Fondé en 2003 par un passionné dart et de chanson, Serge Landry Kololo, dit Ibrasson, qui a quitté le groupe, Nkota se définit comme un pont entre passé et présent, entre musiques dhier et daujourdhui, dici et dailleurs, entre peuples et continents. « Quand nous nous sommes rencontrés, nous avions tous un même objectif : faire la fusion entre la musique traditionnelle congolaise et la musique dailleurs et viser un public universel, pas seulement africain », assure Tonnerre, le batteur. Doù les rythmes soukouss, reggae, slow et même ndombolo, ainsi que les sonorités du tam-tam, de la guitare basse et autres instruments, intégrés dans le répertoire du groupe à côté des rythmes traditionnels.
Avant de se mettre ensemble, ces jeunes musiciens, qui ont à peine la trentaine, évoluaient dans des troupes de ballets traditionnels. Cest là et au cours de fêtes familiales et sociales, encore très vivantes même en milieu urbain, quils ont découvert et appris le registre musical de leur culture. Un patrimoine quils se sont promis de ne pas laisser tomber, « pour ne pas oublier doù lon vient, ce qui ne nous empêche pas dêtre ouvert à la modernité », martèle un des musiciens.
Riche de rythmes, de sons et dinstruments, ce patrimoine renvoie aussi à des valeurs, malheureusement perdues, selon eux, quil faut faire revivre grâce à la musique. Cest donc un retour aux racines, aux sources, à la « belle époque », vantée par les parents, « celle davant la colonisation, où régnaient la solidarité et la fraternité », que vise aussi Nkota, que lon pourrait traduire aussi par « retrouver le chemin ».
Les thèmes des mélodies, chantées en langues du pays, principalement en lari, et en français, mettent laccent sur la fierté dêtre Africain, le refus de la facilité et de la paresse et les valeurs humanistes. « Nous parlons de lamour et de la vie en général, du quotidien, du sida, de la valeur du travail et de leffort », expliquent Feeling et Mabos, respectivement soliste et batteur de Nkota. « Doukou Déo » (où va la jeunesse ?), un des titres phares de lorchestre, dénonce largent facile, les viols, la prostitution. « Je nirai pas là-bas » loue le bienfait de vivre en Afrique, « parce que cest ici que se trouvent notre source et notre richesse », ce qui ninterdit pas daller visiter dautres contrées. Au contraire, car il faut souvrir au monde. « Sakuabo » évoque la relation dun père avec son fils, tandis que « Mama » est un hommage à la mère. Un titre qui a eu un grand succès, lors du dernier Festival panafricain de musique (Fespam), qui sest tenu début août 2009 à Brazzaville. Pourtant, pas facile de faire admettre à un public encore très accro du ndombolo, que dautres courants musicaux existent. Mais, avec sa voie envoûtante, Fanie, accompagnée des musiciens, a su séduire la foule, qui a repris en chœur le refrain.
Si une partie des Congolais boude encore « lautre musique » que représente Nkota, le groupe a toutefois ses fans, qui viennent lécouter et lapplaudir au Centre culturel français de Brazzaville où il sest produit, par deux fois, en 2009, et lors de soirées et de galas, publics ou privés, dont ceux organisés par lUnion européenne. Outre le Fespam, Nkota a également participé au Festival de la bande dessinée à Kinshasa en République démocratique du Congo, au Festival du rire Tuseo à Brazzaville et à bien dautres événements.
Après avoir sorti, en 2009, un premier album « Tobe », Nkota sattelle maintenant à la réalisation du second, qui pourrait paraître en 2010. Tout le groupe compose. Cest à lespace culturel Marico (Marionnettes du Congo), à Bacongo, devenu son fief, quil répète et que sélaborent ses futures mélodies. Un travail sans relâche, avec toujours la même obsession : ne pas aller trop loin dans linnovation. « Quand on séloigne trop de notre but, on sarrête, pour revenir là doù lon vient ».
Un dosage subtil que sefforcent de trouver les musiciens du groupe, dont lambition est de faire émerger, en Afrique centrale, une musique tradi-moderne propre à cette région dAfrique, berceau de la musique moderne africaine qui a fait le tour du monde, mais qui commence à sessouffler. Leurs regrets : le soutien très timide de leurs aînés, qui ne prennent pas linitiative de « faire jouer en premier des jeunes artistes, lors dun concert dont ils sont la tête daffiche », et le manque dappui du Ministère de la Culture et des Arts.
Cest hors du Congo que Nkota trouve ses modèles, qui sont notamment le Kinois Loka Kwanza, le Malien Salif Keïta et les Sénégalais Youssou NDour et Ismaël Lô. « Ils ont su inventer un style de musique moderne, à partir de leurs traditions. Nous pouvons aussi le faire en Afrique centrale ».
Le pari nest pas impossible, avec la génération que représentent les groupes Nkota et Langi, dont les approches sont similaires. En tout cas, au dernier Fespam, Nkota na pas fait démentir les propos dun vieux sage africain : « Dans les sociétés traditionnelles en Afrique, tout commence dabord par la parole. Quand la parole ne suffit pas pour exprimer tout ce quon a envie de dire, on chante, puis le corps se met en mouvement ; de ce mouvement naîssent les vibrations et les sensations qui permettent de transcender les problèmes de la vie » . |Muriel Devey (AEM)
Gros plan sur le groupe NKota |
Reportage photo : Muriel Devey (AEM)
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