02.11.09 Le Potentiel / Cinq questions à Philippe Muanda

 

1. Vous êtes rapporteur de l’Assemblée provinciale du
Bas-Congo et président de la Commission d’enquête instituée pour
contrôler la gestion de l’Exécutif provincial du Bas-Congo. Un rapport
quant à ce circule sur Internet et a même été publié. Est-ce vrai ?

Malheureusement, je ne sais de quelle presse il s’agit pour que je
sache de quel rapport dont il est question. Mais ce que je sais est
qu’au niveau de ma Commission, nous avons établi un premier rapport
signé et déposé sur la table du Bureau de notre institution. Une fois
arrivé au Bureau, ce rapport a été examiné de fond en comble. Et les
membres du bureau ont estimé à l’unanimité qu’il y avait des
faiblesses, entre autres la violation du droit de la défense. Plusieurs
ministres incriminés n’avaient pas été entendus. Voilà pourquoi le
Bureau avait adressé une lettre au président de la Commission que je
suis pour que l’on finalise le travail en écoutant les ministres
n’ayant pas bénéficié du principe contradictoire. Nous avons donc
poursuivi le travail pendant dix jours à l’issue desquels nous avions
établi un rapport définitif et complet. Et ce rapport a été signé par
tous les membres de la commission présents, soit 8 sur 10, l’un s’étant
excusé parce que malade et l’autre empêché parce que en voyage à
Kinshasa. Voilà donc ce que je peux dire au sujet de cette question.

2. Dans quel contexte avez-vous pu travailler pour mener
cette enquête parlementaire ? Avez-vous obtenu tout ce dont vous aviez
besoin ?

Oui. Effectivement. J’ose croire que c’est le premier rapport qui
circule. Donc, après que nous ayons recommencé le travail avec
l’injonction du Bureau qui nous avait demandé d’entendre tout le monde,
nous sommes arrivés à de nouveaux éléments qui nous ont permis de faire
le rapport final et complet adopté par tous et transmis au gouvernement
provincial et à notre bureau. Je dois dire que tous les ministres
étaient disponibles, du gouverneur au plus petit agent du gouvernorat.
Il n’y avait pas d’obstruction et nous avions fait notre rapport de
manière objective. Tous les membres de ma commission ont reçu des
réponses précises aux questions posées aux dirigeants concernés. Et
lorsque nous avons constitué notre commission, la Cour des comptes
était venue aussi à Matadi pour contrôler l’Exécutif provincial. Et
pour éviter un quelconque télescopage, nous avons laissé les membres de
la Cour des comptes faire d’abord leur travail et nous nous étions mis
à l’œuvre aussitôt après leur retour à Kinshasa. Donc, on a pu perdre
quelques jours à cause de cela. Les recommandations proposées par la
Commission et adoptées par la plénière ont été transmises à qui de
droit.

3. Puisque le rapport final est là, que doit-on en retenir ? Y a-t-il eu megestion ou pas ?

Je crois qu’ici je ne peux rien dire. Le rapport a été examiné à
huis clos en plénière. Et celle-ci n’a pas autorisé qu’il soit rendu
public, même pas en partie. En ce moment, je ne peux pas dire ce qu’il
y a eu, mais les recommandations ont été transmises à l’Exécutif
provincial qui est libre de les rendre publiques s’il n’est pas lié au
secret de délibération. L’Exécutif provincial peut aussi vous donner le
contenu de ce rapport. Donc, pour le moment, je ne sais rien vous dire.

4. On constate ces derniers temps une vague de critiques
sur la gestion de la chose publique à tous les niveaux (gouvernement
central, provinces, entreprises publiques…). Doit-on considérer que la
RDC n’a aucun dirigeant avec des mains propres ?

Cette question me paraît impertinente. Je vais y répondre comme
acteur politique. Je pense que nous devons savoir d’où nous venons, où
nous sommes et où nous allons. Imaginez un seul instant quelqu’un qui
exerçait son métier quelque part et qui parvient à être élu ou nommé
pour assurer des charges publiques avec toutes les règles
financières…Je pense qu’il n’appartient pas aux Congolais de se
lamenter à tout moment pour dire qu’il n’y a que de voleurs au Congo.
Parce que si tous nos dirigeants sont des voleurs, alors on devra
importer des dirigeants d’ailleurs pour nous gouverner. Non ! Ceux sur
qui on tire chaque fois ont été soit élus au suffrage universel direct,
soit au second degré. D’autres encore sont arrivés grâce aux élus (le
cas du Premier ministre et de ses ministres, des ministres
provinciaux). Si on doit chaque fois critiquer ceux qui nous
gouvernent, cela veut dire donc que nous sommes de mauvais électeurs.
Nous ne sommes pas en théocratie ; nous sommes plutôt en démocratie. Et
ceux qui nous gouvernent ne sont pas toujours des saints. On peut
découvrir quelques petites erreurs par-ci par-là, mais ce n’est pas une
raison pour alarmer l’opinion nationale et internationale. A cette
allure, nos partenaires extérieurs pourraient ne plus nous aider si
tous nos gestionnaires sont accusés de megestion. C’est une réflexion
que je me fais et que je partage avec les autres. Ce n’est pas le fait
d’être Premier ministre, ministre, gouverneur, député ou sénateur que
l’on devient automatiquement voleur.

5. Comment un rapport officiel peut-il se retrouver sur
la place publique ? En plus, le Bas-Congo a toujours été cité en
exemple pour la bonne gouvernance. Aujourd’hui, le doute s’installe
dans l’opinion à cause de ce fameux rapport. Doit-on désormais mettre
le Bas-Congo dans le panier de la mauvaise gestion ?

C’est la conséquence de ce que je viens de déplorer tantôt. J’ai
communiqué ce rapport au Bureau. J’étais convoqué pour répondre aux
préoccupations de mes collègues du Bureau. Et comme chaque commission
évolue sous le principe de la majorité, je ne pouvais pas me
désolidariser d’avec les autres collègues. Ce rapport-là me liait même
s’il a été voté par 7 voix pour et une abstention. Et comme le Bureau a
estimé qu’il était incomplet, le président du bureau de l’époque,
l’honorable François Kimasi, m’avait écrit pour que l’on recommence le
travail. On l’a fait. Et je ne sais pas à ce niveau comment ce premier
rapport annulé, parce qu’incomplet, pouvait circuler sur Internet. Ca,
c’est la classe politique congolaise. Je ne peux pas donner un jugement
là-dessus.

S’agissant du second volet de votre question, si je vous dis
que le Bas-Congo fait exception dans la bonne gouvernance, là je vous
donne déjà le contenu du rapport. C’est difficile que vous puissiez
m’avoir sur ce point-là. Je reste constant avec moi-même. Le rapport
est secret. Toutefois, l’opinion devra retenir que le rapport qui a
circulé sur Internet et publié et qui fait état de je ne sais quoi, ce
rapport-là a été anéanti. Il est nul et de nul effet parce
qu’incomplet.

PROPOS RECUEILLIS PAR M.L. ET C.N.

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