09.10.09 Le Potentiel : CINQ QUESTIONS à Siméon Senga, par Louis-Paul Eyenga Sana

 

 

1. La question de la révision constitutionnelle domine les
débats dans les milieux politiques congolais. Quel est votre avis à ce
sujet ?

Je constate que l’annonce de la mise en place d’une commission ou
d’un groupe de réflexion par le président du Sénat a été confirmée par
le ministre de la Communication et des Médias. La commission a été
instituée par les autorités habilitées conformément à l’article 218 de
la Constitution. Donc, elle est légale. Il ressort d’une émission de la
Radio Okapi du lundi 28 septembre 2009 sur la révision
constitutionnelle que les points de vue des Congolais sont
diamétralement opposés. Les uns s’opposent catégoriquement à toute
révision de la Constitution et exigent son application. Les autres, par
contre, estiment que la révision est nécessaire et elle s’impose
surtout en ce qui concerne l’article 2 qui prévoit la création d’autres
provinces en vue de porter leur nombre de 11 à 25 provinces.

2. Quelle position faut-il prendre pour cette disposition?

Il s’agit ici de porter les provinces actuelles à 25 dans le délai
de 36 mois qui suivent l’installation effective des institutions
politiques. Ce délai est fixé par l’article 226 de la Constitution et
arrive à l’expiration dans quelques mois. Les autorités investies du
pouvoir constitutionnel dérivé, sont donc dans l’obligation de prendre
position avant l’expiration de ce délai sans chercher à savoir pourquoi
la non application de l’article 226 car, nous savons que le retard est
certainement justifié par les difficultés économico- financières que
notre pays traverse et qui nous permettent de dire qu’il s’agit bien
d’un cas de force majeure pour laquelle la révision s’impose
nécessairement. Dans le cas contraire, on violerait la Constitution
après l’expiration du délai constitutionnel précité.

3. Si tel est le cas, que préconisez-vous ?

Pour cela, nous osons proposer que la mise en place de nouvelles
provinces, soit reportée à la quatrième année de la deuxième
législature de la troisième République lorsque la crise du système
financier international sera maîtrisée et lorsque des investisseurs
reviendront. Nous pensons qu’à cette période, la relance de notre
économie sera effective et les recettes de l’Etat seront suffisantes
pour financer les infrastructures nécessaires concernant les provinces
à créer. Dans ce cadre du report de la mise en place de nouvelles
provinces, prenons connaissance de l’avis du Programme des Nations
unies pour le développement ( PNUD) exprimé dans sa note d’orientation
lors du forum national sur la décentralisation tenu à Kinshasa, du 3 au
5 octobre 2007. Il serait plus prudent de programmer la mise en place
de nouvelles provinces à partir de 2011, car la mise en place de
nouvelles provinces dans deux ou trois ans, soit deux ans avant le
renouvellement des mandats des députés provinciaux est contre
productrice et coûteuse. Il serait plus réaliste de démarrer les
nouvelles provinces au moment de la deuxième législature ; entre-temps,
le gouvernement central et les gouvernements fédéraux concernés,
prendront des dispositions spéciales pour créer les conditions
matérielles pour accueillir les nouvelles provinces. Je rappelle que
cet avis a été émis avant la crise du système financier international.
C’est pourquoi, nous proposons un délai plus long.

4. Que pensez-vous d’autres matières de la Constitution en dehors de celles prévues à l’article 220 ?

Ces
matières font appel aux débats sur l’opportunité et la nécessité de
leur révision. Prenons un exemple : un député qui accepte librement
d’être membre du gouvernement, peut-il conserver son mandat et le
récupérer après son départ du gouvernement ? Au terme de l’article 108
de la Constitution, les incompatibilités concernent neuf cas. Pourquoi,
la révision constitutionnelle serait effectuée seulement pour un député
qui avait choisi d’être membre du gouvernement ? Et celui qui avait
accepté d’être membre d’une institution d’appui à la démocratie ou
celui qui avait accepté d’être mandataire public actif par exemple ;
va-t-il rester frapper par l’incompatibilité ? Va-t-on vers la
suppression totale ou partielle des incompatibilités nécessaires pour
une démocratie et adopter le système de cumul des mandats ? Dans
l’affirmative, nous nous acheminons sûrement vers un système où
quelques citoyens vont d’accaparer la gestion du pays qui va nous
conduire sans nul doute vers un régime semblable à l’oligarchie !

5. Que dire de l’article 220 de la Constitution ?

Cet article dispose en effet que ; « La forme républicaine de l’Etat
, le principe du suffrage universel, la forme représentative du
gouvernement , le nombre et la durée des mandats du président de la
République, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme
politique et syndical ne peuvent faire l’objet d’aucune révision
constitutionnelle. Est formellement interdite toute révision
constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits
et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces
et des entités territoriales décentralisées ». Cet article a été inséré
dans la Constitution afin d’éviter de révisions intempestives que nous
avions connues sous la deuxième République. Il s’agit d’un verrouillage
en vue de protéger la démocratie naissante et de bâtir un Etat de
droit.

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