne va
progresser. Ensuite, la croyance et la pratique de la sorcellerie et des fétiches
constituent un véritable obstacle au développement.
De nos jours encore, certains congolais croient quils
peuvent devenir riches, obtenir une promotion, gagner un match de football ou
garder le mariage en faisant des gris-gris au lieu dêtre créatif et travailler
dur. A tout cela ajouter notre culture africaine qui est statique et
conformiste ne laissant pas assez de place à la compétition, à la créativité, ni
à la recherches, au changement de systèmes et dinvention des choses nouvelles.
Notre culture est statique et conformiste, elle manque ladaptabilité aux
réalités du moment.
Que dire du tribalisme ou du régionalisme dont les
méfaits sont incalculables ? Tous ces obstacles sont surmontables, mais
jusqu'à ce jour nos efforts de développement sont confrontés sur deux
fronts: la lutte de replacer notre centre pour le sevrage des seins de la
mère occidentale, et la lutte contre certaines de nos valeurs ne cadrant plus
avec le monde daujourdhui. La sagesse exige que lon attaque un front avant
de commencer lautre. Ezabot disait à son enfant : « Mon enfant, en
cas de troubles ou de problèmes penses dabord à toi-même, dabord à toi-même ! ».
Le Congo et lAfrique doivent commencer par changer avant de dire à loccident
de changer.
Pour réussir le développement au Congo ou en Afrique, il
incombe aux pays occidentaux de démontrer un minimum de respect et de tolérance
de la culture et des valeurs des africains. Il ne suffit pas de dire que les
africains doivent prendre leur destinée en mains. Cela est vrai, mais le passé
historique a créé des relations politiques, économiques et culturelles entre
lAfrique et lOccident marquées par les injustices et les préjugées.
Le changement de mentalité
de la part de loccident et de lAfrique est nécessaire pour que les uns et les
autres se développent selon leurs cultures. Le rôle assigné aux africains de
producteurs de matière premières qui doivent être transformées en occident pour
être revendues cent fois plus cher est lun des freins au développement de
lAfrique, car cest une injustice à grande échelle.
Limposition dutiliser les langues occidentales en
Afrique est un grand obstacle au développement car aucun pays occidental
nutilise la langue de son voisin pour se développer ni éduquer ses enfants
dans une langue étrangère. Pourquoi faire aux autres ce que vous ne voulez pas
que les autres fassent pour vous ?
produit un très bon rapport conjoint avec le Gouvernement de
les écoles congolaise et les parents. Ce rapport produit en 2005 a très bien
examiné tous les problèmes quantitatifs qui se posent dans lEnseignement au
Congo RDC. Le rapport na pas abordé laspect qualitatif de notre enseignement,
à savoir, le contenu de lenseignement qui doit être conforme à nos réalités
sociales et culturelles. Le très
respecté, LAbée Ekwa, sest plaint de cette lacune depuis les années 1964.
Tant que ce problème persiste, nous marcherons avec des cailloux dans nos
souliers.
Nouvelles Stratégies : Samir Amin et de Développement de lAfrique
Dans son livre fort impressionnant, Le
développement inégal (1973), Amin propose un modèle de développement de
lAfrique en deux étapes. La première étape sappelle ‘la déconnexion par les
‘pays pauvres du système international. Amin soutient que le système occidental est à la base de la
dépendance d'un bon nombre des pays africains. Ce système est encadré par
le FMI, en anglais International Monetary Funds, IMF. Dans la deuxième étape, la phase de ‘reconnexion,
Amin estime quen se développant en dehors du modèle occidental, les pays
africains seront en mesure de négocier d'égal à égal avec loccident ;
car, selon Amin, si on est pauvre, on
est en position de faiblesse dans les négociations. Pour Amin, les pays du ‘Tiers-Monde
doivent couper les liens avec l'occident sils veulent se
développer. Notre constat donne raison à
Amin dans le cas du Japon, de
Chine
Corée
coupé le cordon ombilical avec loccident paternaliste. Le modèle occidental
naidera jamais les africains à se développer. Pourquoi ? Amin avance des
raisons philosophiques suivantes :
Le modèle occidental est caractérisé par la théorie de
l'évolutionnisme, le diffusionnisme et le dualisme. Les tenants de cette école
de pensée soutiennent que le développement est linéaire. Cette conception dun
développement linéaire est contraire au système africain qui est
circulaire. En Afrique, la vie est un
cercle caractérisé par la naissance, lâge adulte puis la mort, et la vie
recommence. En Afrique tout se faisait en cercle : manger en cercle,
danser en cercle, palabrer en cercle. En Afrique le temps est cercle ainsi que
les saisons, etc. En Europe le temps est linéaire.
