07.09.09 Le Potentiel: Cinq questions à Mabaya Gizi, par St. Augustin Kinienzi

 

1.Ancien mandataire de l’Onatra, entreprise en proie à la
crise qui a emporté son Adg pourtant recruté par le Copirep. Quelle
lecture faites-vous de la situation ?

Je pense que le recrutement par le Copirep de ce mandataire qui
vient de quitter le bateau Onatra est grosse erreur. Grosse erreur
parce qu’après l’indépendance, le gouvernement a consenti d’énormes
sacrifices pour la formation des cadres congolais ; des cadres qui sont
de bons éléments que je connais personnellement. Comment peut-on
accepter de faire un retour (en arrière) en recrutant un gestionnaire
expatrié alors qu’il y a des compétences au pays? J’ai eu à dénoncé
cela parce que, à mon avis, la personne recrutée n’avait pas le profil
pour diriger l’entreprise. Nous espérons que le gouvernement prendra
des mesures nécessaires pour que de telles erreurs ne se répètent plus.
On doit se rendre compte que dans les entreprises publiques – j’ai été
non seulement Adg de l’Onatra mais également président de l’Association
nationale des entreprises du portefeuille (Anep) – des éléments qui
peuvent réellement diriger ce pays au niveau des entreprises existent.
Il suffit que ces éléments soient encadrés, rôle que doit jouer l’Etat
: régulation et encadrement. Et vous verrez que ces éléments donneront
des résultats à la hauteur des attentes. Donc, recourir à des personnes
dont le profil est douteux, leur faire confiance pour la gestion de la
chose publique, nous conduit à ce que nous déplorons aujourd’hui.

2. En septembre s’ouvre la session budgétaire au
Parlement. Entre-temps, la population ne voit rien qui change dans son
vécu quotidien. Comment vous parlementaires comptez-vous réorienter les
choses pour que, cette fois-ci, le peuple trouve son compte ?

C’est une question difficile mais qui a des solutions. Ces solutions
ne peuvent pas se produire par un coup de baguette magique. La
meilleure solution à la question que vous posez, c’est d’abord au
niveau de l’Etat, du gouvernement de relancer la production. En
relançant la production, on procurera du travail à la population. Et
cela aura pour effet d’améliorer nos recettes au niveau de l’Etat. En
ce moment-là, on peut satisfaire les besoins de toute la population.
Sans cela, je ne vois pas comment on s’en sortirait. C’est la solution
d’un gestionnaire (j’ai quand même cette qualité). Toute autre solution
qu’on trouverait au niveau du budget ne serait qu’une demi-mesure,
qu’on ne trompe pas le peuple. Nous devons, si nous voulons obtenir des
solutions durables au niveau du gouvernement, relancer la production
dans notre pays. Et quand je parle de production ce n’est pas
uniquement les mines, mais c’est surtout l’agriculture. Notre monde est
essentiellement rural, il faut qu’on donne du travail aux gens. Quand
on aura produit, on exportera et la population va automatiquement
respirer. C’est le seul remède miracle. Il n’y en a pas deux.

3. Que dites-vous de la construction du pont Kinshasa-Brazzaville sur le fleuve Congo ayant alimenté la polémique au pays ?

Là je vais vous parler en tant que responsable qui a suivi cette
question de très près. Déjà, vers les années 70, j’avais, en tant que
directeur des voies et travaux à l’Onatra, participé avec mon collègue
Samuel Bikoko qui était en ce moment-là directeur de département des
ports, comme expert aux travaux de la commission qui examinait cette
question à l’époque. Comment nous avions résolu le problème à l’époque
parce qu’on ne peut dire au niveau régional et sous-régional où nous
trouvons qu’un tel ouvrage n’est pas nécessaire, qu’il ne faut pas
construire un pont entre Kinshasa et Brazzaville. On nous prendrait
pour des gens qui ne réfléchissent pas. Donc, l’ouvrage entre Kinshasa
et Brazza, il faut absolument le construire. Sur le plan d’intégration
régionale et sous-régionale, cet ouvrage est très important. Mais
attention, et c’est ce que nous avons déclaré dans toutes les
commissions, il faut que les deux pays (RDC-Congo), puissent avoir les
mêmes conditions de travail au plan commercial. On ne peut pas créer un
ouvrage qui, sur le plan concurrentiel, nous placerait d’une position
défavorable.

4. Que demandiez-vous concrètement par rapport à ce projet d’importance régionale ?

Concrètement, nous avions absolument accepté à l’époque la
construction d’un pont entre Kinshasa et Brazzaville, mais nous avions
dit que ce projet doit s’accompagner d’un autre projet important. C’est
le financement du projet Ilebo-Kinshasa-Matadi-Banana-le port en eau
profonde. En ce moment-là, et le Congo-Kinshasa et le Congo-Brazza se
tretrouveraient dans les mêmes conditions de concurrence. Parce que
Brazzaville a le port de Pointe-Noire à Brazza reliés par le chemin de
fer et de notre côté, nous aurons aussi le port de
Banana-Kinshasa-Ilebo reliés par un chemin de fer. Donc, les mêmes
conditions de concurrence rétablies entre les deux pays et là il ne se
poserait aucun problème. Et apparemment, les bailleurs de fonds ont
compris notre souci, notamment la BAD qui a rendu récemment visite au
Sénat, nous avons rappelé à cette occasion l’importance de financer ce
projet. En réponse à notre requête, la BAD accepte de financer l’étude
de faisabilité du projet Ilebo-Kinshasa. Nous sommes appelés à nous
développer, à nous ouvrir au monde ; on ne peut pas refuser un ouvrage
qui nous ouvre au monde mais nous posons des conditions commerciales
optimales pour que notre pays ne parte pas défavorisé dès le départ. Et
d’ailleurs, lorsqu’on parcourt la Charte des ACP avec l’UE , il est dit
qu’on ne peut pas prendre une disposition qui créerait des conditions
qui feraient qu’un pays soit défavorisé par rapport à un autre, surtout
par rapport aux conditions initiales. Cela est admis sur le plan
international.

5.Comment avez-vous apprécié la visite de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton en RDC ?

A mon avis, tous les Congolais ont apprécié positivement la visite
de Mme Hillary Clinton dans la mesure où cette visite nous ouvre
quelque peu sur le monde. A un certain moment, nous avons vu que nous
perdions notre place sur la scène diplomatique. Nous pensons que cette
visite nous a apporté une bouffée d’oxygène qui nous aide à repartir.
J’espère que les autorités du pays vont saisir cette opportunité pour
qu’une fois nous repartions sur le plan international et que nous
recouvrions la place qui était la nôtre sur l’échiquier international.
Nous avons également apprécié ce que Mme Clinton a déclaré dans son
discours, notamment au Grand Hôtel Kinshasa. La chose importante que
j’ai retenu, c’est encore une fois cet appel à la bonne gouvernance.
Elle a dit que faire du business dans notre pays ce n’est pas facile.
Il faut donc améliorer le climat des affaires pour que des
investisseurs viennent facilement.

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