Le PAM distributeur de vivres compromet le développement agricole au Kivu

Beni, Butembo, Bunia, Bukavu … partout où sont
installés le personnel et casques bleus des Nations unies, on observe un
phénomène récurrent et humiliant : de petits commissionnaires 

congolais vendent des vivres destinés au
personnel des Nations unies à des Congolais.
Pain, eau pure
minéralisée, fromage, biscuits protéinés, beure et margarine, fruits, œufs,
poulets surgelés … tout est vendu et le bénéfice reversé au personnel de la Monuc. Une activité
commerciale très rentable. Et comme toujours en informel. Paradoxal, ces
mêmes produits vivriers, on peut les trouver chez les nationaux. Naturels mais
à un prix exorbitant.

Dans le Kivu montagneux, les terres sont
hautement agricoles (et donc fertiles). On peut y planter et récolter
saisonnièrement bananes, oignons, légumes, riz, faitue, arachides, pommes de
terre, betteraves, tomates, haricot, maïs … Sur l’axe Beni – Kanyabayonga par
exemple, le voyageur peut admirer et goûter au frais et au naturel des fruits
comme des ananas, le maracuja (fruit de la passion), des raisins, des fraises
curieusement dans les restaurants et hôtels de ces contrées, on sert
honteusement de la limonade et de coca. Souvent importés de l’Ouganda.

Dans les mêmes contrées du Kivu gâtées par la
généreuse nature, des fermes longent les routes au point que Masisi a été
surnommé la « Suisse du Zaïre ». On y élève moutons, caprins, lapins
et cobayes, canards, poules, vaches. Et ces vaches donnent du lait (maziwa)
plus nourrissant et des fromages avec leurs dérivés (saucisson de Paris, Pili,
boudins, …) Paradoxalement, certains commerçants véreux importent du lait
impropre à la consommation depuis la Chine. Le personnel de la Monuc déverse quantité de
vivres qu’il ne peut consommer cassant pour ainsi le marché local. Mentalité de
mendiants inculquée à des populations jadis dynamiques et qui, non seulement
s’auto suffisaient mais aussi nourrissaient le reste du pays par leurs mains.
Et la guerre, avec tous ses prétextes visibles et invisibles, connus et
inconnus, réels et imaginaires, continue son chemin. Elle profite à tous.

Et pourtant !

Pourtant on crie partout que la réponse à la
crise financière internationale reste l’agriculture. Pour l’Afrique. Pour la RD Congo qui connait une
guerre qui se pérennise. Interrogeant l’Ambassadeur de France en RDCongo lors
de son passage à Beni sur l’option du Programme 
Alimentaire Mondial  (PAM) à ne considérer que le volet distribution des
vivres
à des paysans essentiellement agricoles au lieu d’adjoindre aussi le
volet distribution de semences, ce dernier a souhaité que «  de
plus en plus ; l’achat de l’aide alimentaire soit fait dans les provinces
bénéficiaires notamment dans le Kivu pour les populations déplacées et
réfugiées du Kivu
 ». Et de renchérir « que le concours que
nous apportons soit le concours d’appui aux producteurs, soit pour organiser
tel marché rural, soit une coopérative semencière. Soit pour apporter
l’équipement agricole. Le concours doit servir de relance de l’agriculture
nationale, plus précisément provinciale
 ».

Dans le même registre, l’Ambassadeur de l’Italie
en RDC annonçait à la seconde près le dumping agricole : « Mon
gouvernement vient d’allouer une aider alimentaire de deux millions d’euros,
soit 700 tonnes de viande agricole en boîte. Viande cuite prête pour la
consommation pour inciter la production agricole et appuyer la coopération
agricole
 ». In Les Coulisses n°204 du 20 mars 2009 pp. 8-17 Voilà la
situation dans laquelle vivent personnellement de nombreux déplacés dans le
Kivu où il y a plus d’une centaine d’ONG locale, nationale et internationale
qui vivent de la guerre et qui ont pris les populations  en otage. Avec la
complicité de leaders ethniques.

Ces petites références montrent que la politique
de Dumping agricole pratiquée par les Etats occidentaux est à la base de la sous
alimentation
en Afrique, singulièrement au Congo. La conséquence de ladite
politique est que sur n’importe quel marché africain, comme l’écrit Jean
Ziegler (La Haine
de l’Occident), le consommateur peut acheter des chinchards (mpiodi) en lieu et
place des tilapia, des poulets, des croupions de dindon, fruits et légumes
français, italiens, portugais pour la moitié ou le tiers de prix des produits
autochtones correspondants. Le dumping occidental détruit l’agriculture
vivrière dans le Kivu, au Congo et en Afrique.

Eradiquer la pauvreté et la faim par
l’agriculture. Le retour en force de l’agriculture, seul remède efficace contre
la crise financière internationale. Slogan ou réalité ? C’est dans l’agriculture
désormais
qu’il faut investir. La houe, la pelle, le travail à la force de
bras du lever au coucher du soleil, dans la précarité ne saurait répondre à la
crise financière internationale.

Il semble que tous, nous devrions apprendre à conduire
des tracteurs
, à manier la machine agricole, à conduire la charrue. Car,
comme l’écrit Béchir Ben Yahmed (Jeune Afrique n°2514 p.4), l’argent pour les
20 prochaines années se trouve dans les fermes. Et les fermes au Kivu, on n’en
manque pas. Dans l’entre-temps, les populations de la RDCongo ont trouvé un
palliatif au Programme Alimentaire Mondiale (PAM) qui s’appelle en homophonie
Programme Alimentaire Minimum (PAM) où l’on peut manger à tour de rôle dans une
même famille.

 

 

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