05.02.10 Le Potentiel: CINQ QUESTIONS à José Endundo Bononge, par Albert tshiambi

 

1. La Conférence de Copenhague aura été un accord imparfait ou
mieux incomplet auquel la République démocratique du Congo vient quand
même d’adhérer. N’est-ce pas là une attitude anachronique ?

Il est certain qu’en ce qui concerne les résultats escomptés en
matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il aurait
été préférable d’obtenir un Accord international contraignant plutôt que
de s’en remettre à la seule bonne volonté des pays. A cet égard, on
peut parler d’échec et malheureusement s’attendre dans l’avenir à de
probables dérapages climatiques. C’est sans doute reculer pour mieux
sauter. Dans quelques mois, voire quelques années, la communauté des
experts scientifiques devra à nouveau tirer la sonnette d’alarme. La
faiblesse des engagements qui viennent d’être pris à Copenhague aura
entre-temps généré des insuffisances et des retards dans la mise en
oeuvre des mesures d’atténuation des émissions, ce qui se traduira
immanquablement par des conséquences environnementales, sociales et
économiques encore plus pénalisantes pour tous. Le challenge qui sera
alors présenté n’en sera que plus difficile et coûteux à relever pour
l’ensemble des parties. Comme de nombreux autres pays, la RDC a dénoncé
ce risque depuis plusieurs mois dans chacune de ses prises de position
dans les instances internationales, même si, du fait de sa situation
géographique et de la richesse de ses ressources forestières, elle n’est
pas directement menacée. Au contraire, la RDC fait partie de la
solution à la problématique du changement climatique et la place qu’elle
est amenée à prendre ne peut que grandir avec la taille des enjeux à
relever. Le coût relativement faible, ramené à la tonne de dioxyde de
carbone non émise, des mesures d’atténuation à mettre en oeuvre dans le
secteur forestier tropical, comparativement à d’autres secteurs de
l’économie mondiale, renforce la position clé de la RDC dans le
Programme mondial de lutte contre le changement climatique.

2. Que répondriez-vous à ceux qui soutiennent que l’on n’a pas
entendu la voix de la RDC à Copenhague. Est-ce un choix stratégique ou
tout simplement une contre performance de la délégation congolaise?

Cette appréciation ne reflète pas la réalité des faits. Je peux au
contraire vous assurer que nombre de personnalités et de représentants
de pays étrangers qui ont suivi le déroulement de la COP 15 et les
interventions de la délégation congolaise que j’avais l’honneur de
conduire sont d’un avis très différent du vôtre. Il est temps que nos
concitoyens abandonnent ces visions négatives de nous-mêmes,
autoflagellantes, trop répandues et qui ne nous mènent à rien. Pourquoi
ne pas évoquer le pilotage politique des négociations climat que les
pays membres du Groupe Afrique ont confié à la RDC lors de la Conférence
de Copenhague ? Pourquoi ignorer que pendant deux ans, la RDC va
présider la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) et aura, à
ce titre, à montrer la place exceptionnelle des forêts du Congo,
accouplée au cycle de l’eau d’un bassin lui aussi exceptionnel par sa
diversité et son potentiel hydroélectrique ?

3. Qu’y a-t-il pour la RDC en perspective et en suite après
Copenhague?

Cet Accord de Copenhague a déjà apporté des retombées financières
intéressantes pour la RDC. Les pays développés se sont engagés
collectivement à fournir des ressources nouvelles additionnelles à
hauteur de 30 milliards de dollars américains sur la période 2010-2012
(15 milliards venant du Japon, 12 de l’Union européenne et 3 des USA),
dont une part importante à destination des pays forestiers tropicaux
dont fait partie la RDC. Cette aide devrait être portée à 100 milliards
par an à partir de 2020. J’insiste sur le fait que ces montants sont
additionnels à tous les autres financements qui ont cours et qui eux
aussi se développent.

4. Selon une certaine opinion, des membres de votre délégation
partis à Copenhague ont disparu dans la nature et sont restés en
Europe. Qu’en est-il réellement?

Ce pays vit de la rumeur. Sur les 32 personnes qui devaient
m’accompagner et qui figuraient sur la liste des demandes de visas
envoyés à l’Union européenne, 4 n’ont pu obtenir leur visa; il
s’agissait de personnalités d’autres institutions que les pays
occidentaux n’ont pas considéré comme des structures ayant à prendre
part à la négociation. Tous les autres sont venus, ont participé aux
travaux de la COP15 et sont de retour au pays. D’autres Congolais ont
également fait le déplacement de Copenhague, mais ils ne faisaient pas
partie de la délégation que je conduisais et appartenaient
essentiellement à des ONG. Je vous rappelle enfin que les organisateurs
de la Conférence ont enregistré la participation de plus de 15.000
délégués répartis en 192 délégations, ce qui vous montre l’importance de
l’événement auquel la RDC a répondu présent.

5. L’on apprend que les chefs des partis politiques ne seront
plus membres du prochain gouvernement, car ils se posent en obstacle à
l’action du Premier ministre. Qu’en dîtes-vous?

Une seule personne dans le pays nomme les ministres, en tenant compte
des réalités politiques à l’Assemblée nationale et de ce que chacun
peut apporter à la reconstruction. Ce n’est donc pas à moi à répondre à
cette question.

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