Pour lEurope occidentale, tous les autres pays doivent
passer par les étapes de croissance matérielle comme cela a été le cas pour
leurs pays. Dautre part, la théorie de l'évolutionnisme (en biologie
occidentale) a été [mal] appliquée en
sciences sociales pour créer un type de développement qui ne se conforme pas à
la logique africaine. Lévolutionnisme en développement fait croire que les
peuples des pays africains sont des enfants qui ont besoin de grandir pour
atteindre le niveau de maturité de lOccident. La réalité montre quen
développement et en civilisation, il nexiste pas un modèle qui convient à tous
les pays. Selon le professeur Joseph Ki-Zerbo cest une escroquerie que de dire
que les pays africains se développeront comme les occidentaux. Dans mon article
intitulé « Le Développement provoque le sous-développement », jai
insisté sur le fait que le développement à la manière occidentale nest ni
possible ni désirable pour lAfrique pour des raisons culturelles et
historiques brièvement décrites dans cet article (voir : www.kongoshalom.wordpress.com).
La question qui se
pose est celle de savoir si les pays africains sinscrivent dans
lapproche de la dépendance et du ‘world system décrit par Samin, par rapport aux théoriciens de la
modernisation dont les postulats centraux sont: l'évolutionnisme, le
diffusionnisme et le dualisme. Rappelons que pour ces théoriciens tous les pays
doivent suivre le modèle occidental pour atteindre le développement. Par
exemple, Rostow est le tenant de ce groupe dont IMF et
sont la colonne vertébrale du modèle occidental (Jai eu les idées sur Amin de
notre jeune frère Ngoyi Pierre.
La genèse de la théorie de la modernisation ou de
lévolutionnisme est la théorie à la
base même de la colonisation dune grande partie du monde par lEurope
occidentale. Pour lEurope occidentale tous les peuples du monde nont pas de
civilisation, ils nont pas de démocratie ; ils nont pas de
développement. Les Européens se sont donnaient la mission de civiliser et développer les autres cultures en prenant
les valeurs occidentales comme le seul modèle, ou létalon des mesures. Ce
modèle de pensée est connu sous le nom dEurocentrisme: les valeurs de lEurope
occidentale sont placées au centre de toutes les activités de la vie
individuelles et nationale de tous les habitants de lunivers.
Lécrivain Kenyan Nguni Wa Thiongo décrit mieux la
mentalité occidentale qui consiste à placer ses valeurs au centre de toutes les
activités et en imposant les autres pays de suivre leur modèle. Selon, Ngugi Wa
Thiongo, Dans son livre, Moving the Centre, The Struggle for Cultural Freedoms (1993), leurocentrisme
nenrichit pas le monde, mais il lappauvrit en langues, en économie, en tout.
Leurocentrisme impose le développement occidental comme le model universel.
Ainsi faisant luniversalité du développement occidental détruit son propre
modèle. Ce nest quen préservant les autres modèles de développement dans le
monde que le modèle occidental sera épargné et enrichi.
Par ailleurs, ajoutons quun développement qui sacharne
à éliminer les problèmes ou qui est basé sur la satisfaction des besoins de la
population est voué à léchec. La meilleure approche en développement consiste
à commencer les activités de développement par utiliser les ressources humaines
locales, les ressources matérielles locales, les langues et les culturelles
locales déjà existantes. Pour dire cela dune autre manière, le développement
qui réussit est celui qui utilise le capital humain local, le capital social
local, le capital culturel du milieu local, le capital environnemental et les
institutions du milieu local. Cest ce modèle de développement endogène que le
Président de
appelle de tous ses vœux pour notre beau pays. Il a raison.
Conclusion et Recommandations
De ce qui précède,
nous devons dire que personne au monde, malgré la bonne volonté, ne peut voir
mieux nos problèmes et nos besoins que nous-mêmes. A tout prendre, les discours
en développement ne reflètent pas la transparence de ceux qui ont fabriqué le
terme et son mouvement. Il est grand temps que les pays africains redéfinissent
leurs types de développement et que les pays occidentaux cessent de se mêler
des affaires des Africains. Ce nest quen écartant le paternaliste, lesprit
de tout dominer, tout contrôler de la part de loccident que le premier jalon
vers le développement sera posé. Ce nest quen engageant un dialogue entre
dégal à égal entre lAfrique et lOccident que le vrai développement de
lAfrique va commencer.
Toutefois, nous devons reconnaître que lOccident a de
très grandes qualités, mais il a aussi des vilains défauts. LAfrique doit
sinspirer de grandes qualités de lOccident tel que le sens dorganiser les
choses, lordre, lesprit danalyse ou limportance accordée au détail,
lefficience, la valeur accordée au
travail, un travail bien fait et vite fait grâce a leur technologie, lesprit
critique, la compétition mesurée. La maitrise et la gestion de linformation
sont aussi des valeurs positives de lOccident. Ces valeurs sont nécessaires
pour le développement de lAfrique, mais nous les avons en quantité très
minime. Les défauts à éviter sont lindividualisme, légoïsme, la poursuite du
matérialisme comme le seul but de la vie, la violence, lexploitation des
autres et le complexe de supériorité. Au Congo, le Président Kabila a déjà donné
le ton en nous incitant à faire le développement endogène et intégral. Il
appartient aux ‘intellectuels congolais de matérialiser la pensée du Président
de
refus dadopter le développement endogène signifie la perpétuation de la
dépendance étrangère, la stagnation et finalement la victimisation des
générations à venir qui ne serviront que descaliers que les autres utiliseront
pour nous monter sur les têtes, développer leurs pays au détriment de nos pays.
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