07.08.09 BBC: Pr. Philippe Reyntjens : « Les Fdlr, aujourd’hui et depuis des années déjà ne constituent pas une menace militaire pour le Rwanda »

« Même si les
relations se sont améliorées, on ne peut pas dire qu’elles sont
extrêmement chaleureuses. Il reste encore un grand contentieux entre
les deux pays ».


Est-ce que, selon vous, tant qu’il y aura les
Fdlr en Rdc, les relations entre les deux pays ne peuvent pas être plus
cordiales ou bien  il y a autre chose ?

Je ne pense pas que ça
soit la raison principale. Les Fdlr, aujourd’hui et depuis des années
déjà ne constituent pas une menace militaire pour le Rwanda. La Monuc
estime qu’il y a en encore 6 à 7 mille qui n’ont pas du tout la
capacité d’attaquer le Rwanda.

Je pense par contre que les Fdlr
sont surtout un facteur d’insécurité à l’intérieur du Congo. La
présence des Fdlr est une menace  pour les populations congolaises.
Pour les civils et pour l’Etat congolais beaucoup plus que pour le
Rwanda.

Le Rwanda a un autre enjeu essentiellement  depuis une dizaine d’années.

Le
Rwanda et son armée, selon le rapport de l’Onu, ont pillé les
ressources naturelles de la Rdc. Ce qui est important pour le Rwanda 
qui ne dispose pas de ressources naturelles.

C’est une situation qui perdure encore actuellement ou elle s’est amoindrie ?

Je
ne sais pas si l’armée rwandaise est encore présente au Congo. Les
raisons économiques qualifiées de maffieuses qui ne sont même pas
commandées. Il y a également des réseaux ougandais et congolais qui
sont à l’œuvre dans le secteur de l’exploitation des ressources
naturelles.

La faiblesse de l’Etat congolais facilite, en fait, les ambitions rwandaises ?

Tout-à-fait,
cela facilite les ambitions à de monde. Il y a ce qu’on appelle « les
entrepreneurs de l’insécurité » qui s’en rendent compte qu’il est plus
intéressant d’opérer dans un contexte de non état et de conflit.

Vous pensez que les autorités rwandaises peuvent bien faire partir ces gens qui n’ont pas envie d’un Congo fort ?

Pas
tout-à-fait. J’étais, il y a moins d’un mois à Uvira dans le Sud-Kivu
où j’ai eu accès à des informations fiables démontrant que le Rwanda
continue en sous main d’appuyer un petit mouvement rebelle qui opère
dans cette région.

Le FLF qui est un mouvement essentiellement
des Tutsi congolais qui occupe une partie du territoire en y imposant
des taxes non pas en faveur du trésor congolais. Par exemple, le
monitoring de communications téléphoniques entre ce mouvement et Kigali
montre bien que cet appui continue jusqu’aujourd’hui.

Qu’est-ce qu’il faudrait pour que les relations entre les deux pays redeviennent normales ?

Il
faudrait dans la suite du rétablissement de l’autorité de l’Etat sur
toute l’étendue du territoire et le Rwanda aurait à long terme et pas
dans l’immédiat, aurait tout intérêt à avoir un voisin qui est stable
et exerce ses fonctions de souveraineté qu’un Etat doit remplir.

Il
faut que les partenaires tant du Congo que du Rwanda assistent ces deux
pays à promouvoir cette construction étatique de la RDC.

Dans ce
cas là, rien n’empêche par exemple en situation de bon voisinage,
qu’une exploitation économique par les opérateurs  rwandais au Congo
puisse être possible dans un contexte plus au moins légitime.

A court terme, quel est l’intérêt du Rwanda à renouer les relations avec le Congo ?

Le
Rwanda a renoué ces relations à cause des pressions internationales. Je
me rappelle du rapport qui a été publié en décembre 2008 par un panel
de l’ONU qui mettait en cause le Rwanda, l’accusant de continuer à
dérailler sur le processus de reconstruction étatique au Congo.
Quelques bailleurs de fonds du Rwanda particulièrement les Néerlandais 
et les Suédois ont réagi de façon immédiate et ont suspendu une partie
de l’aide budgétaire. Kigali le sait comme moi que le Royaume-Uni
envisageait, un moment donné d’en faire de même. Kagame veut montrer à
ses partenaires internationaux qu’il a changé de fusil d’épaule, qu’il
combattait ; c’est ce qu’il a fait d’ailleurs, le Cndp de Laurent
Nkunda.

Ce
dernier est toujours en détention au Rwanda sans que l’on sache où il
se trouve. Cela devrait montrer à la communauté internationale que le
Rwanda avait cessé de s’ingérer dans les affaires internes du Congo.
J’estime que c’est à cause des pressions internationales que le Rwanda
a pu changer de cap.

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